18 avril 2024
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 23/06175

Chambre 1-2

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2



ARRÊT

DU 18 AVRIL 2024



N° 2024/ 297









Rôle N° RG 23/06175 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLHJY







SAS LE JASMIN





C/



S.A.S. KAJMA





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON





Me Laurent LE GLAUNEC de la SCP MOEYAERT-LE GLAUNEC







Décision déférée à la Cour :



Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal Judiciaire de GRASSE en date du 23 mars 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/01316.





APPELANTE



SAS LE JASMIN

Prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège social est situé [Adresse 1]



représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD substituée par Me BADIE, de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assistée de Me Ridha MIMOUNA, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant





INTIMEE



S.A.S. KAJMA

Prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège social est situé [Adresse 1]



représentée par Me Laurent LE GLAUNEC de la SCP MOEYAERT-LE GLAUNEC, avocat au barreau de DRAGUIGNAN









*-*-*-*-*





COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 12 mars 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme PERRAUT, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.



La Cour était composée de :



M. Gilles PACAUD, Président

Mme Angélique NETO, Conseillère

Mme Florence PERRAUT, Conseillère rapporteur



qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 avril 2024.







ARRÊT



Contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 avril 2024,



Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Julie DESHAYE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




***



EXPOSÉ DU LITIGE :



Par acte sous seing privé en date du 1er juin 2022, la société par actions simplifiées (la SAS) Kajma, a donné à bail commercial à la SAS Le Jasmin, des locaux situés, [Adresse 1], à [Localité 2] (06), pour une durée de neuf années, à compter du 1er juin 2022, moyennant un loyer annuel initialement fixé à 55 148 euros TTC, outre provisions sur charges.



La SAS le Jasmin a comme activité principale la restauration, traiteur sans vente de boissons alcoolisées.



Se prévalant de loyers impayés, la SAS Kajma a fait délivrer à la SAS le Jasmin le 13 juillet 2022, un commandement de payer visant la clause résolutoire, aux fins d'obtenir le paiement des loyers, charges et pas de porte, pour un montant de 35 311,75 euros.



Considérant que les causes du commandement de payer sont demeurées infructueuses, la SAS Kajma a, par exploit d'huissier en date du 31 août 2022, fait assigner la SAS Le Jasmin devant le président du tribunal judiciaire de Grasse, statuant en référé, qui par ordonnance contradictoire du 23 mars 2023, a :

- jugé la SAS Kajma recevable et fondée en ses demandes ;

- constaté la résiliation de plein droit du bail commercial liant les parties, résultant du contrat du 1er juin 2022, par le jeu de Ia clause résolutoire rappelée dans le commandement délivré par acte d'huissier du 13 juillet 2022, à compter du 14 août 2022 ;

- débouté la SAS Le Jasmin de sa demande de délais de paiement et de sa demande sur le fondement des dispositions de I'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

- ordonné à défaut de libération volontaire, l'expulsion de la SAS Le Jasmin des locaux commerciaux, sis [Adresse 1] à [Localité 2] (06), ainsi que celle de tous occupants et biens de son chef, avec au besoin le concours de la force publique en application de l'article R 153-1 du code des procédures civiles d'exécution et l'aide d'un serrurier, dans le mois de la signification de la décision ;

- dit que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneraient lieu à l'application des dispositions des articles L 433-1 et R 433~1 du code des procédures civiles d'exécution ;

- condamné la SAS Le Jasmin à payer à la SAS Kajma, une indemnité provisionnelle d'occupation mensuelle fixée à la somme de 4 595 euros, à compter du 15 août 2022 jusqu'à libération effective des lieux ;

- condamné la SAS Le Jasmin à payer à la SAS Kajma la somme provisionnelle de 35 055 euros, à valoir sur les sommes dues visées dans le commandement de payer du 13 juillet 2022 ;

- condamné la SAS Le Jasmin aux dépens, comprenant le coût du commandement de payer du 13 juillet 2022, en application de l'article 696 du code de procédure civile, et à payer à la SAS Kajma une indemnité de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté toutes autres demandes.



