Numéro 11 - Novembre 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2023

SECURITE SOCIALE

2e Civ., 30 novembre 2023, n° 22-14.260, (B), FRH

Rejet

/ JDF

Il résulte de l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale que les structures qu'il mentionne peuvent prétendre au bénéfice de l'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale sur la rémunération des aides à domicile qui concourent à l'exécution de leurs missions auprès des personnes mentionnées au I du même texte.

C'est donc à bon droit qu'une cour d'appel décide qu'une société peut prétendre au bénéfice de cette exonération pour la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l'exécution des tâches consistant en la dispensation d'apprentissages aux enfants atteints d'un trouble du spectre autistique, effectuées par les éducateurs spécialisés et les intervenants psycho-éducateurs qu'elle emploie au domicile à usage privatif des personnes mentionnées au I de l'article L. 241-10.

Cotisations – Exonération – Bénéfice – Domaine d'application – Apprentissage aux enfants atteints d'un trouble du spectre autistique – Educateurs spécialisés et intervenants psycho-éducateurs – Détermination – Portée

Cotisations – Exonération – Exonération de la part patronale des cotisations – Application – Cas – Dispensation d'apprentissages aux enfants atteints d'un trouble du spectre autistique, par les éducateurs spécialisés et les intervenants psycho-éducateurs

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 janvier 2022), la société [3] (la société) a adressé, le 18 juillet 2017, à l'URSSAF d'Ile-de-France (l'URSSAF) une demande de rescrit social relative aux modalités de calcul de l'exonération des cotisations patronales prévue par l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale.

2. L'URSSAF lui ayant répondu, le 13 septembre 2018, que les conditions d'exonération n'étaient pas remplies, l'association a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. L'URSSAF fait grief à l'arrêt de faire droit au recours de la société, alors « que les dispositions de l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale sont d'interprétation stricte ; qu'il résulte de l'article L. 241-10, III, b) du code de la sécurité sociale, qui renvoie expressément au 2ème alinéa de l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles, que les prestations d'aide à domicile éligibles à l'exonération des cotisations patronales de sécurité sociale sont, soit les prestations d'aide ménagère, soit les actions d'un technicien ou d'une technicienne de l'intervention sociale et familiale de sorte que l'activité des éducateurs spécialisés et intervenants psychoéducateurs, non assimilable à celle des techniciens de l'intervention sociale et familiale ou d'une aide ménagère, ne peut bénéficier de l'exonération ; qu'en décidant du contraire au prétexte erroné que les a et b de l'article L. 241-10 ne sont pas des conditions cumulatives, la cour d'appel a violé l'article L. 241-10, III du code de la sécurité sociale dans sa version issue de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 applicable au litige, ensemble l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016, applicable au litige, l'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale qu'il prévoit s'applique à la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l'exécution des tâches effectuées au domicile à usage privatif :

a) Des personnes mentionnées au I ;

b) Des bénéficiaires soit de prestations d'aide ménagère aux personnes âgées ou handicapées au titre de l'aide sociale légale ou dans le cadre d'une convention conclue entre les structures susmentionnées et un organisme de sécurité sociale, soit des prestations mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles ou des mêmes prestations d'aide et d'accompagnement aux familles dans le cadre d'une convention conclue entre ces structures et un organisme de sécurité sociale, dans la limite, pour les tâches effectuées au bénéfice des personnes visées au a du I du présent article, du plafond prévu par ce même a.

6. Selon l'article L. 241-10, I, de ce code, la rémunération d'une aide à domicile est exonérée des cotisations patronales de sécurité sociale, à l'exception de celles dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, lorsque celle-ci est employée effectivement à leur service personnel, à leur domicile ou chez des membres de leur famille, par, notamment, des personnes ayant à charge un enfant ouvrant droit au complément de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé mentionné à l'article L. 541-1 ou à la prestation de compensation dans les conditions définies au 1° du III de l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles.

7. Il résulte de ce texte que les structures qu'il mentionne peuvent prétendre au bénéfice de l'exonération de cotisations sur la rémunération des aides à domicile qui concourent à l'exécution de leurs missions auprès des personnes mentionnées au I.

8. L'arrêt retient que les conditions posées par les alinéas a et b de l'article L. 241-10, III, précité ne sont pas cumulatives. Il relève que la société fournit des prestations à destination exclusive des personnes présentant un trouble du spectre autistique consistant en la dispensation d'apprentissages individualisés et adaptés spécifiquement à l'enfant, fonctionnels dans son « environnement naturel » et généralisés en présence des parents. Il en déduit que les interventions de la société auprès d'enfants ouvrant droit au complément de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ou à la prestation de compensation, mentionnés à l'article L. 241-10, I, du code de la sécurité sociale, permet à la société de prétendre à l'exonération litigieuse.

9. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que la société pouvait prétendre au bénéfice de l'exonération des cotisations patronales de sécurité sociale pour la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l'exécution des tâches effectuées par les éducateurs spécialisés et les intervenants psycho-éducateurs qu'elle emploie au domicile à usage privatif des personnes mentionnées au I de l'article L. 241-10.

10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : M. Labaune - Avocat général : M. Grignon Dumoulin - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés -

Textes visés :

Articles L. 241-10 et L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale.

2e Civ., 30 novembre 2023, n° 22-16.850, (B), FRH

Cassation partielle

Assurances sociales – Tiers responsable – Recours de la victime – Indemnité complémentaire – Evaluation – Capital constitutif de la pension d'invalidité – Calcul – Barème de la sécurité sociale – Application – Evaluation forfaitaire – Office du juge – Détermination

Il résulte de l'article R. 376-1 du code de la sécurité sociale que les dépenses à rembourser aux caisses de sécurité sociale en application de l'article L. 376-1 du même code peuvent faire l'objet d'une évaluation forfaitaire dans les conditions prévues par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.

Si les modalités fixées par l'arrêté du 27 décembre 2011 relatif à l'application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale ne s'imposent pas au juge, qui reste libre de se référer au barème qu'il estime le plus adéquat, il doit, lorsqu'il décide d'appliquer cet arrêté, en respecter les dispositions.

