N°1 - Septembre/octobre 2019 (Santé et sécurité au travail)

Lettre de la chambre sociale

Soc., 11 septembre 2019, pourvoi n° 17-18.311, FP-P+B

Soc., 11 septembre 2019, pourvoi n° 17-18.311, FP-P+B

Le salarié qui justifie d'une exposition à l'amiante générant un risque élevé de développer une pathologie grave peut être admis à agir contre son employeur, sur le fondement des règles de droit commun régissant l'obligation de sécurité de ce dernier, quand bien même il n'aurait pas travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 modifiée.

Méconnaît ainsi la portée des articles L. 4121-1et L. 4121-2 du code du travail, le premier dans sa rédaction applicable au litige , la cour d’appel qui rejette les demandes des salariés de la Sncf mobilités en réparation de leur préjudice d’anxiété aux motifs que la société n’entrait pas dans les prévisions de l’article 41 de la loi précitée.

 

Commentaire :

Par cet arrêt, la chambre sociale de la Cour de cassation reprend à l’identique la solution retenue par l’Assemblée plénière le 5 avril dernier (Ass. plén., 5 avril 2019, pourvoi n° 18-17.442, en cours de publication et sa note explicative). En effet, celle-ci a reconnu, en raison du développement important du contentieux concernant des salariés ne relevant pas des dispositions de l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, la possibilité pour un salarié justifiant d’une exposition à l’amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, d’agir contre son employeur, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi précitée.

Il s’agit ainsi d’un revirement par rapport aux dernières décisions rendues par la chambre sociale qui refusait la réparation du préjudice d’anxiété aux salariés exposés à l’amiante ne remplissant pas les conditions prévues par l’article 41 de la loi précitée ou dont l’employeur n’était pas inscrit sur la liste fixée par arrêté ministériel, y compris sur le fondement d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité (Soc., 3 mars 2015, pourvoi n° 13-26.175, Bull. 2015, V, n° 41 ; Soc., 26 avril 2017, pourvoi n° 15-19.037, Bull. 2017, V, n° 71 ; Soc., 21 septembre 2017, pourvoi n° 16-15.130, Bull. 2017, V, n° 161).

Soc., 11 septembre 2019, pourvoi n° 17-26.879, FP-P+B

Soc., 11 septembre 2019, pourvoi n° 17-26.879, FP-P+B

Le régime de cessation anticipée d'activité pour les salariés marins ayant exercé des fonctions à la machine à bord des navires comportant des équipements contenant de l'amiante, fondé sur la date de construction des navires sur lesquels les marins ont exercé et qui permet la preuve contraire par l'employeur de l'absence de tels équipements, n'est pas assimilable à celui prévu par l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 pour les salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget.

Toutefois, en application des règles de droit commun régissant l'obligation de sécurité de l'employeur, le salarié qui justifie d'une exposition à l'amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n'aurait pas travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 modifiée.

 

Commentaire :

Par cet arrêt, la chambre sociale de la Cour de cassation exclut l’assimilation du régime de cessation anticipée d'activité pour les salariés marins ayant exercé des fonctions à la machine à bord de navires comportant des équipements contenant de l'amiante, prévu par l’article 65 du décret du 17 juin 1938 dans sa rédaction issue du décret n° 2002-1272 du 18 octobre 2002, à celui découlant de  l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 pour les salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante.

En effet, elle n’a pas souhaité instaurer, pour cette catégorie de salariés, un régime spécifique  reposant sur une présomption simple d’exposition à l’amiante résultant de la date de construction des navires sur lesquels ils étaient affectés. Ces salariés relèvent ainsi du régime de droit commun résultant de l’arrêt rendu par l’Assemblée plénière le 5 avril dernier (Ass. plén., 5 avril 2019, pourvoi n° 18-17.442, en cours de publication et sa note explicative).

Soc., 11 septembre 2019, pourvoi n° 17-24.879, FP-P+B

Soc., 11 septembre 2019, pourvoi n° 17-24.879, FP-P+B

En application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, le salarié qui justifie d’une exposition à une substance nocive ou toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave et d’un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’une telle exposition, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité.

 

Commentaire :

Par cet arrêt, la chambre sociale de la Cour de cassation admet le principe de la réparation d’un préjudice d’anxiété pour un salarié non exposé à l’amiante mais à une autre substance nocive sous une double condition. Il doit démontrer d’une part, une exposition à une substance nocive ou toxique entraînant un risque élevé de développer une pathologie grave et d’autre part, un préjudice d’anxiété personnellement subi du fait de cette exposition.

Cette décision s’inscrit ainsi dans la continuité de l’arrêt rendu par l’Assemblée plénière le 5 avril dernier (Ass. plén., 5 avril 2019, pourvoi n° 18-17.442, en cours de publication et sa note explicative).

Soc., 11 septembre 2019, pourvoi n° 18-50.030, FP-P+B

Soc., 11 septembre 2019, pourvoi n° 18-50.030, FP-P+B

Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits permettant de l'exercer, et un salarié bénéficiaire de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) a connaissance du risque à l'origine de son anxiété à compter de l'arrêté ministériel ayant inscrit l’établissement sur la liste permettant la mise en œuvre de ce régime légal spécifique.

En conséquence, viole l'article 2262 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, l'article 26, II, de cette même loi et l'article 2224 du code civil l'arrêt qui, pour déclarer recevables les actions des salariés en réparation de leur préjudice d’anxiété, retient que le délai pour agir court, non à compter de l’arrêté ministériel ayant inscrit l’établissement sur la liste permettant la mise en œuvre du  régime légal de l'ACAATA, mais de l’arrêté modifiant la période d’inscription de cet établissement.

 

Commentaire :

Par cet arrêt, la chambre sociale de la Cour de cassation apporte une précision sur le point de départ du délai de prescription de l’action en réparation du préjudice d’anxiété subi par un salarié exposé à l’amiante, en s’inscrivant dans la continuité de sa jurisprudence aux termes de laquelle le préjudice d’anxiété naît à la date à laquelle le salarié a connaissance du risque à l’origine de son anxiété, c’est-à-dire à la date où il a connaissance de l’arrêté ministériel d’inscription de l’activité de l’employeur sur la liste des établissements permettant la mise en œuvre du régime légal (Soc., 2 juillet 2014, pourvoi n° 12-29.788, Bull. 2014, V, n° 160 ; Soc., 19 novembre 2014, pourvoi n° 13-19.264, Bull. 2014, V, n° 266).

Elle considère en l’espèce que, dans l’hypothèse où un établissement a été inscrit par arrêté sur la liste permettant la mise en œuvre du régime légal de l’ACAATA et pour lequel la période d’inscription a été modifiée par un arrêté postérieur, le délai pour agir en réparation court à compter de l’arrêté d’inscription et non à compter de l’arrêté modifiant la période d’inscription. Il convient de préciser toutefois que dans cette affaire, tous les salariés concernés étaient déjà engagés lors de la parution de l’arrêté d’inscription.

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