Ce magistrat a considéré :

- qu'il n'appartenait pas au juge des référés de trancher la validité d'un commandement de payer ;

- que le commandement permettait au débiteur de comprendre les sommes réclamées ;

- qu'aucun élément n'attestait que le bail avait été entaché de dol ;

- que le juge du fond n'avait pas été saisi d'une demande d'annulation pour vice caché ;

- qu'au moment où le dirigeant de la SAS Le Jasmin avait signé le bail, il avait une parfaite connaissance des lieux et des clauses du précédent bail, étant le précédent locataire ;

- que son consentement n'avait pas été surpris par sa méconnaissance du français ;

- qu'au moment où la SAS Kajma a signé un nouveau bail avec son nouveau locataire, la clause prévoyant un pas de porte devait trouver application ;

- qu'en ce qui concernait les travaux la SAS Le Jasmin ne produisait aucun élément pour justifier la somme de 120 000 euros prétendument dépensée ;

- que concernant les manquements prétendus du bailleur à ces obligations, et sa mauvaise foi, la SAS Le jasmin était mal fondée à exciper de l'exception d'inexécution.

- que la SAS Le Jasmin ne produisait aucun élément de nature à justifier ses capacités à apurer la dette.



Selon déclaration reçue au greffe le 3 mai 2023, la SAS Le Jasmin a interjeté appel de cette décision, l'appel portant sur toutes ses dispositions dûment reprises.



Par dernières conclusions transmises le 12 juin 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, elle sollicite de la cour, qu'elle :



- à titre principal :

* infirme l'ordonnance déférée et dise n'y avoir lieu à référé, en constatant l'existence d'une contestation sérieuse au vu des articles 834 et 835 du code de procédure civile ;

* infirme l'ordonnance déférée et dise que la demande de l'intimée à l'encontre de l'appelante est irrecevable pour nullité du commandement de payer ;



-à titre subsidiaire :

* réforme l'ordonnance déférée dans toutes ses dispositions, en lui accordant un échéancier lui permettant de régler sa dette d'une manière échelonnée conformément aux dispositions de l'article 1343-5 du code civil et de l'article L.145-41 du code de commerce ;

* ordonne par voie de conséquence la suspension de la clause résolutoire ;



- condamne la SAS Kajma, à lui payer la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;



- condamne la SAS Kajma, à supporter les entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de la SCP Badie-simon- Thibaud&juston, avocats associes près la cour d'appel d'Aix-en-Provence.



Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir :



- que le commandement de payer est nul et inopposable en l'absence de décompte précis, ce qui lui fait nécessairement grief, et rend l'obligation sérieusement contestable ;

- que le contrat de bail, est nul car entaché de dol ;



- que le pas de porte n'est pas légitime, étant déjà locataire des lieux, son premier bail a été résilié pour être substitué par le présent bail ;

- qu'outre le pas de porte, le bail comporte une clause imposant de payer un dépôt de garantie dont le montant a été fixé de manière arbitraire ;

- que le contrat de bail est déséquilibré ;

- que le bailleur fait preuve de mauvaise foi ;

- qu'il s'était engagé à effectuer des travaux ;

- qu'elle subit des désordres ;

- que le bailleur a manqué à son obligation de délivrer un local en conformité avec sa destination ;

- que le délai de grâce et la demande d'échelonnement de la dette sont bien fondés ;

- que la situation financière de l'entreprise et les difficultés rencontrées se sont accumulées en raison de la vétusté des locaux et le délabrement du cadre accueillant les clients.



Par dernières conclusions transmises le 22 février 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SAS Kajma sollicite de la cour qu'elle confirme l'ordonnance déférée, en toutes ses dispositions et qu'elle :



- déboute la SAS Le Jasmin de ses demandes ;

- condamne la SAS Le Jasmin à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens incluant le coût du commandement de payer d'un montant de 256,75 euros.



Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir :

- que la SAS Le Jasmin a fait l'objet d'une procédure d'expulsion le 5 décembre 2023, et n'est plus dans les lieux ;

- qu'aucun élément ne peut entraîner la nullité du commandement de payer et qu'il ne souffre d'aucune irrégularité ;

- que le bail est valable et que la SAS Le Jasmin l'a signé avec un consentement éclairé d'autant que le local était précédemment occupé par son président actuel, en son nom propre ;

- que la SAS Le Jasmin est de mauvaise foi ;

- qu'à aucun moment le local était inexploitable ;

- que le constat d'huissier produit par la SAS Le Jasmin ne fait d'ailleurs état d'aucune difficulté, vétusté le rendant impropre à son usage.



L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 27 février 2024.




MOTIFS DE LA DÉCISION :



Sur l'acquisition de la clause résolutoire et la constatation de la résiliation du bail



Il résulte de l'article 834 du code de procédure civile que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.



L'article 835 du même code dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.



Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.



Aux termes de l'article L 145-41 alinéa 1 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.



En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail, en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en 'uvre régulièrement.



A titre liminaire, il doit être rappelé que la demande tendant à voir prononcer la nullité du commandement de payer ou d'un contrat, ne relève pas des pouvoirs du juge des référés, qui peut seulement apprécier si les conditions d'établissement de ces actes se heurtent à des contestations sérieuses ou non.



Il conviendra donc d'analyser ces moyens, afin de déterminer s'il constitue des contestations sérieuses.



Sur le commandement de payer



En l'espèce le bail commercial conclu le 1er juin 2022, entre la SAS Kajma et la SAS Le Jasmin stipule, en son article 15 'clause résolutoire-indemnité d'occupation', qu'à défaut de paiement d'un seul terme de loyer à son échéance ou d'inexécution de l'une quelconque des clauses ou conditions du présent bail, un mois après un simple commandement de payer ou sommation d'exécuter les conditions en souffrance restés sans effet et, contenant déclaration par le bailleur de l'intention d'user du bénéfice de la présente clause, le présent bail sera résilié de plein droit, si bon semble au bailleur, même dans le cas de paiement ou d'exécution postérieure, à l'expiration du délai ci-dessus.



En l'espèce, le commandement de payer visant la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail, délivré le 13 juillet 2022, porte sur la somme de 35 311,75 euros dont le décompte détaillé correspond à :

- provision pour charges juin 2022 : 230 euros,

- loyer juillet 2022 : 4 595 euros,

- provision pour charges juillet 2022 : 230 euros,

- pas de porte : 30 000 euros,

- coût de l'acte : 256,75 euros,

- intérêts au jour du parfait règlement : mémoire.



Il a été délivré en rappelant au locataire les dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce ainsi que les termes de la clause résolutoire contractuelle.



Ainsi, l'intégration de la somme de 30 000 euros, au titre du pas de porte, dans le commandement de payer, peut être discutée, en ce que la clause résolutoire ne prévoit pas expressément que l'inexécution de cet engagement entrainerait de plein droit la résolution du contrat.



Cependant, il n'en demeure pas moins que la SAS Le Jasmin restait redevable de loyers et provisions sur charges impayés pour les mois de juin et juillet 2022, à hauteur de 5 055 euros, dont le décompte était précis est circonstancié.



Or la clause résolutoire prévoit qu'en l'absence de paiement dans le délai d'un mois de la délivrance du commandement de payer, des loyers et charges, cela entraine de plein droit la résiliation du bail.



Ce commandement de payer permet sans difficultés au débiteur de comprendre les sommes qui lui sont réclamées, étant précisé qu'un commandement de payer délivré pour des sommes supérieures à celle effectivement dues, n'en produit pas moins effet.

Le décompte est clair et permet donc à la SAS Le Jasmin d'en comprendre la portée.



La SAS Le Jasmin, ne conteste pas l'absence de règlement des loyers et provision sur charges visés dans le commandement de payer, avant l'expiration du délai d'un mois qui lui était imparti.