Viole ces textes la cour d'appel qui, ayant décidé de faire application de cet arrêté, ne met pas en oeuvre l'indemnisation forfaitaire qu'il prévoit.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 18 janvier 2022), le 25 septembre 2013, M. [E] a été grièvement blessé à l'oeil droit par le mécanisme d'ouverture de la porte du garage qu'il louait à la société Néolia (la société), assurée auprès de la société Aréas dommages (l'assureur).

2. M. [E] a assigné en indemnisation de ses préjudices la société et son assureur, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Saône (la caisse).

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal, pris en ses deuxième et troisième branches

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen du pourvoi principal pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [E] fait grief à l'arrêt de condamner in solidum la société et l'assureur à lui payer la seule somme de 81 310 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2019, alors que « pour le calcul de la perte des gains professionnels futurs subi par la victime d'un accident, les revenus professionnels à prendre en compte sont ceux antérieurs à cet accident ; qu'une période d'inactivité professionnelle de deux ans et demi liée à un licenciement pour motif économique intervenu avant cet accident n'est pas de nature à rompre tout lien de causalité entre la faute du responsable à l'origine de cet accident et la perte, par la victime, des revenus antérieurs à cette période et, en conséquence, à exclure tout préjudice de perte de gains professionnels futurs ; qu'en retenant que M. [E], qui avait été victime d'un accident le 25 septembre 2013, imputable à la société Néolia, n'apparaissait pas avoir occupé d'emploi depuis son licenciement économique intervenu le 6 juillet 2011 jusqu'à la survenance de cet accident, soit pendant deux ans et demi, de sorte qu'il devait être considéré comme dépourvu de revenus antérieurs à l'accident et que tout préjudice de perte de gains professionnels futurs était dès lors exclu, la cour d'appel a violé le principe de réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit pour la victime. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel, après avoir rappelé que M. [E] se prévalait de l'impossibilité, en raison de sa cécité monoculaire, de retrouver un emploi de dessinateur industriel tel qu'occupé dans le passé, énonce que l'indemnisation d'une perte de gains professionnels futurs nécessite la preuve, qui incombe à celui qui s'en prévaut, d'une diminution entre les revenus antérieurs à l'accident et ceux postérieurs à la consolidation.

6. Elle retient ensuite que si, depuis la consolidation, M. [E] tire des revenus d'une activité de mécanicien automobile, l'intéressé, qui a travaillé comme dessinateur industriel entre le 23 avril 2008 et le 6 juillet 2011, date de son licenciement pour motif économique, n'apparaît pas avoir ensuite occupé d'emploi, ni perçu de revenus, même de l'assurance chômage, jusqu'à la survenance de l'accident le 25 septembre 2013, de sorte que la perception de revenus au moment de l'accident n'est pas établie.

7. Elle ajoute qu'une période de deux ans et demi sans revenus, même de remplacement, ne permet pas de retenir que ses anciens revenus professionnels ont été perdus à cause de l'accident ni, en conséquence, de les prendre comme terme de comparaison avec les revenus futurs.

8. Elle en déduit que la victime doit ainsi être considérée comme dépourvue de revenus antérieurs à l'accident, ce qui exclut tout préjudice de perte de gains professionnels futurs.

9. En l'état de ces énonciations et constatations, la cour d'appel, qui a fait ressortir que tant les revenus de référence à la date de l'accident, invoqués par la victime, que le préjudice dont celle-ci se prévalait, étaient hypothétiques, a légalement justifié sa décision.

10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le premier moyen du pourvoi incident de la caisse

Enoncé du moyen

11. La caisse fait grief à l'arrêt, infirmant le jugement, de cantonner la condamnation in solidum de la société et de l'assureur à son profit à la somme de 28.381,64 euros, alors que : « appelé à évaluer forfaitairement des dépenses futures, le juge est libre de choisir la méthode de calcul qu'il estime la plus adéquate ; que toutefois, lorsqu'il décide d'appliquer l'arrêté du 27 décembre 2011, il se doit d'en respecter les dispositions ; qu'aux termes de l'article 1er dudit arrêté, dans sa rédaction antérieure à l'arrêté du 27 décembre 2021, l'annuité s'établit, s'agissant des prothèses oculaires, à hauteur de 150 % (100 % au titre du a) + 50 % au titre du b)) de la base suivante : la valeur de la fourniture, de la réparation et du renouvellement ; qu'en retenant, au visa de l'arrêté du 27 décembre 2011 qu'elle entendait appliquer, que, pour tenir compte de la fréquence de renouvellement, l'annuité se calcule sur la base suivantes : le quart de la valeur de la fourniture et la moitié de la valeur de la réparation (repolissage), la cour d'appel a violé l'article 1er de l'arrêté du 27 décembre 2011 relatif à l'application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 376-1 et R. 376-1 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 376-1 et R. 376-1 du code de la sécurité sociale et l'arrêté du 27 décembre 2011 :

12. Selon le deuxième de ces textes, les dépenses à rembourser aux caisses de sécurité sociale en application du premier de ces textes peuvent faire l'objet d'une évaluation forfaitaire dans les conditions prévues par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.

13. Si les modalités fixées par cet arrêté ne s'imposent pas au juge, qui reste libre de se référer au barème qu'il estime le plus adéquat, il doit, lorsqu'il décide d'appliquer cet arrêté, en respecter les dispositions.

14. Après avoir rappelé la formule de calcul de l'annuité de dépenses fixée à l'article premier de l'arrêté du 27 décembre 2011 relatif à l'application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale, l'arrêt énonce qu'en visant 100 % de la valeur de la fourniture, de la réparation et du renouvellement, le texte ne vise pas 100 % du montant unitaire de chaque prestation, sans égard au rythme de leur répétition, mais 100 % des frais à exposer chaque année en tenant compte de ce rythme.

