Numéro 11 - Novembre 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2023

TESTAMENT

1re Civ., 22 novembre 2023, n° 21-17.524, (B), FRH

Rejet

Testament olographe – Validité – Conditions – Date – Preuve – Eléments pris en considération – Eléments intrinsèques corroborés par des éléments extrinsèques – Cas – Date pré-imprimée

En dépit de son absence de date, un testament olographe n'encourt pas la nullité dès lors que des éléments intrinsèques à l'acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période, le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible.

Une date pré-imprimée sur le support utilisé par le testateur pour rédiger son testament olographe peut constituer un élément intrinsèque à celui-ci.

Reprise d'instance

1. Il est donné acte à Mme [E] [N] et à M. [F] [D] (les consorts [M]) de leur reprise d'instance en qualité d'ayants droit de [W] [D].

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mars 2021), [P] [D] est décédée le 7 octobre 2015, en laissant pour lui succéder ses deux frères, [W] et [S].

3. [S] [D] s'est prévalu d'un testament olographe le désignant comme légataire universel, rédigé au verso d'un relevé de compte bancaire arrêté au 31 mars 2014 et signé par [P] [D], mais non daté.

4. [W] [D] a assigné son frère en nullité de ce testament.

5. [S] [D] étant décédé en cours d'instance, sa veuve, Mme [Y], est intervenue volontairement à la procédure.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

6. Les consorts [M] font grief à l'arrêt de rejeter la demande en nullité du testament, alors :

« 1°/ que lorsque le testament ne comporte, de la main même du testateur, aucun élément indicatif de la date de sa rédaction, la date imprimée sur le papier portant testament n'est pas un élément intrinsèque contenant le principe et la racine de la date du testament permettant de recourir à des éléments extrinsèques pour reconstituer celle-ci ; qu'en déclarant valable le testament litigieux, dépourvu de date manuscrite, au vu de la date imprimée d'un relevé bancaire donnant la valorisation d'une épargne à la date du 31 mars 2014, la cour d'appel a violé l'article 970 du code civil ;

2°/ en tout état de cause que l'élément intrinsèque contenu dans le testament, en cas d'absence de date, doit être complété par des éléments extrinsèques ; qu'à défaut d'avoir relevé des éléments extrinsèques venant compléter l'élément intrinsèque constitué du verso de l'original d'un relevé bancaire donnant la valorisation d'une épargne au 31 mars 2014, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 970 du code civil. »

Réponse de la Cour

7. En dépit de son absence de date, un testament olographe n'encourt pas la nullité dès lors que des éléments intrinsèques à l'acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période, le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible.

8. Une date pré-imprimée sur le support utilisé par le testateur pour rédiger son testament olographe peut constituer un élément intrinsèque à celui-ci.

9. Ayant relevé, d'une part, que [P] [D] avait établi son testament au verso de l'original d'un relevé de banque donnant la valorisation d'une épargne au 31 mars 2014 et y avait indiqué l'adresse de son domicile, laquelle correspondait à celle figurant sur le relevé, et, d'autre part, que l'intéressée avait été hospitalisée à compter du 27 mai 2014 jusqu'à son décès, la cour d'appel a estimé, en présence de deux éléments intrinsèques, corroborés par un élément extrinsèque, que le testament avait été écrit entre ces deux dates.

10. Ayant également retenu qu'il n'était pas démontré que [P] [D] était atteinte d'une incapacité de tester à cette période, pendant laquelle elle n'avait pas pris d'autres dispositions testamentaires, la cour d'appel, qui en a déduit qu'il n'y avait pas lieu de prononcer la nullité du testament en raison de son absence de date, a, ainsi, légalement justifié sa décision.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Champalaune - Rapporteur : Mme Dard - Avocat général : M. Sassoust - Avocat(s) : SCP Gury et Maitre ; SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés -

Textes visés :

Article 970 du code civil.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 9 juillet 2014, pourvoi n° 13-18.685, Bull. 2014, I, n° 135 (rejet), et l'arrêt cité.

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