Numéro 11 - Novembre 2023

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

DOUANES

Crim., 29 novembre 2023, n° 22-85.867, (B), FRH

Cassation partielle

Agent de la douane judiciaire – Compétence – Compétence matérielle – Infractions visées par l'article 28-1 du code de procédure pénale – Cas – Délit de soustraction aux mesures de gel des avoirs en matière de lutte contre le terrorisme

Dès lors que les modalités de constatation, de poursuite et de répression du délit de soustraction aux mesures de gel des avoirs dans le cadre de la lutte contre le terrorisme sont prévues par le code des douanes, cette infraction constitue une infraction prévue par le code des douanes au sens du 1° du I de l'article 28-1 du code de procédure pénale.

MM. [F] [Z] et [P] [T] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 25 août 2022, qui, pour soustraction aux mesures de gel des avoirs dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, a condamné, le premier, à trois mois d'emprisonnement avec sursis probatoire, une amende douanière et une confiscation, le second, à deux mois d'emprisonnement avec sursis, une amende douanière et une confiscation.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. MM. [F] [Z] et [P] [T] étaient respectivement président et secrétaire de deux associations dissoutes en mars 2019 car considérées comme vecteurs de diffusion d'une idéologie appelant à la haine, à la discrimination et faisant l'apologie du terrorisme.

3. En application de l'article L. 562-2 du code monétaire et financier, quatre arrêtés pris conjointement par les ministres des finances et de l'intérieur ont prononcé le gel de leurs avoirs bancaires pour des périodes de six mois entre le 2 octobre 2018 et le 18 avril 2021.

4. Par jugement du 6 septembre 2021, le tribunal correctionnel les a condamnés pour soustraction aux mesures de gel des avoirs dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, M. [Z], à la peine de deux mois d'emprisonnement, une amende douanière et une confiscation et, M. [T], à la peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis, une amende douanière et une confiscation.

5. Les intéressés ainsi que le ministère public et l'administration des douanes ont relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens, le cinquième moyen, pris en ses première et deuxième branches, le sixième moyen, pris en ses première et deuxième branches, et le septième moyen

6. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté le moyen de nullité soulevé par M. [T], tiré de l'incompétence des agents des douanes pour effectuer l'enquête préliminaire dont il a fait l'objet, alors « que, selon l'article 28-1 du code de procédure pénale, les agents des douanes peuvent être habilités à effectuer des enquêtes préliminaires concernant une liste limitative d'infractions, comprenant la recherche des auteurs des délits douaniers et des infractions connexes, sur réquisition du procureur de la République ; que M. [T] a invoqué la nullité des actes réalisés par les agents des douanes, en enquête préliminaire, en soutenant qu'ils ne pouvaient enquêter sur le délit de soustraction aux mesures de gels des avoirs incriminées par l'article L. 574-3 du code monétaire et financier non visé par l'article 28-1 du code de procédure pénale et en l'absence de réquisition du procureur de la République à cette fin ; que pour rejeter ce moyen, la cour d'appel a considéré qu'en renvoyant à l'article 459 du code des douanes, le législateur avait donné compétence aux agents des douanes pour réaliser les enquêtes concernant ce délit, qu'il s'agissait d'un délit connexe à une infraction douanière permettant l'extension de compétence et que le soit-transmis adressé au magistrat délégué au service judiciaire des douanes avait valablement saisi les agents des douanes pour enquêter ; que dès lors que le délit de soustraction aux mesures de gel des avoirs n'est pas un délit incriminé par le code des douanes, qu'il n'était en l'espèce pas connexe à une infraction au code des douanes dont les agents des douanes auraient été régulièrement saisis, et que l'article 28-1 du code de procédure n'a pas institué de délégation du pouvoir d'enquête par le procureur de la République au magistrat chargé de superviser l'enquête des agents des douanes habilités, la cour d'appel a violé les articles L. 574-3 du code monétaire et financier, les articles 453 et 459 du code des douanes et l'article 28-1 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

8. Pour écarter le moyen de nullité, selon lequel les agents des douanes habilités n'étaient pas compétents pour enquêter sur les faits de soustraction aux mesures de gel des avoirs sur le fondement de l'article 28-1 du code de procédure pénale, l'arrêt attaqué retient que ce texte prévoit que ces agents peuvent effectuer des enquêtes judiciaires sous le contrôle du procureur de la République s'agissant des infractions douanières, mais également s'agissant des infractions connexes aux infractions douanières.