15. Il ajoute que le calcul des dépenses de santé actuelles et futures, tel qu'effectué par la caisse, est erroné en ce qu'il repose sur une annuité incluant le prix entier d'une prothèse oculaire et du repolissage de cette prothèse, alors qu'il ne devait inclure que le quart du prix de la prothèse et la moitié du prix de son repolissage, conformément aux conclusions de l'expert qui préconise le remplacement de la prothèse tous les quatre ans et son repolissage tous les deux ans.

16. Il en déduit que l'indemnité s'élève non pas à 41 764,26 euros, mais à

11 722,24 euros.

17. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas mis en oeuvre l'indemnisation forfaitaire prévue à l'arrêté dont elle avait décidé de faire application, a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

18. La caisse fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande fondée sur les articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale, alors « que tout jugement à peine de nullité doit être motivé ; qu'en la déboutant de sa demande fondée sur les articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sans assortir sa décision sur ce point du moindre motif, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

19. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

20. L'arrêt déboute la caisse de sa demande fondée sur les articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale.

21. En statuant ainsi, sans donner aucun motif à sa décision rejetant la demande d'indemnité forfaitaire de gestion, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné in solidum la société Néolia et la société Aréas dommages à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Saône la somme de 28 381,64 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2019, et en ce qu'il a débouté la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Saône de sa demande fondée sur les articles L. 376-1 et L 454-1 du code de la sécurité sociale, l'arrêt rendu le 18 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Dijon.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : Mme Cassignard - Avocat général : Mme Nicolétis - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Duhamel ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Articles L. 376-1, R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale.

2e Civ., 16 novembre 2023, n° 21-25.534, (B), FRH

Cassation

Caisse – Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) – Contrôle – Procédure – Délégation – Convention – Date d'effet – Détermination – Portée

Aux termes de l'alinéa 1er de l'article L. 122-7 du code la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016, applicable au litige, le directeur d'un organisme local ou régional peut déléguer à un organisme local ou régional la réalisation des missions ou activités liées à la gestion des organismes, au service des prestations, au recouvrement et à la gestion des activités de trésorerie, par une convention qui prend effet après approbation par le directeur de l'organisme national de chaque branche concernée.

Il résulte de ce texte que la convention de délégation prend effet dès son approbation par le directeur de l'organisme national de la branche concernée. En conséquence, l'organisme délégataire est habilité à exercer les pouvoirs résultant de cette délégation à compter de la décision d'approbation.

Caisse – Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) – Contrôle – Procédure – Délégation – Condition – Détermination – Portée

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (Nanterre, 21 septembre 2021), rendu en dernier ressort, l'URSSAF du Centre-Val de Loire (l'URSSAF) a adressé, par un courrier du 15 décembre 2017 à Mme [E] (la cotisante) un appel de cotisation d'un certain montant portant sur la cotisation subsidiaire maladie, due au titre de la protection universelle maladie pour l'année 2016.

2. La cotisante a formé un recours devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'URSSAF fait grief au jugement de constater l'irrégularité de l'appel de cotisation établi le 15 décembre 2017, de l'annuler et de la condamner à rembourser à la cotisante la somme de 3 644 euros avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision, alors « que le directeur d'un organisme local ou régional peut déléguer à un organisme local ou régional la réalisation des missions ou activités liées à la gestion des organismes, par une convention qui prend effet après approbation par le directeur de l'organisme national de chaque branche concernée ; qu'en l'espèce, diverses URSSAF, dont l'URSSAF Ile-de-France, avaient délégué à l'URSSAF Centre-Val de Loire leurs missions de recouvrement de la cotisation subsidiaire maladie par convention du 1er décembre 2017, laquelle avait été approuvée par le directeur général de l'ACOSS par décision du 11 décembre 2017 ; qu'en jugeant que l'URSSAF Centre-Val de Loire n'était pas habilitée à notifier à la cotisante le 15 décembre 2017 un appel de cotisations dès lors que la décision du directeur général de l'ACOSS n'avait été publiée au Bulletin officiel que le 15 janvier 2018, quand la publication de cette décision n'était pas requise pour que la convention de délégation du 1er décembre 2017 prenne effet, le tribunal a violé l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 122-7 du code la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016, applicable au litige :

4. Aux termes de l'alinéa 1er de ce texte, le directeur d'un organisme local ou régional peut déléguer à un organisme local ou régional la réalisation des missions ou activités liées à la gestion des organismes au service des prestations au recouvrement et à la gestion des activités de trésorerie, par une convention qui prend effet après approbation par le directeur de l'organisme national de chaque branche concernée.

5. Il résulte de ce texte que la convention de délégation prend effet dès son approbation par le directeur de l'organisme national de la branche concernée.

En conséquence, l'organisme délégataire est habilité à exercer les pouvoirs résultant de cette délégation à compter de la décision d'approbation.

6. Pour prononcer la nullité de l'appel de cotisation du 15 décembre 2017 et ordonner le remboursement à la cotisante de la somme dont elle s'est acquittée, le jugement énonce que la décision du directeur de l'ACOSS du 11 décembre 2017, qui a validé l'habilitation de l'URSSAF Centre-Val de Loire, n'a été publiée au Bulletin officiel santé, protection sociale, solidarité que le 15 janvier 2018 et qu'en l'absence de publication de la décision de délégation à la date du 15 décembre 2017, l'URSSAF délégataire ne pouvait procéder au calcul, à l'appel et au recouvrement de la cotisation subsidiaire maladie due par la cotisante au titre de l'année 2016.

7. En statuant ainsi, le tribunal a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 septembre 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Nanterre ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Paris.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : M. Rovinski - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Alinéa 1er de l'article L. 122-7 du code la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016.

2e Civ., 16 novembre 2023, n° 22-14.638, (B), FRH

Cassation

Cotisations – Assiette – Rémunérations – Définition – Exclusion – Cas – Indemnités de congés payés versées par une caisse de congés

Il résulte des articles L. 242-1, alinéas 1er et 7, L. 243-1-3, 2°, et D. 242-1, I, du code de la sécurité sociale que la rémunération soumise à cotisations de sécurité sociale au sens du troisième de ces textes, pour le calcul du montant du plafond de 5 % de la sécurité sociale qu'il prévoit, ne comprend pas les indemnités de congés payés versées par une caisse de congés dès lors que la rémunération qui sert de référence au calcul de la limite de l'exclusion d'assiette prévue en son I, b), est celle soumise à cotisations de sécurité sociale définies au premier de ces textes qui comprend seulement les rémunérations versées par l'employeur.

