Numéro 9 - Septembre 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2023

UNION EUROPEENNE

Com., 13 septembre 2023, n° 22-16.884, (B), FS

Cassation

Accord du 24 janvier 2020 sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne – Période de transition – Convention de Lugano du 30 octobre 2007 – Application au litige

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 avril 2022) et les productions, cinquante-sept fûts de produits chimiques devaient être acheminés par la société suisse Mediterranean Shipping Company (la société MSC) depuis le port du [Localité 5] jusqu'à [Adresse 10] (Afrique du Sud), via le port de [Localité 9] (Afrique du Sud), sous couvert de deux connaissements émis par la société française Trans Service Line (la société TSL).

2. La société Bolloré Logistics Suisse (la société Bolloré Logistics) a réservé le transport auprès de la société MSC (le transporteur maritime) selon un booking reservation du 9 février 2018.

3. Les fûts ont été empotés dans un conteneur qui été embarqué au [Localité 5] sur le navire MSC Giselle en exécution d'un sea waybill n° MSCUKL646698 (la lettre de transport) du 20 février 2018.

4. Après son acheminement par voie maritime jusqu'au port de [Localité 9] et le transbordement du conteneur, la marchandise devait être transportée par voie terrestre jusqu'à sa destination finale, [Adresse 10].

5. Le 19 mars 2018, durant le transport terrestre effectué par la société PCM Solutions (le voiturier), l'ensemble routier transportant le conteneur s'est renversé dans un virage, entraînant la perte de la marchandise.

6. Le 18 décembre 2018, la société TSL a reçu une réclamation amiable d'un montant de 287 738 francs suisses de la part de la société Givaudan Suisse, se prévalant de la qualité de cessionnaire des droits des chargeurs et destinataires de la marchandise, et de la société Chubb Versicherungen (la société Chubb), agissant en qualité d'assureur facultés de ces mêmes marchandises.

7. Le 18 mars 2019, les sociétés Givaudan Suisse et Chubb ont assigné la société TSL devant le tribunal de commerce de Paris en indemnisation de leurs préjudices résultant de la perte de la marchandise.

8. Le 18 avril 2019, les sociétés TSL et Bolloré Logistics ont assigné la société MSC devant le même tribunal en garantie des condamnations qui pourraient éventuellement être prononcées à leur encontre au bénéfice des sociétés Chubb et Givaudan Suisse dans la première instance, dont la jonction a été refusée.

9. Dans cette seconde instance, la société MSC a soulevé l'incompétence des juridictions françaises en se prévalant d'une clause attributive de compétence désignant la High Court of Justice of London (Royaume-Uni).

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

10. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font grief à l'arrêt de déclarer la cour d'appel de Paris incompétente, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en statuant sur sa propre compétence cependant qu'elle était saisie d'un appel contre un jugement du tribunal du commerce de Paris ayant statué sur sa compétence et que l'objet du litige était limité à la compétence de cette juridiction pour connaître du litige, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ».

Réponse de la Cour

11. Sous le couvert du grief non fondé de violation de l'article 4 du code de procédure civile, le moyen ne tend qu'à dénoncer une erreur matérielle affectant le dispositif de l'arrêt, laquelle n'est pas attaquable par la voie du pourvoi et doit donner lieu à la procédure prévue à l'article 462 du même code.

12. Le moyen n'est donc pas recevable.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

13. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il rejette l'exception d'incompétence soulevée par la société MSC et dit le tribunal de commerce de Paris compétent et, statuant à nouveau, de les renvoyer à mieux se pourvoir, alors « que l'article 23 de la Convention de Lugano concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale du 30 octobre 2007 ne trouve à s'appliquer que si la clause attributive de juridiction désigne un tribunal ou des tribunaux d'un État lié par cette Convention ; que lorsque la clause attributive de juridictions désigne le tribunal d'un État tiers, le juge doit apprécier la validité de la clause en fonction du droit applicable au lieu où il siège ; que, par ailleurs, le Royaume-Uni doit être considéré comme un État tiers à la Convention de Lugano, y compris pour les actions engagées avant son retrait de l'Union Européenne, dès lors que ce texte ne compte pas parmi ceux dont les articles 67 et suivants de l'Accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique (2019/C 384 I/01) maintient l'application au Royaume-Uni aux actions intentées pendant la période de transition courant jusqu'au 31 décembre 2020 ; qu'il s'en déduit que même saisi avant le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, d'une clause attributive de juridiction désignant une juridiction britannique, le juge français doit en apprécier la validité au regard de ses règles de droit interne ; qu'en jugeant que le retrait du Royaume-Uni n'avait pas d'effet sur l'application de l'article 23 de la Convention de Lugano s'agissant d'un contrat conclu et d'une action introduite avant le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne et avant la fin de la période de transition le 31 décembre 2020, la cour d'appel a violé les textes précités, ensemble l'article 48 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

14. Les modalités de sortie de l'Union européenne du Royaume-Uni ont été réglées dans l'Accord du 24 janvier 2020 sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique (l'Accord).

15. En application de cet Accord, entré en vigueur le 1er février 2020, le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne est devenu total à compter du 1er janvier 2021.

16. En ses articles 126 et 127, l'Accord prévoit une période de transition jusqu'au 31 décembre 2020, pendant laquelle, sauf dispositions contraires, le droit de l'Union européenne reste applicable au Royaume-Uni et sur son territoire, de sorte que le Royaume-Uni demeure lié pendant cette période par les obligations découlant des accords internationaux conclus par l'Union européenne.

17. La Convention de Lugano concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale du 30 octobre 2007 (la Convention de Lugano), par laquelle le Royaume-Uni était lié comme Etat membre de l'Union européenne, n'est ni citée ni visée, même implicitement, par les dispositions de l'article 127 de l'Accord relatives aux traités et actes adoptés par les institutions, organes et organismes de l'Union européenne déclarés, par exception, non applicables au Royaume-Uni et sur son territoire pendant la période de transition.

18. Il en résulte que le Royaume-Uni est demeuré lié par la Convention de Lugano jusqu'au 31 décembre 2020, date d'expiration de la période de transition.

19. Après avoir, d'une part, énoncé que l'application de la Convention de Lugano est subordonnée au fait qu'une des parties au moins est domiciliée sur le territoire d'un Etat lié par cette convention, à la désignation d'un tribunal du ressort d'un Etat lié par cette convention et à la reconnaissance du caractère international du litige, d'autre part, relevé que le Royaume-Uni, sur le territoire duquel se trouve la juridiction désignée par la clause, était membre de l'Union européenne au moment de l'introduction de l'instance le 18 avril 2019, soit avant son retrait de l'Union européenne et avant la fin de la période transitoire fixée au 31 décembre 2020, la cour d'appel en a exactement déduit que le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne est sans effet quant à l'application de la Convention de Lugano au litige et que la validité de la clause attributive de juridiction devait être soumise aux conditions de forme prévues à l'article 23 de cette Convention et non aux règles découlant des dispositions du droit national.

20. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

21. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font le même grief à l'arrêt, alors « que le bon de réservation de transport (« Booking confirmation ») mentionnait comme adresse électronique à laquelle les conditions générales de transport MSC étaient consultables « http :www.mscgva. ch/bl_terms/bl.html » ; qu'en retenant, pour considérer que la société Bolloré Logistics avait pu prendre connaissance et accepter ces conditions générales que le bon de réservation renvoyait à l'adresse électronique « http://www.msc.com/che/contract-of-carriage", cependant que ce bon de réservation mentionnait une autre adresse électronique que celle-ci, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document, en violation du principe faisant interdiction au juge de ne pas dénaturer les termes clairs et précis de la clause. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

22. Pour déclarer le tribunal de commerce de Paris incompétent, l'arrêt retient notamment que la clause attributive de compétence au profit de la juridiction londonienne n'apparaît pas retranscrite par écrit sur le contrat de transport mais dans un autre document auquel il renvoie, que le bon de réservation du 9 février 2018 et la lettre de transport maritime (LTM) du 20 février 2018 mentionnent de façon très apparente et lisible une clause de renvoi aux conditions générales du transporteur sur son site web dont l'adresse électronique est précisée, mettant la partie contractante en mesure, moyennant des diligences normales, de les consulter, sauvegarder ou imprimer avant la conclusion du contrat. Il mentionne ensuite l'adresse figurant selon lui en caractères gras en page 2 du booking reservation. Il en déduit que la condition prévue aux paragraphes 1, a), et 2 de l'article 23 de la Convention de Lugano est remplie et que la clause attributive de juridiction est valide.

23. En statuant ainsi, alors qu'il ne s'agissait pas de l'adresse électronique figurant en caractères gras sur le booking reservation, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.

Sur le deuxième moyen, pris en sa cinquième branche

Enoncé du moyen

24. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font le même grief à l'arrêt, alors « qu'est valable la clause attributive de juridiction conclue sous une forme qui est conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles ; qu'en se bornant à relever, pour dire valable, la clause attributive de juridiction dont se prévalait la société MSC l'existence d'un courant d'affaires entre les parties et la soumission de ces relations d'affaires aux conditions générales de transport MSC, sans constater que le contrat litigieux avait été conclu sous une forme qui était conforme aux habitudes que les parties avaient établies entre elles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 23.1 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 23.1 de la Convention de Lugano :

25. Ce texte dispose :

« Si les parties, dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un État lié par la présente Convention, sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un État lié par la présente Convention pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. Cette convention attributive de juridiction est conclue :

a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite ; ou

b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles ; ou

c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée. »

26. Pour déclarer le tribunal de commerce de Paris incompétent, l'arrêt retient que la société MSC justifie, par la production des listings des transports de Bolloré Logistics 2015-2018, d'un courant d'affaires régulier avec la société TSL / BL suisse et même d'un flux récurrent sur cette ligne de transport aux mêmes conditions, qui permet de considérer qu'elles étaient habituées à la présence de cette clause.

27. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'existence d'habitudes établies pendant cette période entre les parties quant à la conclusion d'une telle clause attributive de compétence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le deuxième moyen, pris en sa sixième branche

Enoncé du moyen

28. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font le même grief à l'arrêt, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en affirmant qu'il n'est pas contesté que la clause d'élection de for désignant la High Court de Londres correspond à un usage largement connu et régulièrement observé dans le secteur du transport international de marchandises, cependant que les sociétés Bolloré Logistics et TSL contestaient l'existence d'un usage en la matière en raison de la diversité des clauses de règlement de litige insérées dans les connaissements, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

29. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

30. Pour déclarer le tribunal de commerce de Paris incompétent, l'arrêt retient également qu'il n'est pas contesté que la clause attributive de compétence au profit de la juridiction londonienne correspond à un usage largement connu et régulièrement observé dans le secteur du transport international de marchandises dans lequel les sociétés TSL et Bolloré Logistics sont des opérateurs internationaux connus.

31. En statuant ainsi, alors que, dans leurs conclusions d'appel, ces deux sociétés contestaient l'existence d'un usage en la matière en raison de la diversité des clauses insérées dans les connaissements, en soutenant que les clauses stipulées par les transporteurs ne renvoient pas systématiquement à la High Court of Justice of London, que certaines se réfèrent à la « principal place of business », que la rédaction des clauses de juridiction varie selon le bon vouloir du transporteur maritime, qu'on ne peut pas parler de clause type et que le seul usage qui puisse être établi consiste dans la répétition de l'insertion d'une clause de juridiction dans les connaissements, dont la rédaction varie et dépend de la seule volonté du transporteur maritime, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Fontaine - Avocat général : Mme Guinamant - Avocat(s) : SARL Delvolvé et Trichet ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Articles 126 et 127 de l'Accord du 24 janvier 2020 sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique ; Convention de Lugano du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale.

Com., 20 septembre 2023, n° 21-10.763, (B), FRH

Cassation

Douanes – Dette douanière – Recouvrement – Action civile – Prescription – Délai – Détermination – Acte passible de poursuites judiciaires répressives – Recherche nécessaire

Il résulte des articles 221, § 4, du code des douanes communautaire et 355, 2, du code des douanes que, pour déterminer le délai de prescription de la dette douanière applicable, il appartient aux juges du fond de rechercher si un acte passible de poursuites judiciaires répressives a été commis, peu important qu'aucune poursuite pénale n'ait été engagée contre le débiteur.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 24 novembre 2020) et les productions, la société Sagem défense sécurité (la société Sagem), devenue la société Safran Electronics & Défense (la société Safran), importe des composants électroniques depuis les États-Unis.

La société SDV Logistique International (la société SDV LI), devenue la société Bolloré Logistics (la société Bolloré), est le commissaire en douane qui s'occupe des opérations de dédouanement des produits importés par la société Safran.

2. Le 11 juillet 2011, l'administration des douanes a engagé un contrôle des opérations d'importation effectuées entre le 1er janvier 2009 et le 27 mai 2011.

3. Considérant que les marchandises importées par la société Safran avaient été déclarées sous des positions tarifaires erronées et que les déclarations d'importation comportaient des irrégularités quant à la valeur déclarée des marchandises, l'administration des douanes, après avoir notifié l'avis de résultat d'enquête à la société Sagem, le 12 juin 2014, et à la société SDV LI, le 2 mars 2015, leur a notifié, respectivement les 3 mars et 10 juin 2015, des infractions de fausses déclarations d'espèce et de valeur, puis a émis à leur encontre, respectivement les 16 mars et 11 juin 2015, des avis de mise en recouvrement (AMR) au titre des droits de douane et de la taxe sur la valeur ajoutée à l'importation éludés.

4. Après le rejet de leurs contestations, les sociétés Safran et Bolloré ont assigné l'administration des douanes en annulation des décisions de rejet et des AMR.

Examen des moyens

Enoncé du moyen

5. L'administration des douanes fait grief à l'arrêt d'annuler l'AMR émis le 11 juin 2015 contre la société SDV LI, devenue Bolloré, et d'annuler la décision de la direction régionale des douanes et droits indirects d'Auvergne du 27 septembre 2016 ayant rejeté la contestation formée par cette société, alors « qu'en relevant, pour écarter l'application à la dette douanière due par la société SDV LI de la prescription trentenaire prévue par l'article 355, 2, du code des douanes, que seule une décision de poursuite ou de condamnation de la société SDV LI émanant d'une juridiction d'ordre pénal pouvait caractériser l'existence d'un acte frauduleux ayant empêché l'administration des douanes de connaître l'existence du fait générateur de son droit, quand cette prescription trentenaire devait s'appliquer en présence d'un acte frauduleux seulement passible de poursuites judiciaires répressives, sans qu'il soit nécessaire que l'auteur de cet acte ait été effectivement poursuivi devant les juridictions pénales ou qu'il ait été effectivement déclaré coupable par ces mêmes juridictions, la cour d'appel a violé les articles 3 du règlement (CEE) n° 1697/79 du Conseil du 24 juillet 1979 et 355, 2, du code des douanes. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 221, paragraphe 4, du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2700/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 novembre 2000 (le code des douanes communautaire), et l'article 355, 2, du code des douanes, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 :

6. Selon le premier de ces textes, lorsque la dette douanière résulte d'un acte qui était, au moment où il a été commis, passible de poursuites judiciaires répressives, la communication au débiteur peut être effectuée, dans les conditions prévues par les dispositions en vigueur, après l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la date de la naissance de la dette douanière.

