23 avril 2024
Cour d'appel de Nîmes
RG n° 22/01605

5ème chambre sociale PH

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 22/01605 - N° Portalis DBVH-V-B7G-INXZ







CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AUBENAS

13 avril 2022



RG :21/00040







[G]





C/



Association OGEC LYCEE [6]





















Grosse délivrée le 23 AVRIL 2024 à :



- Me AUTRIC

- Me POMIES RICHAUD













COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 23 AVRIL 2024





Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'Aubenas en date du 13 Avril 2022, N°21/00040



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère



GREFFIER :



Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 5ème chambre sociale, lors des débats et du prononcé de la décision.



DÉBATS :



A l'audience publique du 20 Mars 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 Avril 2024.



Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.



APPELANT :



Monsieur [S] [G]

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représenté par Me Thomas AUTRIC de la SELARL EVE SOULIER - JEROME PRIVAT - THOMAS AUTRIC, avocat au barreau de NIMES





INTIMÉE :



Association OGEC LYCEE [6]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représentée par Me Loic JULIEN de la SELARL DERAMECOURT & JULIEN, avocat au barreau de VALENCE

Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, avocat au barreau de NIMES



ARRÊT :



Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 23 Avril 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour.




FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS



M. [S] [G] a été engagé à compter du 1er septembre 2018, suivant contrat à durée indéterminée, en qualité de formateur par l'association OGEC lycée [6].



Au dernier état de sa relation contractuelle, M. [S] [G] percevait un salaire mensuel de 2866 euros.



Le 18 janvier 2021, suite à plusieurs faits découverts fin 2020- début 2021, l'association OGEC lycée [6] a mis à pied à titre conservatoire M. [S] [G] et l'a convoqué à un entretien préalable, fixé au 1er février 2021.



Par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 février 2021, M. [S] [G] a été licencié pour fautes graves, pour les motifs suivants :



« - refus de remettre à la Direction les clés des coffres, rendant ainsi inaccessibles de nombreux outils de travail, ainsi que les codes permettant l'accès aux outils numériques nécessaires aux prestations de formation;

- installation d'un système clandestin de captation d'images;

- falsification de cartes self ;

- prise de commandes à des fournisseurs à l'insu de la Direction ;

- usurpation de la fonction de responsable de centre de formation.

Chacun de ces faits constitue déjà un manquement grave à vos obligations contractuelles, notamment celle de loyauté.

De surcroît, le 1er février 2021, vous avez osé proférer de graves obscénités et menaces envers l'un de vos supérieurs hiérarchiques, confirmant ainsi une absence totale de prise de conscience de la gravité de votre comportement.

Pour l'ensemble de ces faits, le maintien de votre contrat de travail s'avère impossible même

pour la durée d'un préavis et nous vous licencions pour fautes graves. »



Par requête du 28 mai 2021, M. [S] [G] a saisi le conseil de prud'hommes d'Aubenas aux fins de dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et voir condamner l'association OGEC lycée [6] au paiement de diverses sommes indemnitaires.



Par jugement du 13 avril 2022, le conseil de prud'hommes d'Aubenas a :



- débouté M. [S] [G] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné M. [S] [G] à verser à l'OGEC la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [S] [G] aux entiers dépens de l'instance.



Par acte du 10 mai 2022, M. [S] [G] a régulièrement interjeté appel de cette décision.



Aux termes de ses dernières conclusions en date du 7 juillet 2022, M. [S] [G] demande à la cour de :





- recevoir M. [S] [G] en son appel,

- infirmer le jugement critiqué,



En conséquence,

- dire et juger que le licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,



En conséquence,

- condamner l'OGEC lycée [6] au paiement de la somme de :

- 10.031 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 11.464 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.146 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 2.574 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 4.157,73 euros en paiement des heures supplémentaires,

- 6.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner l'OGEC lycée [6] au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



M. [S] [G] soutient que :

- les motifs de licenciement sont vagues et généraux, de plus ils ne sont pas fondés,

- il a effectué des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées.