Cotisations – Recouvrement – Action en recouvrement – Procédure – Observations de l'inspecteur du recouvrement – Seul constat de l'absence de mise en conformité – Application de la majoration – Portée

Aux termes de l'article L. 243-7-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l'issue d'un contrôle réalisé en application de l'article L. 243-7 est majoré de 10 % en cas de constat d'absence de mise en conformité. Un tel constat est dressé lorsque l'employeur n'a pas pris en compte les observations notifiées lors d'un précédent contrôle, que ces observations aient donné lieu à redressement ou non. Il en résulte que la majoration de 10 % est due sur le seul constat que les observations notifiées lors d'un précédent contrôle n'ont pas été respectées par la personne contrôlée, alors même qu'il n'était pas mentionné dans la lettre d'observations établie à l'issue de ce contrôle la nécessité d'une mise en conformité et qu'une contestation sur le bien-fondé du redressement avait été formée.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 10 février 2022), la société [3] (la société), a fait l'objet d'un contrôle sur les années 2015 à 2017, ayant donné lieu à une lettre d'observations de l'URSSAF de Basse-Normandie, aux droits de laquelle vient l'URSSAF de Normandie (l'URSSAF) du 8 juin 2018, puis à une mise en demeure du 4 septembre 2018 et à une contrainte du 29 octobre 2018, au titre de majorations de redressement et de retard.

2. La société a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'URSSAF fait grief à l'arrêt d'annuler les chefs de redressement n° 6 (prévoyance complémentaire) et n° 7 (retraite supplémentaire), alors « que sont exclues de l'assiette des cotisations sociales les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite versées aux bénéfice de leurs salariés, pour une fraction n'excédant pas, notamment, 5 % de la rémunération soumise à cotisations de sécurité sociale en application de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de prévoyance n'excédant pas, notamment, 1,5 % de la rémunération soumise à cotisations de sécurité sociale ; que les indemnités de congés payés versées directement par une caisse de congés payés, comme la caisse de congés payés du bâtiment, à laquelle l'employeur cotise et qui se substitue à ce dernier vis-à-vis des salariés, ne sont pas à prendre en compte dans l'assiette de rémunération servant au calcul des limites d'exonération de cotisations sociales des contributions patronales au financement du régime de retraite complémentaire et du régime de prévoyance complémentaire ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, dans ses versions en vigueur du 1er janvier 2013 au 23 décembre 2015, du 23 décembre 2015 au 1er janvier 2016, du 1er janvier 2016 au 1er janvier 2017 et du 1er janvier 2017 au 1er janvier 2018 ainsi que l'article D. 242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 7 janvier 2012 au 30 septembre 2018. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 242-1, L. 243-1-3 et D. 242-1 du code de la sécurité sociale, dans leurs rédactions successives applicables au litige :

4. Aux termes de l'alinéa 1er du premier de ces textes, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail.

5. Aux termes de ce même texte, sont exclues de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés.

6. Aux termes du troisième de ces textes, les contributions des employeurs au financement d'opérations de retraite mentionnées au septième alinéa de l'article L. 242-1 sont exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale propre à chaque assuré, pour une fraction n'excédant pas la plus élevée des deux valeurs suivantes : a) 5 % du montant du plafond de la sécurité sociale ; b) 5 % de la rémunération soumise à cotisations de sécurité sociale en application de l'article L. 242-1, déduction faite de la part des contributions des employeurs destinées au financement de prestations complémentaires de retraite et de prévoyance soumise à cotisations de sécurité sociale, la rémunération ainsi calculée étant retenue jusqu'à concurrence de cinq fois le montant du plafond de la sécurité sociale.

7. Aux termes du deuxième de ces textes, au titre des périodes de congés des salariés des employeurs affiliés aux caisses de congés mentionnées à l'article L. 3141-32 du code du travail, les cotisations et contributions auprès des organismes de recouvrement sont acquittées dans les conditions suivantes : 2° Pour les cotisations de sécurité sociale et les contributions mentionnées à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, à l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale et au 1° de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles, les caisses de congés payés mentionnées à l'article L. 3141-32 du code du travail effectuent, avant la fin du mois au cours duquel les cotisations leur sont versées, un versement égal au produit du montant des cotisations encaissées par les caisses de congés payés, par un taux fixé par décret, en fonction des taux de cotisations et contributions en vigueur.

Le cas échéant, ce versement fait l'objet d'un ajustement dans des conditions fixées par décret, sur la base des montants d'indemnités de congés payés effectivement versés.

8. Il résulte de ces textes que la rémunération soumise à cotisations de sécurité sociale au sens de l'article D. 242-1, I, du code de la sécurité sociale, pour le calcul du montant du plafond de 5 % de la sécurité sociale qu'il prévoit, ne comprend pas les indemnités de congés payés versées par une caisse de congés mentionnée à l'article L. 3141-32 du code du travail, dès lors que la rémunération qui sert de référence au calcul de la limite de l'exclusion d'assiette prévue au I b) de l'article D. 242-1 est celle soumise à cotisations de sécurité sociale définie à l'article L. 242-1, laquelle comprend seulement les rémunérations versées par l'employeur.

