9 juin 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-22.202

Première chambre civile - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:C110429

Texte de la décision

CIV. 1

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 juin 2022




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10429 F

Pourvoi n° W 20-22.202





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUIN 2022

M. [H] [S], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° W 20-22.202 contre l'arrêt rendu le 7 juillet 2020 par la cour d'appel de Pau (2e chambre, section 2), dans le litige l'opposant à Mme [C] [M], domiciliée [Adresse 5], défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Antoine, conseiller, les observations écrites de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [S], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [M], après débats en l'audience publique du 12 avril 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Antoine, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.


1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [S] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [S] et le condamne à payer à Mme [M] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. [S]

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. [S] à payer à Mme [M] la somme de 50 000 euros au titre de la prestation compensatoire ;

Aux motifs propre que " le premier juge s'est livré à une analyse complète et pertinente de la situation des parties au regard des différents critères énumérés aux articles 271 et 272 du code civil ; qu'il ne sera en conséquence lieu ici que d'actualiser les données retenues à la lumière des pièces nouvelles versées aux débats par ces dernières ; qu'il doit d'ores et déjà être indiqué qu'il ne sera tenu rigoureusement aucun compte des simples affirmations - nombreuses - des parties ne reposant sur rien ; que le mariage des époux aura duré 26 ans, dont 21 ans de vie commune, faute de preuve d'une durée plus longue ; qu'à défaut de démontrer que le choix de l'intimée de travailler ou de ne pas travailler constitue une décision personnelle et unilatérale de cette dernière, il doit être considéré qu'il s'agit d'une décision commune prise par le couple ; qu'au demeurant, les changements d'affectation relativement fréquents et obligatoires dans la gendarmerie, consubstantiels à la fonction exercée par le mari, n'étaient pas de nature à favoriser la carrière professionnelle de l'épouse ; que sur l'avis d'imposition de l'appelant pour l'année 2018 figure un revenu de 32 088 euros, ce qui représente 2 674 euros par mois en moyenne ; que pour mémoire, on notera que, sur son bulletin de solde du mois d'octobre 2019, est mentionné un cumul net imposable de 30 505 euros, soit en moyenne 3 050 euros par mois, étant rappelé que c'est à la date du prononcé du divorce qu'il y a lieu de se placer pour apprécier l'éventuelle disparité créée par la rupture du mariage dans les condition de vie des parties ; que l'attestation de son supérieur hiérarchique selon laquelle il n'aurait effectué qu'une dizaine de jours de déplacement professionnel en métropole n'est pas probant de l'absence de primes faute de concerner explicitement les affectations ou déplacements outre-mer ou à l'étranger ; que les dires de l'appelant quant à l'évaporation des sommes figurant autrefois sur son PEA ne sont guère crédibles ; qu'on est en effet en droit de douter qu'il ait dû dépenser la somme démesurée de près de 70 000 euros pour se remeubler ; qu'il s'ajoute à ces liquidités un patrimoine immobilier en nue propriété de l'ordre de 100 000 euros - estimation donnée par l'appelant mais totalement invérifiable - auquel peuvent s'ajouter un ou deux biens immobiliers situés à [Localité 1] et à [Localité 4], peut-être vendus en nue-propriété mais pour un prix dont le montant et le sort restent mystérieux ; que même si ce dernier ne produit aucune simulation de retraite, il est constant que sa carrière est totalement linéaire, à la différence du cursus professionnel chaotique de l''intimée qui, à la mi-2019, n'avait cotisé que 106 trimestres ; que compte tenu de l'âge, de l'état de santé délicat et des qualifications professionnelles de cette dernière ainsi que de la situation actuelle du marché de l'emploi, il est peu probable qu'elle parvienne à cotiser 168 trimestres - et ce qui plus est dans des conditions favorables - pour obtenir une pension à taux plein à un niveau décent ; que tout laisse à penser qu'aux termes d'une recherche de transaction immobilière effectuée par l'appelant que l'intimée a cédé son immeuble de [Localité 2] en janvier 2019 ; que sur ce document officiel de vente figurent les caractéristiques du bien litigieux mais pas son prix ; que l'appelant a fait délivrer à l'intimée une sommation d'avoir à communiquer l'acte notarié de cession ; qu'or, d'une part, l'intimée ne conteste nullement la réalité de cette cession, d'autre part, elle n'a pas cru devoir répondre à la sommation précitée alors pourtant qu'il s'agit d'un point très important puisque, selon les dires non étayés et invérifiables de l'appelant, le montant de la transaction s'élèverait à quasiment 640 000 euros ; que cependant, le premier juge doit être approuvé lorsqu'il a insisté sur le fait de la récompense à advenir à l'appelant - qui pourrait être bien supérieure au chiffre de l'ordre de 185 000 euros retenu par le notaire expert mais sur la base d'une valeur immobilière de 520 000 euros va amputer le patrimoine de l'intimée ; que sur l'avis d'imposition 2018 de l'intimée, dernier produit, figure un revenu imposable de 13 636 euros, soit 1136 euros par mois en moyenne ; que compte tenu de l'ensemble de ces données et de celles retenues à raison par le premier juge et qui demeurent d'actualité, il y a lieu de constater que la rupture du mariage crée dans les conditions de vies respectives des parties une disparité qui doit être compensée ; que la somme arbitrée par le premier juge y parvient avec justesse et doit en conséquence être confirmée ".

