18 avril 2024
Cour d'appel de Rennes
RG n° 23/05100

7ème Ch Prud'homale

Texte de la décision

7ème Ch Prud'homale





ORDONNANCE N°132/2024



N° RG 23/05100 - N° Portalis DBVL-V-B7H-UB5Y













M. [X] [U]





C/



CLEMENT ET FILS (AUTO PERFORMANCE) S.A.S.















Ordonnance d'incident















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE MISE EN ETAT

DU 18 AVRIL 2024





Le dix huit Avril deux mille vingt quatre, date indiquée à l'issue des débats du mardi six février deux mille vingt qautre devant Madame Isabelle CHARPENTIER, Magistrat de la mise en état de la 7ème Ch Prud'homale,

assisté de Françoise DELAUNAY, Greffier, lors des débats et lors du prononcé





Statuant dans la procédure opposant :





DEMANDEUR A L'INCIDENT :



Monsieur [X] [U]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représenté par Me Catherine FEVRIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de QUIMPER





INTIME



DÉFENDEUR A L'INCIDENT :



CLEMENT ET FILS (AUTO PERFORMANCE) S.A.S. Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES





APPELANTE







A rendu l'ordonnance suivante :
































EXPOSÉ DU LITIGE



La SAS Clément et Fils Autoperformance exerce une activité de commerce de voitures et de véhicules automobiles légers et emploie plus de 10 salariés (15).



Le 7 juillet 2016, M. [X] [U] était embauché en qualité de vendeur dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée par la SAS Clément et Fils Autoperformance.



Le 31 janvier 2022, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement pour faute lourde fixé au 9 février suivant.



Le 21 février 2022, M. [U] a été licencié pour faute lourde.



Le salarié a contesté les griefs dans un courrier du 3 mars 2022.



Le 27 juin 2022, M. [U] a saisi le conseil de prud'hommes de Quimper afin de voir notamment prononcer la nullité de son licenciement en raison de faits de harcèlement moral et sexuel et la condamnation de son employeur à diverses sommes et indemnités.



Le 7 septembre 2022, les parties se sont présentées à l'audience de conciliation qui n'a abouti à aucun accord.



Le conseil des prud'hommes de Quimper, saisi d'une demande de sursis à statuer par l'employeur dans l'attente de l'issue des procédures pénales en cours, a par jugement en date du 26 juillet 2023 :

- Débouté la SAS Clément et Fils Autoperformance de sa demande de sursis à statuer

- Renvoyé l'affaire et les parties à l'audience du mercredi 15 novembre 2023 à 9h00.

- Réservé les dépens.



La SAS Clément et Fils Autoperformance a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe le 29 août 2023.



M.[U] a constitué avocat le 16 octobre 2023.



Le salarié a saisi le 23 novembre 2023 le conseiller de la mise en état d'un incident tendant à voir déclarer irrecevable l'appel de la société Clément et Fils Autoperformance.



En l'état de ses dernières conclusions d'incident n°2 transmises par RPVA le 26 janvier 2024, M. [U] demande au conseiller de la mise en état de :

- Déclarer l'appel de la SAS Clément et Fils Autoperformance à l'encontre du jugement irrecevable,

- Subsidiairement, renvoyer les parties au fond,

- Condamner la SAS Clément et fils Autoperformance à une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner la SAS Clément et fils autoperformance aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais d'exécution forcée de la décision à intervenir.

- Débouter la SAS Clément et fils autoperformance de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions,



En l'état de ses conclusions n°2 d'incident transmises par RPVA le 2 février 2024, la SAS Clément et Fils Auto Performance demande au conseiller de la mise en état de :

- Déclarer l'appel recevable ;

- Débouter M. [U] de toutes ses demandes ;

- Condamner M. [U] à lui payer la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner M. [U] aux entiers dépens.



L'incident a été fixé à l'audience du 6 février 2024.



Les parties ont précisé que l'audience devant le conseil des prud'hommes de Quimper a été renvoyée sur le fond au 20 mars 2024.






MOTIFS DE LA DÉCISION





Sur la recevabilité de l'appel



M.[U] soulève l'irrecevabilité de l'appel formé par la société Clément et Fils Auto Performance à l'encontre d'un jugement du 26 juillet 2023, ayant refusé un sursis à statuer, dans la mesure où cette décision n'est pas susceptible d'un appel immédiat, en ce qu'elle ne tranche pas le principal, ne met pas fin à l'instance et qu'aucun texte n'autorise l'appel à l'encontre d'une telle décision. Il fait valoir que les moyens opposants de son employeur selon lequel la décision serait en réalité une décision de mise en état et non pas un jugement et que la notification de la décision mentionne la voie de l'appel comme voie de recours, sont inopérants puisque la décision attaquée a bien été rendue par le conseil des prud'hommes et non par le juge de la mise en état et que la qualification inexacte du jugement 'rendu en premier ressort' n'est pas créatrice de droit.