En l'état de ses dernières écritures en date du 24 août 2022, contenant appel incident, l'OGEC lycée [6] demande à la cour de :



- confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné

M. [S] [G] à verser la somme de seulement 300 euros au titre de l'article 700 du

code de procédure civile,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [S] [G] à verser la

somme de seulement 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Et, statuant à nouveau :

- condamner M. [S] [G] à verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile s'agissant de l'instance devant le premier juge,



Y ajoutant :

- condamner M. [S] [G] à payer à l'OGEC [6] le somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel,

- condamner M. [S] [G] aux dépens de première instance et d'appel.



L'OGEC lycée [6] fait valoir que :

- les motifs de licenciement sont suffisamment précis et leur matérialité est établie,

- M. [S] [G] ne justifie par aucun élément avoir effectué des heures supplémentaires pour lesquelles il sollicite le paiement d'une somme fixée forfaitairement.



Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.



Par ordonnance en date du 24 octobre 2023, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 13 novembre 2023 à 16 heures et fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 13 décembre 2023.










MOTIFS



Sur le licenciement



La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et la poursuite du contrat. Il incombe à l'employeur qui l'invoque d'en apporter la preuve.



En l'espèce, M. [S] [G] soutient que les motifs portés dans la lettre de licenciement ...sont à la fois vagues et généraux et que pour aucun d'entre eux, la faute grave reprochée n'est corroborée par une date précise, une preuve pertinente, connues du salarié lors de son licenciement.



Or, les motifs énoncés dans la lettre de licenciement sont suffisamment précis et matériellement vérifiables pour donner lieu à un débat judiciaire utile, peu importe qu'ils ne soient pas datés dès lors qu'il peuvent être situés dans le temps.



- sur le refus de remettre à la Direction les clés des coffres, rendant ainsi inaccessibles de nombreux outils de travail, ainsi que les codes permettant l'accès aux outils numériques nécessaires aux prestations de formation :



L'association OGEC lycée [6] relate que le 28 décembre 2020 un coffre-fort a été découvert au-dessus du bureau de M. [S] [G], portes grandes ouvertes avec à l'intérieur un grand nombre de clés (clés des coffres-forts sauf une ouvrant un petit coffre situé dans le coffre « armes factices » ; clés des « portakabin » de tout l'établissement [6] et que M. [S] [G] a assuré à plusieurs reprises ne pas détenir ; clés des anciens locaux situés au [Adresse 5] à [Localité 1] ; « passe » enseignant pour ouvrir les salles de classe du lycée ; cinq clés USB contenant les supports pédagogiques du centre de formation de marque Icone Grafic et habilitations électriques « Memo Forma »), que deux de ces clés USB appartenant aux enseignants du CAP Agent de sécurité étaient considérées comme disparues depuis le déménagement post séisme du 11 novembre 2019, que sept clés USB contenaient des données confidentielles dont le contenu de l'ordinateur de M. [M] [I] et de celui de sa collègue Mme [E] qui n'intervenaient pourtant pas dans le centre de formation.



Or, l'association OGEC lycée [6] rappelle que ces clés des coffres forts et armoires contenant les matériels pédagogiques étaient introuvables depuis le 16 décembre 2020 comme le relate M. [B], dans une attestation détaillée :

« Le mercredi 16 décembre 2020, la cheffe d'établissement (Mme [N]) me demande de changer les serrures des « Portakabin '' de l'IFSA, car des trousseaux entiers ont disparu. Ce que je fais, sauf pour une porte (la première de la salle de cours n°1) don nous n'avions pas la clé. Porte qui est condamné fermée à clé depuis la mise en place de ces structures, aux dires de Mr [G] il y a quelques temps en arrière. J'ai tenté de la bloquer de l'intérieur sans succès.

Nous avons (Mme [E] enseignante /formatrice et moi-même) désactivé le système de vidéo surveillance qui enregistrait (vidéo et sons en extérieur mais également en salle de pause des stagiaires) et transmettait à un tiers hors établissement par le biais d'une box 4G. Après que nous ayons informé Mme [K] et Mme [N] de la situation.