9. Les juges ajoutent que l'article L. 574-3 du code monétaire et financier, qui incrimine la soustraction aux mesures de gel des avoirs, prévoit expressément que les modalités de constatation, de poursuite et de répression de cette infraction sont régies par le code des douanes.

10. Ils en déduisent qu'il résulte de ce renvoi de l'article L. 574-3 aux textes du code des douanes que les agents des douanes habilités ont bien compétence pour effectuer des enquêtes judiciaires sur cette infraction en application de l'article 28-1 du code de procédure pénale.

11. Par ailleurs, ils relèvent que, dès lors qu'il ressort des pièces de procédure que le service des douanes judiciaires a été saisi par un soit-transmis adressé au magistrat délégué aux missions judiciaires de la douane et de l'administration fiscale, détaillant les réquisitions du procureur de la République, il doit en être conclu que ce service a bien agi sur réquisition de ce magistrat.

12. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen.

13. En effet, en premier lieu, dès lors que les modalités de constatation, de poursuite et de répression du délit de soustraction aux mesures de gel des avoirs dans le cadre de la lutte contre le terrorisme sont prévues par le code des douanes, cette infraction constitue une infraction prévue par le code des douanes au sens du 1° du I de l'article 28-1 du code de procédure pénale.

14. En second lieu, il résulte de ce même article et de l'article R. 15-33-12 du même code que le procureur de la République peut délivrer des réquisitions au magistrat délégué aux missions judiciaires de la douane, à charge pour ce dernier de désigner, aux fins de leur exécution, le ou les agents des douanes habilités.

15. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

16. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré MM. [Z] et [T] coupables de soustraction aux obligations résultant d'une décision de gel de leurs avoirs, alors :

« 1°/ que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article L. 574-3 du code monétaire et financier réprime le fait, pour les dirigeants ou les préposés des organismes financiers et personnes mentionnés à l'article L. 562-4 et, pour les personnes faisant l'objet d'une mesure de gel ou d'interdiction prise en application du chapitre II du titre VI du livre V, de se soustraire aux obligations en résultant ou de faire obstacle à sa mise en œuvre ; qu'avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 6 novembre 2020, les mesures de gels ordonnées par le ministre de l'économie sur le fondement de l'article L. 562-2 du code monétaire et financier ne s'appliquaient pas aux prestations de services fournies par des sociétés ou autres entités établies à l'étranger ; que dès lors, en retenant la culpabilité des prévenus pour avoir fait fonctionner des comptes ouverts pendant les différentes périodes de gel de leur avoirs par différents arrêtés pris antérieurement à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, la cour d'appel a violé les articles L. 563-4, L. 574-3 du code de procédure pénale et 111-4 du code de procédure pénale et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

2°/ qu'en retenant à l'encontre des prévenus une soustraction à leurs obligations résultant des arrêtés de gels de leurs avoirs, lorsque les articles L. 561-1 et suivants du code monétaire et financier ne leur imposent aucune obligation particulière et que les arrêtés pris en application de l'article L. 562-2 du code monétaire et financier se contentaient de geler leurs avoirs, sans indiquer quelles obligations s'imposaient à eux, le courrier d'accompagnement se contentant de rappeler la possibilité de demander au service du trésor une partie des fonds bloqués, ce qui ne constitue pas une obligation mais un droit, la cour d'appel a encore violé les articles L. 574-3 du code de procédure pénale et 111-4 du code de procédure pénale et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