La régularité du commandement de payer délivré le 13 juillet 2022, ne se heurte donc à aucune contestation sérieuse.



Sur le bail



Sur le fait que le contrat de bail serait entaché de dol, la SAS Le Jasmin ne justifie pas avoir saisi une juridiction du fond d'une demande d'annulation de celui-ci.



Il ressort des éléments de la procédure que M. [U] [G], actuel Président de la SAS Le Jasmin, était le précédent locataire de la SAS Kajma, en son nom personnel, lors de la signature du bail conclu le 6 février 2021 à effet au 1er février 2021.

Lors de l'exécution du précédent contrat de bail, il ne s'était ni acquitté du pas de porte, ni du dépôt de garantie, ni des loyers.

Il avait donc fait l'objet d'une ordonnance de référé rendue le 20 janvier 2022, constatant la résiliation du bail par le jeu de la clause résolutoire, ordonnant son expulsion et le condamnant à verser différentes provisions.



De plus, les clauses du précédent bail sont similaires à celui conclu au nom de la SAS Le Jasmin, objet du présent litige.



M. [G] ne verse aucun élément démontrant un défaut de maîtrise de la langue française et donc que son consentement aurait été surpris.



Au contraire, il est établi qu'il connaissait les lieux et les circonstances démontrent qu'il avait conscience de la portée de ses engagements.



Aucune irrégularité dans l'établissement du contrat de bail, objet du présent litige susceptible de constituer une contestation sérieuse, n'est donc établie.



Sur l'exception d'inexécution et la mauvaise foi du bailleur

Afin de démontrer les manquements du bailleur à ses obligations et sa mauvaise foi, la SAS Le Jasmin verse aux débats :



- un courrier recommandé avec accusé de réception du 3 novembre 2022, relatif à des vitres cassées dans le restaurant, qui étaient selon M. [G] cassées avant l'ouverture ;



- un constat d'huissier dressé le 9 décembre 2022, photographies à l'appui, duquel il ressortait un écoulement d'eau par goutte-à-goutte au niveau de la poutre de la véranda (représentant la moitié de capacité d'accueil) du restaurant côté mer, des menuiseries extérieures vieillissantes, des rails de coulissement déformés, un système de verrouillage de la véranda inefficient, sur le côté gauche de la véranda un ventail de droite fissuré sur toute sa hauteur avec une réparation de fortune, le toit de la véranda ne présentant aucune dégradation visible ;



- un courrier de la mairie daté du 28 septembre 2022, adressé à la SAS le Jasmin, dans le cadre d'une plainte pour nuisances olfactives, précisant que lors d'un contrôle effectué par un inspecteur de la salubrité, il avait été relevé la présence de fuites d'eau dans les garages de la copropriété en provenance de son établissement et un défaut d'étanchéité du conduit d'extraction pour stopper l'écoulement des graisses dans le garage du copropriétaire.

M. [G] était mis en demeure de faire réaliser un test d'étanchéité sous pression du conduit d'extraction afin de s'assurer de sa conformité et de son indépendance de la VMC de l'immeuble.



L'ensemble de ces éléments sont postérieurs à la délivrance du commandement de payer et de l'assignation.



Ils n'établissent, ni l'impossibilité de jouissance des lieux par la locataire et ni celle de leur exploitation.



Le constat d'huissier n'indique pas que le local est vétuste et impropre à son usage, le toit ne présentant aucune dégradation visible.



La SAS Le Jasmin ne produit aucun élément comptable qui justifierait de difficultés d'exploitation. Elle ne verse aucun justificatif de réalisation de travaux.



En outre, le premier juge a relevé que, par courriel du 10 octobre 2022, la SAS Kajma avait accepté de prendre en charge le nettoyage du conduit d'extraction.



La SAS Le Jasmin, est donc mal fondée à exciper de l'exception d'inexécution pour justifier le non-paiement de ses loyers.