A ce moment-là, tous les coffres fort et armoires de matériels pédagogiques sont inaccessibles car les clés sont introuvables.



Le lundi 28 décembre 2020 je me rends au lycée, à la demande de la responsable du centre de formation (Mme [K]) pour accueillir Mr [C] (formateur sécurité contractuel) et préparer sa prestation.

Au cours de cette visite je découvre le coffre-fort situé au-dessus du bureau de Mr [G] porte grande ouverte.

Je vais chercher immédiatement Mme [K] et lui fait constater qu'à l'intérieur se trouve des clés en grand nombre (clé des coffres fort sauf une ouvrant un petit coffre situé dans le coffre « armes factices '' ; les clés des « Portakabin '' de tout l'établissement St André ,dont Mr [G] à plusieurs reprise nous à assurer ne pas posséder ; les clés des anciens locaux situés au [Adresse 5] à [Localité 1] ; un passe enseignant pour ouvrir les salles de classes du lycée, cinq clés USB contenant les supports pédagogiques du centre de formation de marque icone Grafic et habilitation électrique « Memo Forma ».

Deux de ces clés USB semble être celles appartenant aux enseignants de CAP Agent de Sécurité, que nous recherchons depuis le déménagement post séisme du 11 novembre 2019

En ouvrant le coffre « Armes Factices '' nous découvrons une mallette plastique noire, pleine de sacs de pièces de monnaie. Nous en informons immédiatement Mme [N] et refermons le coffre à clé a sa demande.

Nous laissons le petit coffre intérieur fermé en l'absence de clé pour l'ouvrir.

Sept clés USB contenant des données diverses don le contenu de mon ordinateur et de celui de ma collègue (Mme [E]) situé dans l'enceinte scolaire « Portakabin » hors centre de formation, un CD d'installation de « main courante électronique '' de marque AZUR Concept et un disque dur de marque Toshiba, illisible car bloqué.

J'ai remis tout ce matériel à Mme [K] immédiatement.



Le mercredi 6 janvier 2021



Mme [E] et moi avons fait l'inventaire des armoires pédagogique et trouvé des documents m'appartenant (documentation technique et autres procedures d'utilisation du matériel élèves de CAP agent de sécurité ) introuvable depuis le déménagement post séisme du 11 novembre, également les emballages vides des caméras de vidéo surveillance de notre système.

Mme [E], a, pour essayer de comprendre et trouver des informations sur leur fonctionnement « flashé '' le QR code d'une des boites : A ce moment-là une application s'est installée automatiquement sur son téléphone et l'image d'une montée d'escalier dans un ce qui semble être le hall d'entrée d'une maison est apparue a l'écran.

Nous avons à cette occasion essayée de remettre en service quelques caméras pour pouvoir assurer la formation de TFP APS qui venait de commencer dans le respect du cahier des charges de l'ADEF, sans succès.

Dès que ma collègue essayait de connecter le système avec les codes habituels, tout se bloquait, un message avertissant que le système devait être contrôlé par un IPAD (introuvable dans le centre de formation). Mme [E] a effectué des captures d'écran de ces événements.



Le mercredi 13 janvier 2021

A la demande de Mme [N], accompagné de Mr [R] (Directeurs Délégués aux Formations Professionnelles et Technologiques) , nous avons forcé le dernier coffre situé dans l'armoire forte « Armes factices ''.

A l'intérieur, nous avons découvert des munitions de chasse et de gros calibre non neutralisées, munitions à peinture utilisées en entrainement Gendarmerie, des menottes et un pistolet d'alarme de couleur bleu de marque REC, neutralisé (Pistolet m'appartenant, ce pistolet me sert en formation des élèves de CAP coté lycée et avait disparu depuis le déménagement post séisme du 11 novembre 2019).

Les munitions ont été remisent à Mme [N]. Suite à l'audit surprise de l'ADEF et les écarts constatés par l'auditeur, nous essayons (Mme [E], Mr [R] et moi-même) de remettre en conformité le centre de formation, car la vidéo surveillance, le système de ronde pointées, la gestion de l'alarme intrusion sont inopérant. Les livrets de suivi individuels des stagiaires sont également manquant.