9. Pour décider que l'indemnité de congés payés est à inclure pour le calcul du plafond de 5 %, l'arrêt énonce que l'article L. 242-1, qui définit l'assiette des cotisations, ne distingue pas selon que l'indemnité de congés payés est versée directement par l'employeur ou par une caisse de congés payés et qu'il vise également les sommes qui sont versées par l'entremise d'un tiers, lesquelles ne sont pas limitées aux pourboires et que la distinction proposée serait créatrice d'une inégalité entre les employeurs selon qu'ils sont tenus ou non d'adhérer à une caisse de congés payés.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

11. L'URSSAF fait grief à l'arrêt d'annuler la mise en demeure du 4 septembre 2018 et la contrainte du 29 octobre 2018, alors « qu'en application de l'article L. 243-6-7 (lire L. 243-7-6) du code de la sécurité sociale, le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mises en recouvrement à l'issue du contrôle est majoré de 10 % en cas d'absence de mise en conformité ; qu'il en est ainsi en cas de réitération d'une pratique ayant déjà fait l'objet d'une observation ou d'un redressement lors d'un précédent contrôle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que lors d'un contrôle précédent, portant sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, elle avait notifié à la société, par lettre d'observations du 22 avril 2014, des redressements concernant la prise en compte des indemnités de congés payés versées par la caisse de congés payés en matière de retraite complémentaire et le dépassement des seuils d'exonération en matière de prévoyance complémentaire et que ces mêmes chefs de redressement avaient été visés dans la lettre d'observations du 8 juin 2018 ; qu'en considérant néanmoins qu'elle n'était pas fondée à reprocher à la société une absence de mise en conformité sur ces deux chefs de redressement, donnant lieu à majoration de redressement, et en annulant, en conséquence, la mise en demeure émise à l'encontre de cette société le 4 septembre 2018 ainsi que la contrainte décernée à cette dernière le 29 octobre 2018, la cour d'appel a violé l'article L. 243-6-7 (lire L. 243-7-6) du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 19 décembre 2012 au 28 décembre 2019. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 243-7-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige :

12. Aux termes de ce texte, le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l'issue d'un contrôle réalisé en application de l'article L. 243-7 est majoré de 10 % en cas de constat d'absence de mise en conformité. Un tel constat est dressé lorsque l'employeur n'a pas pris en compte les observations notifiées lors d'un précédent contrôle, que ces observations aient donné lieu à redressement ou non.

13. Il en résulte que la majoration de 10 % est due sur le seul constat que les observations notifiées lors d'un précédent contrôle n'ont pas été respectées par la personne contrôlée, alors même qu'il n'était pas mentionné dans la lettre d'observations, établie à l'issue de ce contrôle, la nécessité d'une mise en conformité et qu'une contestation sur le bien-fondé du redressement avait été formée.

14. Pour annuler la mise en demeure émise le 4 septembre 2018 et la contrainte du 29 octobre 2018, l'arrêt énonce que la lettre d'observations du 8 juin 2018 vise les mêmes chefs de redressement que ceux visés dans la lettre d'observations du 22 avril 2014, qu'il n'avait été demandé aucune mise en conformité dans cette dernière lettre d'observations et qu'en outre, ces chefs de redressement ont été contestés devant la juridiction de sécurité sociale qui a accueilli le recours de la société.

15. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la société n'avait pas respecté les observations notifiées lors du précédent contrôle, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 février 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : M. Rovinski - Avocat général : Mme Tuffreau - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles L. 242-1, alinéas 1er et 7, L. 243-1-3, 2°, et D. 242-1, I, du code de la sécurité sociale ; articles L. 243-7 et L. 243-7-6 du code de la sécurité sociale.

2e Civ., 30 novembre 2023, n° 21-25.844, (B), FRH

Rejet

Cotisations – Exonération – Bénéfice – Exclusion – Cas – Prestations fournies par un éducateur spécialisé – Portée

Pour l'application de l'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale prévue par l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale, les prestations fournies par un éducateur spécialisé d'un service d'action éducative en milieu ouvert (AEMO) ou d'un service d'accueil externalisé (SAE) ne sont pas assimilables à l'action d'un technicien ou d'une technicienne de l'intervention sociale et familiale.

C'est donc à bon droit qu'une cour d'appel décide qu'une l'association ne peut prétendre au bénéfice de cette exonération pour la fraction des rémunérations, versée en contrepartie de l'exécution des tâches effectuées par les éducateurs spécialisés qu'elle emploie auprès de bénéficiaires qui ne sont pas visés par les dispositions de l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale.

Cotisations – Exonération – Exonération de la part patronale des cotisations – Exclusion – Cas

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 26 octobre 2021), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2014 à 2016, l'URSSAF d'Auvergne (l'URSSAF) a adressé à l'[3] (l'association) une lettre d'observations le 30 septembre 2017, puis une mise en demeure le 11 décembre 2017, opérant un redressement du chef de l'exonération de cotisations patronales, prévue par l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale, appliquée aux salaires versés aux éducateurs spécialisés.

2. L'association a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

4. L'association fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors « que l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit, sur les rémunérations des aides à domicile, une exonération des cotisations patronales pour la fraction versée en contrepartie des tâches effectuées au domicile des bénéficiaires des prestations mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles, qui sont celles relevant de l'action d'un technicien ou d'une technicienne de l'intervention sociale et familiale, lequel a pour mission d'effectuer une intervention sociale préventive et réparatrice à travers des activités d'aide à la vie quotidienne d'une part, et d'aide à l'éducation des enfants d'autre part ; qu'en retenant que l'association ne pouvait bénéficier du dispositif d'exonération pour les rémunérations de ses salariés exerçant, en qualité d'éducateurs spécialisés, des prestations d'aide à l'éducation des enfants auprès de familles en difficultés, lesquelles relevaient ainsi du champ d'action d'un technicien ou d'une technicienne de l'intervention sociale et familiale, la cour d'appel a violé l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, et l'article L. 222-3, alinéa 2, du code de l'action sociale et des familles. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses, l'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale s'applique à la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l'exécution des tâches effectuées, notamment, au domicile à usage privatif des bénéficiaires des prestations mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles.

6. Selon ce dernier texte, l'aide à domicile comporte l'action d'un technicien ou d'une technicienne de l'intervention sociale et familiale ou d'une aide ménagère.