Dans ces conditions, la SAS Le Jasmin, n'établit pas, avec l'évidence requise en référé, un manquement de la bailleresse à son obligation d'exécuter le contrat de bonne foi, lors de la délivrance du commandement de payer, aucun manquement du bailleur à son obligation de délivrance n'étant caractérisé.



Il y a lieu donc lieu de confirmer l'ordonnance entreprise, en ce qu'elle a constaté la résiliation du bail, en raison de l'acquisition de la clause résolutoire à la date du 14 aout 2022 et ordonné l'expulsion de la SAS Le Jasmin.



Sur la demande de provision portant sur les loyers, charges, indemnités d'occupation et pas de porte :



Par application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.



Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant et la condamnation provisionnelle, que peut prononcer le juge des référés sans excéder ses pouvoirs, n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.



Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.



C'est au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier l'existence d'une contestation sérieuse, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ce moyen.



Ainsi le paiement des loyers et charges aux termes convenus dans le contrat de location constitue une obligation essentielle du locataire.



Il n'est pas contesté que la libération des lieux est intervenue par voie forcée le 5 décembre 2023.



Les loyers, charges et indemnités d'occupation sont donc dus jusqu'à cette date, cette obligation étant non sérieusement contestable.



De même aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être exécutés de bonne foi.



Le contrat de bail conclu entre les parties prévoit en son article 10, un loyer annuel de 45 957 euros hors charges, soit un loyer mensuel de 4 595 euros TTC. Il stipule en son article 12, que le preneur s'engage à payer un pas de porte de 30 000 euros HT soit 36 000 euros TTC, et que cette somme demeure acquise sans exception ni réserve, de sorte que le preneur ne pourra jamais la revendiquer...quel que soit le sort du bail par la suite, fût-il résolu ou résilié.



Le paiement du pas de porte à hauteur de 30 000 euros HT, est donc une obligation contractuelle, non sérieusement contestable.



L'article 1353 du code civil dispose que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.



En l'espèce, au vu du commandement de payer délivré le 13 juillet 2022, il convient de confirmer l'ordonnance en que la SAS Le Jasmin a été condamnée à payer la somme de 35 055 euros à titre de provision à valoir sur les loyers, charges et pas de porte, dus au mois de juillet 2022.



Il convient, également de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné la SAS le Jasmin au paiement d'une indemnité provisionnelle d'occupation, à compter de la résiliation du bail, fixée à une somme égale au montant du dernier loyer du, soit 4 595 euros mensuel TTC, jusqu'à libération effective des lieux, soit le 5 décembre 2023.



Sur la demande de délai de paiement :



Aux termes de l'article L. 145-41 alinéa 1 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux : le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai .

L'alinéa 2 du même texte dispose que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil, peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation des effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant l'autorité de chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas si locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.



L'article 1343-5 du code civil précise que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.



En l'espèce la SAS Le Jasmin ne produit aucun élément comptable de nature à justifier qu'elle dégage de son activité de restauration des ressources suffisantes pour lui permettre de s'acquitter de sa dette, en sus du paiement du loyer et des charges courants.



Elle ne démontre donc pas être en capacité de respecter un échéancier.



Par conséquent l'ordonnance du premier juge sera confirmée en ce qu'elle a rejeté par des motifs pertinents la demande de délais de paiement.



Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :



Il convient de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné la SAS Le Jasmin à payer à la SAS Kajma, la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens, incluant le coût du commandement de payer du 13 juillet 2022.



Succombant, la SAS Le Jasmin sera condamnée à payer à la SAS Kajma la somme 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande formulée à ce titre.



Elle sera également condamnée à supporter l'intégralité des dépens d'appel.





PAR CES MOTIFS :



La cour,



Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;



Y ajoutant :



Condamne la SAS Le Jasmin à payer à la SAS Kajma la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;



Déboute la SAS Le Jasmin de sa demande formulée sur le même fondement ;



Condamne la SAS Le Jasmin à supporter l'intégralité des dépens d'appel.



La greffière Le président

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