17 avril 2024
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 23/10288

Chambre 2-4

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4



ARRÊT AU FOND

DU 17 AVRIL 2024



N°2024/100













Rôle N° RG 23/10288 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLXHT







[O] [D] épouse [V]





C/



S.A.R.L. [13]





































Copie exécutoire délivrée le :

à :



Me Sandra JUSTON



Me Laetitia MAGNE









Décision déférée à la Cour :







Ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de TOULON en date du 04 Juillet 2023 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 20/04597.









APPELANTE



Madame [O] [D] épouse [V] Veuve de Monsieur [I] [V], décédé le [Date décès 3] 2017

née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 8] - COTE D'IVOIRE, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE (avocat postulant) et plaidant par Me Jean-olivier D'ORIA, avocat au barreau de PARIS.



INTIMEE



S.A.R.L. [13], inscrite au RCS de TOULON sous le n° [N° SIREN/SIRET 4] dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Laetitia MAGNE, avocat au barreau de TOULON (avocat postulant) et plaidant par Me Claude OHANA, avocat au barreau de BELFORT.















*-*-*-*-*

















COMPOSITION DE LA COUR



En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Michèle JAILLET, Présidente, et Mme Pascale BOYER, Conseillère.



Madame Pascale BOYER, Conseillère, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.









Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, Premier Président de chambre,

Madame Michèle JAILLET, Présidente,

Mme Pascale BOYER, Conseillère







Greffier lors des débats : Mme Fabienne NIETO.



Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Avril 2024..







ARRÊT



Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Avril 2024.



Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Mme Fabienne NIETO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






















































Exposé du litige



La Société [13] ([13]) a été fondée en 1999 par deux associés :

- [P] [D], titulaire de 99 % des parts

- [S] [C], sa compagne, propriétaire de 1 % des parts sociales.



Cette société a acquis notamment un immeuble à usage d'hôtel restaurant à [Localité 12].



[P] [D] était aussi associé dans plusieurs autres sociétés commerciales et civiles exerçant dans le domaine de la construction et la transaction immobilière, dont la SCI [11], dont les parts étaient réparties comme suit :

- 99 parts à Madame [C]

- 1 part à [P] [D].



Le 22 juillet 2008, [P] [D] a cédé à sa concubine, Madame [C], la majorité des parts dont il était propriétaire dans plusieurs sociétés, notamment les parts qu'il détenait dans la [13] à l'exception de 5 parts.

Entre les mois de juin et d'octobre 2008, Madame [C] a été notamment désignée gérante de la [13].



[P] [D] est décédé le [Date décès 7] 2008, sans descendant, ni ascendant laissant comme héritiers son frère et ses deux soeurs :

- [O] [D] veuve [V],

- [K] [D] épouse [A]

- [Y] [D].



Ces derniers ont remis en cause les cessions de parts intervenues en 2008 en raison de l'état de santé de leur frère au moment où elles ont été réalisées.



Les parties se sont rapprochées et, le 21 octobre 2010, Madame [C] a cédé à chaque héritier les parts reçues en 2008, notamment celles de la [13], et a démissionné de ses fonctions de gérante des sociétés.

Ces fonctions ont été confiées à un tiers à la famille, Monsieur [L], puis [Y] [D] a été désigné gérant de la [13] le 3 septembre 2011.



Madame [C] est restée titulaire de 99 parts sur 100 de la SCI [11], propriétaire de biens immobiliers et titulaire d'une créance sur la [13] de plus d'un million d'euros.



Le 8 septembre 2011, la [13] a été placée en redressement judiciaire sur déclaration de cessation de paiement par Monsieur [L].

Cette procédure était motivée par l'absence d'activité de la société et la présence de nombreuses dettes envers d'autres sociétés animées par [P] [D] et Madame [C], notamment celle envers la SCI [11].



Les 21 et 23 décembre 2011, un acte d'avocat a été signé par les trois héritiers et Madame [C], tant en son nom personnel qu'en qualité de gérante de la SCI [11], aux fins de procéder à l'extinction des litiges et à l'apurement des comptes par rapport à la [13].