7. Pour l'application de l'exonération prévue à l'article L. 241-10, III, précité, dont les dispositions sont d'interprétation stricte, les prestations fournies par un éducateur spécialisé d'un service d'action éducative en milieu ouvert (AEMO) ou d'un service d'accueil externalisé (SAE) ne sont pas assimilables à l'action d'un technicien ou d'une technicienne de l'intervention sociale et familiale.

8. L'arrêt retient que l'action d'un technicien de l'intervention sociale et familiale doit s'inscrire dans le cadre des missions professionnelles associées à ce métier et que l'éducateur spécialisé n'effectue concrètement aucune des tâches matérielles et domestiques dévolues à ce professionnel, quand bien même son objectif général est le soutien aux familles et leur accompagnement dans un processus d'autonomisation. Il relève que l'examen des fiches de poste des éducateurs spécialisés salariés de l'association révèle que la participation concrète aux activités domestiques de la vie familiale ne figure pas au nombre de leurs attributions.

9. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que l'association ne pouvait prétendre au bénéfice de l'exonération des cotisations patronales de sécurité sociale pour la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l'exécution des tâches effectuées par les éducateurs spécialisés qu'elle emploie auprès de bénéficiaires qui ne sont pas visés par les dispositions de l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale.

10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : M. Labaune - Avocat général : M. Grignon Dumoulin - Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale.

2e Civ., 16 novembre 2023, n° 22-12.051, (B), FRH

Cassation

Cotisations – Exonération – Emplois dans une zone franche urbaine – Conditions – Condition d'effectif – Domaine d'application – Exclusion – Cas – Titulaires de contrat de qualification ou de professionnalisation

Il résulte de la combinaison des articles 12, IV, et 13, II, de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, modifiée, dans leurs rédactions successivement applicables au litige, et des articles L. 6325-5 et L. 1111-3, 6°, du code du travail, ce dernier dans sa rédaction applicable depuis la loi n° 2008-67 du 21 janvier 2008, que les titulaires d'un contrat de qualification, devenu contrat de professionnalisation, n'entrent pas dans les effectifs pris en compte pour l'application aux entreprises implantées en zone franche urbaine de l'exonération de cotisations sociales patronales.

Cotisations – Exonération – Emplois dans une zone franche urbaine – Conditions – Détermination

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 14 décembre 2021), à la suite de deux contrôles portant sur les années 2006 et 2007, puis 2011 et 2012, l'URSSAF du Nord-Pas-de-Calais (l'URSSAF) a notifié à la société [3] (la société) implantée en zone franche urbaine, les 23 janvier 2009 et 3 février 2014, deux lettres d'observations suivies de deux mises en demeure résultant de la remise en cause de l'exonération des cotisations sociales au titre de cette implantation.

2. La société a saisi de recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le troisième moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

4. La société fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors :

« 1°/ que le contrat de travail à durée indéterminée convenu toutes clauses reprises par ailleurs et avec report d'ancienneté le lendemain de la date d'expiration du contrat à durée déterminée auquel il succède est la poursuite du même contrat de travail ; qu'en approuvant l'URSSAF d'avoir comptabilisé deux fois les salariées concernées, la cour d'appel a violé les articles 12 et 13 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 modifiée ;

2°/ qu'à supposer qu'il se soit agi de deux contrats successifs, le premier ayant pris fin, un seul devait être comptabilisé ; qu'en les cumulant, la cour d'appel a violé les articles 12 et 13 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, modifiée. »

Réponse de la Cour

5. Constitue une nouvelle embauche au sens de l'article 12-VI de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, modifiée, la conclusion d'un nouveau contrat de mission, peu important l'absence d'intervalle de temps entre les deux missions successives.

6. C'est à bon droit que la cour d'appel a jugé que les contrats de travail à durée déterminée des salariées concernées étant arrivés à leur terme avant la conclusion d'un nouveau contrat de travail en faveur de chacune d'elles, chacun des contrats constituait une embauche distincte, au sens des dispositions régissant l'exonération litigieuse et devait être prise en compte dans le quota d'embauches de résidents en zone franche urbaine.

7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

8. La société fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en retenant un contrat de qualification au titre des embauches hors zone franche urbaine au motif erroné et en tout cas inopérant qu'il s'agirait d'un contrat de travail contrairement au contrat d'apprentissage, la cour d'appel a violé les articles 12 et 13 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 modifiée, ensemble l'article L. 1111-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 12, IV, et 13, II, de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, dans leurs rédactions successivement applicables au litige et les articles L. 6325-5 et L. 1111-3, 6°, du code du travail, le dernier dans sa rédaction applicable depuis la loi n° 2008-67 du 21 janvier 2008 :

9. Selon le dernier de ces textes, ne sont pas pris en compte dans le calcul des effectifs de l'entreprise les titulaires d'un contrat de professionnalisation jusqu'au terme prévu par le contrat lorsque celui-ci est à durée déterminée ou jusqu'à la fin de l'action de professionnalisation lorsque le contrat est à durée indéterminée.

10. Il résulte de la combinaison des textes susvisés que les titulaires d'un contrat de qualification, devenu contrat de professionnalisation, n'entrent pas dans les effectifs pris en compte pour l'application aux entreprises implantées en zones franches urbaines de l'exonération de cotisations sociales patronales.

11. Pour valider le redressement au motif que le quota de résidents zone franche urbaine embauchés n'était pas atteint, l'arrêt relève qu'il résulte de l'article L. 981-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable, que le contrat de qualification est un contrat de travail à durée déterminée obéissant à un régime spécifique et qu'il n'y a aucune raison, à la différence du contrat d'apprentissage qui n'est pas un contrat de travail, que les salariés recrutés sous contrat de qualification professionnelle soient exclus de l'effectif de l'entreprise pour le calcul des exonérations.

12. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 décembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : M. Rovinski - Avocat général : Mme Tuffreau - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles 12, IV, et 13, II, de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, modifiée, dans leurs rédactions successivement applicables au litige ; articles L. 6325-5 et L. 1111-3, 6°, du code du travail, dans sa rédaction applicable depuis la loi n° 2008-67 du 21 janvier 2008.