Et, aux motifs adoptés, qu' " aux termes des dispositions des articles 270 et 271 du code civil, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; qu'il est tenu compte de la durée du mariage, de l'âge et de l'état de santé des époux, de leur qualification et situation professionnelle, des conséquences de leur choix professionnels pendant la vie commune, du patrimoine estimé ou prévisible après liquidation du régime matrimonial, de leurs droits existants et prévisibles et de leur situation respective en matière de pensions de retraite ; que le mariage a duré vingt-six années, et Mme [M] est aujourd'hui âgée de 56 ans ; que le couple a eu un enfant ; que Mme [M] fait valoir avoir régulièrement travaillé, avoir démissionné de son emploi en 1991 pour suivre M. [S], avec lequel elle n'était pas encore mariée, à [Localité 4], avoir alors retrouvé un emploi jusqu'en 1996, date à laquelle elle a suivi son époux en Colombie jusqu'en 1999, l'enfant commune étant née dans ce pays ; qu'à compter du retour du couple en France, Mme [M] a continué à travailler en qualité d'assistance technique auprès de Maître [X] ; qu'il a été mis fin à son contrat de travail en octobre 2017, pour des raisons qui ne sont pas précisées et qu'elle a perçu 1594 euros à titre de solde de tout compte ; qu'elle perçoit donc depuis cette date une indemnité journalière de 37,25 euros, soit mensuellement la somme de 1175 euros et ce, jusqu'en octobre 2020 ; que la déclaration de revenus 2017 n'est pas versée aux débats ; que concernant ses droits futurs à la retraite, il n'est produit qu'un relevé de carrière de 2014 ; qu'elle vit dans un bien qui lui appartient en propre ; que d'après sa déclaration sur l'honneur, elle disposerait d'une épargne retraite de 32 000 euros ; que ses charges actuelles ne sont pas connues, les seules pièces y afférentes étant constituées d'un état établi par elle-même au moment de l'ordonnance de non conciliation soit en 2013, et non actualisée ; que M. [S] au vu de ses avis d'imposition a perçu 31 285 euros en 2016, soit une moyenne mensuelle de 2678 euros ; que ce sont les uniques pièces que verse aux débats Monsieur [S] ; qu'il ne fait aucune mention des primes qu'il perçoit nécessairement lorsqu'il est en mission à l'étranger lesquelles ne sont certainement pas négligeables et en principe non imposables ; qu'il supporte le règlement de la pension alimentaire due au titre du devoir de secours (250 euros) qui prendra fin au prononcé du divorce et la contribution alimentaire due pour l'entretien de l'enfant majeure (350 euros) ; qu'il ne fait état d'aucune autre charge significative ; que ses droits à la retraite seront incontestablement supérieurs à ceux de Madame [M] ; qu'il n'y a pas lieu de tenir compte de sa vocation successorale, élément par nature aléatoire ; qu'il convient ensuite d'examiner le patrimoine personnel mobilier et immobilier des époux ; que Madame [M] est propriétaire d'un bien situé à [Localité 2] acquis dans le cadre d'une donation-partage et qui a constitué le domicile conjugal ; que la communauté a ainsi que cela résulte du rapport du notaire expert désigné, financé la soulte due par Madame aux copartageants, une piscine, divers travaux et Monsieur a financé d'autres travaux avec des fonds propres ; que le notaire a ainsi conclu que compte tenu d'une créance entre époux détenue par Monsieur et des récompenses dues à la communauté par Madame, cette dernière demeure débitrice envers son époux d'une soulte de 185 548 euros, le bien ayant par ailleurs été évalué par le sapiteur à 520 000 euros ; que Monsieur [S] de son côté a reçu pendant le mariage la nue-propriété d'une maison à [Localité 1] (Landes), la nue-propriété d'un studio à [Localité 4] ; qu'après la vente du studio et division de la maison en deux lots, et vente de l'un d'entre eux, Monsieur reste nu-propriétaire du lot restant, la nue-propriété étant évaluée à 90 000 euros et la pleine propriété à 120 000 euros ; qu'il détient en outre un PEA d'environ 74 000 euros et un véhicule VOLVO financé par des fonds propres d'une valeur de 10900 euros ; que M. [S] fait ainsi valoir qu'il ne détient qu'un patrimoine de 175 000 euros là où Madame [M] détient un patrimoine de 520 000 euros ; qu'il paraît néanmoins oublier, bien qu'il sollicite le paiement de cette somme à titre d'avance sur communauté, qu'il est créancier de l'épouse d'une soulte de 185 548 euros qu'au demeurant celle-ci ne conteste pas lui devoir, somme qui viendra en conséquence en déduction du patrimoine de Madame ; qu'au vu des éléments qui précèdent il sera alloué à Madame [M] une prestation compensatoire en capital d'un montant de 50 000 euros " ;