Car un risque de suspension d'agrément par l'ADEF si nous n'arrivons pas à régler ses écarts.

Mme [E] essaie alors de connecter la vidéo surveillance sans succès ; quelque chose ou quelqu'un l'empêche à distance de le faire.

Nous avons finalement fait bloquer la Box 46 et changé la carte SIM pour réinstaller le système. Pour essayer de régler le problème de la main courante et du système de ronde pointée, j'ai contacté Azur Concept pour avoir des informations sur cette main courante introuvable sur les ordinateurs de l'IFSA, le commercial (Mr [J]) m'a informé que ce matériel avait été acheté par le biais d'une commande chez Aquiserv et que le contrat de maintenance avait été renouvelé en décembre et non réglé à ce jour. J'ai transmis tous les documents reçut à Mme [N].

J'ai réécrit les fiches d'évaluation formative des stagiaires que nous avons remisent à Mr [C] et être ainsi de nouveau en conformité.»







M. [S] [G] avait à plusieurs reprises assuré ne pas posséder ces instruments.



La matérialité de ces faits est corroborée par les échanges de courriers dont celui de Mme [N] qui, le 14 décembre 2020, reproche à M. [S] [G] de ne pas lui avoir donné le code pour ouvrir le coffre.



M. [S] [G] produit au débat des échanges de courriels du 10 décembre 2020 avec Mme [N] chef d'établissement censés établir que le problème avait été réglé antérieurement :

- courriel de Mme [N]: «Monsieur [G] bonjour, Avec Madame [K] nous venons d'essayer le code, 2015, de la boîte permettant de récupérer les clés des modules IFSA. En effet nous avons besoin pour que Madame [X] puisse procéder au ménage. Force est de constater que celui-ci a été chargé. Je vous remercie de bien vouloir me renvoyer le nouveau code afin que je puisse récupérer les clés».

- réponse de M. [S] [G] : «Madame [N], Comme régulièrement par souci de sécurité ( c'ur de mon métier), je change les codes d'accès. D'autant plus depuis que certaines personnes laissent les codes affichés. Et comme je fais à chaque période sans stagiaires.

Comme demandé, je suis venu vous déposer le passe IFSA au secrétariat vers 17 heures».

- réponse de Mme [N] : «Bonsoir Monsieur [G] je vous remercie j'ai bien récupéré le trousseau de clés a 17h40 au secrétariat. cordialement».



L'association OGEC lycée [6] rétorque que cet échange ne portait que sur les clés des Portakabins qui devaient être remises à la personne en charge du ménage des locaux et non les clés des coffres et armoires dont il est fait mention dans la notification de licenciement.



L'association OGEC lycée [6] précise que ce sont ces clés de Portakabins qui sont également mentionnées dans le courriel de M. [S] [G] du 7 décembre 2020 aux termes duquel ce dernier, d'une part, s'offusque que la responsable du centre de formation, Mme [K], ait récupéré les clés des locaux dudit centre à la fin de la période de formation et, d'autre part, refuse expressément de lui rendre des comptes.



Effectivement, l'échange de courriels du 20 décembre 2020 ne porte que sur le passe IFSA et non sur les instruments trouvés dans le coffre de M. [S] [G].



- sur l'installation d'un système clandestin de captation d'images;





L'association OGEC lycée [6] relate que le 16 décembre 2020 il a été constaté que le système de vidéo, destiné exclusivement aux formations, avait été installé afin d'enregistrer des images (vidéo et son en extérieur mais également en salle de pause des stagiaires) et que ces images étaient transmises à un tiers hors établissement, dont il était établi ensuite qu'il s'agissait de M. [S] [G], par le biais d'une box 4G, qu'après avoir scanné le QR code des caméras, il est apparu que l'installation clandestine de vidéosurveillance était reliée au domicile de M. [S] [G] .



L'association OGEC lycée [6] justifie la réalité de ce grief par les attestations de Mmes [K] et [E] et M. [B].