3°/ que l'article L. 574-3 du code monétaire et financier réprimant l'obstacle à la mise en œuvre du gel des avoirs, en constatant seulement que les prévenus avaient ouverts des comptes allemands et les avaient alimentés pendant les périodes de dégel, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'obstacle à la mise en œuvre des mesures de gel, par le seul fait pour les prévenus d'avoir fait fonctionner ces comptes, même majoritairement pendant les périodes de gel, sans constater aucune dissimulation ou manœuvre, et a ainsi privé sa décision de base légale, au regard des articles L. 574-3 du code de procédure pénale et 111-4 du code de procédure pénale et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

4°/ que le délit suppose la volonté de faire obstacle à la mise en œuvre du gel ; qu'il s'en déduit que cette volonté doit être caractérisée au moment de l'obstacle mis à la mise en œuvre de la mesure de gel ; que dès lors, en considérant que les prévenus avaient eu l'intention de se soustraire aux obligations résultant du gel de leurs avoirs, en ouvrant des comptes en Allemagne, pendant les périodes de dégel dans la perspective d'une éventuelle reconduction du gel de leurs avoirs, la cour d'appel n'a pas caractérisé la volonté de faire obstacle à la mise en œuvre du gel au moment des faits, faute de constater des manœuvres particulières pendant les périodes de gel, privant sa décision de base légale au regard des articles L. 574-3 du code de procédure pénale et 111-4 du code de procédure pénale et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. »

Réponse de la Cour

17. Pour déclarer les prévenus coupables de soustraction aux mesures de gel des avoirs dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, l'arrêt attaqué énonce que l'article L. 574-3 du code monétaire et financier punit le fait, pour les personnes mentionnées à l'article L. 562-4 du même code, leurs dirigeants ou leurs préposés et pour les personnes faisant l'objet d'une mesure de gel ou d'interdiction prise en application du chapitre II du titre VI du livre V de ce code, de se soustraire aux obligations en résultant ou de faire obstacle à sa mise en œuvre.

18. Les juges relèvent également que l'article L. 562-2, 1°, du code monétaire et financier dispose que le ministre chargé de l'économie et le ministre chargé de l'intérieur peuvent décider, conjointement, pour une durée de six mois, renouvelable, le gel des fonds et ressources économiques qui appartiennent à, sont possédés, détenus ou contrôlés par des personnes physiques ou morales, ou toute autre entité qui commettent, tentent de commettre, facilitent ou financent des actes de terrorisme, y incitent ou y participent.

19. Ils relèvent encore que l'article L. 562-4, 1°, du code monétaire et financier, dans sa version applicable jusqu'au 6 novembre 2020, dispose que toute personne mentionnée à l'article L. 561-2 qui détient ou reçoit des fonds ou des ressources économiques pour le compte d'un client est tenue d'appliquer sans délai les mesures de gel et les interdictions de mise à disposition ou d'utilisation prévues au chapitre II du titre VI du livre V dudit code et d'en informer immédiatement le ministre chargé de l'économie.

20. Ils ajoutent que l'infraction prévue par l'article L. 574-3 consiste à ne pas avoir respecté la mesure administrative de gel des avoirs financiers et économiques détenus par les prévenus sur leurs comptes.

21. Ils retiennent qu'en l'espèce, quatre arrêtés ministériels ont privé les prévenus de la libre disposition des avoirs détenus sur leurs comptes pour une durée de six mois chacun, entre le 2 octobre 2018 et le 18 avril 2021, et que ces arrêtés leur ont été notifiés avec la mention des voies de recours et la possibilité d'obtenir une autorisation administrative d'utiliser une partie des avoirs.

22. Ils retiennent également que les dispositions de l'article L. 562-4 du code monétaire et financier, qui font obligation aux établissements financiers d'appliquer les interdictions édictées par l'autorité administrative, n'étaient pas opposables aux établissements financiers étrangers avant le 6 novembre 2020.

