12 avril 2024
Cour d'appel de Colmar
RG n° 24/01343

Chambre 6 (Etrangers)

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)





N° RG 24/01343 - N° Portalis DBVW-V-B7I-IIZQ

N° de minute : 132/2024





ORDONNANCE





Nous, Anne GALLIATH, Conseillère à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assistée de Laura BONEF, greffière ;






Dans l'affaire concernant :



M. X se disant [P] [B]

né le 25 Juillet 1996 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité algérienne



Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]





VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.754-1, L761-8, R.741-1, R.744-16, R.761-5 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile (CESEDA) ;



VU l'arrêté pris le 14 mars 2024 par M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE faisant obligation à M. X se disant [P] [B] de quitter le territoire français ;



VU la décision de placement en rétention administrative prise le 08 avril 2024 par M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE à l'encontre de M. X se disant [P] [B], notifiée à l'intéressé le même jour à 19h30 ;



VU le recours de M. X se disant [P] [B] daté du 10 avril 2024, reçu et enregistré le même jour à 13h12 au greffe du tribunal, par lequel il demande au tribunal d'annuler la décision de placement en rétention administrative pris à son encontre ;



VU la requête de M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE datée du 10 avril 2024, reçue et enregistrée le même jour à 13h24 au greffe du tribunal, tendant à la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 28 jours de M. X se disant [P] [B] ;



VU l'ordonnance rendue le 11 Avril 2024 à 11h17 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, rejetant le recours de M. X se disant [P] [B], déclarant la requête de M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE recevable et la procédure régulière, et ordonnant la prolongation de la rétention de M. X se disant [P] [B] au centre de rétention de Geispolsheim, ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de 28 jours à compter du 10 avril 2024 ;



VU l'appel de cette ordonnance interjeté par M. X se disant [P] [B] par voie électronique reçue au greffe de la Cour le 12 Avril 2024 à 09h50 ;



VU la proposition de LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE par voie électronique reçue le 12 avril 2024 afin que l'audience se tienne par visioconférence,



VU les avis d'audience délivrés le 12 avril 2024 à l'intéressé, à Maître Orlane AUER, avocat de permanence, à M. [V] [X], interprète en langue arabe assermenté, à M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE et à M. Le Procureur Général ;



Le représentant de M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE, intimé, dûment informé de l'heure de l'audience par courrier électronique du 12 avril 2024, a comparu.



Après avoir entendu M. X se disant [P] [B] en ses déclarations par visioconférence et par l'intermédiaire de M. [V] [X], interprète en langue arabe assermenté, Maître Orlane AUER, avocat au barreau de COLMAR, commise d'office, en ses observations pour le retenu, puis Maître Béril MOREL, avocat au barreau de Paris, en ses observations pour la SELARL CENTAURE AVOCATS, conseil de M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE, et à nouveau l'appelant qui a eu la parole en dernier.






MOTIFS DE LA DÉCISION :



Sur la recevabilité de l'appel



L'appel interjeté par Monsieur [P] [B] le 12 avril 2024 (à 9h50), par déclaration écrite et motivée, à l'encontre de l'ordonnance rendue le 11 avril 2024 (à 11h17) par le juge des libertés et de la détention de Strasbourg, dans le délai prévu à l'article R. 743-10 du CESEDA, est recevable.



Sur l'appel



Monsieur [P] [B] interjette appel de l'ordonnance du 11 avril 2024 du juge des libertés et de la détention de Strasbourg ordonnant une première prolongation de sa rétention pour une durée de 28 jours.



Sur la recevabilité des moyens nouveaux



Il ressort des dispositions de l'article L.743-11 du CESEDA qu''à peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité antérieure à une audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la mesure ne peut être soulevée lors d'une audience ultérieure'.



Sauf s'ils constituent des exceptions de procédure au sens de l'article 74 du Code de procédure Civile, les moyens nouveaux sont recevables en appel.



En application des dispositions de l'article 563 du code de procédure civile, pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.



Les moyens nouveaux de l'acte d'appel peuvent être complétés ou régularisés dans le délai de recours de 24h.



En l'espèce, dans sa déclaration d'appel, Monsieur [P] [B] soulève l'irrégularité de la requête en prolongation de la rétention administrative, ce moyen nouveau est recevable.



Sur l'incompétence de l'auteur de l'acte



En application des dispositions de l'article R.742-1, 'le juge des libertés et de la détention est saisi aux fins de prolongation de la rétention d'une simple requête par l'autorité administrative, dans les conditions prévues au chapitre III, avant l'expiration, selon le cas, de la période de 48h mentionnée à l'article L.742-1 ou de la période de prolongation ordonnée en application des articles L.742-4, L.742-5, L.742-6 ou L.742-7".



Le conseil de l'intéressé fait valoir que le juge judiciaire doit vérifier la compétence du signataire de la requête et l'existence des mentions des empêchements éventuels des délégataires de signature.



Il résulte des pièces de procédure que la signataire de la requête tendant à la première prolongation de la rétention, Madame [R] [K], a régulièrement reçu délégation de signature pour ce faire, par arrêté du 1er février 2024.



Le moyen est donc infondé, la mention d'empêchements éventuels des autres délégataires de signature n'étant pas prévue par les textes.





