Numéro 11 - Novembre 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2023

PREUVE (règles générales)

Com., 29 novembre 2023, n° 22-14.119, (B), FRH

Cassation

Eléments de preuve – Pièces – Pièces détenues par un tiers – Compétence exclusive du conseiller de la mise en état (non)

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 janvier 2022), M. [D] a été désigné le 20 juillet 2016 en qualité de président du directoire de la société par actions simplifiée Genoyer International, moyennant une rémunération comportant une partie fixe et une part variable, une indemnité de rupture conventionnelle étant prévue en cas de révocation ou non-renouvellement.

2. Le 12 décembre 2017, le conseil de surveillance a prononcé sa révocation et lui a versé son solde de tout compte ainsi qu'une indemnité de révocation.

3. Soutenant que sa révocation était abusive, M. [D] a assigné la société Genoyer International ainsi que la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank (la société CACIB), la société Naxicap Partners et M. [R], membres du conseil de surveillance de la société Genoyer International, afin d'obtenir réparation de divers préjudices et revendiquer le bénéfice des dispositions de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, concernant la protection des lanceurs d'alerte.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

4. M. [D] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande tendant à « donner injonction aux parties intimées, sous telle astreinte qu'il plaira à la cour [d'appel] de fixer, de communiquer le pacte d'actionnaires du 7 octobre 2015 » et, en conséquence, de le débouter de ses demandes indemnitaires à l'encontre des sociétés CACIB, Naxicap Partners et Genoyer International, alors « que dans les procédures comportant une mise en état, une demande de production de pièces formée conformément aux dispositions des articles 138 et suivants du code de procédure civile peut être présentée devant la juridiction de jugement par une partie qui n'en a pas saisi le conseiller de la mise en état ; qu'en l'espèce, M. [D] exposait, dans ses conclusions en appel, qu'il était essentiel « qu'il puisse produire le pacte d'actionnaires [...] qui lui a été subtilisé dans les jours précédant sa révocation et dont l'article 21 fixe les modalités d'intéressement de l'équipe dirigeante de la société Genoyer », et ce, afin d'étayer, notamment, ses prétentions relatives, d'une part, à la gestion de fait imputable aux sociétés CACIB et Naxicap Partners, d'autre part, à l'intéressement qui lui avait été promis au moment de sa venue dans le groupe Genoyer ; que, pour rejeter sa demande tendant à donner injonction aux parties intimées de communiquer sous astreinte le pacte d'actionnaires du 7 octobre 2015, la cour d'appel a jugé que « la demande de production forcée, sous astreinte, du pacte d'actionnaires relève de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état et n'est plus recevable au stade du débat au fond » ; qu'en statuant ainsi, tandis que M. [D] était recevable à former pour la première fois devant la formation de jugement une demande tendant à la production du pacte d'actionnaires du 7 octobre 2015, la cour d'appel a violé les articles 11, 139, 788 et 907 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 11, 138, 139, 142, 771 et 907 du code de procédure civile :

5. Il résulte de la combinaison de ces textes que, dans les procédures comportant une mise en état, une demande de production de pièces formée conformément aux dispositions des articles 138 et suivants du code de procédure civile peut être présentée devant la juridiction de jugement par une partie qui n'en a pas saisi le conseiller de la mise en état.

6. Pour rejeter la demande de production forcée du pacte d'actionnaires, l'arrêt retient que cette demande relève de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état et n'est plus recevable au state du débat au fond.

7. En statuant ainsi la cour d'appel a violé les articles 11, 138,139 et 142 du code de procédure civile par refus d'application, et l'article 771 du même code par fausse application.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : M. Ponsot - Avocat(s) : SCP Gury et Maitre ; SCP Bénabent ; SCP Guérin-Gougeon ; SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet -

Textes visés :

Articles 11, 138, 139, 142, 771 et 907 du code de procédure civile.

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