7 juillet 2020
Cour d'appel de Pau
RG n° 18/04037

2ème CH - Section 2

Texte de la décision

FC/BE



Numéro 20/01851





COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 2







Arrêt du 07 juillet 2020







Dossier : N° RG 18/04037 - N° Portalis DBVV-V-B7C-HDU7





Nature affaire :



Demande en divorce autre que par consentement mutuel







Affaire :



[M] [S]



C/



[X] [C] épouse [S]







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 07 juillet 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,







En application de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 et de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, l'affaire, fixée à l'audience du 12 mai 2020, a été examinée selon la procédure sans audience.







APRES DÉBATS





Monsieur CERTNER, Président chargé du rapport,





Monsieur CERTNER, Président,



Madame BALIAN, Conseiller,



Madame MÜLLER Conseiller,





qui en ont délibéré conformément à la loi.















Grosse délivrée le :



à :





dans l'affaire opposant :









APPELANT :



Monsieur [M] [S]

né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]





Représenté par Me Béatrice BLAZY-ANDRIEU, avocat au barreau de BAYONNE













INTIMEE :



Madame [X] [C] épouse [S]

née le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 5]





Représentée par Me Bernard GUEROULT de la SCP GUEROULT, avocat au barreau de BAYONNE



































sur appel de la décision

en date du 16 OCTOBRE 2018

rendue par le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES DE BAYONNE

RG numéro : 13/01199


EXPOSE DU LITIGE





[M] [S] a interjeté appel, limité à la prestation compensatoire, à l'homologation du projet d'acte liquidatif notarié de Maître [N] et aux dispositions relatives à l'article 700 du Code de procédure civile, du Jugement de divorce prononcé par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de BAYONNE le 16/10/18 ayant notamment :



* mis à sa charge le paiement à [X] [C] d'une prestation compensatoire sous la forme d'un capital de 50.000 €uros,



* homologué le projet d'état liquidatif du régime matrimonial des époux dressé par Maître [N], notaire désigné par Ordonnance du Juge de la Mise en Etat le 17/11/15 sur le fondement de l'art. 255 paragraphe 10 à l'effet d'établir un tel projet,



* mis à sa charge le versement au profit de [X] [C] de la somme de 2.000 €uros en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile ;





Les faits de la cause ont été relatés par le premier Juge en des énonciations auxquelles la Cour se réfère expressément ;





Vu les écritures déposées par l'appelant le 10/12/19 ;





Vu les écritures déposées par l'intimée le 20/12/19 ;





L'Ordonnance de clôture a été prononcée le 24/12/19 ;





L'affaire, fixée une première fois pour être plaidée, a été renvoyée en raison de la grève des avocats et à la demande de ces derniers ;





Vu les attestations d'acceptation de chacune des parties de recourir à la procédure sans audience et sans plaidoiries de l'article 8 de l'Ordonnance n° 2020-304 du 25/03/20 ;






MOTIFS DE LA DECISION





Sur la recevabilité de l'appel





L'intimée prétend -exclusivement dans le dispositif de ses conclusions- que l'appel de son adversaire serait irrecevable mais n'invoque aucun moyen d'aucune sorte, notamment procédural, au soutien de sa demande, laquelle ne peut qu'être écartée ;





Sur la prestation compensatoire



Le premier Juge s'est livré à une analyse complète et pertinente de la situation des parties au regard des différents critères énumérés aux articles 271 et 272 du Code Civil ; il ne sera en conséquence lieu ici que d'actualiser les données retenues à la lumière des pièces nouvelles versées aux débats par ces dernières ;





Il doit d'ores et déjà être indiqué qu'il ne sera tenu rigoureusement aucun compte des simples affirmations -nombreuses- des parties ne reposant sur rien ;



Le mariage des époux aura duré 26 ans, dont 21 de vie commune, faute de preuve d'une durée plus courte ;



A défaut de démontrer que le choix de l'intimée de travailler ou de ne pas travailler constitue une décision personnelle et unilatérale de cette dernière, il doit être considéré qu'il s'agit d'une décision commune prise par le couple ; au demeurant, les changements d'affectation relativement fréquents et obligatoires dans la gendarmerie, consubstantiels à la fonction exercée par le mari, n'étaient pas de nature à favoriser la carrière professionnelle de l'épouse ;