- Mme [E] « Ce même jour, j'ai scanné le QR Code qui donne accès aux caméras et j'ai eu la surprise de voir un salon avec un escalier et un jardin qui n'appartienne pas au lycée, je ne sais pas cela donnait, je suis donc allé montrer ces images à Mme [K] et Mme [N] et Mme [K] a certifié que l' image correspond à la maison de M. [G]...»

- Mme [K] : «mardi 5 janvier 2021, Mme [L] [E] est venue me voir dans mon bureau pour me montrer des images de caméras. En effet, celle-ci s'est connectée sur le système de vidéo surveillance et est tombée sur des images d'un domicile, j'atteste que ces images émanent du domicile de M. [G]...»





M. [S] [G] s'étonne que l'employeur informé de faits n'ait pas cru bon d'informer le salarié, des constats excipés et de les soumettre à contradiction lors de l'entretien préalable. Ce qui ne présente aucune pertinence et ce dont il ne tire aucune conséquence.



Il s'interroge également sur le constat effectué par Mme [K] portant sur des faits datés du mardi 05 janvier 2021, tout en produisant pour l'occasion, pour appuyer ses dires, d'une photo du domicile de M. [S] [G] prise par visiosurveillance datée quant à elle du 06/01/2021, soit...un jour plus tard. Or aucune conséquence ne peut être tirée de ce constat.



M. [S] [G] soutient sans nullement le démontrer que la direction avait procédé à l'installation du système de surveillance par caméra une année avant la procédure de licenciement, il s'étonne par contre que l'employeur, qui aurait découvert ce système clandestin, ne l'ait pas convoqué plus tôt. Or le lien entre l'installation vidéo et le domicile de M. [S] [G] a été fait le 6 janvier 2021 et a donné lieu à une mise à pied et convocation à entretien préalable le 18 janvier suivant.



M. [S] [G] verse un courriel du 07 décembre 2020 adressé à Mme [N] : «Mme [N]. Je tiens par le présent mail à vous signaler les agissements de Madame [K], responsable adjointe du centre de formation.

Ce lundi matin arrivant comme d'habitude à 8h, je me retrouve fort dépourvu en arrivant dans ma salle de formation et de constater qu'il manque le trousseau de clés général. Trousseau qui est sous ma responsabilité depuis la livraison des « Portakabin ''. J'appelle Madame [K] qui n'était pas encore arrivée pour lui demander où pouvait bien être ce trousseau. Madame [K], m'a alors répondu qu'elle était avec l'expert et que c'était elle qui avait le trousseau et qu'elle arriverait plus tard. 1h30 plus tard voici Madame [K] qui arrive et la je découvre avec étonnement qu'elle a enfermé ledit trousseau à clé dans son bureau...

Pour faire ceci si ce n'est pour me harceler, me rabaisser et m'insulter dans mes fonctions.

Madame [K] a même osé (devant Mr [A] qui était dans son bureau à ce moment donné) de me demander pourquoi j'avais besoin de ce trousseau... Depuis quand ai-je besoin de me justifier '

Cette relation ne peut plus durer.

Je vous demande donc d'intervenir pour éviter que cela ne se reproduise à l'avenir».



Outre que cet échange ne présente aucun lien avec les faits reprochés, il ne fait que confirmer ce que l'employeur visait plus avant à savoir que cet échange ne portait que sur les clés des Portakabins qui devaient être remises à la personne en charge du ménage des locaux et non les clés des coffres et armoires dont il est fait mention dans la notification de licenciement, l'échange de courriels du 10 décembre suivant portait toujours sur ce point.





- sur la falsification de cartes self :



L'association OGEC lycée [6] expose que le 5 janvier 2021 a été découverte une caisse rouge du meuble trois tiroirs contenant des cartes de self falsifiées et un carnet à souche de tickets de repas revêtus de la signature de M. [S] [G].