Par cet acte, les parties ont renoncé à contester la validité des cessions de parts de 2008 et de 2010 et ont accepté irrévocablement la dévolution successorale contenue dans la déclaration de succession du 25 mai 2009.



A l'issue de cet acte :

- les héritiers de [P] [D] ont cédé à Madame [C] pour 1 euro symbolique la part de la SCI [11] que leur frère détenait à son décès,

- le compte courant d'associé de Madame [C] dans la [13] d'un montant de 15007,55 euros a été réglé par une partie de la somme de 47.500 euros qui lui avait été versée,

- la SCI [11] a cédé aux consorts [D] sa créance envers la [13] (d'un montant de 1.058.678,68 euros) moyennant un prix de 114.992,45 euros paiement par en partie par compensation avec le solde de la somme de 47500 euros reçue et par le versement d'un montant de 82.500 euros, réglé selon un échéancier jusqu'au 10 janvier 2013.



Par cet acte, la SCI [11] s'est interdit de réclamer à la [13] le paiement de la créance pendant la durée de l'échéancier et à l'issue de ce dernier si il a été respecté.



A l'issue de cette opération, le compte courant correspondant à la créance envers la SCI [11] et celui envers le défunt ont été fusionnés sous le numéro [XXXXXXXXXX06] intitulé 'COMPTE HOIRIE [P] [D]' pour un montant de 1.068.004,75 euros, le défunt étant titulaire à son décès envers la société d'une somme de 9326,07 euros.



Le 29 mars 2012, le tribunal de commerce de PARIS a constaté la clôture de la procédure collective de la [13] pour extinction du passif.

Il a constaté la disparition de l'état de cessation des paiements au motif que le montant des liquidités disponibles permettait de faire face au passif déclaré.

Ce dernier ne comprenait pas les créances des sociétés familiales notamment de la SCI [11], non déclarée.



Le 22 janvier 2016, le tribunal de grande instance de Marseille, saisi par [O] [V] aux fins de partage de la succession de son frère et de partage des indivisions nées après le décès, a :

- rejeté l'exception d'incompétence au profit du tribunal de commerce de Paris soulevée au motif que le litige opposait des associés de sociétés commerciales,

- ordonné une expertise comptable afin de déterminer, notamment, la propriété des fonds présents sur un compte au nom de l'hoirie dans la société [15], vérifier la présence d'irrégularités dans la gestion de la SCI [10] et vérifier si la créance de la [14] sur la [13] a une contrepartie.



Monsieur [U], expert judiciaire, a déposé rapport de ses opérations le 30 mars 2018.



Dans le cadre d'un accord transactionnel intervenu les 27 et 30 septembre 2019 entre les héritiers de [P] [D], afin de régler les litiges relatifs à sa succession.

Les parties ont notamment convenu ce qui suit :

- [O] [V] a reçu une indemnité de 425.000 euros,

- elle a renoncé à tous ses droits dans la succession de son frère et à toutes ses demandes dans les instances en cours devant le tribunal de grande instance de Marseille,

- [Y] [D] et [K] [A] ont renoncé à leurs revendications vis à vis de [O] [V] concernant la succession de leur frère et à leurs demandes dans les instances en cours devant le tribunal de grande instance de Marseille

- [O] [V] s'est engagée à céder ses droits indivis sur un immeuble à [Localité 9]

- elle s'est engagée à céder à son frère et sa soeur les 1832 parts de la société [13] qu'elle possédait privativement et sa quote-part d'un tiers des 5 parts indivises faisant partie de la succession de [P] [D] moyennant le prix d'1 euro symbolique.



Cette cession a eu lieu concernant la [13] le 14 novembre 2019.



Par courrier du 14 novembre 2019, [O] [V] a réclamé le remboursement des avances personnellement consenties à la [13] pour 18.037,31 euros et de sa quote-part, estimée à la somme de 356.001,58 euros, dans le compte courant d'associé indivis envers cette société .



Le gérant de la [13] lui a opposé l'accord transactionnel de 2019, la signature de l'accord de 2011 contenant rachat de la créance de la SCI [11] en qualité d'héritiers de [P] [D], la forclusion de sa créance, non déclarée dans la procédure collective, et l'absence de droit de créance en l'absence de cession effective de la créance.



