Numéro 9 - Septembre 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2023

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES

2e Civ., 28 septembre 2023, n° 21-23.857, (B), FRH

Cassation partielle sans renvoi

Maternité – Prestations – Indemnité journalière – Calcul – Salaire de base – Détermination

Il résulte des articles L. 323-4 et R. 323-4, 1°, du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, que le gain journalier servant de base au calcul de l'indemnité journalière de l'assurance maladie est déterminé d'après le montant des trois dernières paies des mois civils antérieurs à la date de l'interruption du travail lorsque le salaire ou le gain est réglé mensuellement.

Lorsque le dernier jour travaillé de l'assuré se situe le dernier jour d'un mois civil, de sorte que ce mois a été entièrement rémunéré, il doit être pris en compte pour la détermination du revenu d'activité antérieur retenu pour le calcul de l'indemnité journalière, l'interruption du travail n'étant effective que le premier jour du mois civil suivant.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Paris, 2 septembre 2021), rendu en dernier ressort, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 3] (la caisse) lui ayant notifié un indu correspondant à un trop-perçu d'indemnités journalières au cours de son congé maternité pour la période du 24 septembre au 14 octobre 2019, Mme [S] (l'assurée) a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

La caisse a formé une demande reconventionnelle en condamnation de l'assurée au paiement de l'indu.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. La caisse fait grief au jugement de dire bien fondé le recours de l'assurée et de la débouter de sa demande en paiement, alors « que le revenu d'activité antérieur retenu pour le calcul de l'indemnité journalière est déterminé sur la base du montant des trois dernières paies des mois civils antérieurs à la date de l'interruption de travail lorsque ce revenu est réglé mensuellement ; qu'il s'ensuit que lorsque l'assuré a cessé de travailler le dernier jour d'un mois civil, de sorte qu'il a été entièrement rémunéré au titre de celui-ci à terme échu, la base de calcul doit intégrer ce mois, l'interruption effective du travail ne survenant que le premier jour du mois civil suivant ; qu'en l'espèce, le tribunal a constaté que l'assurée avait cessé son activité le 31 mars 2019, de sorte qu'elle avait perçu au cours de ce dernier mois civil entièrement travaillé l'intégralité de son salaire payable mensuellement ; qu'en considérant cependant que le mois de mars 2019 ne pouvait être inclus dans la base de calcul et qu'il convenait de prendre en compte les mois de décembre 2018 et janvier et février 2019, le tribunal a violé les articles L. 323-4, L. 331-3, R. 323-4 et R. 331-5 du code de la sécurité sociale, dans leur version applicable au litige. »

Réponse de la Cour

3. Vu les articles L. 323-4 et R. 323-4, 1°, du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige :

4. Il résulte de ces textes que le gain journalier servant de base au calcul de l'indemnité journalière de l'assurance maladie est déterminé d'après le montant des trois dernières paies des mois civils antérieurs à la date de l'interruption de travail lorsque le salaire ou le gain est réglé mensuellement.

5. Lorsque le dernier jour travaillé de l'assuré se situe le dernier jour d'un mois civil, de sorte que ce mois a été entièrement rémunéré, il doit être pris en compte pour la détermination du revenu d'activité antérieur retenu pour le calcul de l'indemnité journalière, l'interruption de travail n'étant effective que le premier jour du mois civil suivant.

6. Pour accueillir le recours de l'assurée, le jugement retient que celle-ci ayant cessé son activité le 31 mars 2019 et étant payée mensuellement, il convient de prendre pour base de calcul les trois mois précédents, soit les mois de décembre 2018, janvier 2019 et février 2019.

7. En statuant ainsi, alors que le revenu d'activité journalier antérieur devait être déterminé d'après les paies des mois de janvier à mars 2019, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

10. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 5 et 7 qu'il convient de rejeter le recours de l'assurée et de faire droit à la demande de la caisse en paiement de l'indu.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare le recours de Mme [S] recevable, le jugement rendu le 2 septembre 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

REJETTE le recours de Mme [S], épouse [Y], et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 3] la somme de 842, 73 euros au titre de l'indu.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Taillandier-Thomas (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Cassignard - Avocat général : Mme Tuffreau - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles L. 323-4 et R. 323-4, 1°, du code de la sécurité sociale.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 27 novembre 2014, pourvoi n° 13-25.313, Bull. 2014, II, n° 237 (cassation) ; 2e Civ., 8 octobre 2020, pourvoi n° 19-21.128, Bull. (cassation sans renvoi).

2e Civ., 7 septembre 2023, n° 21-19.792, (B), FRH

Cassation

Prestations (dispositions générales) – Appareillage – Remboursement – Conditions – Respect des spécificités techniques de la liste des produits et prestations remboursables – Nécessité

Il résulte des articles L. 165-1 et R. 165-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, que le remboursement par l'assurance maladie des produits de santé autres que les médicaments visés à l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale est subordonné à leur inscription sur la liste des produits et prestations remboursables établie par arrêté ministériel, qui précise notamment leurs spécifications techniques.

Viole ces textes la cour d'appel qui décide qu'un dispositif médical peut être pris en charge par l'assurance maladie au titre du code 1135305 de la liste des produits et prestations remboursables, relatif au perfuseur de précision volumétrique, alors que ce dispositif ne respectait pas les spécifications techniques prévues par cette liste et que le fournisseur ne pouvait se prévaloir d'une tolérance administrative qui n'est pas créatrice de droit.

