Le créancier qui n’a pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir l’anéantissement d’un contrat en invoquant la force majeure
1re Civ., 25 novembre 2020, pourvoi n°19-21.060
Il n’est pas rare qu’un événement imprévu empêche une partie à un contrat de profiter de la prestation à laquelle elle avait droit. Tel est le cas d’une personne qui a réservé et payé un spectacle ou un séjour et ne peut en profiter du fait d’un problème de transport ou d’une maladie.
La Cour de cassation a, en premier lieu, réservé le bénéfice de la force majeure au seul contractant empêché d’exécuter son obligation, même si un arrêt isolé (1re Civ., 10 février 1998, pourvoi n° 96- 13.316, Bull. 1998, I, n° 53) rendu en matière d'enseignement privé à distance avait admis que le contrat soit résilié par l'élève ou son représentant légal si, par suite d'une force majeure, il était empêché de suivre l'enseignement correspondant et si cette exception a été reprise à l'article L. 444-8 du code de l'éducation.
L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 a, ensuite, défini la force majeure à l’article 1218 du code civil, selon lequel il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur. Ce texte ne donne donc pas au créancier, simplement empêché de profiter de la prestation, la possibilité d’invoquer la force majeure pour obtenir l’anéantissement du contrat.
La Cour de cassation, faisant application pour la première fois de l’article 1218 du code civil dans une affaire dans laquelle deux personnes avaient souscrit et payé un hébergement auprès d’un établissement de cure thermale mais avaient dû interrompre leur séjour de manière anticipée en raison de l’hospitalisation de l’une d’entre elles, retient donc qu’elles ne pouvaient invoquer la force majeure pour obtenir le remboursement des jours d’hébergement dont elles n’avaient pu profiter et casse donc le jugement ayant prononcé la résiliation du contrat.
Reste au créancier la possibilité de souscrire une assurance-annulation pour se prémunir contre ce risque.