23. Ils constatent ensuite qu'il résulte de l'enquête que les deux prévenus ont chacun ouvert un compte auprès de la « néo-banque » allemande [1], les 7 et 10 avril 2019, alors que la mesure de gel résultant du premier arrêté avait pris fin le 2 avril 2019, et qu'ils ont donc, sitôt retrouvée la disponibilité de leurs avoirs, mis en place le moyen de détourner d'éventuelles nouvelles mesures du même type.

24. Ils constatent enfin qu'il ressort de l'examen des comptes ouverts au sein de la banque [1] que ceux-ci ont davantage été actifs en période de gel que de dégel, montrant ainsi quel était le but recherché lors de l'ouverture des comptes.

25. Ils en concluent que les prévenus, qui avaient bien connaissance de la possibilité qui leur était ouverte par les dispositions de l'article L. 562-11 du code monétaire et financier de solliciter auprès de la direction du Trésor une autorisation de déblocage de leurs fonds et en ont usé, se sont intentionnellement soustraits aux mesures de gel de leurs avoirs et ont détourné la mesure administrative.

26. En statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision et a fait l'exacte application des textes visés au moyen pour les motifs qui suivent.

27. En premier lieu, selon le 5° de l'article L. 562-1 du code monétaire et financier, le gel des fonds est défini comme toute action tendant à empêcher un changement de leur volume, montant, localisation, propriété, possession, nature, destination ou toute autre modification qui pourrait permettre leur utilisation, notamment la gestion de portefeuille. Il résulte donc de l'article L. 574-3 du même code une obligation pour les personnes faisant l'objet d'une mesure de gel de s'abstenir de tout acte visant à se soustraire ou à faire obstacle à une telle action.

28. En deuxième lieu, le seul fait que la cour d'appel ait retenu que les prévenus avaient ouvert des comptes dans une banque étrangère, juste après la fin de la première période de gel, afin de pouvoir disposer ensuite de leurs avoirs pendant la période de gel suivante, caractérise leur soustraction à la mesure de gel, la loi n'exigeant en outre aucune dissimulation ou manœuvre.

29. En dernier lieu, il ne saurait être déduit de ce que les établissements financiers étrangers n'étaient pas soumis à l'obligation d'appliquer les mesures de gel avant le 6 novembre 2020 que les personnes dont les avoirs avaient alors été gelés pouvaient, sans se rendre coupable du délit prévu par l'article L. 574-3, contourner ces mesures de gel en utilisant un compte bancaire au sein d'un tel établissement.

30. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Sur le cinquième moyen, pris en sa cinquième branche, et le sixième moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé des moyens

31. Le cinquième moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [Z] au titre de l'action douanière, à la confiscation de la somme de 12 185,61 euros et au paiement d'une amende du même montant, outre la peine d'emprisonnement de trois mois assortis du sursis probatoire, alors :

« 5°/ qu'en fixant l'amende sans prendre en considération la possibilité de prononcer une amende inférieure à la somme minimum sur laquelle a porté l'infraction, par application de l'article 369 du code des douanes auquel elle ne se réfère pas, quand elle admettait que les dépenses en cause étaient essentiellement des dépenses de vie courante et en refusant de tenir compte du fait que les arrêtés de gel se fondaient sur un risque d'aide au terrorisme qui n'existait plus au moment où ils avaient été pris, comme le soutenait la défense, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 574-3 du code monétaire et financier, 459 et 369 du code des douanes, des articles 485 et 593 du code de procédure pénale. »

32. Le sixième moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [T] au paiement d'une amende douanière de 3 228,35 euros et a ordonné la confiscation d'une somme du même montant correspondant au produit de l'infraction, au titre de l'action douanière, alors :