L'association OGEC lycée [6] verse au débat :

- les attestations de :

- Mme [D] : « Toutes personnes, élèves, adultes IFSA, apprentis UFA, ayant besoin de se rendre au self et de régler les repas, doivent impérativement s'adresser au secrétariat. Monsieur [G] alors qu'il n'en avait pas le droit a pris l'initiative de s'occuper des personnes en formation à l'IFSA. Tout d'abord en leur faisant des tickets repas ensuite en mettant en place des badges et également en encaissant les repas. »

- Mme [E] « dans ce même meuble nous avons aussi trouvé des cartes de cantine factices...»

- Mme [K] : « le mardi 5 janvier, Mme [E], Mme [Y], Mme [N] et moi-même sommes allées dans la salle de formation de M. [G] afin de faire l'inventaire du matériel pédagogique et du rangement pour accueillir les nouveaux stagiaires et formateurs dans de bonnes conditions. En ouvrant le coffre de cette salle (dans lequel il y a du matériel pédagogique ) nous avons trouvé une malette noire pleine d'argent que nous avons immédiatement repositionné dans le coffre . Ensuite nous avons trouvé dans la caisse rouge du meuble trois tiroirs de l'espèce avec des papiers sur lesquels étaient notés des noms de stagiaires d'anciennes sessions , concernant les repas du self. Dans ce même meuble nous avons trouvé des cartes de self factices»

Mme [Y] reproduit une attestation identique : « le mardi 5 janvier 2021, Mme [E], Mme [K], Mme [N] et moi-même sommes allé dans la salle de formation de M. [G] afin de faire l'inventaire du matériel pédagogique et le rangement pour accueillir les stagiaires et formateurs dans de bonnes conditions. En ouvrant le de cette salle (dans lequel il y a du matériel pédagogique ) nous avons trouvé une malette noire pleine d'argent que nous avons immédiatement repositionné dans le coffre . Ensuite nous avons trouvé dans la caisse rouge du meuble trois tiroirs de l'espèce avec des papiers sur lesquels étaient notés des noms de stagiaires d'anciennes sessions , concernant les repas du self. Dans ce même meuble nous avons trouvé des cartes de self factices»

- un cliché photographique représentant une malette, des bons repas, des espèces ainsi que des chèques.

- et les pièces 26 a, b et c qui sont des reçus signés par M. [S] [G]



Ainsi, selon l'intimée, M. [S] [G] a mis en place un système occulte de vente de cartes de self alors que la délivrance des cartes et tickets repas relevait exclusivement du secrétariat.



M. [S] [G] conteste la pertinence des éléments de preuve produits par l'employeur estimant que les attestations produites par ce dernier démontrent une organisation de la preuve à postériori recherchée par l'employeur. Or, les preuves ne peuvent être réunies qu'après découverte des faits incriminés et rien ne permet de remettre en cause la sincérité des attestations produites par l'employeur.

Pour le surplus, les explications confuses et difficilement compréhensibles de M. [S] [G] ne peuvent emporter la conviction. En effet celui-ci développe dans ses écritures que :

Quant aux photos sur les badges et la monnaie contenues dans le coffre, ne peuvent à l'évidence démontrer l'existence d'une économie occulte, par essence attentatoire aux intérêts de l'OGEC, en ce précisément, d'une part, que les badges des commensaux sont remis à chaque repas à la secrétaire, Mme [F] [D], et que d'autre part, l'employeur, ne rapporte aucune preuve comptable, d'un détournement.

Enfin, dans l'exercice de ses fonctions, si M. [G] est effectivement détenteur d'une carte lui permettant l'accès à la cantine ; le remise de cette carte par l'employeur relevant des obligations à la charge de l'employeur. (pièce 14) Le terme falsification, pris dans une acception indéfinie, corroborée par aucun élément de preuve pertinent, ne peut évidemment être retenu comme un motif réel et sérieux.



Ces considérations pour le moins absconses se heurtent aux constats opérés plus avant.