Le 12 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Marseille a constaté le désistement des parties dans l'instance en partage.





[O] [V] a fait assigner le 22 septembre 2020, la [13] devant le tribunal judiciaire de TOULON aux fins d'obtenir qu'il soit mis fin à l'indivision sur le compte courant d'associés dans la [13] intitulé 'COMPTE HOIRIE [P] [D]' et que la [13] soit condamnée à lui verser la somme de 356.001,58 euros, représentant le tiers de son montant lui revenant.



Par conclusions d'incident, [O] [V] a sollicité la condamnation de la [13] à la production forcée des grands livres de compte 2019 à 2021 et des documents sociaux et comptables.



La [13] a élevé une fin de non recevoir de la demande en partage de l'indivision pour défaut de mise en cause des coindivisaires de la demanderesse.



Par ordonnance contradictoire du 4 juillet 2023, à laquelle il convient de se référer pour plus ample exposé des faits, procédure et prétentions des parties, le juge de la mise en état a :

- REJETÉ la demande incidente de [O] [V] en production forcée de pièces

-DÉCLARÉ irrecevable la demande tendant au paiement de la somme de 356.001,58 euros formée par [O] [V] en remboursement de sa part indivise sur le compte [XXXXXXXXXX06] intitulé « COMPTE HOIRIE [P] [D] » à l'encontre de la SARL [13] ([13]) ;

-REJETÉ les demandes formées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-CONDAMNÉ [O] [V] aux dépens de l'incident.



[O] [V] a formé appel par déclaration du 1er août 2023.



Le 28 août 2023 l'appelante a répondu à l'interrogation du président de la chambre que la décision n'avait pas été signifiée à partie.



Le 13 septembre 2023, les parties ont été avisées de la fixation de l'affaire selon la procédure de jugement à bref délai à l'audience de plaidoiries du 20 mars 2024 avec une clôture de la procédure prévue au 21 février 2024.



Dans ses premières conclusions du 28 septembre 2023, l'appelante demande à la cour de :



- A titre principal, la RECEVOIR en son appel,

- INFIRMER l'ordonnance en ce qu'elle a :

-Rejeté la demande incidente de [O] [V] en production forcée de pièces

-Déclaré irrecevable la demande tendant au paiement de la somme de 356.001,58 euros formée par [O] [V] en remboursement de sa part indivise sur le compte [XXXXXXXXXX06] intitulé « COMPTE HOIRIE [P] [D] » à l'encontre de la SARL [13] ([13]) ;

-Rejeté les demandes formées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamné [O] [V] aux dépens du présent incident ,



Statuant à nouveau ,

- DÉCLARER recevable la demande tendant au paiement par la [13] de la somme de 356.001,58 euros au titre de sa part indivise dans le compte courant d'associé eu égard à l'assignation délivrée aux coindivisaires,

- CONDAMNER la [13] à communiquer, dans les 15 jours de l'arrêt, sous astreinte de 2000 euros par jour, les trois grands livres comptables des années 2019, 2020 et 2021 assortis des comptes annuels et des procès-verbaux d'assemblées afférents,

- CONDAMNER la [13] à lui payer la somme de 3000 euros à titre des frais irrépétibles afférent à l'instance d'incident devant le juge de la mise en état,

- CONDAMNER la [13] aux dépens de l'incident,



En tout état de cause,

- DEBOUTER la [13] de toutes ses demandes,

- La CONDAMNER à lui verser la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure afférents à l'instance d'appel

- La CONDAMNER aux dépens d'appel.



Par ses conclusions communiquées le 20 octobre 2023, la [13] demande à la cour de :

- CONFIRMER l'ordonnance du 4 juillet 2023



Y ajoutant,

- CONDAMNER [O] [V] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, au titre du présent incident ;

- CONDAMNER [O] [V] aux entiers dépens de l'incident, en application de l'article 699 du Code de procédure civile.



Par ses dernières conclusions du 1er février 2024, l'appelante maintient ses prétentions.

Elle ajoute que la cause d'irrecevabilité pour absence de mise en cause des co-héritiers a disparu en cause d'appel du fait de la jonction de la nouvelle assignation délivrée avec l'affaire principale.