2e Civ., 16 novembre 2023, n° 21-25.356, (B), FRH

Cassation partielle

Cotisations – Réduction – Réduction des cotisations sur les bas salaires – Bénéfice – Exclusion – Rémunération du personnel des établissements publics de coopération intercommunale

Selon l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, la réduction des cotisations patronales de sécurité sociale sur les bas salaires est appliquée aux gains et rémunérations versés aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L. 5422-13 du code du travail et aux salariés mentionnés au 3° de l'article L. 5424-1 du code du travail qui concerne les employeurs bénéficiant d'une option d'adhésion volontaire au régime d'assurance chômage qui s'opère de manière irrévocable.

Selon l'article L. 5424-2 du code du travail, les employeurs mentionnés au 2° de l'article L. 5424-1, qui assurent la charge et la gestion de l'assurance chômage, peuvent toutefois adhérer au régime d'assurance chômage.

Il en résulte que la réduction des cotisations patronales n'est pas applicable aux rémunérations du personnel des établissements publics de coopération intercommunale qui ont seulement la faculté d'adhérer volontairement, à titre révocable, au régime d'assurance chômage mais ne sont pas tenus de s'assurer contre le risque de privation d'emploi.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 12 octobre 2021), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2014 à 2016, l'URSSAF d'Auvergne (l'URSSAF) a notifié à la communauté d'agglomération du [Localité 3] (la communauté d'agglomération), prise en sa régie de l'abattoir communautaire, une lettre d'observations comportant notamment un chef de redressement relatif à l'application à tort de la réduction de cotisations de sécurité sociale sur les bas salaires, suivie d'une mise en demeure du 11 décembre 2017.

2. La communauté d'agglomération a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'URSSAF fait grief à l'arrêt d'annuler partiellement le redressement opéré à l'encontre de la communauté d'agglomération et de la condamner à lui rembourser les sommes versées à ce titre, alors :

« 1°/ qu'une régie d'un établissement public de coopération intercommunale ne disposant pas de la personnalité morale ne peut être considérée comme un employeur distinct de l'établissement public qui l'a créée ; qu'en jugeant, en l'espèce, que la régie de l'abattoir communautaire de la cotisante n'avait pas la personnalité morale mais devait néanmoins être regardée comme un employeur soumis à l'obligation d'assurance contre le risque de privation d'emploi, la cour d'appel a violé les articles L. 1412-1 et L. 2221-1 à L. 2221-20 du code général des collectivités territoriales ;

2°/ que la réduction des cotisations patronales au titre de la loi Fillon n'est applicable qu'aux employeurs qui ont l'obligation de s'assurer contre le risque de privation d'emploi ; qu'il en résulte qu'un établissement public administratif adhérant volontairement à l'assurance chômage de manière révocable au titre de son personnel non statutaire n'est pas éligible à la réduction Fillon ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la cotisante cotisait auprès de Pôle Emploi depuis le 1er juillet 1989 de manière volontaire à titre révocable ; qu'en jugeant pourtant que la régie de l'abattoir communautaire de la cotisante était éligible au dispositif de la réduction Fillon, la cour d'appel a violé l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 5422-13, L. 5424-1 et L. 5424-2 du code du travail, en leur rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 241-13 du code de la sécurité sociale, L. 5422-13, L. 5424-1 et L. 5424-2 du code du travail :

4. Selon le premier de ces textes, la réduction des cotisations patronales de sécurité sociale sur les bas salaires est appliquée aux gains et rémunérations versés aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par le deuxième et aux salariés mentionnés au 3° de l'article L. 5424-1 du code du travail qui concerne les employeurs bénéficiant d'une option d'adhésion volontaire au régime d'assurance chômage qui s'opère de manière irrévocable.

5. Selon le dernier de ces textes, les employeurs mentionnés au 2° de l'article L. 5424-1 du code du travail, qui assurent la charge et la gestion de l'allocation chômage, peuvent toutefois adhérer au régime d'assurance chômage.

6. Il en résulte que la réduction des cotisations patronales n'est pas applicable aux rémunérations du personnel des établissements publics de coopération intercommunale qui ont seulement la faculté d'adhérer volontairement, à titre révocable, au régime d'assurance chômage mais ne sont pas tenus de s'assurer contre le risque de privation d'emploi.

7. Pour dire que la régie de l'abattoir communautaire était éligible au bénéfice de la réduction des cotisations patronales de sécurité sociale sur les bas salaires, l'arrêt relève que les agents non statutaires des services publics industriels et commerciaux exploités par la régie, financièrement autonome, d'une collectivité locale n'étant pas visé par la liste exhaustive de l'article L. 5424-1 du code du travail, il y a lieu de considérer que pour le personnel non statutaire de cette régie, la communauté d'agglomération était tenue à une obligation d'adhésion au régime de l'assurance chômage. Il retient aussi que la régie doit être regardée, nonobstant son absence de personnalité morale, comme un employeur soumis à l'obligation d'assurance contre le risque de privation d'emploi.

8. En statuant ainsi, alors que la régie de l'abattoir communautaire, dépourvue de personnalité morale, ne pouvait être considérée comme un employeur distinct de la communauté d'agglomération qui l'avait créée et qu'en tant qu'établissement public de coopération intercommunale, aucune obligation d'adhésion à l'assurance chômage ne pesait sur lui, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule le redressement du chef de la réduction générale sur les bas salaires ainsi que les majorations et pénalités y afférentes, l'arrêt rendu le 12 octobre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : M. Leblanc - Avocat général : Mme Tuffreau - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SARL Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ; articles L. 5424-2 et L. 5422-13 ; alinéas 2° et 3° de l'article L. 5424-1 du code du travail.

2e Civ., 30 novembre 2023, n° 21-23.980, (B), FRH

Rejet

Cotisations – Réduction – Réductions prévues par la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 – Preuve – Charge – Obligation de l'employeur – Charge de la preuve – Justification – Cas

Il résulte de la combinaison des articles L. 241-13, VI, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008, et D. 241-13 du même code, alors en vigueur, dont les dispositions ne sont pas d'application limitée aux contrôles effectués en application de l'article L. 243-7 du code de la sécurité sociale, que l'employeur qui décide de pratiquer, sur les cotisations versées aux organismes sociaux, les réductions et déductions prévues aux articles L. 241-13, L. 241-17 et L. 241-18 du même code, doit en justifier par la tenue et la production du document prévu par l'article D. 241-13 du code de la sécurité sociale précité.