« 3°/ qu'en fixant l'amende douanière à la somme de 3 228,35 €, sans prendre en considération la possibilité de prononcer une amende inférieure à la somme minimum du montant du, par application de l'article 369 du code des douanes auquel elle ne se réfère pas, quand elle admettait que les dépenses en cause étaient essentiellement des dépenses de vie courante et en refusant de tenir compte du fait que les arrêtés de gel se fondaient sur un risque d'aide au terrorisme qui n'existait plus, comme le soutenaient les prévenus, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 574-3 du code monétaire et financier, 459 et 369 du code des douanes, des articles 485 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

33. Les griefs sont réunis.

34. Pour condamner M. [Z] à une confiscation de la somme de 12 185,61 euros et à une amende douanière d'un même montant et M. [T] à une confiscation de la somme de 3 228,35 euros et à une amende d'un même montant, la cour d'appel énonce que ces sanctions sont justifiées au regard des montants soustraits à l'obligation de gel des avoirs et de la situation familiale et financière des prévenus.

35. En statuant ainsi, après avoir détaillé la situation familiale et professionnelle des prévenus lorsqu'elle a motivé les sanctions pénales prononcées à leur encontre, la cour d'appel a justifié sa décision.

36. Les griefs doivent être écartés.

Mais sur le cinquième moyen, pris en ses autres branches

Enoncé du moyen

37. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [Z] au titre de l'action douanière, à la confiscation de la somme de 12 185,61 euros et au paiement d'une amende du même montant, outre la peine d'emprisonnement de trois mois assortis du sursis probatoire, alors :

« 3°/ que, par ailleurs et en tout état de cause, en fixant l'amende à la somme de 12 185,61 euros, qui correspondrait au montant du produit de l'infraction, et en ordonnant la confiscation d'une somme du même montant, quand par ailleurs la cour d'appel avait constaté que le prévenu avait utilisé pendant les périodes de gel des avoirs, tiré de son compte auprès de la banque allemande la somme de 6 357,20 euros (arrêt, p. 9), la cour d'appel se prononce par des motifs contradictoires, équivalents au défaut de motifs, en violation de l'article 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 593 du code de procédure pénale :

38. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision.

L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.

39. Pour condamner M. [Z] à une confiscation d'un montant de 12 185,61 euros et à une amende douanière d'un même montant, l'arrêt attaqué relève que l'article 459 du code des douanes réprime l'infraction de soustraction à une mesure de gel des avoirs de la confiscation du produit du délit et d'une amende douanière égale au minimum au montant et au maximum au double de la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction.

40. Les juges ajoutent que la somme susmentionnée représente le produit de l'infraction.

41. En prononçant ainsi, alors qu'elle a constaté que le compte ouvert par M. [Z] à la banque avait été alimenté à hauteur de 9 641,54 euros uniquement pendant la période de dégel et que les débits intervenus pendant les périodes de gel s'élevaient à la somme de 6 357,20 euros, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires.

42. La cassation est, par conséquent, encourue de ce chef, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre grief.

Portée et conséquences de la cassation

43. La cassation sera limitée à la confiscation et à l'amende douanière prononcées à l'encontre de M. [Z].

Les autres dispositions seront donc maintenues.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi formé par M. [T] :

Le REJETTE ;

Sur le pourvoi formé par M. [Z] :

CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Douai, en date du 25 août 2022, mais en ses seules dispositions relatives à la confiscation et à l'amende douanière prononcées à l'encontre de M. [Z], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Douai, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Bonnal - Rapporteur : M. Gillis - Avocat général : M. Bougy - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Article 28-1 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

Sur le pouvoir d'enquête des agents de la douane judiciaire s'agissant d'une infraction non prévue par l'article 28-1 du code de procédure pénale : Crim., 28 juin 2017, pourvoi n° 16-83.372, Bull. crim. 2017, n° 181 (cassation). Sur la notion d'infraction douanière : Crim., 23 octobre 2019, pourvoi n° 18-85.636 (rejet).

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