7. La Cour de justice de l'Union européenne juge que l'article 221, paragraphe 4, du code des douanes communautaire, en ne prévoyant lui-même aucun délai de prescription, pas plus que les motifs de suspension ou d'interruption de la prescription applicable, et en se bornant à se référer aux « conditions prévues par les dispositions en vigueur », opère un renvoi au droit national pour le régime de la prescription de la dette douanière, lorsque celle-ci résulte d'un acte qui était, au moment où il a été commis, passible de poursuites judiciaires répressives. Elle en déduit que, pour autant que le droit de l'Union ne comporte pas en la matière de règles communes, il appartient à chaque État membre de déterminer le régime de la prescription des dettes douanières qui n'ont pas pu être constatées en raison d'un fait passible de poursuites judiciaires répressives (arrêt du 17 juin 2010, Agra, C-75/09, points 33 à 36).

8. Interprétant, dans son arrêt du 18 décembre 2007, ZF Zefeser (C-62/06), la notion d' « acte passible de poursuites judiciaires répressives » figurant à l'article 3, premier alinéa, du règlement (CEE) n° 1697/79 du Conseil du 24 juillet 1979 concernant le recouvrement « a posteriori » des droits à l'importation ou des droits à l'exportation qui n'ont pas été exigés du redevable pour des marchandises déclarées pour un régime douanier comportant l'obligation de payer de tels droits, la Cour de justice a dit pour droit que la qualification d'un acte d' « acte passible de poursuites judiciaires répressives » au sens du code des douanes communautaire relève de la compétence des autorités douanières appelées à déterminer le montant exact des droits à l'importation ou à l'exportation en cause. Elle a précisé par ailleurs qu'une telle qualification n'exige pas que des poursuites judiciaires répressives soient effectivement engagées par les autorités pénales d'un État membre et aboutissent à une condamnation des auteurs de l'acte en cause ni, a fortiori, que de telles poursuites ne soient pas prescrites (point 25). Elle a ajouté que la qualification, par les autorités douanières, d'un acte d' « acte passible de poursuites judiciaires répressives » est opérée sans préjudice du contrôle que les juridictions des États membres peuvent exercer sur les décisions des autorités douanières et sans porter nullement atteinte à l'ensemble des conséquences, y compris en ce qui concerne l'éventuel remboursement de droits indûment exigés par ces autorités, que le droit national applicable peut faire découler des décisions desdites juridictions, et notamment de celles constatant l'abandon des poursuites ou prononçant la relaxe des prévenus (point 29).

9. Il ressort de son arrêt du 16 juillet 2009, Snauwaert e.a. et Deschaumes (C-124/08 et C-125/08, point 26), que cette analyse reste pertinente aux fins d'interpréter l'article 221, paragraphe 4, du code des douanes communautaires, applicable ratione temporis.

10. Il résulte du second texte visé que la prescription triennale du droit de reprise de l'administration, prévue à l'article 354 du code des douanes, est écartée lorsque c'est par un acte frauduleux du redevable que l'administration a ignoré l'existence du fait générateur de son droit et n'a pu exercer l'action qui lui compétait pour en poursuivre l'exécution.

11. L'article 355, 2, du code des douanes constitue la disposition nationale à laquelle renvoie l'article 221, paragraphe 4, du code des douanes communautaire pour définir la prescription de la dette douanière se substituant à la prescription triennale.

12. Pour retenir que le délai de prescription triennal prévu à l'article 221, paragraphe 3, du code des douanes communautaire est applicable et que la dette résultant du procès-verbal de constat porté à la connaissance de la société SDV LI le 10 juin 2015, concernant des faits remontant entre le 1er janvier 2009 et le 27 mai 2011, est prescrite, l'arrêt retient que seule une décision de poursuite ou de condamnation de la société SDV LI émanant d'une juridiction d'ordre pénal pourrait caractériser l'existence d'un acte frauduleux ayant empêché l'administration des douanes de connaître l'existence du fait générateur de son droit.

13. En se déterminant ainsi, en considérant que, faute d'une décision de poursuite ou de condamnation de la société SDV LI émanant d'une juridiction d'ordre pénal, l'administration fiscale ne caractérisait pas l'existence d'un acte passible de poursuites judiciaires répressives, quand il lui appartenait de rechercher si un tel acte avait été commis, peu important qu'aucune poursuite pénale n'ait été engagée à l'encontre de cette société, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Tostain - Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 221, § 4, du code des douanes communautaire ; article 355, 2, du code des douanes, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008.

Rapprochement(s) :

Sur l'interversion de la prescription en droit des douanes communautaire, à rapprocher : Com., 7 juin 1994, pourvoi n° 90-21.975, Bull. 1994, IV, n° 204 (cassation).

Com., 13 septembre 2023, n° 22-12.855, (B), FRH

Cassation

Règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 – Articles 3, § 1, et 4 – Extension de procédure pour confusion de patrimoine – Vérification d'office de la compétence pour ouvrir la procédure d'insolvabilité – Centre effectif de direction et de contrôle de la société visée par l'action aux fins d'extension – Appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents

En application de l'article 3 du règlement (UE) 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015, les juridictions de l'État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d'insolvabilité et, selon l'article 4 de ce règlement, la juridiction saisie d'une demande d'ouverture d'une procédure d'insolvabilité examine d'office si elle est compétente, indique dans la décision d'ouverture de la procédure d'insolvabilité les fondements de sa compétence et précise, notamment, si sa compétence est fondée sur les paragraphes 1 ou 2 de l'article 3.

Le règlement du 20 mai 2015 ne contenant pas de règle de compétence se référant expressément à l'extension, au motif d'une confusion des patrimoines, d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un État membre à une société dont le siège statutaire est situé dans un autre État membre et son article 3, § 1, étant rédigé dans des termes identiques à celui de l'article 3, § 1, du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, il s'en déduit que la règle énoncée par la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 15 décembre 2011 (CJUE, arrêt du 15 décembre 2011, Rastelli, C-191/10) s'applique de façon similaire aux procédures soumises au règlement du 20 mai 2015 et que ce règlement doit être interprété en ce sens que, dans l'hypothèse où une société, dont le siège statutaire est situé sur le territoire d'un État membre, est visée par une action tendant à lui étendre les effets d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un autre État membre à l'encontre d'une autre société établie sur le territoire de ce dernier État, la seule constatation de la confusion des patrimoines de ces sociétés ne suffit pas à démontrer que le centre des intérêts principaux de la société visée par ladite action se trouve également dans ce dernier État.