Alors, premièrement, qu'en application de l'article 271 du code civil, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux auquel elle est versée et selon les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; qu'à cet effet, le juge prend notamment en considération le patrimoine estimé ou prévisible des époux tant en capital qu'en revenus après la liquidation du régime matrimonial ; qu'en l'espèce, après avoir relevé que Mme [M] était propriétaire en propre d'un immeuble situé à [Localité 2] dont la valeur avait été estimée à 520 000 euros par le notaire expert, la cour d'appel s'est bornée à constater que la récompense due par Mme [M] à M. [S] allait amputer le patrimoine de l'épouse ; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait elle-même qu'il s'agissait d'un " point important ", la cour d'appel n'a pas recherché si, après amputation du montant de la créance en récompense, le patrimoine propre de Mme [M] était d'une valeur telle que subsistait une disparité dans les conditions de vie respectives des époux susceptible de justifier du bien fondé de la prestation compensatoire, et a donc privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;

Alors, deuxièmement, que le juge ne peut dénaturer les pièces qui lui sont soumises ; qu'en l'espèce, pour justifier de la non-perception de prime de déplacements à l'étranger, M. [S] produisait une attestation de son supérieur, le capitaine [N], commandant d'escadron de gendarmerie, dans laquelle celui-ci certifiait que " l'adjudant [S] [H] n'a effectué aucune mission outre mer ou à l'étranger depuis 2013 " ; qu'il était également attesté de ce que " sur ladite période, il totalise moins de 10 jours de déplacement en métropole ouvrant droit au versement d'un indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT) doit 40 euros par jour " ; qu'en jugeant néanmoins que " l'attestation de son supérieur hiérarchique selon laquelle il n'aurait effectué qu'une dizaine de jours de déplacement professionnel en métropole n'est pas probante de l'absence de primes faute de concerner explicitement les affectations ou déplacements outre-mer et à l'étranger " (arrêt, p. 4, §4), alors qu'il résultait clairement des termes explicites de cette attestation que M. [S] n'avait effectué aucune mission à l'étranger ou en outre-mer, la cour d'appel a dénaturé cette pièce du dossier et violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Alors, troisièmement, qu'une décision fondée sur des motifs contradictoires équivaut à une décision dépourvue de motifs ; qu'en l'espèce, pour évaluer le patrimoine propre de M. [S], et après avoir constaté que ce dernier était titulaire d'un PEA, la cour d'appel a retenu que " les dires de l'appelant quant à l'évaporation des sommes figurant autrefois sur son PEA ne sont guère crédibles : on est en effet en droit de douter qu'il ait du dépenser la somme démesurée de près de 70 000 euros pour se remeubler " ; qu'en statuant ainsi, et faisant siens les motifs des premiers juges qui avaient fixé le solde de ce compte à la somme 74 000 euros, alors même qu'elle constatait que des dépenses avaient été faites par M. [S] à l'aide de ces fonds, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs contradictoires, a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors quatrièmement et enfin, que tout jugement doit être motivé ; qu'en se bornant à retenir que " les dires de l'appelant quant à l'évaporation des sommes figurant autrefois sur son PEA ne sont guère crédibles : on est en effet en droit de douter qu'il ait du dépenser la somme démesurée de près de 70 000 euros pour se remeubler ", sans rechercher l'exact montant du solde figurant sur ce compte d'épargne qu'il convenait de prendre en considération pour déterminer la valeur du patrimoine de M. [S], la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;

Le greffier de chambre

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