Elle produit deux nouvelles pièces, soit l'avis de fixation à bref délai et un avis de jonction du 5 décembre 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de TOULON.



Le 16 février 2024, l'intimée a communiqué de nouvelles conclusions et deux nouvelles pièces. Elle soulève un nouveau moyen d'irrecevabilité de l'action de Madame [V].

L'appelante a sollicité le report de la clôture afin de pouvoir y répliquer.



Le président de la chambre a refusé le report.



La clôture a été prononcée le 21 février 2024 à 10 h 04.



Par conclusions du 21 février 2024, à 17 h 51, l'appelante communique trois nouvelles pièces (de 46 à 48).

Elle demande à la cour, en sus des prétentions antérieures qu'elle maintient de :

- REVOQUER l'ordonnance de clôture,

- A défaut, REJETER des débats les pièces et conclusions communiquées par l'intimée le 16 février 2024.




Motifs de la décision



En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.





Sur le respect du principe de la contradiction



L'article 15 du code de procédure civile dispose que 'Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.'



L'article 16 du même code ajoute que 'Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.

Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations'.



L'intimée a déposé des conclusions le 16 février 2024 dans lesquelles elle développe un moyen nouveau d'irrecevabilité alors qu'elle avait été avisée dès le 13 septembre 2023 que la clôture de la procédure serait prononcée le 21 février 2024 et que la jonction prononcée par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de TOULON qui modifie les données du litige date du 5 décembre 2023.



En concluant tardivement, soit deux jours ouvrés avant la clôture par des écritures soulevant des moyens nouveaux, elle n'a pas permis à son contradicteur de prendre connaissance utilement des nouvelles prétentions et des pièces jointes et d'y répondre avant l'ordonnance de clôture.



Il sera toutefois relevé que les conclusions du 16 février 2024 constituaient une réponse à celles de l'appelante du 1er février 2024.

Dans ces écritures, elle opposait à l'intimée la régularisation de la procédure au fond par la jonction du 5 décembre 2023 entre la procédure principale et la nouvelle assignation qu'elle avait fait délivrer à la [13] et aux co-indivisaires.

Or, à compter de la jonction, elle disposait du temps nécessaire pour l'évoquer dans ses conclusions à une date moins tardive par rapport à celle de la clôture annoncée.



Alors qu'elle évoquait la couverture de la cause d'irrecevabilité dans ses conclusions du 28 septembre 2023 du fait de la délivrance d'une nouvelle assignation, elle a soulevé le moyen tiré de la régularisation par ses conclusions du 1er février 2024.



Par conséquent, il convient d'écarter des débats les conclusions et les pièces notifiées par l'appelante le 1er février 2024 et l'intimée le 16 février 2024.



La cour statuera au vu des conclusions notifiées par l'appelante le 28 septembre 2023 et l'intimée le 20 octobre 2023.



Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture



Elle est sollicitée par l'appelante afin de lui permettre de répliquer aux conclusions de l'intimée du 16 février 2024.



Dans la mesure où ces écritures ont été écartées des débats, il n'existe pas de cause grave justifiant la révocation de l'ordonnance de clôture.



Cette demande sera rejetée et les conclusions et pièces du 21 février 2024 seront déclarées irrecevables en application des dispositions de l'article 802 du code de procédure civile.





Sur l'étendue de la saisine de la cour



Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.



Les demandes de 'donner acte' sont dépourvues de tout enjeu juridique et ne constituent pas des prétentions au succès desquels les parties pourraient avoir un intérêt légitime à agir au sens de l'article 4 du code de procédure civile.



Ne constituent pas par conséquent des prétentions au sens de l'article sus-cité du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir 'constater' ou 'donner acte' ou encore à 'prendre acte' de sorte que la cour n'a pas à y répondre.



Il n'y a donc pas lieu de reprendre ni d'écarter dans le dispositif du présent arrêt les demandes tendant à 'constater que' ou 'dire que ' telles que figurant dans le dispositif des conclusions des parties, lesquelles portent sur des moyens ou éléments de fait relevant des motifs et non des chefs de décision devant figurer dans la partie exécutoire de l'arrêt.