Sur l'avis d'imposition de l'appelant pour l'année 2018 figure un revenu de 32.088 €uros, ce qui représente 2.674 €uros par mois en moyenne ; pour mémoire, on notera que, sur son bulletin de solde du mois d'octobre 2019, est mentionné un cumul net imposable de 30.505 €uros, soit en moyenne 3.050 €uros par mois, étant rappelé que c'est à la date du prononcé du divorce qu'il y a lieu de se placer pour apprécier l'éventuelle disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie des parties ; l'attestation de son supérieur hiérarchique selon laquelle il n'aurait effectué qu'une dizaine de jours de déplacement professionnel en métropole n'est pas probant de l'absence de primes faute de concerner explicitement les affectations ou déplacements outre-mer ou à l'étranger ;



Les dires de l'appelant quant à l'évaporation des sommes figurant autrefois sur son PEA ne sont guère crédibles ; on est en effet en droit de douter qu'il ait dû dépenser la somme démesurée de près de 70.000 €uros pour se remeubler ; il s'ajoute à ces liquidités un patrimoine immobilier en nue-propriété de l'ordre de 100.000 €uros -estimation donnée par l'appelant mais totalement invérifiable- auquel peuvent s'ajouter un ou deux biens immobiliers situé à [Localité 7] et à [Localité 9], peut-être vendus en nue-propriété mais pour un prix dont le montant et le sort restent mystérieux ;



Même si ce dernier ne produit aucune simulation de retraite, il est constant que sa carrière est totalement linéaire, à la différence du cursus professionnel chaotique de l'intimée qui, à la mi-2019, n'avait cotisé que 106 trimestres ; compte tenu de l'âge, de l'état de santé délicat et des qualifications professionnelles de cette dernière ainsi que de la situation actuelle du marché de l'emploi, il est peu probable qu'elle parvienne à cotiser 168 trimestres -et ce qui plus est dans des conditions favorables- pour obtenir une pension à taux plein à un niveau décent ;



Tout laisse à penser qu'aux termes d'une recherche de transaction immobilière effectuée par l'appelant que l'intimée a cédé son immeuble de [Localité 8] en janvier 2019 ; sur ce document officiel de vente figure les caractéristiques du bien litigieux mais pas son prix ; l'appelant a fait délivrer à l'intimée une sommation d'avoir à communiquer l'acte notarié de cession ; or, d'une part, l'intimée ne conteste nullement la réalité de cette cession, d'autre part elle n'a pas cru devoir répondre à la sommation précitée alors pourtant qu'il s'agit d'un point très important puisque, selon les dires non étayés et invérifiables de l'appelant, le montant de la transaction s'élèverait à quasiment 640.000 €uros ;



Cependant, le premier Juge doit être approuvé lorsqu'il a insisté sur le fait que la récompense à advenir à l'appelant -qui pourrait être bien supérieure au chiffre de l'ordre de 185.000 €uros retenu par le notaire expert mais sur la base d'une valeur immobilière de 520.000 €uros- va amputer d'autant le patrimoine de l'intimée ;



Sur l'avis d'imposition 2018 de l'intimée, dernier produit, figure un revenu imposable de 13.636 €uros, soit 1.136 €uros par mois en moyenne ;



Compte tenu de l'ensemble de ces données et de celles retenues à raison par le premier Juge et qui demeurent d'actualité, il y a lieu de constater que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des parties une disparité qui doit être compensée ;



La somme arbitrée par le premier Juge y parvient avec justesse et doit en conséquence être confirmée ;





Sur la part contributive à l'entretien et l'éducation de l'enfant commun





Le premier Juge a rejeté la demande de revalorisation à hauteur de 500 €uros par mois du montant de la part contributive paternelle en raison de la carence en preuve de [X] [C] qui, par appel incident, réclame son augmentation cette fois-ci à la somme de 900 €uros par mois ;



Il convient de rappeler que ladite contribution a été initialement fixée à 350 €uros par mois ;



Il est constant, au vu des pièces produites par l'intimée que l'enfant commun [H], désormais majeure, poursuit des études d'odontologie à l'université de [Localité 10] en ESPAGNE ; elle doit à cette fin faire face à des frais de scolarité et de vie courante justifiés et importants ;



