Numéro 4 - Avril 2023

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

FICHIERS ET LIBERTES PUBLIQUES

Crim., 12 avril 2023, n° 22-85.944, (B), FRH

Rejet

Fichiers ou traitements informatiques – Fichier de lecture automatisée des plaques d'immatriculation – Consultation – Agents habilités – Visa sur les résultats des consultations – Effet

Le visa apposé sur les résultats de la consultation du système LAPI par un agent habilité implique nécessairement que cet agent a lui-même consulté le fichier pour en extraire les renseignements remis à l'auteur de la réquisition.

M. [N] [E] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 29 septembre 2022, qui, dans l'information suivie contre lui, des chefs d'importation de stupéfiants, infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.

Par ordonnance en date du 28 novembre 2022, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le 27 juillet 2018, M. [N] [E] a été mis en examen des chefs susvisés.

3. Le 28 janvier 2019, son avocat a déposé une requête en nullité aux fins de voir constater l'irrégularité de la consultation du système de lecture automatique des plaques d'immatriculation (LAPI), accomplie par les agents du centre opérationnel de la douane terrestre (CODT) de [Localité 1], en l'absence de procès-verbal permettant d'identifier l'agent habilité à effectuer cette consultation.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en annulation présentée par M. [E], et dit la procédure régulière jusqu'à la cote D 2194, alors :

« 1°/ d'une part qu'il résulte des articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de la sécurité intérieure, ainsi que de l'article 5 de l'arrêté du 18 mai 2009 portant création d'un traitement automatisé de contrôle des données signalétiques des véhicules, que « seuls les agents des services de police et de gendarmerie nationales ainsi que des douanes, individuellement désignés et dûment habilités par leur chef de service, peuvent accéder au traitement automatisé de contrôle des données signalétiques des véhicules collectées par les dispositifs fixes ou mobiles mis en oeuvre en application de ces textes » ; qu'au cas d'espèce, M. [E] faisait valoir que la procédure ne permettait pas de s'assurer de ce que le fichier LAPI avait été consulté par un agent dûment habilité et individuellement désigné à cette fin ; qu'en affirmant, pour écarter ce moyen et dire régulière la consultation du fichier LAPI effectuée sur réquisition des enquêteurs, que « la réponse à la réquisition du 15 juin 2018 a été communiquée à la cour par le procureur général et le listing transmis figure en cotes D. 2090 à D. 2181 » et qu' « il en résulte que l'accès à ce fichier a été le fait de [G] [B], contrôleur principal des douanes affectée au centre opérationnel des douanes terrestres de [Localité 1] », quand une telle déduction était impossible en l'état des pièces de la procédure, la Chambre de l'instruction, qui a dénaturé la réponse à la réquisition du 15 juin 2018 et le listing coté D. 2090 à D. 2181, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de la sécurité intérieure, ainsi que de l'article 5 de l'arrêté du 18 mai 2009 portant création d'un traitement automatisé de contrôle des données signalétiques des véhicules, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

2°/ d'autre part qu'il résulte des articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de la sécurité intérieure, ainsi que de l'article 5 de l'arrêté du 18 mai 2009 portant création d'un traitement automatisé de contrôle des données signalétiques des véhicules, que « seuls les agents des services de police et de gendarmerie nationales ainsi que des douanes, individuellement désignés et dûment habilités par leur chef de service, peuvent accéder au traitement automatisé de contrôle des données signalétiques des véhicules collectées par les dispositifs fixes ou mobiles mis en oeuvre en application de ces textes » qu'au cas d'espèce, M. [E] faisait valoir que la procédure ne permettait pas de s'assurer de ce que le fichier LAPI avait été consulté par un agent dûment habilité et individuellement désigné à cette fin qu'en affirmant, pour écarter ce moyen et dire régulière la consultation du fichier LAPI effectuée sur réquisition des enquêteurs, qu' « un officier de police judiciaire qui sollicite le CODT n'a pas besoin d'être habilité dès lors qu'il n'a pas lui même eu accès au système LAPI et se contente de recueillir les informations de la part des agents de ce service. Il suffit que l'identité de l'agent habilité à accéder aux données, duquel il détenait les renseignements sollicités, soit connue » pour en déduire que la signature de [G] [B], habilitée à consulter le fichier LAPI par décision du 15 janvier 2018, sur le seul retour de réquisition suffisait à établir que la consultation de ce fichier était régulière, quand il lui incombait encore de démontrer que Madame [B] était bien l'agent ayant consulté personnellement les données du fichier LAPI, la Chambre de l'instruction n'a pas suffisamment justifié sa décision au regard des articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de la sécurité intérieure, ainsi que de l'article 5 de l'arrêté du 18 mai 2009 portant création d'un traitement automatisé de contrôle des données signalétiques des véhicules 591 et 593 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

5. Pour écarter le moyen tiré de l'absence de précision sur l'identité et l'habilitation de l'agent ayant consulté le système LAPI, l'arrêt attaqué retient que le procureur général a versé aux débats, d'une part, la décision d'habilitation de Mme [G] [B], en date du 15 janvier 2018, d'autre part, la réponse à la réquisition judiciaire du 15 juin 2018, portant la mention manuscrite « voir les résultats dans tableaux joints » suivie de la signature de Mme [B], à cette même date.

6. Les juges en concluent que l'accès au système LAPI a été le fait de Mme [B], contrôleur principal des douanes, affectée au CODT de [Localité 1], régulièrement habilitée à le consulter par décision de la cheffe dudit centre, en date du 15 janvier 2018, au sens des articles L. 232-3 et L. 234-2 du code de la sécurité intérieure.

7. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.

8. En effet, le visa apposé sur les résultats de la consultation du système LAPI par un agent habilité implique nécessairement que cet agent a lui-même consulté le fichier pour en extraire les renseignements remis à l'auteur de la réquisition.

9. Ainsi, le moyen doit être écarté.

10. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Bonnal - Rapporteur : M. Dary - Avocat général : M. Valat - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer -

Textes visés :

Articles 591 et 593 du code de procédure pénale ; articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de la sécurité intérieure ; article 5 de l'arrêté du 18 mai 2009 portant création d'un traitement automatisé de contrôle des données signalétiques des véhicules.

Rapprochement(s) :

Crim., 19 février 2019, pourvoi n° 18-84.671, Bull. crim. 2019, n° 38 (cassation partielle et désignation de juridiction).

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