N°6 - Novembre 2021 - Janvier 2022 (Concurrence déloyale ou illicite)

Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

Une sélection commentée des décisions rendues par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation : banque, concurrence, concurrence déloyale, entreprises en difficulté, impôts et taxes, propriété industrielle, référé, société commerciale, transports maritimes...

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Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

N°6 - Novembre 2021 - Janvier 2022 (Concurrence déloyale ou illicite)

Preuve - Principe de loyauté dans l'administration de la preuve - Atteinte - Applications diverses - Stratagème - Attestations émanant de « clients mystère » - Irrecevabilité

Le recours à des " clients mystère " pour établir des faits de concurrence déloyale est-il conforme au principe de loyauté dans l'administration de la preuve ?

Com. 10 nov. 2021, pourvoi n° 20-14.669

Com. 10 nov. 2021, pourvoi n° 20-14.670

Ces deux arrêts se prononcent sur la recevabilité des témoignages de « clients mystère » pour établir des faits de concurrence déloyale.

En l'espèce, un syndicat professionnel de défense de la profession des opticiens-lunetiers avait organisé, auprès de différents magasins d'optique, la visite de « clients mystère » pour dénoncer les pratiques consistant à falsifier les factures en augmentant le prix des verres et en diminuant corrélativement celui des montures, afin que le montant pris en charge par la mutuelle soit plus important. Les personnes recrutées et rémunérées par une société spécialisée dans ce type de prestation devaient se faire passer pour des clients et suivre un scénario préétabli auprès des opticiens visités, pour vérifier le recours à cette pratique frauduleuse.

Deux cours d’appel saisies d'actions en concurrence déloyale formées par le syndicat professionnel contre certains opticiens ont déclaré les attestations de ces « clients mystère » irrecevables, en application de l'article 9 du code de procédure civile et du principe de loyauté dans l'administration de la preuve.

Les deux arrêts commentés approuvent ces décisions selon lesquelles le recours à un stratagème consistant à faire appel aux services de tiers rémunérés pour une mise en scène de nature à faire douter de la neutralité de leur comportement à l'égard du défendeur présente un caractère déloyal et rend irrecevables les attestations et autres documents ainsi obtenus.

Ces arrêts sont en cohérence avec les précédents arrêts de la Cour de cassation ayant fait application du principe de loyauté dans l'administration de la preuve en matière de concurrence déloyale (notamment 2e Civ., 26 sept. 2013, n° 12-23.387, qui avait confirmé l'invalidité d'une ordonnance sur requête autorisant un huissier, accompagné de faux clients, à procéder à des constatations auprès de commerçants en taisant sa mission et sa qualité, et 1re Civ., 25 janv. 2017, n° 15-25.210, Bull. N° 20 ; 2e Civ., 5 déc. 2019, n° 18-24.511 et 2e Civ., 5 déc. 2019, n° 18-20.709, qui énoncent que le droit à un procès équitable commande que la personne qui assiste l'huissier instrumentaire lors de l'établissement d'un procès-verbal de constat soit indépendante de la partie requérante).

Répondant à la difficulté de faire la preuve de pratiques commerciales illicites ou déloyales, la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, qui était invoquée par le demandeur au pourvoi, autorise désormais le recours à la technique des « visites-mystère ». Toutefois, seuls les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, comme ceux des services d'instruction de l'Autorité de la concurrence, sont habilités à en faire usage, dans le cadre des enquêtes qu’ils mettent en œuvre en conformité avec les garanties légales qui président à celles-ci.

Les pratiques telles que celles dénoncées par le syndicat professionnel en l'espèce, si elles sont constitutives d'une pratique commerciale déloyale et trompeuse, peuvent être poursuivies et sanctionnées en application des articles L. 121-1 et suivants du code de la consommation. Une procédure menée en application de ces textes pourrait, le cas échéant, faire la preuve d’actes de concurrence déloyale, la jurisprudence de la chambre commerciale admettant de longue date que la mise en œuvre de pratiques illicites par un opérateur économique constitue un acte de concurrence déloyale.

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