Prestations (dispositions générales) – Prestations sanitaires – Remboursement – Dispositions applicables

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 16 juin 2021), à la suite d'un contrôle des prestations servies par la société [3] (la société), fournisseur de matériel médical spécialisé dans la perfusion à domicile, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Corse (la caisse) lui a notifié un indu pour la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2016.

2. La société a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, quatrième, cinquième et sixième branches

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief à l'arrêt d'annuler la notification d'indu, alors :

« 1°/ que les dispositifs médicaux à usage individuel ne sont pris en charge que s'ils répondent aux spécifications techniques de la liste des produits et prestations remboursables ; qu'un perfuseur de précision volumétrique, figurant à la liste des produits et prestations remboursables sous le code 1135305, comprend un réservoir gradué ; qu'en décidant le contraire, pour dire que les perfuseurs Dosi-flow pouvaient être pris en charge sous le code 1135305 et annuler l'indu réclamé par la caisse, les juges du fond ont violé les articles L. 165-1 et R. 165-1 du code de la sécurité sociale, ensemble la liste des produits et prestations remboursables ;

4°/ que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en opposant, sous couvert de sécurité juridique, une tolérance administrative, pourtant non créatrice de droits, qui résulterait d'une part, d'un courrier de la direction des hôpitaux du ministère de l'emploi et des solidarités du 30 novembre 1999 et d'une télécopie du comité économique des produits de santé du 18 septembre 2001, retenant tous deux que le Dosi-flow pouvait se rattacher au code 1135305, et d'autre part, de ce que la caisse aurait admis pendant plus de dix [ans] la facturation du Dosi-flow sous le code 1135305, les juges du fond ont violé l'article 12 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 165-1 et R. 165-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que la liste des produits et prestations remboursables ;

5°/ qu'à supposer même que les juges du fond soient en droit d'opposer une tolérance administrative, de toute façon, les éléments mis en avant par la cour d'appel - à savoir, d'une part, un courrier de la direction des hôpitaux du ministère de l'emploi et des solidarités du 30 novembre 1999 et une télécopie du comité économique des produits de santé du 18 septembre 2001, retenant tous deux que le Dosi-flow pouvait se rattacher au code 1135305, et d'autre part, la circonstance que la caisse aurait admis pendant plus de dix [ans] la facturation du Dosi-flow sous le code 1135305 - étaient insuffisants pour caractériser une telle tolérance ; qu'à cet égard, l'arrêt doit être censuré pour défaut de base légale au regard de l'article 12 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 165-1 et R. 165-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que la liste des produits et prestations remboursables ;

6°/ qu'en statuant comme ils l'ont fait, au motif inopérant que la société était de bonne foi, les juges du fond ont violé les articles L. 165-1 et R. 165-1 du code de la sécurité sociale, ensemble la liste des produits et prestations remboursables. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 165-1 et R. 165-1 du code de la sécurité sociale, le titre 1er, chapitre 2, section 2, de la liste des produits et prestations remboursables, dans leur rédaction applicable au litige, et l'article 12 du code de procédure civile :

4. Il résulte des deux premiers de ces textes que le remboursement par l'assurance maladie des produits de santé autres que les médicaments visés à l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale est subordonné à leur inscription sur la liste des produits et prestations remboursables établie par arrêté ministériel, qui précise notamment leurs spécifications techniques.

5. Selon le troisième, ne peut être pris en charge par l'assurance maladie sous le code 1135305, alors en vigueur, qu'un perfuseur de précision volumétrique qui comprend un réservoir gradué, semi-rigide, de 100 à 150 millilitres.

6. Pour décider que le perfuseur litigieux, muni d'un accessoire de régulation de débit, pouvait être pris en charge au titre du code 1135305, l'arrêt retient que la liste des produits et prestations remboursables ne prévoit pas que le perfuseur de précision volumétrique doit présenter un réservoir gradué. Il ajoute que la fonction de précision volumétrique du perfuseur litigieux est admise par l'autorité administrative nationale puisqu'il résulte d'un courrier de la direction des hôpitaux du ministère de l'emploi et de la solidarité du 30 novembre 1999 et d'une télécopie du médecin inspecteur général de la santé publique, chef du département des dispositifs médicaux du centre économique des produits de santé du 18 septembre 2001, adressés au fournisseur du dispositif litigieux, que celui-ci pouvait être rattaché au code alors applicable au perfuseur de précision volumétrique. Il en déduit que la société a légitimement pu considérer que le dispositif litigieux était remboursable par assimilation à un perfuseur de précision volumétrique, d'autant que la caisse a accepté la facturation de ce dispositif par assimilation à ce code pendant plus de 10 ans. Il estime que le principe de sécurité juridique dont peut bénéficier un justiciable de bonne foi s'oppose à l'action en recouvrement d'indu diligentée par la caisse.

7. En statuant ainsi, alors que le dispositif litigieux ne respectait pas les spécifications techniques prévues par la liste des produits et prestations remboursables et que la société ne pouvait se prévaloir d'une tolérance administrative qui n'est pas créatrice de droit, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Taillandier-Thomas (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Labaune - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; SARL Cabinet Munier-Apaire -

Textes visés :

Articles L. 162-17, L. 165-1 et R. 165-1 du code de la sécurité sociale.

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