27 septembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-16.844

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2017:CO01215

Texte de la décision

COMM.

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 septembre 2017




Rejet


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 1215 F-D

Pourvoi n° Q 16-16.844




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Parfip France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...]                       ,

contre l'arrêt rendu le 25 septembre 2014 et l'arrêt rectificatif rendu le 28 mai 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 5), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Stahl Cranesystems, société par actions simplifiée, dont le siège est [...]                                     ,

2°/ à M. X... de Carrière, domicilié [...]                                                                                    , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société anonyme Safetic, anciennement dénommée Easydentic,

3°/ à la société Index Systems, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...]                                       ,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 4 juillet 2017, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Parfip France, de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la société Index Systems, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Stahl Cranesystems, l'avis de M. Y..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 25 septembre 2014 et 28 mai 2015) et les productions, que la société Stahl Cranesystems (la société Stahl) a conclu avec la société Easydentic, aux droits de laquelle est venue la société Safetic, cinq contrats successifs dits d'"abonnement de maintenance avec option de location" portant sur divers matériels ; qu'elle a en parallèle conclu des contrats successifs de partenariat avec la société Index Systems, aux termes desquels elle percevrait une commission pour les clients apportés ; que les contrats conclus avec la société Safetic ont été cédés à la société Parfip ; que la société Stahl a suspendu les prélèvements et assigné les sociétés Parfip et Index Systems en annulation de l'ensemble des contrats ; que la société Parfip a demandé le paiement des échéances ;

Attendu que la société Parfip fait grief à l'arrêt, tel que rectifié, de sa condamnation au paiement d'une certaine somme et du rejet de ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ qu'il appartient à celui qui invoque la nullité d'un contrat de prouver que les conditions de cette nullité sont réunies ; qu'en reprochant dès lors à la société Parfip, en présence d'un contrat prétendument ambigu sur ce point, de ne pas démontrer que la société Stahl aurait opté pour une location et non pour une remise du bien en pleine propriété, de sorte qu'il n'y aurait pas d'accord des parties sur l'objet même du contrat, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du code civil ;

2°/ que le juge ne peut pas méconnaître la loi des parties ; qu'en l'espèce, les contrats étaient expressément intitulés, aux conditions particulières, « contrats d'abonnement de maintenance et de location », qu'ils comportaient des « conditions générales du contrat de location » et qu'ils stipulaient en gras : « dans le cas où l'abonné opte pour la location du matériel [ce matériel est] désigné alors dans le tableau ci-après », tous les contrats comportant la désignation du matériel loué dans le tableau prévu à cette fin ; qu'il s'en évinçait clairement et précisément que la société Stahl avait opté pour la location du matériel et qu'il n'existait donc aucune ambiguïté sur l'objet du contrat, de sorte qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a dénaturé les contrats produits, en violation de l'article 1134 du code civil ;

3°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en jugeant que la société Parfip ne démontrait pas que la société Stahl aurait opté pour une location et qu'il existerait une ambiguïté des contrats sur ce point, sans examiner les procès-verbaux de réception d'installation de matériel par lesquels la société Stahl avait expressément « reconnu que la signature du procès-verbal entraîne la prise d'effet du contrat de location de matériel », les courriers adressés par la société Parfip à la société Stahl par lesquels la première indiquait intervenir dans le « financement du bien d'équipement » et les échéanciers envoyés par la société Parfip à la société Stahl faisant état des sommes dues à titre de « loyers », échéanciers qui avaient été initialement honorés sans réserve par la société Stahl, ces éléments permettant d'établir que la société Stahl s'était bien engagée en qualité de locataire envers la société Parfip, loueur financier, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que la restitution inclut la valeur de jouissance que la chose a procurée ; qu'en condamnant la société Parfip à restituer, du fait de l'annulation du contrat, la somme de 21 581,26 euros perçue par elle, sans retrancher à cette somme la valeur que la jouissance de la chose avait procurée à la société Stahl, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt constate que les conditions particulières des cinq contrats, aux termes desquelles "dans le cas où l'abonné est propriétaire du matériel, le montant de l'abonnement mensuel correspond à la maintenance du matériel et dans le cas où l'abonné opte pour la location de matériel, le montant de l'abonnement comprend la maintenance et la location du matériel", présentent à l'évidence une ambiguïté en ce que le prix de la maintenance seule est identique à celui de la maintenance avec location, de sorte que les prestations de fourniture de matériel ne sont pas clairement définies dans leur prix respectif ; qu'il en déduit que la société Easydentic, en proposant une option sur la fourniture et une prestation de maintenance, tout en fixant un seul prix, a créé une ambiguïté sur la chose et sur le prix ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, et dès lors que les documents émis unilatéralement par le loueur prétendu ne suffisent pas à caractériser un accord de volontés, la cour d'appel, qui n'a ni dénaturé les contrats ni inversé la charge de la preuve, a légalement justifié sa décision d'annuler l'ensemble des contrats pour défaut d'accord sur la chose et le prix ;