La SAS Clément et Fils Auto Performance conclut à la recevabilité de son appel au motif que :

- elle a saisi le 27 mars 2023 le bureau de conciliation et d'orientation chargé de la mise en état des affaires du conseil des prud'hommes d'une demande de sursis à statuer sur laquelle il lui appartenait de se prononcer s'agissant d'une exception de procédure,

- la décision qualifiée de jugement rejetant l'exception de procédure a été rendue par le conseil des prud'hommes en sa qualité de juge de la mise en état alors qu'il s'agissait d'une ordonnance de mise en état, laquelle est susceptible d'appel immédiat lorsqu'elle statue sur une exception de procédure sans mettre fin à l'instance.

- au surplus, la notification du jugement effectuée par le greffe le 1er août 2023 mentionne l'appel comme voie de recours de cette décision.



Il résulte des débats que la décision attaquée a été rendue le 26 juillet 2023 par le conseil des prud'hommes, dans sa formation de jugement de droit commun à l'issue d'une audience de plaidoirie du 10 mai 2023.



L'argumentation de l'employeur selon laquelle il a saisi d'une demande de sursis à statuer le bureau de conciliation et d'orientation en sa qualité de 'juge de la mise en état', seul compétent pour se prononcer sur une exception de procédure et que la décision du conseil rejetant l'exception de procédure en qualité de juge de la mise en état, doit s'analyser comme une ordonnance susceptible d'appel, est inopérante. En effet, les premiers juges ont statué dans une formation de droit commun, après que le bureau de conciliation et d'orientation ait ordonné le renvoi de l'affaire devant le bureau de jugement par avis du 5 avril 2023 en application des articles L 1454-1-2 et R 1454-1 du code du travail et que le juge de la mise en état était dessaisi lors de l'ouverture des débats à l'audience du 10 mai 2023.



Le moyen soulevé par l'employeur n'est pas justifié et doit être écarté.



Il résulte des dispositions des articles 544 et 545 du code de procédure civile que peuvent être frappés d'appel les jugements qui tranchent dans leur dispositif tout le principal, ainsi que ceux qui tranchent une partie du principal et ordonnent une mesure d'instruction ou une mesure provisoire et ceux qui statuent sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident mettant fin à l'instance ; que dans les autres cas, les décisions ne peuvent être frappées d'appel indépendamment des jugements sur le fond que dans les cas spécifiés par la loi.



En l'absence de disposition spécifique, une décision qui s'est limitée à rejeter une demande de sursis à statuer et qui a renvoyé l'affaire pour être jugée au fond à une prochaine audience ne peut pas être frappée d'appel immédiat.



Tel est le cas pour le jugement attaqué du 26 juillet 2023, qui n'a pas tranché sur les demandes même partiellement et n'a pas mis fin à l'instance, et a renvoyé à une audience sur le fond. L'appel immédiat sera en conséquence déclaré irrecevable.



L'article 536 du code de procédure civile dispose la qualification inexacte par les juges qui l'ont rendu est sans effet sur le droit d'exercer un recours.



Le fait que la notification du greffe du 1er août 2023 ait mentionné l'appel comme voie de recours possible du jugement, tout comme le dispositif dudit jugement, n'est pas créateur de droit pour la société Clément et Fils Autoperformance qui est irrecevable en application de l'article 545 du code de procédure civile à exercer un recours immédiat indépendamment du jugement sur le fond.



Il convient ainsi de déclarer irrecevable l'appel de la société Clément et Fils Autoperformance à l'encontre du jugement rendu le 26 juillet 2023 par le conseil de prud'hommes de Quimper.



La société Clément et Fils Autoperformance, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à M.[U] une indemnité de procédure de 1 500 euros.



La demande de la société appelante fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera aussi rejetée.





PAR CES MOTIFS :



par ordonnance susceptible de déféré,



Déclare irrecevable l'appel formé par SAS Clément et Fils Autoperformance à l'encontre du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Quimper le 26 juillet 2023;



Condamne la SAS Clément et Fils Autoperformance à payer à M.[U] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



Rejette la demande de SAS Clément et Fils Autoperformance fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.



Condamne SAS Clément et Fils Autoperformance aux dépens.





Le Greffier Le Magistrat de la mise en état

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.