Il est donc nécessaire, pour renverser la présomption selon laquelle ce centre se trouve au lieu du siège statutaire, qu'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permette d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société visée par l'action aux fins d'extension se situe dans l'État membre où a été ouverte la procédure d'insolvabilité initiale.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 2 décembre 2021), la société ATC RIB, qui exerçait son activité dans des locaux donnés à bail par la société de droit allemand Lek Beteiligungen UG (la société Lek), qui avait le même dirigeant et dont elle était la filiale, a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 14 mai 2018. Un jugement du 3 août 2018, confirmé par un arrêt du 25 avril 2019, a converti cette procédure en liquidation judiciaire, M. [D] étant désigné en qualité de liquidateur.

2. Le liquidateur a assigné la société Lek pour lui voir étendre la procédure collective de la société ATC RIB en invoquant l'existence de relations financières anormales.

La société Lek a contesté la compétence du tribunal de la procédure collective en se prévalant des dispositions du règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

3. La société Lek fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement rejetant l'exception d'incompétence territoriale qu'elle avait soulevée et de lui étendre la liquidation judiciaire de la société ATC RIB, alors :

« 1°/ que la juridiction saisie d'une demande d'ouverture d'une procédure d'insolvabilité entrant dans le champ d'application du règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 examine d'office si elle est compétente en vertu de l'article 3, indique, dans sa décision d'ouverture de la procédure d'insolvabilité, les fondements de sa compétence et précise notamment si sa compétence est fondée sur le § 1 ou le § 2 de l'article 3 ; que doit, pareillement, vérifier d'office si elle est compétente en vertu de ce texte et indiquer les fondements de sa compétence, la juridiction d'un Etat membre qui, après avoir ouvert une procédure principale d'insolvabilité à l'encontre d'une société en retenant que le centre des intérêts principaux de celle-ci était situé sur le territoire de cet Etat, est saisie, en application d'une règle de son droit national, d'une demande d'extension cette procédure à une deuxième société, dont le siège statutaire est situé dans un autre État membre ; que pour confirmer le jugement du tribunal ayant rejeté l'exception d'incompétence territoriale et s'étant déclaré compétent pour statuer sur l'extension à la société Lek, dont le siège social était en Allemagne, de la procédure de liquidation judiciaire affectant la société ATC RIB, l'arrêt retient qu'il résulte de la combinaison des articles 562 et 954, alinéa 3, du code de procédure civile que la partie qui entend voir infirmer le chef d'un jugement ayant rejeté l'exception d'incompétence soulevée en première instance et accueillir cette exception doit formuler une prétention en ce sens dans le dispositif de ses conclusions d'appel, que le dispositif des dernières conclusions d'appel de la société Lek se borne à solliciter l'infirmation du jugement frappé d'appel, sans réitérer l'exception d'incompétence rejetée par celui-ci, et que ledit jugement ne peut dès lors qu'être confirmé de ce chef ; qu'en se prononçant de la sorte, sans examiner d'office si elle était internationalement compétente pour étendre à la société de droit allemand Lek une procédure d'insolvabilité ouverte à l'égard de la société ATC RIB, ni indiquer les fondements de sa compétence, la cour d'appel a violé l'article 4 du règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 ;

2°/ qu'une juridiction d'un Etat membre qui a ouvert une procédure principale d'insolvabilité à l'encontre d'une société, en retenant que le centre des intérêts principaux de celle-ci est situé sur le territoire de cet Etat, ne peut étendre, en application d'une règle de son droit national, cette procédure à une deuxième société, dont le siège statutaire est situé dans un autre État membre, qu'à la condition qu'il soit démontré que le centre des intérêts principaux de cette dernière se trouve dans le premier Etat membre ; que lorsqu'une société, dont le siège statutaire est situé sur le territoire d'un Etat membre, est visée par une action tendant à lui étendre les effets d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un autre Etat membre à l'encontre d'une autre société établie sur le territoire de ce dernier Etat, la seule constatation de la confusion des patrimoines de ces sociétés ne suffit pas à démontrer que le centre des intérêts principaux de la société visée par ladite action se trouve également dans ce dernier Etat ; qu'il est nécessaire, pour renverser la présomption selon laquelle ce centre se trouve au lieu du siège statutaire, qu'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permette d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société visée par l'action aux fins d'extension se situe dans l'Etat membre où a été ouverte la procédure d'insolvabilité initiale ; que pour confirmer le jugement du tribunal ayant, après s'être déclaré compétent, étendu à la société Lek, dont le siège social était en Allemagne, la procédure de liquidation judiciaire affectant la société ATC RIB, l'arrêt s'est borné à retenir qu'est démontrée l'existence de relations financières entre ces deux sociétés, facilitées par le fait qu'elles ont le même dirigeant, incompatibles avec des obligations contractuelles réciproques normales, et de nature à caractériser une confusion des patrimoines ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le centre des intérêts principaux de la société Lek était sur le territoire français, ce qui ne pouvait se déduire de la seule constatation de la confusion de son patrimoine avec celui de la société ATC RIB, mais exclusivement d'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permettant d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société Lek se situait en France et non au lieu de son siège statutaire en Allemagne, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 3 du règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 ;

3°/ que pour les sociétés et les personnes morales, le centre des intérêts principaux est présumé, jusqu'à preuve du contraire, être le lieu du siège statutaire ; que pour confirmer le jugement du tribunal ayant, après avoir rejeté l'exception d'incompétence territoriale, étendu à la société Lek, dont le siège social était en Allemagne, la procédure de liquidation judiciaire affectant la société ATC RIB, l'arrêt a retenu, par motifs éventuellement adoptés, que rien ne permet de démontrer que le centre des intérêts principaux de la société Lek se situait à [Localité 3] ; qu'en se déterminant ainsi, bien que centre des intérêts principaux d'une société soit présumé, jusqu'à preuve du contraire, être le lieu du siège statutaire, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve, en violation de l'article 3 du règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 3, §§ 1 et 4, du règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 :

4. Selon le second de ces textes la juridiction saisie d'une demande d'ouverture d'une procédure d'insolvabilité examine d'office si elle est compétente en vertu de l'article 3 du règlement, indique, dans la décision d'ouverture de la procédure d'insolvabilité, les fondements de sa compétence et précise, notamment, si sa compétence est fondée sur les paragraphes 1 ou 2 de l'article 3.

5. Selon le premier de ces textes, les juridictions de l'État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d'insolvabilité.

6. Après avoir relevé que le règlement (CE) nº 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité ne contient pas de règle de compétence se référant expressément à l'extension, au motif d'une confusion des patrimoines, d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un État membre à une société dont le siège statutaire est situé dans un autre État membre, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, 1re ch., 15 décembre 2011, Rastelli, C-191/10), a dit pour droit que ce règlement « doit être interprété en ce sens que dans l'hypothèse où une société, dont le siège statutaire est situé sur le territoire d'un État membre, est visée par une action tendant à lui étendre les effets d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un autre État membre à l'encontre d'une autre société établie sur le territoire de ce dernier État, la seule constatation de la confusion des patrimoines de ces sociétés ne suffit pas à démontrer que le centre des intérêts principaux de la société visée par ladite action se trouve également dans ce dernier État. Il est nécessaire, pour renverser la présomption selon laquelle ce centre se trouve au lieu du siège statutaire, qu'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permette d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société visée par l'action aux fins d'extension se situe dans l'État membre où a été ouverte la procédure d'insolvabilité initiale ».