L'article 9 du code de procédure civile dispose qu''il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention' et que l'article 954 du même code, dans son alinéa 1er, impose notamment aux parties de formuler expressément ses prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée 'avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et leur numérotation'.



Par ailleurs l'effet dévolutif de l'appel implique que la cour connaisse des faits survenus au cours de l'instance d'appel et depuis le jugement déféré et statue sur tous les éléments qui lui sont produits même s'ils ne se sont révélés à la connaissance des parties qu'en cours d'instance d'appel.



En l'espèce, la déclaration d'appel porte sur tous les chefs de l'ordonnance critiquée.



Sur la demande de production de pièces



L'appelante soutient que les pièces réclamées sont nécessaires à la solution du litige.

Elle indique que des produits exceptionnels de 460.000 euros en 2020 auraient servi à rembourser des comptes courants d'associés de la [13] mais qu'elle n'en n'a pas bénéficié.

Elle sollicite la production des comptes pour confirmer ce fait.



Elle ajoute que, contrairement à ce qu'affirme le juge de la mise en état, la [13] n'a pas confirmé, ni contredit la somme réclamée.



L'intimée confirme en tant que de besoin, les écritures figurant dans la pièce adverse n°10, soit le grand livre 2018, portant sur les comptes suivants :

- numéro [XXXXXXXXXX06] 'COMPTE HOIRIE [P] [D]' : 1.068.004,75 euros - numéro 4510221 FRAIS [V] : 18.037,31 euros.



Elle précise qu'elle ne conteste pas les montants réclamés mais la recevabilité des demandes en paiement et leur bien fondé.

Elle soutient que, n'étant plus associée, Madame [V] n'a pas le droit de recevoir communication des pièces comptables de la société qui sont protégées par le secret des affaires.

Elle précise qu'elle dispose des documents comptables publiés.



L'article 788 du code de procédure civile prévoit que le juge de la mise en état, pendant la phase d'instruction de la procédure, exerce tous les pouvoirs nécessaires à la communication, l'obtention et la production des pièces par les parties.



Il appartient à celui qui sollicite la production forcée d'une pièce d'établir que ces dernières sont nécessaires à la solution du litige et qu'il ne peut y avoir accès.

Il appartient à celui qui s'en prévaut de communiquer les pièces qu'il invoque.



A l'appui de sa demande de ce chef, l'appelante vise, dans ses conclusions, un courrier officiel du 17 juin 2020 et une sommation du 4 août 2020 adressée à la [13] de régler les sommes réclamées.



Elle fait aussi état de produits exceptionnels qui auraient été distribués par la [13] selon les comptes 2020. Elle ne vise cependant aucune pièce permettant de prouver cette affirmation.



Son conseil fait état, dans un courrier du 15 avril 2022, d'une lecture des comptes annuels de 2020 l'ayant conduit à un soupçon de fraude. Pourtant

Madame [V] se prévaut, dans ses écritures, d'une absence de dépôt des documents comptables relatifs à cette période et, dans la note du consultant qu'elle a mandaté, Monsieur [G], du 16 août 2022, il n'est pas fait mention de ces comptes.



Madame [V] ne produit pas les comptes annuels 2020 que son conseil a pu examiner, en indiquant qu'ils avaient été déposés le 12 octobre 2021, qui auraient pu fonder sa demande de communication de pièces, alors que ce dernier .



Elle échoue donc à faire la preuve de la nécessité d'ordonner à la [13] la production forcée des pièces réclamées.



La décision de première instance sera confirmée de ce chef.



Sur la question de la recevabilité de la demande en paiement



L'appelante soutient que le compte courant d'associé est assimilable à un prêt d'un associé envers la société et qu'il est indépendant des parts sociales, de sorte qu'une cession de parts n'induit pas nécessairement une cession du compte courant.



Elle ajoute qu'il appartenait à la [13] si elle l'estimait nécessaire d'attraire en la cause les autres titulaires du compte courant litigieux.



Elle indique qu'elle a fait délivrer le 19 septembre 2023, une autre assignation à la [13], à [K] [A] et à [Y] [D] aux fins d'obtenir le partage de la créance indivise et l'attribution à chaque indivisaire d'un tiers de son montant.