Caisse – Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) – Contrôle – Opérations de contrôle – Cotisations – Réduction – Justification – Obligation de l'employeur – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 7 septembre 2021), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 28 novembre 2019, pourvoi n° 18-20.386), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2007 et 2008, l'URSSAF du Languedoc-Roussillon (l'URSSAF) a notifié à la société [4] (la société cotisante) une mise en demeure le 25 novembre 2010 correspondant à un rappel de cotisations pour l'année 2009 et des majorations de retard.

2. La société cotisante a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société cotisante fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors :

« 1°/ qu'il résulte de l'article D. 241-13 du code de la sécurité sociale que « L'employeur tient à la disposition de l'inspecteur de recouvrement mentionné à l'article R. 243-59 un document justificatif du montant des réductions qu'il a appliquées » ; qu'en faisant application de ces dispositions à une mise en demeure qui n'avait été précédée d'aucune procédure de contrôle, la cour d'appel a violé par fausse application l'article D. 241 [lire D. 241-13] du code de la sécurité sociale ;

2°/ que, selon l'article 1315, devenu 1353, du code civil, auquel ne déroge pas l'article D. 241-7 du code de la sécurité sociale, l'organisme de recouvrement qui remet en cause le bénéfice d'un dispositif de réduction de cotisations sociales doit démontrer le bien-fondé de sa position ; qu'en rejetant le recours de l'entreprise visée par une mise en demeure qui n'avait été précédée d'aucun contrôle aux motifs que « pour remettre en cause l'annulation de l'exonération qu'elle avait initialement calculée, et affirmer qu'elle n'est redevable que de la somme de 3 086,78 ¿ au titre de l'excédant de réduction de cotisations pour l'année 2009, la [société cotisante] produit un tableau qu'elle présente comme reprenant le nom de ses salariés, sans qu'il soit possible de déterminer ni les conditions dans lesquelles ce tableau a été établi, ni l'exactitude des mentions portées qui ne sont objectivées par aucun document », la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;

3°/ que le juge ne peut modifier les termes du litige ; qu'en attendant de l'entreprise visée par la mise en demeure qu'elle « objective », par des documents extrinsèques, le tableau mentionné à l'article D. 241-13 du code de la sécurité sociale, ce que l'URSSAF elle-même ne demandait pas, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4°/ que l'article D. 241-13 du code de la sécurité sociale n'exige aucun document justificatif extrinsèque, de sorte qu'en reprochant à l'entreprise de ne pas en avoir produit, la cour d'appel en a violé les dispositions ;

5°/ qu'en ne répondant pas au moyen des conclusions de l'employeur faisant valoir qu'il avait établi chaque mois de l'année 2009 et le 1er janvier 2010 les documents justificatifs du montant des réductions pratiquées, confirmées par la déclaration DADS, de sorte que l'URSSAF ne pouvait prétendre ne pas avoir disposé du document mentionné à l'article D. 241-13 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel n'a pas motivé sa décision, et a violé en conséquence l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article L. 241-13, VI, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008, applicable au litige, pour bénéficier des réductions de cotisations instituées par ce texte, l'employeur doit tenir à disposition des organismes de recouvrement des cotisations un document en vue du contrôle du respect des dispositions de cet article, document dont le contenu et la forme sont précisés par décret.

5. Selon l'article D. 241-13 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-1380 du 24 septembre 2007, alors en vigueur, ce document doit indiquer le nombre de salariés ouvrant droit aux réductions et déductions prévues aux articles L. 241-13, L. 241-17 et L. 241-18, le montant total des exonérations appliquées au titre de chacune de ces dispositions ainsi que, pour chacun de ces salariés, son identité, la rémunération brute mensuelle versée, le montant de chaque réduction ou déduction appliquée, le coefficient issu de l'application de la formule de calcul prévue par l'article D. 241-7 et, le cas échéant le nombre d'heures supplémentaires ou complémentaires effectuées au sens de l'article 81 quater du code général des impôts et la rémunération y afférente.

6. Il résulte de la combinaison de ces textes, dont les dispositions ne sont pas d'application limitée aux contrôles effectués en application de l'article L. 243-7 du code de la sécurité sociale, que l'employeur qui décide de pratiquer, sur les cotisations versées aux organismes sociaux, les réductions et déductions prévues aux articles L. 241-13, L. 241-17 et L. 241-18 du même code, doit en justifier par la tenue et la production du document prévu par l'article D. 241-13 du code de la sécurité sociale précité.

7. L'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que l'URSSAF a annulé le montant des réductions générales sur les bas salaires de l'année 2009 tel que figurant sur le tableau récapitulatif pour cette année et que la société pouvait justifier du montant de la réduction appliquée par elle en produisant les états mensuels établis pour chaque salarié. Il constate que celle-ci produit un tableau qu'elle présente comme reprenant le nom de ses salariés, mois par mois, pour l'année 2009, et les données relatives à leurs salaires, sans qu'il soit possible de déterminer ni les conditions dans lesquelles ce tableau a été établi, ni l'exactitude des mentions portées.

8. De ces constatations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, la cour d'appel, qui a fait ressortir que la société ne produisait pas le document prévu par l'article D. 241-13 du code de la sécurité sociale, et qui n'était pas tenue de répondre à un moyen que ses constatations rendaient inopérant, a pu déduire, sans inverser la charge de la preuve ni modifier l'objet du litige, que la société ne justifiait pas du montant des réductions appliquées par elle.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : M. Labaune - Avocat général : Mme Pieri-Gauthier - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles L. 241-13, VI, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008, L. 241-17, L. 241-18, L. 243-7 et D. 241-13 du code de la sécurité sociale.

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