7. Le règlement du 20 mai 2015 ne contenant pas non plus de règle de compétence se référant expressément à l'extension, au motif d'une confusion des patrimoines, d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un État membre à une société dont le siège statutaire est situé dans un autre État membre et son article 3, § 1, étant rédigé dans des termes identiques à celui de l'article 3, § 1, du règlement du 29 mai 2000, il s'en déduit, sans aucun doute raisonnable quant à l'interprétation du droit de l'Union sur les questions soulevées par le moyen, que la règle énoncée par la CJUE dans son arrêt du 15 décembre 2011 précité s'applique de façon similaire aux procédures soumises au règlement du 20 mai 2015.

8. Pour étendre à la société Lek la liquidation judiciaire de la société ATC RIB, l'arrêt retient, par motifs propres, avant d'énumérer les éléments qu'elle considère de nature à établir l'existence de relations financières anormales entre les deux sociétés, que la partie qui entend voir infirmer le chef d'un jugement ayant rejeté l'exception d'incompétence soulevée en première instance et accueillir cette exception doit formuler une prétention en ce sens dans le dispositif de ses conclusions. Il ajoute, par motifs adoptés, que la société Lek détient 49 % du capital de la société New Worl Wing, ayant son activité principale à [Localité 4], commune située en France, que la détention de cette part du capital de la société New Worl Wing ne peut pas être considérée comme un simple actif financier et que M. [M], gérant de la société Lek, est aussi président de la New Worl Wing, rien ne permettant de démontrer que le centre des intérêts principaux de la société Lek se situe à [Localité 3].

9. En se déterminant par de tels motifs, impropres à établir que le centre des intérêts principaux de la société Lek se trouvait en France et à fonder sa compétence, ce qui ne pouvait se déduire de la confusion de son patrimoine avec celui de la société ATC RIB, mais exclusivement d'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permettant d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société Lek se trouvait en France et non au lieu de son siège statutaire en Allemagne, la cour d'appel, à qui il appartenait d'office de vérifier sa compétence, n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 décembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : M. Riffaud - Avocat général : Mme Guinamant - Avocat(s) : SARL Cabinet Briard ; SARL Cabinet Pinet -

Textes visés :

Articles 3 et 4 du règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015.

Rapprochement(s) :

Sur la compétence territoriale en matière de procédures d'insolvabilité, cf : CJUE, arrêt du 15 décembre 2011, Rastelli, C-191/10.

Soc., 13 septembre 2023, n° 22-17.638, (B) (R), FP

Cassation partielle

Travail – Aménagement du temps de travail – Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 – Acquisition des droits à congés payés – Conditions – Fixation par un Etat membre d'une obligation de travail effectif du salarié – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 février 2022), le 26 avril 2007, M. [B] a été engagé en qualité de conducteur receveur par la société Transports Daniel Meyer.

2. Le 21 février 2014, le salarié a été victime d'un accident du travail. Il a fait l'objet d'un arrêt de travail jusqu'au 8 octobre 2015.

3. Après la délivrance par le médecin du travail d'un avis d'inaptitude définitive, le salarié a été licencié le 19 novembre 2015 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

4. Le 4 novembre 2016, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution du contrat de travail.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de limiter à une certaine somme le rappel d'indemnité de congés payés, alors « que tout travailleur doit bénéficier d'un congé payé annuel ; que les salariés absents du travail en vertu d'un congé maladie au cours de la période de référence sont assimilés à ceux ayant effectivement travaillé au cours de cette période ; qu'il s'en infère que le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle, assimilé au travailleur ayant effectivement travaillé, acquiert des droits à congés payés pendant la totalité de la période de suspension du contrat ; qu'en retenant que le salarié, placé en congé maladie le 21 février 2014, ne pouvait prétendre à une indemnité de congés payés pour la période postérieure au 21 février 2015, la cour d'appel a violé l'article L. 3141-5 du code du travail interprété à la lumière de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, n'opère aucune distinction entre les travailleurs qui sont absents du travail en vertu d'un congé de maladie, pendant la période de référence, et ceux qui ont effectivement travaillé au cours de ladite période. Il s'ensuit que, s'agissant de travailleurs en congé maladie dûment prescrit, le droit au congé annuel payé conféré par cette directive à tous les travailleurs ne peut être subordonné par un Etat membre à l'obligation d'avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit Etat (CJUE, arrêt du 20 janvier 2009, Schultz-Hoff, C- 350/06, point 41 ; CJUE, arrêt du 24 janvier 2012, Dominguez, C-282/10, point 20).

7. La Cour de Justice de l'Union européenne juge qu'il incombe à la juridiction nationale de vérifier, en prenant en considération l'ensemble du droit interne et en faisant application des méthodes d'interprétation reconnues par celui-ci, si elle peut parvenir à une interprétation de ce droit permettant de garantir la pleine effectivité de l'article 7 de la directive 2003/88/CE et d'aboutir à une solution conforme à la finalité poursuivie par celle-ci (CJUE, arrêt du 24 janvier 2012, Dominguez, C-282/10).

8. Aux termes de l'article L. 3141-3 du code du travail, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur.

9. Selon l'article L. 3141-5 du code du travail, sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé, les périodes, dans la limite d'une durée ininterrompue d'un an, pendant lesquelles l'exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle.

10. Il résulte des dispositions combinées des articles L. 3141-1 et L. 3141-5 du code du travail que les périodes pendant lesquelles l'exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle, ne permettent pas d'acquérir des droits à congés payés au-delà d'une durée ininterrompue d'un an.

11. Le moyen, qui propose une interprétation de la loi, à la lumière de la directive 2003/88/CE, contraire aux termes des articles L. 3141-1 et L. 3141-5 du code du travail, n'est pas fondé.

Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

12. Le salarié fait le même grief à l'arrêt, alors « que, subsidiairement, lorsqu'il n'est pas possible d'interpréter la réglementation nationale de manière à en assurer la conformité avec l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, la juridiction nationale doit laisser la réglementation nationale inappliquée ; que les dispositions précitées doivent être interprétées comme imposant que les périodes au cours desquelles le salarié est placé en congé maladie soient, pour la détermination du droit à congé annuel, prises en compte pour la totalité de leur durée ; qu'à supposer qu'il ne soit pas possible d'interpréter l'article L. 3141-5 du code du travail de manière à en assurer la conformité avec l'article 7 de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 et l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, il appartenait à la cour, en application du second de ces textes, de laisser cet article inappliqué ; qu'en faisant toutefois application de ce texte pour rejeter la demande d'indemnité de congés payés présentée par le salarié en tant qu'elle portait sur la période postérieure au 21 février 2015, la cour d'appel a violé l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ensemble l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, et, par fausse application, l'article L. 3141-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, L. 1132-1, L. 3141-3 et L. 3141-5 du code du travail :

13. Aux termes du premier de ces textes, tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu'à une période annuelle de congés payés.

14. En application du deuxième de ces textes, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison notamment de son état de santé.

15. Aux termes du troisième de ces textes, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur.

16. Selon le dernier de ces textes, sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé, les périodes, dans la limite d'une durée ininterrompue d'un an, pendant lesquelles l'exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle.

17. Le droit au congé annuel payé constitue un principe essentiel du droit social de l'Union européenne (CJUE, arrêt du 6 novembre 2018, Bauer et Willmeroth, C-569/16 et C- 570/16, point 80).

18. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, n'opère aucune distinction entre les travailleurs qui sont absents du travail en vertu d'un congé de maladie, pendant la période de référence, et ceux qui ont effectivement travaillé au cours de ladite période. Il s'ensuit que, s'agissant de travailleurs en congé maladie dûment prescrit, le droit au congé annuel payé conféré par cette directive à tous les travailleurs ne peut être subordonné par un Etat membre à l'obligation d'avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit Etat (CJUE, arrêt du 20 janvier 2009, Schultz-Hoff, C- 350/06, point 41 ; CJUE, arrêt du 24 janvier 2012, Dominguez, C-282/10, point 20).

19. La Cour de Justice de l'Union européenne juge qu'il incombe à la juridiction nationale de vérifier, en prenant en considération l'ensemble du droit interne et en faisant application des méthodes d'interprétation reconnues par celui-ci, si elle peut parvenir à une interprétation de ce droit permettant de garantir la pleine effectivité de l'article 7 de la directive 2003/88/CE et d'aboutir à une solution conforme à la finalité poursuivie par celle-ci (CJUE, arrêt du 24 janvier 2012, Dominguez, C-282/10).

20. Par arrêt du 6 novembre 2018 (CJUE, arrêt du 6 novembre 2018, Bauer et Willmeroth, C-569/16 et C- 570/16), la Cour de Justice de l'Union européenne a jugé qu'en cas d'impossibilité d'interpréter une réglementation nationale de manière à en assurer la conformité avec l'article 7 de la directive 2003/88/CE et l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, la juridiction nationale doit laisser ladite réglementation nationale inappliquée.

La Cour de Justice de l'Union européenne précise que cette obligation s'impose à la juridiction nationale en vertu de l'article 7 de la directive 2003/88/CE et de l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne lorsque le litige oppose un bénéficiaire du droit à congé à un employeur ayant la qualité d'autorité publique et en vertu de la seconde de ces dispositions lorsque le litige oppose le bénéficiaire à un employeur ayant la qualité de particulier.

21. La Cour de cassation a jugé que la directive 2003/88/CE ne pouvant permettre, dans un litige entre des particuliers, d'écarter les effets d'une disposition de droit national contraire, un salarié ne peut, au regard de l'article L. 3141-3 du code du travail, prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés au titre d'une période de suspension du contrat de travail ne relevant pas de l'article L. 3141-5 du code du travail (Soc., 13 mars 2013, pourvoi n° 11-22.285, Bull. 2013, V, n° 73).

22. S'agissant d'un salarié, dont le contrat de travail est suspendu par l'effet d'un arrêt de travail pour cause d'accident de travail ou de maladie professionnelle, au-delà d'une durée ininterrompue d'un an, le droit interne ne permet pas, ainsi qu'il a été dit au point 9, une interprétation conforme au droit de l'Union européenne.

23. Dès lors, le litige opposant un bénéficiaire du droit à congé à un employeur ayant la qualité de particulier, il incombe au juge national d'assurer, dans le cadre de ses compétences, la protection juridique découlant de l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de garantir le plein effet de celui-ci en laissant au besoin inappliquée ladite réglementation nationale.

24. Il convient en conséquence d'écarter partiellement l'application des dispositions de l'article L. 3141-5 du code du travail en ce qu'elles limitent à une durée ininterrompue d'un an les périodes de suspension du contrat de travail pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle assimilées à du temps de travail effectif pendant lesquelles le salarié peut acquérir des droits à congé payé et de juger que le salarié peut prétendre à ses droits à congés payés au titre de cette période en application des dispositions des articles L. 3141-3 et L. 3141-9 du code du travail.

25. Pour limiter à une certaine somme la condamnation de l'employeur au titre de l'indemnité de congé payé, l'arrêt retient que l'article 7 de la directive 2003/88/CE, qui doit guider le juge dans l'interprétation des textes, n'est pas d'application directe en droit interne quand l'employeur n'est pas une autorité publique. Il ajoute que la période écoulée entre la date de l'arrêt de travail du 21 février 2014 et expirant un an après, soit le 21 février 2015, ouvre droit à congés payés, mais nullement la période qui a suivi.

26. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite la condamnation de la société Transports Daniel Meyer à payer à M. [B] au titre de l'indemnité de congé payé la somme de 132,71 euros, l'arrêt rendu le 9 février 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.

Arrêt rendu en formation plénière de chambre.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : M. Flores - Avocat général : Mme Roques - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ; article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; articles L. 3141-3, L. 3141-5 et L. 3141-9 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la reconnaissance par la Cour de justice de l'Union européenne du droit au congé annuel comme principe du droit social de l'Union européenne et du caractère inconditionel de ce droit, cf. : CJUE, arrêt du 26 juin 2001, BECTU, C-173/99 ; CJUE, arrêt du 20 janvier 2009, Schultz-Hoff, C-350/06 ; CJUE, arrêt du 30 juin 2016, Sobczyszyn, C-178/15 ; CJUE, arrêt du 29 novembre 2017, King, C-214/16 ; CJUE, arrêt du 6 novembre 2018, Bauer et Willmeroth, C-569/16 et C-570/16. Sur l'effet direct de l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et l'office du juge national en cas d'impossibilité d'interprétation conforme des textes à la lumière de la directive, cf. : CJUE, arrêt du 6 novembre 2018, Max-Plank - Geselshaft, C-684-16.

Soc., 13 septembre 2023, n° 22-17.340, n° 22-17.341, n° 22-17.342, (B) (R), FP

Rejet

Travail – Aménagement du temps de travail – Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 – Acquisition des droits à congés payés – Conditions – Fixation par un Etat membre d'une obligation de travail effectif du salarié – Portée

Travail – Aménagement du temps de travail – Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 – Disposition du droit national contraire à la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et à l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne – Suspension du contrat de travail – Cas – Arrêt de travail pour cause de maladie non professionnelle – Office du juge – Obligation d'interprétation conforme – Portée

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 22-17.340, 22-17.341, et 22-17.342 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Reims, 6 avril 2022), Mme [Z] et deux autres salariés de la société Transdev [Localité 4] ont saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre des congés payés qu'ils soutenaient avoir acquis pendant la suspension de leur contrat de travail à la suite d'un arrêt de travail pour cause de maladie non professionnelle.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief aux arrêts de dire que les salariés sont en droit de récupérer des jours de congés et qu'il doit comptabiliser un certain nombre de jours annuels de congés payés en plus des droits à congés annuels acquis et en cours, alors :

« 1°/ que l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne permettant pas, dans un litige entre des particuliers, d'écarter les effets d'une disposition de droit national contraire, le salarié ne peut prétendre, au regard des dispositions des articles L. 3141-3 et L. 3143-5 du code du travail, à l'acquisition de congés payés au titre d'une période de suspension du contrat de travail pour maladie d'origine non professionnelle ; qu'en décidant au contraire que « la Charte des droits fondamentaux (...), opposable dans les litiges entre particuliers, commande également de laisser le droit national inappliqué », pour en déduire que « c'est à raison que les salariés réclament un droit à congés payés annuels, nés pendant leur période d'absence pour cause de maladie non professionnelle », la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et, par refus d'application, les articles L. 3141-3 et L. 3141-5 du code du travail ;

2°/ que l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne se borne à disposer que « Tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu'à une période annuelle de congés payés » ; qu'en se fondant sur cet article 31, § 2, de la Charte pour en déduire un droit des salariés à un congé annuel minimal garanti de quatre semaines quand l'article 31, § 2, ne fixe pas de durée minimale pour la période annuelle de congés payés, la cour d'appel a violé l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ensemble les articles L. 3141-3 et L. 3141-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. Aux termes de l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu'à une période annuelle de congés payés.