- sur la prise de commandes à des fournisseurs à l'insu de la Direction :



L'association OGEC lycée [6] soutient que cette faute est corroborée par les bons ou devis de commande établis par M. [S] [G], dont l'écriture et la signature ne peuvent être déniées, (Pièces n° 13 - bon agence Ekole, n° 21 devis CFP Sécurité, n°22 devis INRS, n° 23 bon de commande CFP Sécurité envoyé de la messagerie de M. [G]) prétendument émis pour le compte de l'OGEC mais à l'insu de celui-ci, alors que M. [G] ne pouvait agir de sa propre initiative ce que corrobore l'attestation de la comptable Mme [U] : « toutes commandes passées au nom de l'établissement doit être validé par la direction (Mme [N]) par la DDFPT (M. [R]) ou par le service comptabilité (Mme [U])».



L'association OGEC lycée [6] relève que la pièce n°22 supporte à l'évidence une grossière imitation de la signature de Mme [K] dont l'original figure sur les attestations rédigées par cette dernière.



M. [S] [G] prétend que l'ensemble des commandes sont toutes validées par l'employeur, la réception se faisant sous son contrôle, que les propres pièces versées au débat par l'employeur (notamment la pièce 22 adverse), montrent que la commande doit être validée par Mme [K], laquelle a seule la signature.

Or précisément cette pièce, la seule prétendument signée par Mme [K], est arguée de faux par l'employeur qui démontre son caractère contrefait. Par contre, les autres pièces émanent incontestablement de M. [G] sans aucune autorisation préalable.



- sur l'usurpation de la fonction de responsable de centre de formation :



L'association OGEC lycée [6] produit au débat le procès-verbal d'examen SSIAP 1 établi par M. [S] [G] sur lequel il se présente comme responsable du centre de formation.



M. [S] [G] réplique que ce motif est totalement incohérent, qu'il ne repose en définitive que sur le seul procès-verbal de l'examen SSIAP, où apparaît effectivement son identité et la qualité Responsable Centre Formation, que, à supposer la qualité évoquée impropre, l'employeur a seule autorité pour dépêcher son salarié à la session d'examen, et que cette supposée usurpation, n'a eu aucune incidence négative envers l'employeur.



Il n'en demeure pas moins que M. [S] [G] s'est prévalu d'une qualité qu'il ne possédait pas.



- sur les insultes proférées et les menaces adressées le 1er février 2021 en l'encontre d'un supérieur hiérarchique :





Les insultes proférées à l'encontre de M. [R] sont corroborées par l'attestation de ce dernier qui déclare que M. [G] lui a dit le 1er février 2021 « pourquoi tu me parles toi ! Va te faire enculer, Va te faire enculer, Va te faire enculer... t'inquiète pas ça va se régler à l'extérieur on se reverra») et ce que confirme Mme [P] : « M. [G] a par trois fois crié «va te faire enculer» à M. [R]»



M. [S] [G] se contente de dénégations.





Il résulte de tout ce qui précède que les griefs retenus à l'encontre de M. [S] [G] au soutien de la mesure de licenciement sont établis, leur gravité justifiant la rupture immédiate du contrat de travail.



Le jugement mérite confirmation.





Sur les heures supplémentaires





Aux termes de l'article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.



En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.



Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.



À défaut d'éléments probants fournis par l'employeur, les juges se détermineront au vu des seules pièces fournies par le salarié



Après analyses des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.



Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l'opposition à l'exécution de celle-ci de l'employeur se trouvant alors indifférente.

Le salarié peut revendiquer le paiement d'heures supplémentaires à raison de l'accord tacite de l'employeur.

Cet accord tacite peut résulter de la connaissance par l'employeur de la réalisation d'heures supplémentaires par le biais de fiche de pointage et l'absence d'opposition de l'employeur à la réalisation de ces heures.



L'absence de mise en place par l'employeur d'un tel système ne le prive pas du droit de soumettre au débat contradictoire tout élément de droit, de fait et de preuve, quant à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies.



En l'espèce, M. [S] [G] se réfère à son contrat de travail prévoyant en son article 5 à la rubrique «durée aménagement du temps de travail» :

« Eu égard aux variations d'activité de l'établissement, le temps de travail fera l'objet d'un calendrier sur l'année sur la période du 1er septembre au 31 août.