L'appelant s'oppose à la demande adverse, essentiellement parce qu'il n'a pas été préalablement consulté sur l'engagement de telles dépenses et se fonde sur une décision de la Cour de Cassation du 22/03/12 qui irait en ce sens ; en réalité, cette Jurisprudence n'est pas applicable au cas précis pour concerner les conséquences d'une décision de fond dont le Juge de l'Exécution avait à apprécier la portée sur le litige autonome qui lui était soumis ;



On ne saurait reprocher à [H] -et indirectement à sa mère- de vouloir obtenir un diplôme qualifiant lui permettant d'accéder à une profession parfaitement sérieuse et rémunératrice et de lui ouvrir des perspectives d'avenir et d'évolution sociale ;



Dans ces conditions, il y lieu de faire droit à la demande d'augmentation formée par l'intimée et de porter à la somme de 500 €uros par mois le montant de la part contributive due par l'appelant à l'entretien et l'éducation de sa fille ;



Il convient cependant d'ajouter qu'il appartiendra à l'intimée, au moins une fois l'an, de justifier du cursus de l'enfant commun -notamment par la production de certificat d'inscription et de scolarité, des résultats d'examen, etc- par tout moyen laissant une trace probante ;





Sur l'homologation du projet d'état liquidatif établi par Maître [N], notaire commis





La valeur de l'immeuble propre de [X] [C] situé à [Localité 8] constitue l'élément essentiel pour la calcul des sommes à advenir à l'appelant ; il a été cédé, moyennant un prix indéterminable en l'état en raison du silence de l'intimée ;



Dans ces circonstances, il apparaît que le projet notarié d'acte liquidatif -certes antérieur de peu à la vente du bien en cause- établi sur le fondement du paragraphe 10 de l'article 255 du Code Civil ne contient pas les informations suffisantes pour que la Juridiction soit en mesure de statuer sur les désaccords persistants entre les parties ;



D'où il suit que la disposition par laquelle le premier Juge a homologué le projet d'acte liquidatif dressé par Maître [N] doit être réformée ;



La liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des parties ont été ordonnés par le premier Juge, point sur lequel il n'a pas à revenir, sauf à préciser que les opérations à intervenir suivront les règles de l'article 267-1 du Code Civil renvoyant aux dispositions des articles 1336 et suivants du Code de procédure civile. ;





Sur les plus amples prétentions des parties





L'appelant sollicite le bénéfice d'une provision à titre d'avance sur communauté d'un montant de 190.000 €uros ; compte tenu des éléments exploitables sous cet angle figurant dans le projet d'acte liquidatif établi par Maître [N], de la position de l'intimée réclamant l'homologation de ce travail dans lequel il est retenu une attribution au profit de l'appelant d'une somme d'environ 185.000 €uros sur la base d'une estimation de l'immeuble de l'intimée situé à [Localité 8] probablement sous-évaluée, de la vente de ce bien de sorte que l'intimée dispose de liquidités suffisantes et de ce qui vient d'être tranché s'agissant de la prestation compensatoire, il y a lieu en l'état et en vertu des règles énoncées à l'alinéa 3 de l'article 267 du Code Civil de condamner [X] [C] à verser à l'appelant une provision à titre d'avance sur communauté d'un montant de 135.000 €uros ;



L'intimée réclame l'allocation de dommages-intérêts d'un montant de 10.000 €uros pour procédure abusive ; cependant, pour prospérer, il lui appartenait de caractériser une faute imputable à son adversaire, un préjudice et un lien de causalité entre les deux ; elle y échoue totalement faute même de tenter de faire une telle démonstration, étant rappelé que le simple fait d'interjeter appel ne dégénère pas ipso facto en abus d'ester en Justice, alors que de surcroît qu'il vient d'être partiellement fait droit à l'une des demandes de l'appelant ;



La demande en remboursement des frais de saisie-conservatoire formée par l'appelant ne saurait prospérer, cette question échappant à la compétence du Juge du divorce ; il doit en être débouté ;



La somme allouée en première instance à [X] [C] au titre de l'art. 700 du Code de procédure civile doit être confirmée pour être équitable ;



Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de cet article au profit de l'une ou de l'autre des parties, ses conditions de mise en oeuvre -équité, situation économique- n'étant pas réunies en cause d'appel ;



L'intimée ne réclame pas une modification du sort des dépens de première instance ; l'appelant paraît solliciter qu'ils soient supportés par cette dernière mais ne croit devoir asseoir sa prétention sur le moindre motif valable alors qu'il a succombé sur l'essentiel devant le premier Juge et que le divorce a été prononcé à ses torts exclusifs ; il y a lieu à confirmation ;



Ceux d'appel doivent être laissés à la charge de chacune des parties qui les a exposées ;



Compte tenu de la rédaction de l'article 695 du C.P.C., il est inutile de statuer sur les frais d'expertise ;





PAR CES MOTIFS





La COUR, statuant publiquement après débats en Chambre du Conseil, contradictoirement et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,





Déboute [X] [C] de sa demande d'irrecevabilité de l'appel formé par [M] [S],

















Réforme le Jugement déféré,



Dit n'y avoir lieu à homologation du projet d'état liquidatif du régime matrimonial des époux dressé par Maître [N], notaire désigné par Ordonnance du Juge de la Mise en Etat le 17/11/15 sur le fondement de l'art. 255 paragraphe 10 du Code Civil,



Confirme la décision appelée pour le surplus,



Y ajoutant,



Condamne [M] [S] à verser à [X] [C] une part contributive à l'entretien et l'éducation de l'enfant commun de 500 €uros par mois,



Dit que cette somme est payable d'avance, avant le 5 de chaque mois, avec prorata temporis s'il y a lieu, par mandat ou virement, ou encore en espèces contre reçu, au domicile de la mère, et sans frais pour elle, en sus de toutes prestations sociales auxquelles elle pourrait prétendre,



Dit que cette contribution est due tant que l'enfant n'est pas en état de subvenir lui-même à ses besoins, et/ou poursuit des études sérieuses, étant précisé que le parent qui en assume la charge devra justifier régulièrement -notamment par la production de certificat d'inscription et de scolarité, des résultats d'examen, etc- de la situation de l'enfant auprès de l'autre parent, et ce au moins une fois l'an par tout moyen laissant une trace probante,



Dit que cette contribution ci-dessus sera revalorisée à la diligence du débiteur lui-même, le 1er juillet de chaque année, en fonction de la variation subie par l'indice des prix à la consommation de l'ensemble des ménages (266 postes hors tabac, base 100 en 1990) publié par l'I.N.S.E.E., entre le mois du prononcé de l'Ordonnance de non-conciliation et le mois de septembre précédant la revalorisation,



Dit que la première revalorisation interviendra le 1er juillet 2021, que les paiements devront être arrondis à l'€uro le plus proche, et qu'elle devra être calculée comme suit :



montant de la pension x indice du mois d'avril 2020

indice du mois du présent Arrêt



Pour satisfaire aux prescriptions de l'article 465-1 du Code de Procédure Civile, rappelle qu'en cas de défaillance dans le règlement des sommes dues :



1) le créancier peut en obtenir le règlement forcé en utilisant à son choix une ou plusieurs des voies d'exécution suivantes :



* saisie conservatoire,

* autres saisies,

* paiement direct entre les mains de l'employeur,

* recouvrement public par l'intermédiaire du Procureur de la République,



2) le débiteur encourt les peines des articles 227-3 et 227-29 du Code Pénal : 2 ans d'emprisonnement et 15.000 €uros d'amende, interdiction des droits civiques, civils et de famille, suspension ou annulation du permis de conduire, interdiction de quitter le territoire de la République,



Condamne [X] [C] à verser à [M] [S] une provision à titre d'avance sur communauté d'un montant de 135.000 €uros conformément aux dispositions de l'alinéa 3 de l'article 267 du Code Civil,



Déboute les parties de leurs plus amples prétentions,







Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel,



Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens d'appel.





Arrêt signé par Corinne BALIAN, conseiller par suite de l'empêchement de Francois CERTNER, Président et par Sylvie HAUGUEL, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.







LA GREFFIEREP/ Le Président empêché









Sylvie HAUGUELCorinne BALIAN

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