Et attendu, en second lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions de la société Parfip que celle-ci ait soutenu devant la cour d'appel qu'une indemnité lui était due au titre de la jouissance des biens par la société Stahl ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;

D'où il suit que le moyen, en partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Parfip France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Stahl Cranesystems et celle de 2 500 euros à la société Index Systems ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Parfip France

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné la société Parfip France à payer la somme de 21 581,26 € à la société Stahl Cranesystems et d'AVOIR rejeté les demandes de la société Parfip France fondées sur les contrats conclus avec la société Stahl Cranesystems,

AUX MOTIFS QUE la société Stahl soutient que les cinq contrats signés avec la société Easydentic pour la fourniture de matériels de biométrie et leur maintenance sont nuls, dans la mesure où, d'une part, la chose sur laquelle ils portent n'est pas déterminée et où, d'autre part, ils reposent sur une cause illicite ; que la société Parfip soutient qu'à l'occasion des cinq opérations réalisées entre la société Stahl et la société Safetic, il a été conclu deux contrats, d'une part un contrat de location, d'autre part un contrat de maintenance et qu'elle n'est pas partie au second ; que les cinq contrats sont intitulés « contrat d'abonnement de maintenance avec option de location de matériel » et comportent un article 4 intitulé « propriété du matériel » concernant la seule hypothèse où « l'abonné a opté pour une location » ; que les conditions particulières du contrat stipulent que « préalablement à la signature des présentes, le prestataire a proposé à l'abonné soit d'acheter soit de louer le matériel » ce qui suppose la démonstration d'une telle proposition antérieure à la signature des contrats et la désignation d'un matériel identifié avec son prix soit à l'achat, soit à la location afin de permettre une levée de l'option offerte ; que, si les cinq contrats souscrits ont donné lieu à un procès-verbal de réception du matériel et si la société Stahl ne conteste pas en avoir eu la jouissance, elle affirme qu'elle l'a reçu en pleine propriété et que la société Parfip est intervenue pour financer les prestations de maintenance ; que les conditions particulières des cinq contrats stipulent que « dans le cas où l'abonné est propriétaire du matériel, le montant de l'abonnement mensuel correspond à la maintenance du matériel et dans le cas où l'abonné opte pour la location du matériel le montant de l'abonnement comprend la maintenance et la location du matériel » ; que la société Parfip n'apporte pas la démonstration que la société Stahl ait opté pour une location ; que le seul paiement entre ses mains ne saurait en rapporter la preuve ; que les clauses précitées présentent à l'évidence une ambiguïté en ce que le prix de la maintenance seule est identique à celui de la maintenance avec location ; qu'ainsi il existe bien deux prestations, d'une part, la fourniture de matériel que ce soit à titre de location ou de cession en pleine propriété, d'une part, celle de la maintenance ; qu'ainsi ni l'une, ni l'autre ne sont clairement définies dans leur prix respectif ; que la société Parfip ne justifie pas de la valeur du matériel ; qu'en toute hypothèse s'agissant de matériels techniques, les prestations de maintenance sont essentielles et en leur absence il est évident que la société Stahl n'aurait pas conclu ; que dès lors la société Parfip ne peut affirmer, sans élément à l'appui, que le prix de la maintenance n'impacterait pas le loyer ; que d'ailleurs la fixation d'un seul montant que le client opte pour un achat ou pour une location démontre que le prix du matériel était résiduel par rapport au coût de la maintenance ce que la société Parfip, professionnel du financement et partenaire de la société Easydentic ne pouvait pas ignorer ; qu'il résulte de ces éléments que la société Easydentic en proposant une location ou une option d'achat de matériel, une prestation de maintenance, tout en fixant un seul prix, a créé une ambiguïté sur la chose et le prix ; que dans ces conditions peu importe que le matériel ait été fourni et réceptionné et que la société Stahl ait versé des redevances dès lors qu'il n'est pas démontré clairement quel est l'objet du prix payé ; qu'en conséquence, à défaut d'accord sur la chose et le prix, l'ensemble des contrats concernant la fourniture de matériels et la prestation de maintenance, qui forme une seule et même opération économique, sera annulé et le jugement infirmé,