Sur le pouvoir renforcé de l'autorité judiciaire dans le contrôle de la rétention



Le conseil de Monsieur [P] [B] fait valoir qu'il ne ressort pas de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qu'il ait procédé à l'examen d'office de tout moyen suceptible d'emporter la mainlevée de la rétention alors que la Cour de justice de l'union européenne a rappelé, dans un arrêt du 8 novembre 2022, que le juge judiciaire doit relever d'office tout non-respect d'une condition de légalité dans le cadre des procédures de contrôle de la rétention administrative.

Il fait valoir que le juge des libertés et de la détention aurait du se prononcer sur l'absence de diligence envers les autorités consulaires et le caractère disproportionné de la rétention du fait de la situation personnelle de l'étranger. Il soutient que l'administration n'a effectué des diligences que le lendemain du placement en rétention administrative et que la prolongation de la rétention administrative ordonnée par le juge des libertés et de la détention est disproportionnée au regard de la situation personnelle de l'intéressé qui est marié religieusement avec une ressortissante néerlandaise enceinte et dispose d'une adresse stable en France.



Il convient de souligner que ces moyens n'ont pas été soulevés en première instance.



L'exigence de motivation de la décision n'impose absolument pas au juge de rappeler tous les critères du placement en rétention administrative et de la prolongation de la rétention administrative et moyens possibles de nullité et d'énoncer si, pour chacun, ils ont bien été respectés.



Il ressort de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 4] qu'il a examiné la régularité de la rétention administrative, il a ainsi énoncé dans sa décision que l'étranger avait été pleinement informé de ses droits et qu'il avait été en mesure de les exercer dès son placement au lieu de rétention, qu' il n'était émis aucune critique sur les diligences accomplies jusque là par l'administration et que rien ne s'opposait à la prolongation de la rétention administrative.



En outre, Monsieur [P] [B], dépourvu de document d'identité ou de voyage, a été placé en rétention administrative le 8 avril 2024 en exécution d'une obligation de quitter le territoire prise à son encontre le 14 mars 2024. Dès le 9 avril 2024, soit dès le lendemain du placement en rétention qui a eu lieu le 8 avril 2024 à 19h30, la préfecture a adressé aux autorités consulaires algériennes une demande de reconnaissance. La demande est en cours d'instruction.

Si la mesure d'éloignement n'a pas pu être mise en oeuvre dans le délai de 48 heures qui s'est écoulé depuis le placement en rétention administrative, il ressort de l'ensemble de ces éléments que l'administration a accompli les diligences nécessaires afin d'exécuter la mesure d'éloignement dans les meilleurs délais et que les délais pour instruire les demandes ne sont pas imputables à l'administration.



Il ressort de la procédure que l'étranger ne produit aucun justificatif relatif à sa situation personnelle ni à sa domiciliation et n'a pas respecté les termes d'une précédente assignation à résidence.Il ne présente donc pas de garantie de représentation suffisante propre à prévenir le rique de soustraction à la mesure d'éloignement dont il est l'objet. Ainsi, la rétention administrative n'est pas disproportionnée.



En conséquence, le moyen relatif à l'absence d'examen d'office de tout moyen suceptible d'emporter la mainlevée de la rétention par le juge des libertés et de la détention sera rejeté.



Sur les conditions d'une assignation à résidence



Monsieur [P] [B] n'ayant pas remis à un service de police ou une unité de gendarmerie l'original du passeport ou tout document d'identité justificatif de son identité, il ne remplit pas les conditions d'une assignation à résidence telles que fixées par l'article L. 743-13 du CESEDA.



Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [P] [B].









PAR CES MOTIFS :



DÉCLARONS l'appel de M. X se disant [P] [B] recevable en la forme ;



au fond, le REJETONS ;



CONFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg le 11 Avril 2024 ;



RAPPELONS à l'intéressé les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention :

- il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin,

- il peut communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix ;



DISONS avoir informé M. X se disant [P] [B] des possibilités et délais de recours contre les décisions le concernant.



Prononcé à [Localité 1], en audience publique, le 12 Avril 2024 à 15h38, en présence de

- l'intéressé par visio-conférence

- Maître Orlane AUER, conseil de M. X se disant [P] [B]

- Maître Béril MOREL pour la SELARL CENTAURE AVOCATS, conseil de LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE

- de l'interprète, lequel a traduit la présente décision à l'intéressé lors de son prononcé.



Le greffier, Le président,



















reçu notification et copie de la présente,

le 12 Avril 2024 à 15h38





l'avocat de l'intéressé

Maître Orlane AUER









Comparante



l'intéressé

M. X se disant [P] [B]



né le 25 Juillet 1996 à [Localité 3]





Comparant par visioconférence



l'interprète

M. [V] [X]











Comparant



l'avocat de la préfecture

Me Béril MOREL











Comparante









EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :



- pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition,

- le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou en rétention et au ministère public,

- le délai du pourvoi en cassation est de deux mois à compter du jour de la notification de la décision, ce délai étant augmenté de deux mois lorsque l'auteur du pourvoi demeure à l'étranger,

- le pourvoi en cassation doit être formé par déclaration au Greffe de la Cour de cassation qui doit être obligatoirement faite par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation,

- l'auteur d'un pourvoi abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile,

- ledit pourvoi n'est pas suspensif.









La présente ordonnance a été, ce jour, communiquée :

- au CRA de [Localité 2] pour notification à M. X se disant [P] [B]

- à Maître Orlane AUER

- à M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE

- à la SELARL CENTAURE AVOCATS

- à M. Le Procureur Général près la Cour de ce siège.



Le Greffier











M. X se disant [P] [B] reconnaît avoir reçu notification de la présente ordonnance

le À heures



Signature de l'intéressé

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