Elle précise que les sommes ayant servi à régler la créance de la SCI [11] envers la [13] ne sont pas des fonds indivis issus de la succession de leur frère mais des fonds personnels de chaque indivisaire.

Elle soutient qu'il s'agit d'une créance indivise des consorts [D] hors succession et non une créance de la succession de leur frère. Elle en déduit qu'elle ne faisait pas partie de l'accord transactionnel de 2019.



Elle précise que le compte courant indivis n'était pas mentionné dans le rapport de l'expert judiciaire chargé d'établir les comptes de la succession de leur frère.





L'intimée soutient que, malgré la délivrance d'une assignation aux autres indivisaires, ces derniers n'ont pas été mis en cause dans le cadre de la procédure dans laquelle s'est prononcé le juge de la mise en état.



Elle indique qu'elle soulèvera dans le cadre de la nouvelle procédure la fin de non recevoir tirée de l'existence d'une transaction conclue au mois de septembre 2019.



En l'espèce, il est constant que le compte courant dont Madame [V] a sollicité le règlement en partie est un compte indivis.

En tout état de cause, la relation des faits par Madame [V] révèle que le rachat de la créance de la SCI [11] a été financé par les trois frères et soeurs indistinctement, de sorte qu'ils sont titulaires de droits indivis sur ce compte.



La demande de Madame [V] tendant à l'attribution par la [13] à chacun d'un tiers de la somme s'analyse en une demande de partage de l'indivision qui implique la mise en cause des coindivisaires.

En effet, ces derniers doivent être mis en mesure de faire valoir leurs droits relativement à la réalité des droits invoqués par la demanderesse et leur étendue.



A la date à laquelle le juge de la mise en état a statué, Madame [V] n'avait pas mis en cause les autres indivisaires.



A la date à laquelle la cour statue, la cause d'irrecevabilité de l'action initiée par assignation du 22 septembre 2020 n'a pas disparu puisque les autres indivisaires n'ont été mis en cause par assignation en intervention forcée à cette instance et n'y sont pas intervenus volontairement.



Madame [V] a fait délivrer une nouvelle assignation qui a donné lieu à l'enregistrement d'une nouvelle procédure concernant une instance distincte et la jonction ne pourrait, en tout état de cause, pas créer une instance unique.



Il convient, en conséquence, de confirmer la décision du premier juge de déclarer irrecevable la demande de partage de la somme indivise





Sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance



L'appelante a visé les chefs de l'ordonnance ayant rejeté les demandes au titre des frais irrépétibles de procédure et l'ayant condamnée aux dépens.



Elle demande à la cour de condamner la [13] aux dépens de l'incident et à l'indemniser des frais irrépétibles exposés.



La [13] sollicite la confirmation de l'ordonnance sur tous ses chefs.



La cour confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance critiquée.



Il convient, en conséquence, de confirmer également la condamnation de Madame [V] à supporter les dépens de l'incident en première instance.

La décision de première instance ayant rejeté les demandes des parties au titre des frais irrépétibles de procédure sera également confirmée.



Sur les dépens et les frais irrépétibles relatifs à l'instance d'appel



Madame [V] succombant en appel, elle supportera les dépens de cette instance.



Elle sera condamnée à verser à la [13] la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure qu'il est inéquitable de laisser à sa charge.



La demande au titre des frais irrépétibles de procédure de Madame [V] sera rejetée.





PAR CES MOTIFS



La cour statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort :



Ecarte des débats les conclusions et pièces communiquées par l'appelante le 1er février 2024 et par l'intimée le 16 février 2024 ;



Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture ;



Déclare irrecevables les conclusions et pièces communiquées par l'appelante le 21 février 2024 ;



Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour



Y ajoutant,



Condamne Madame [O] [V] née [D] aux dépens d'appel ;



Condamne Madame [O] [V] née [D] à verser à la [13] la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure ;



Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires.



Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,



Signé par Madame Michèle JAILLET, présidente, et par Madame Fabienne NIETO, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.





La greffière La présidente

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