La durée annuelle de travail de Monsieur [G] est de 365 jours - 52 dimanches - 11 jours fériés - 36 jours de congés payés = 266 jours de travail annuel, soit 44,33 semaines x 35 heures =1552 heures par an arrondies à 1560 heures de travail effectif par an journée de solidarité incluse.

La durée annuelle de travail de Monsieur [G] est de 1560 h par an.

L'horaire hebdomadaire moyen lycée de Monsieur [G] est de 35 heures.

La durée hebdomadaire de travail variera selon un programme de modulation collective fixé chaque année pour la durée de l'année scolaire et dont Monsieur [G] sera informé par voie d'affichage.

Un calendrier individuel de modulation sera remis à Monsieur [G] qu'il devra signer ainsi que le chef d'établissement.

Si pour des nécessités de service non prévisible, ce planning doit être modifié, M. [G] sera informé dans les meilleurs délais et au moins 10 jours civils avant la date d'application d'un nouvel horaire... ''



M. [S] [G] rappelle que pour l'accomplissement de sa mission il était prévu qu'il accomplisse 1000 heures de face-à-face et 500 heures de préparation, que le planning annuel prévisionnel précise les différentes missions qu'il devait accomplir sur l'année, que le planning n'a d'ailleurs jamais été soumis à acceptation du salarié, sauf en ce qui concerne celui de l'année 2021, qu'il ressort des plannings qu'il a effectué chaque semaine 28 heures de face-à-face auxquelles s'ajoutent 3h30 de préparation, de telle sorte que le temps de travail en cumul hebdomadaire s'élève à 52 heures et demie.



M. [S] [G] se réfère à l'article 11 «définition des différents temps de travail du Chapitre 3 durée du travail» de la Convention collective, qui précise que la durée maximale du face-à-face pédagogique est de 28 heures par semaine sur 4 semaines consécutives et de 10 semaines par an.



Il observe que ses plannings démontrent qu'il a effectué quant à lui 35 heures hebdomadaires, sur l'ensemble de l'année, soit 26 semaines pleines, qu'en cela, les conditions relatives au temps de travail ne sont pas respectées par l'employeur tant en ce qui concerne à la fois :

- le nombre d'heures effectuées par période hebdomadaire,

- la durée maximale de FFP et des modalités de leur exécution



Il ajoute que s'il est effectif que l'employeur lui a versé des heures supplémentaires, ainsi que des primes « mensuelles '' de toute évidence, les heures supplémentaires dépassant très largement les conditions légales et conventionnelles et les modalités relatives à leur paiement sont sanctionnées par l'article L 8221-5 du code du travail.



Il estime avoir effectué 177 heures supplémentaires, lesquelles n'ont pas été payées, de telle sorte qu'il est fondé à en demander le paiement au taux majoré, soit : (177 heures x 23,49) = 4157,73 euros.



Or, d'une part M. [S] [G] était soumis à un volume horaire de 1560 heures/an en sorte que ses heures supplémentaires étaient décomptées sur une période de référence allant du 1er septembre au 31 août de chaque année, d'autre part le contrat de travail prévoyait un horaire hebdomadaire moyen de 35 heures et que la durée hebdomadaire de travail pouvait varier selon un programme de modulation collective fixé chaque année pour la durée de l'année scolaire. En outre, M. [S] [G] se base essentiellement sur les volumes de face-à-face pédagogique auxquels il ajoute des heures de préparation pour en conclure que 28 + 3h30= 52,30 heures ce qui est incompréhensible.



Enfin, l'association OGEC lycée [6] relève justement que les plannings prévisionnels de M. [S] [G] démontrent que sur la période de septembre 2019 à août 2020 il a bénéficié de huit semaines non travaillées, soit environ 280 heures de récupération, en plus de ses cinq semaines de congés payés et des neuf semaines de chômage partiel lié à la crise sanitaire de mars à mai 2020, qui ont largement compensé les 177 heures dont il réclame le paiement.



La demande a été rejetée à bon droit par les premiers juges.



L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en l'espèce.





PAR CES MOTIFS



LA COUR,



Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort



Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,



Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne M. [S] [G] aux dépens d'appel.



Arrêt signé par le président et par le greffier.



LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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