6. En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison notamment de son état de santé.

7. Aux termes de l'article L. 3141-3 du code du travail, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur.

8. Le droit au congé annuel payé constitue un principe essentiel du droit social de l'Union européenne (CJUE, arrêt du 6 novembre 2018, Bauer et Willmeroth, C-569/16 et C-570/16, point 80).

9. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, n'opère aucune distinction entre les travailleurs qui sont absents du travail en vertu d'un congé de maladie, pendant la période de référence, et ceux qui ont effectivement travaillé au cours de ladite période. Il s'ensuit que, s'agissant de travailleurs en congé maladie dûment prescrit, le droit au congé annuel payé conféré par cette directive à tous les travailleurs ne peut être subordonné par un Etat membre à l'obligation d'avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit Etat (CJUE, arrêt du 20 janvier 2009, Schultz-Hoff, C-350/06, point 41 ; CJUE, arrêt du 24 janvier 2012, Dominguez, C-282/10, point 20).

10. La Cour de justice de l'Union européenne juge qu'il incombe à la juridiction nationale de vérifier, en prenant en considération l'ensemble du droit interne et en faisant application des méthodes d'interprétation reconnues par celui-ci, si elle peut parvenir à une interprétation de ce droit permettant de garantir la pleine effectivité de l'article 7 de la directive 2003/88/CE et d'aboutir à une solution conforme à la finalité poursuivie par celle-ci (CJUE, arrêt du 24 janvier 2012, Dominguez, C-282/10).

11. Par arrêt du 6 novembre 2018 (CJUE, arrêt du 6 novembre 2018, Bauer et Willmeroth, C-569/16 et C- 570/16), la Cour de Justice de l'Union européenne a jugé qu'en cas d'impossibilité d'interpréter une réglementation nationale de manière à en assurer la conformité avec l'article 7 de la directive 2003/88/CE et l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux, la juridiction nationale doit laisser ladite réglementation nationale inappliquée.

La Cour de justice de l'Union européenne précise que cette obligation s'impose à la juridiction nationale en vertu de l'article 7 de la directive 2003/88/CE et de l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux lorsque le litige oppose un bénéficiaire du droit à congé à un employeur ayant la qualité d'autorité publique et en vertu de la seconde de ces dispositions lorsque le litige oppose le bénéficiaire à un employeur ayant la qualité de particulier.

12. La Cour de cassation a jugé que la directive 2003/88/CE ne pouvant permettre, dans un litige entre des particuliers, d'écarter les effets d'une disposition de droit national contraire, un salarié ne peut, au regard de l'article L. 3141-3 du code du travail, prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés au titre d'une période de suspension du contrat de travail ne relevant pas de l'article L. 3141-5 du code du travail (Soc., 13 mars 2013, n° 11-22.285, Bull. 2013, V, n° 73).

13. S'agissant d'un salarié, dont le contrat de travail est suspendu par l'effet d'un arrêt de travail pour cause de maladie non professionnelle, les dispositions de l'article L. 3141-3 du code du travail, qui subordonnent le droit à congé payé à l'exécution d'un travail effectif, ne permettent pas une interprétation conforme au droit de l'Union européenne.

14. Dès lors, le litige opposant un bénéficiaire du droit à congé à un employeur ayant la qualité de particulier, il incombe au juge national d'assurer, dans le cadre de ses compétences, la protection juridique découlant de l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de garantir le plein effet de celui-ci en laissant au besoin inappliquée ladite réglementation nationale.

15. Il convient en conséquence d'écarter partiellement l'application des dispositions de l'article L. 3141-3 du code du travail en ce qu'elles subordonnent à l'exécution d'un travail effectif l'acquisition de droits à congé payé par un salarié dont le contrat de travail est suspendu par l'effet d'un arrêt de travail pour cause de maladie non professionnelle et de juger que le salarié peut prétendre à ses droits à congés payés au titre de cette période en application des dispositions des articles L. 3141-3 et L. 3141-9 du code du travail.

16. La cour d'appel, après avoir, à bon droit, écarté partiellement les dispositions de droit interne contraires à l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, a exactement décidé que les salariés avaient acquis des droits à congé payé pendant la suspension de leur contrat de travail pour cause de maladie non professionnelle.

17. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois.

Arrêt rendu en formation plénière de chambre.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : M. Flores - Avocat général : Mme Berriat (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet ; SCP Boutet et Hourdeaux -

Textes visés :

Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ; article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; articles L. 3141-3 et L. 3141-9 du code du travail.

Rapprochement(s) :

En sens contraire de : Soc., 13 mars 2013, pourvoi n° 11-22.285, Bull. 2013, V, n° 73 (cassation partielle). Sur la reconnaissance par la Cour de justice de l'Union européenne du droit au congé annuel comme principe du droit social de l'Union et du caractère inconditionel de ce droit, cf. : CJUE, arrêt du 26 juin 2001, BECTU, C-173/99 ; CJUE, arrêt du 20 janvier 2009, Schultz-Hoff, C-350/06 ; CJUE, arrêt du 30 juin 2016, Sobczyszyn, C-178/15 ; CJUE, arrêt du 29 novembre 2017, King, C-214/16 ; CJUE, arrêt du 6 novembre 2018, Bauer et Willmeroth, C-569/16 et C-570/16. Sur la dissociation, par la Cour de justice de l'Union européenne, du droit aux congés de la qualité de travailleur lorsque l'arrêt de travail est indépendant de la volonté du salarié, notamment pour cause de maladie, cf. : CJUE, arrêt du 20 janvier 2009,Schultz-Hoff e.a., C-350/06 et C-520/06 ; CJUE, arrêt du 24 janvier 2012, Dominguez, C-282/10. Sur l'effet direct de l'article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux et l'office du juge national en cas d'impossibilité d'interprétation conforme des textes nationaux à la lumière de la directive, cf. : CJUE, arrêt du 6 novembre 2018, Max-Plank-Geselshaft, C-684-16.

Soc., 13 septembre 2023, n° 22-14.043, (B), FP

Cassation sans renvoi

Travail – Repos et congés – Congé parental – Directive 2010/18/UE du Conseil du 8 mars 2010 portant application de l'accord-cadre révisé sur le congé parental – Droits acquis ou en cours d'acquisition lors du congé parental – Maintien jusqu'à l'issue du congé parental – Portée

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Chambéry, 8 mars 2022), rendu en dernier ressort, Mme [S] a été engagée, le 6 mars 2017, par la société CGR.

2. Le contrat de travail a été suspendu pour cause de maladie, puis de congé pathologique et prénatal du 1er au 19 août 2018.

La salariée a ensuite pris un congé maternité du 20 août 2018 au 16 février 2019, puis un congé parental d'éducation à compter du 17 février 2019.

