4 avril 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 23-14.534

Première présidence (Ordonnance)

ECLI:FR:CCASS:2024:OR90398

Texte de la décision

COUR DE CASSATION
Première présidence
__________
ORad



Pourvoi n° : Y 23-14.534
Demandeur : République du Benin
Défendeur : la banque Société Générale de Surveillance
Requête n° : 1257/23
Ordonnance n° : 90398 du 4 avril 2024





ORDONNANCE
_______________



ENTRE :

la Société Générale de Surveillance, ayant la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, la SARL Ortscheidt pour avocats à la Cour de cassation,

ET :

la République du Benin, ayant la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret pour avocat à la Cour de cassation,
Michèle Graff-Daudret, conseiller délégué par le premier président de la Cour de cassation, assistée de Vénusia Ismail, greffier lors des débats du 14 mars 2024, a rendu l'ordonnance suivante :

Vu la requête du 26 décembre 2023 par laquelle la Société Générale de Surveillance demande, par application de l'article 1009-1 du code de procédure civile, la radiation du pourvoi numéro Y 23-14.534 formé le 11 avril 2023 par la République du Benin à l'encontre de l'arrêt rendu le 9 février 2023 par la cour d'appel de Paris ;

Vu les observations développées au soutien de la requête ;

Vu les observations présentées en défense à la requête ;

Vu l'avis de Anne-Marie Grivel, avocat général, recueilli lors des débats ;

Par arrêt du 9 février 2023 (RG 22/10203), la cour d'appel de Paris a déclaré irrecevable l'appel formé par la République du Congo contre le jugement d'orientation du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris en date du 12 mai 2022 (RG 20/00247) et condamné la République du Bénin à payer à la SA de droit suisse Société Générale de Surveillance la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 11 avril 2023, la République du Bénin a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt (enregistré sous le N°Y 23-14.534).

Par requête du 26 décembre 2023, la Société Générale de Surveillance a demandé la radiation du pourvoi, sur le fondement de l'article 1009-1 du code de procédure civile, en invoquant la non-exécution de l'arrêt attaqué.

Par observations du 5 mars 2024, la République du Bénin fait valoir que l'inexécution des seules condamnations au paiement de frais irrépétibles ne peut justifier la radiation du pourvoi. Elle ajoute que le jugement d'orientation dont appel a reçu une pleine exécution puisque les immeubles saisis ont été vendus aux enchères publiques par jugements d'adjudication du 19 octobre 2023, respectivement, selon les lots, pour un prix de 50 000 euros, 70 000 euros et 60 000 euros, et que, dans ces conditions, la radiation du pourvoi porterait une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge de cassation. Elle précise qu'au surplus, son conseil est dans l'attente du RIB CARPA du conseil de la Société Générale de Surveillance afin de permettre le paiement des frais irrépétibles par virement, et qu'elle n'oppose donc nullement un refus délibéré de se conformer à l'exécution de cette condamnation accessoire, dont le montant est au surplus très modeste au regard de la valeur des biens immobiliers adjugés. Elle demande le rejet de la requête.

Par observations complémentaires du 11 mars 2024, la République du Bénin indique que la Société Générale de Surveillance exige, pour fournir un RIB CARPA, qu'elle s'engage à payer la somme de 64 400 euros, et qu'elle ne manifeste, quant à elle, aucune volonté de se soustraire au paiement des frais irrépétibles mais en est empêchée par l'obstruction de la Société Générale de Surveillance. Elle demande, en conséquence, d'ordonner le renvoi de l'affaire, afin que la Société Générale de Surveillance communique un RIB CARPA permettant le paiement de la somme de 3 000 euros, ajoutant que l'exigence de cette société du paiement de la somme de 50 000 euros, résultant d'un arrêt d'exequatur du 9 février 2023, étranger à la présente procédure, ou des dépens, qui n'ont au demeurant pas été liquidés, est dénuée de tout fondement.

Dans sa requête et ses observations du 13 mars 2024, la Société Générale de Surveillance fait valoir que, dès que le RIB a été demandé par le conseil de la République du Bénin, soit le 7 mars 2024, elle le lui a immédiatement transmis. Elle ne fait donc aucune « obstruction » au règlement des frais irrépétibles, et tient à souligner l'absence de toute volonté réelle de la République du Bénin de déférer à l'arrêt attaqué, même pour le règlement de sommes modiques, ce comportement caractérisant des circonstances exceptionnelles permettant de justifier la radiation du fait de la non-exécution des condamnations prononcées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 1009-1 du code de procédure civile, hors les matières où le pourvoi empêche l'exécution de la décision attaquée, le premier président ou son délégué décide, à la demande du défendeur et après avoir recueilli l'avis du procureur général et les observations des parties, la radiation d'une affaire lorsque le demandeur ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée de pourvoi, à moins qu'il ne lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que le demandeur est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

L'arrêt attaqué en qu'il déclare irrecevable l'appel formé contre un jugement d'orientation du juge de l'exécution ne prononce aucune condamnation susceptible d'exécution.

Sauf circonstances exceptionnelles, la seule inexécution de la condamnation prononcée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ne justifie pas, en raison de son caractère accessoire, la radiation du pourvoi, laquelle serait de nature à porter une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge de cassation.

Cependant, en l'espèce, alors que sa condamnation au paiement de la somme de 3 000 euros a été prononcée par l'arrêt attaqué le 9 février 2023 et que la requête en radiation a été formée le 26 décembre suivant, la République du Bénin a attendu le 7 mars 2024 pour demander à la Société Générale de Surveillance un RIB afin de lui verser cette somme, modique, que, malgré la transmission dudit relevé d'identité bancaire le 8 mars 2024, et sa prétendue volonté de déférer aux causes de l'arrêt frappé de pourvoi, elle n'a toujours pas payée, ce comportant caractérisant les circonstances exceptionnelles justifiant la radiation.

Dès lors, la requête doit être accueillie.

EN CONSÉQUENCE :

L'affaire enrôlée sous le numéro Y 23-14.534 est radiée.

En application de l'article 1009-3 du code de procédure civile, sauf constat de la péremption, l'affaire pourra être réinscrite au rôle de la Cour de cassation sur justification de l'exécution de la décision attaquée.



Fait à Paris, le 4 avril 2024


Le greffier,
Le conseiller délégué,







Vénusia Ismail
Michèle Graff-Daudret

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