ET QUE, sur les demandes de la société Parfip, il y a lieu de rejeter les demandes de la société Parfip au titre des échéances impayées ; que, les demandes de la société Stahl, la société Stahl estime avoir subi un préjudice de 40 000 € comprenant la somme de 21 581,26 € versés à la société Parfip ; que les contrats étant annulés il y a lieu de condamner la société Parfip à rembourser cette somme qu'elle a perçue ; qu'elle fait valoir que la différence correspond au désagrément subi depuis la signature des contrats et à l'immobilisation de la somme de 21 581,26 € ; qu'elle ne caractérise pas davantage son préjudice alors même qu'elle a eu à sa disposition des matériels et qu'elle n'a jamais allégué d'un défaut de maintenance ; qu'il n'y a pas lieu de lui accorder des dommages et intérêts au titre d'un désagrément qu'elle ne caractérise pas, ni de l'immobilisation des sommes versées,

1- ALORS QU'il appartient à celui qui invoque la nullité d'un contrat de prouver que les conditions de cette nullité sont réunies ; qu'en reprochant dès lors à la société Parfip France, en présence d'un contrat prétendument ambigu sur ce point, de ne pas démontrer que la société Stahl Cranesystems aurait opté pour une location et non pour une remise du bien en pleine propriété, de sorte qu'il n'y aurait pas d'accord des parties sur l'objet même du contrat, la cour a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du code civil.

2- ALORS QUE le juge ne peut pas méconnaître la loi des parties ; qu'en l'espèce, les contrats étaient expressément intitulés, aux conditions particulières, « contrats d'abonnement de maintenance et de location », qu'ils comportaient des « conditions générales du contrat de location » et qu'ils stipulaient en gras : « dans le cas où l'abonné opte pour la location du matériel [ce matériel est] désigné alors dans le tableau ci-après », tous les contrats comportant la désignation du matériel loué dans le tableau prévu à cette fin ; qu'il s'en évinçait clairement et précisément que la société Stahl Cranesystems avait opté pour la location du matériel et qu'il n'existait donc aucune ambiguïté sur l'objet du contrat, de sorte qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a dénaturé les contrats produits, en violation de l'article 1134 du code civil.

3- ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en jugeant que la société Parfip France ne démontrait pas que la société Stahl Cranesystems aurait opté pour une location et qu'il existerait une ambiguïté des contrats sur ce point, sans examiner les procès-verbaux de réception d'installation de matériel par lesquels la société Stahl Cranesystems avait expressément « reconnu que la signature du procès-verbal entraîne la prise d'effet du contrat de location de matériel », les courriers adressés par la société Parfip France à la société Stahl Cranesystems par lesquels la première indiquait intervenir dans le « financement du bien d'équipement » et les échéanciers envoyés par la société Parfip France à la société Stahl Cranesystems faisant état des sommes dues à titre de « loyers », échéanciers qui avaient été initialement honorés sans réserve par la société Stahl Cranesystems, ces éléments permettant d'établir que la société Stahl Cranesystems s'était bien engagée en qualité de locataire envers la société Parfip France, loueur financier, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

4- ALORS QUE la restitution inclut la valeur de jouissance que la chose a procurée ; qu'en condamnant la société Parfip France à restituer, du fait de l'annulation du contrat, la somme de 21 581,26 € perçue par elle, sans retrancher à cette somme la valeur que la jouissance de la chose avait procurée à la société Stahl Cranesystems, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil.

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