3. Le contrat de travail a pris fin le 31 octobre 2020 à la suite d'une rupture conventionnelle.

4. Le 25 mars 2021, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief au jugement de la débouter de sa demande en paiement d'une certaine somme à titre d'indemnité compensatrice de congé payé, alors « que les droits acquis ou en cours d'acquisition par le travailleur à la date du début du congé parental sont maintenus dans leur état jusqu'à la fin du congé parental ; qu'en considérant que les congés payés acquis par Mme [S] avant le début de son congé parental ne pouvaient être reportés à l'issue de ce congé au motif que la salariée n'avait pas été empêchée de les prendre à l'issue de la période de référence, ayant elle-même choisi sa date de départ en congé parental, le conseil de prud'hommes a violé les articles L. 3141-1, L. 3141-3 et L. 3141-28 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5 de l'accord-cadre révisé sur le congé parental figurant à l'annexe de la directive 2010/18/UE du Conseil du 8 mars 2010. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3141-1 et L. 1225-55 du code du travail, interprétés à la lumière de la directive 2010/18/UE du Conseil du 8 mars 2010, portant application de l'accord-cadre révisé sur le congé parental :

6. Aux termes du premier de ces textes, tout salarié a droit chaque année à un congé payé à la charge de l'employeur.

7. Selon le second de ces textes, à l'issue du congé parental d'éducation, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente.

8. La Cour de cassation a jugé que la décision du salarié de bénéficier d'un congé parental d'éducation s'impose à l'employeur, ce dont il résulte que l'intéressé, qui a lui-même rendu impossible l'exercice de son droit à congé payé, ne peut prétendre à une indemnité compensatrice de congés payés (Soc., 28 janvier 2004, pourvoi n° 01-46.314, Bull. 2004, V, n° 32).

9. Toutefois, le droit au congé annuel payé constitue un principe essentiel du droit social de l'Union européenne (CJUE, arrêt du 6 novembre 2018, Bauer et Willmeroth, C-569/16 et C-570/16, point 80).

10. Aux termes de la clause 5, point 2, de l'accord-cadre révisé sur le congé parental figurant à l'annexe de la directive 2010/18/UE du Conseil du 8 mars 2010, les droits acquis ou en cours d'acquisition par le travailleur à la date du début du congé parental sont maintenus en l'état jusqu'à la fin du congé parental. Ces droits s'appliquent à l'issue du congé parental, tout comme les modifications apportées à la législation, aux conventions collectives et/ou à la pratique nationales.

11. La Cour de justice de l'Union européenne juge qu'il ressort tant du libellé de la clause 2, point 6, de l'accord-cadre sur le congé parental, conclu le 14 décembre 1995, qui figure en annexe de la directive 96/34/CE du Conseil du 3 juin 1996, concernant l'accord-cadre sur le congé parental, telle que modifiée par la directive 97/75/CE du Conseil du 15 décembre 1997, dont les termes ont été repris par la clause 5, point 2, de l'accord-cadre révisé sur le congé parental figurant à l'annexe de la directive 2010/18/UE du Conseil du 8 mars 2010, que du contexte dans lequel elle s'insère, que cette disposition a pour but d'éviter la perte ou la réduction des droits dérivés de la relation de travail, acquis ou en cours d'acquisition, auxquels le travailleur peut prétendre lorsqu'il entame un congé parental et de garantir que, à l'issue de ce congé, il se retrouvera, s'agissant de ces droits, dans la même situation que celle dans laquelle il était antérieurement audit congé (CJUE, arrêt du 16 juillet 2009, Gómez-Limón Sánchez-Camacho, C-537/07, point 39 ; CJUE, arrêt du 22 octobre 2009, Meerts, C-116/08, point 39).

12. De même, la Cour de justice (CJUE, arrêt du 22 avril 2010, Land Tirol, C-486/08) a dit pour droit : « La clause 2, point 6, de l'accord-cadre sur le congé parental, conclu le 14 décembre 1995, qui figure à l'annexe de la directive 96/34/CE du Conseil du 3 juin 1996, concernant l'accord-cadre sur le congé parental conclu par l'UNICE, le CEEP et la CES, telle que modifiée par la directive 97/75/CE du Conseil du 15 décembre 1997, doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à une disposition nationale telle que l'article 60, dernière phrase, de la loi du Land du Tyrol relative aux agents contractuels du 8 novembre 2000, dans sa version en vigueur jusqu'au 1er février 2009, selon laquelle les travailleurs, faisant usage de leur droit au congé parental de deux ans, perdent, à l'issue de ce congé, des droits à congés annuels payés acquis durant l'année précédant la naissance de leur enfant. »

13. Par ailleurs, la Cour de cassation juge qu'il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement (Soc., 13 juin 2012, pourvoi n° 11-10.929, Bull. 2012, V, n° 187 ; Soc., 21 septembre 2017, pourvoi n° 16-18.898, Bull. 2017, V, n° 159).

14. Il y a donc lieu de juger désormais qu'il résulte des articles L. 3141-1 et L. 1225-55 du code du travail, interprétés à la lumière de la directive 2010/18/UE du Conseil du 8 mars 2010, portant application de l'accord-cadre révisé sur le congé parental, que lorsque le salarié s'est trouvé dans l'impossibilité de prendre ses congés payés annuels au cours de l'année de référence en raison de l'exercice de son droit au congé parental, les congés payés acquis à la date du début du congé parental doivent être reportés après la date de reprise du travail.

15. Pour débouter la salariée de sa demande en paiement d'une somme à titre d'indemnité compensatrice de congé payé, le jugement constate que le bulletin de paie de juin 2020 faisait mention de quarante-trois jours de congés payés alors que le bulletin du mois suivant n'en mentionnait aucun.

Le jugement retient que les droits à congés payés ayant été reportés à l'issue du congé maternité, la salariée a été parfaitement en mesure de prendre ses congés avant son congé parental d'éducation et n'a pas été placée dans l'impossibilité de le faire. Il ajoute que la situation des salariés en arrêt maladie ou accident de travail n'est pas comparable à celle des salariés en congé parental et que la salariée n'a pas été empêchée de prendre ses congés payés à l'issue de la période de référence ayant choisi elle-même sa date de départ en congé parental.

16. En statuant ainsi, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

17. Tel que suggéré en demande, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

18. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

19. La salariée, qui avait acquis quarante-trois jours de congés payés lors de la prise de son congé parental, peut prétendre, à la suite de la rupture du contrat de travail, à une indemnité compensatrice de congé payé de 2 722,04 euros brut.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 8 mars 2022, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Chambéry ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

Arrêt rendu en formation plénière de chambre.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : M. Flores - Avocat général : Mme Berriat (premier avocat général) - Avocat(s) : Me Haas ; SCP Boullez -

Textes visés :

Articles L. 1225-55 et L. 3141-1 du code du travail ; directive 2010/18/UE du Conseil du 8 mars 2010 portant application de l'accord-cadre révisé sur le congé parental, clause 5, point 2.

Rapprochement(s) :

Sur l'obligation d'assurer au salarié l'exercice effectif de son droit à congé, cf. : CJUE, arrêt du 16 juillet 2009, Gomez-Limon Sanchez-Camacho, C-537/07, point 39 ; CJUE, arrêt du 22 octobre 2009, Meerts, C-116/08, points 37-38-39 ; CJUE, arrêt du 22 avril 2010, Land Tirol, C-486/08, points 50 et s. ; Soc., 21 septembre 2017, pourvoi n° 16-18.898, Bull. 2017, V, n° 159 (rejet), et l'arrêt cité. Sur l'obligation de maintenir le droit à congé, en sens contraire : Soc., 28 janvier 2004, pourvoi n° 01-46.314, Bull. 2004, V, n° 32 (cassation partielle sans renvoi).

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