20 mars 2024
Cour d'appel de Nîmes
RG n° 23/01172

3ème chambre famille

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

















ARRÊT N°



N° RG 23/01172 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IYVR



ACLM



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES Cab1

14 décembre 2022

N°22/01067







[L]



C/



[R]

































Grosse délivrée le 20/03/2024 à

Me BRUYERE



COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

3ème chambre famille



ARRÊT DU 20 MARS 2024



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Agnès CLAIR- LE MONNYER, Présidente de Chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Agnès CLAIR- LE MONNYER, Présidente de Chambre

Mme Isabelle ROBIN, Conseillère

Mme Elisabeth GRANIER, Conseillère



GREFFIER :



Mme Véronique VILLALBA, Greffière,



DÉBATS :



A l'audience publique du 07 février 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 mars 2024.



APPELANTE :



Madame [Z] [L]

née le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 10]

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée par Me BRUYERE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C-30189-2023-1352 du 07/03/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)



INTIMÉ :



Monsieur [S] [R]

[Adresse 8]

[Adresse 5]



Assigné à l'Etude





ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 17 janvier 2024





ARRÊT :



Arrêt rendu par défaut, prononcé publiquement et signé par Mme Agnès CLAIR- LE MONNYER, Présidente de Chambre, le 20 mars 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour










EXPOSE DU LITIGE :



Monsieur [R] et Madame [L] ont vécu en concubinage.



Le 13 avril 2016, suivant acte reçu par Maître [O], Monsieur [R] et Madame [L] ont acquis à concurrence de moitié chacun la pleine propriété indivise d'un bien immobilier sis à [Localité 10], [Adresse 7] moyennant le prix de 93.000 euros. Ledit bien a été acquis grâce à deux prêts souscrits auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc :

- Premier prêt : PTH AVEC ANTICIPATION FACILIMMO (N°0000075909) d'un montant de 87.431 euros. Il est précisé dans l'acte d'acquisition que le remboursement s'effectuera en deux périodes. Pendant la période d'anticipation : 36 échéances mensuelles de 167,58 euros maximum. Puis pendant la période de remboursement (de 180 mois) : 179 échéances mensuelles de 574,78 euros et une échéance de 575,86 euros.

- Second prêt : à taux zéro (N°000009759l0) d'un montant de 50.668 euros pour 300 mois. Il est précisé dans l'acte d'acquisition que pendant la période d'anticipation le prêteur ne percevra aucun remboursement ni paiement d'intérêt et le prêt mis à disposition par fractions successives au fur et à mesure de l'avancement des travaux. Puis pendant la période de remboursement : 119 échéances mensuelles et constantes de 422,23 euros (hors assurances) et une échéance de 422,63 euros (hors assurance).



Madame [L] et Monsieur [R] ne sont pas parvenus à trouver un accord sur la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux.



Par acte d'huissier en date du 21 avril 2022, Madame [L] a fait assigner Monsieur [R] devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Nîmes aux fins de voir ordonner la liquidation du bien indivis évalué à 125.000 euros, être autorisée à vendre le bien, voir fixer l'indemnité d'occupation due par Monsieur [R] à hauteur de 320 euros par mois, voir statuer sur les attributions des deux véhicules et voir désigner un notaire.



Monsieur [R] a constitué avocat, mais n'a pas conclu.



Par ordonnance en date du 17 mai 2022, les parties ont été envoyées en médiation.



Par jugement rendu contradictoirement le 14 décembre 2022, le juge aux affaires familiales a :

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage du régime matrimonial et de l'indivision existant entre Madame [L] et Monsieur [R],

- désigné pour y procéder, Maître [T] [P], Notaire à [Localité 10] [Adresse 1] auquel copie de ce jugement sera adressée,

- dit qu'en cas d'empêchement du notaire, il sera procédé à son remplacement par ordonnance rendue sur requête,

- autorisé Madame [L] de procéder à la vente du bien indivis sis [Adresse 9] à [Localité 10], sans l'autorisation de Monsieur [R],

- rappelé que l'acte de vente passé en application de l'autorisation donnée par ce jugement sera opposable à Monsieur [R],

- débouté Madame [L] de sa demande d'indemnité d'occupation,

- débouté Madame [L] de sa demande d'attribution du véhicule Renault LAGUNA,

- débouté Madame [L] de sa demande d'attribution à Monsieur [R] du véhicule Renault CLIO,

- renvoyé les parties à poursuivre les opérations de compte, liquidation et partage devant le notaire commis,

- rappelé qu'en application de l'article 1368 du Code de procédure civile, dans le délai d'un an suivant sa désignation, le notaire dresse un état liquidatif qui établit les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à repartir et que toutefois, la désignation d'un expert est une cause de suspension du délai accordé au notaire pour dresser l'état liquidatif, et ce jusqu'à la remise de son rapport,

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage.



Par déclaration en date du 4 avril 2023, Madame [L] a relevé appel de la décision en ses dispositions la déboutant de sa demande d'indemnité d'occupation et de ses demandes d'attribution des véhicules.



Par ses conclusions remises le 21 juin 2023, Madame [L] demande à la cour de :

- INFIRMER le jugement de la 2ème Chambre Civile, Cabinet 1 du 14 décembre 2022 en ce qu'il a débouté Madame [L] de sa demande de fixation d'une indemnité d'occupation à la charge de Monsieur [R].

- INFIRMER le jugement de la 2ème Chambre Civile, Cabinet 1 du 14 décembre 2022 en ce qu'il a débouté Madame [L] de sa demande d'attribution du véhicule Renault Laguna.

- INFIRMER le jugement de la 2ème Chambre Civile, Cabinet 1 du 14 décembre 2022 en ce qu'il a débouté Madame [L] de sa demande d'attribution du véhicule Renault Clio à Monsieur [R].

- CONFIRMER le surplus.

- Statuant à nouveau,

- FIXER l'indemnité d'occupation due par Monsieur [R] à hauteur de 320 € mensuels à compter du 8 novembre 2017 et jusqu'à la vente du bien immobilier ou jusqu'à libération effective de Monsieur [R], des lieux, à charge pour lui d'en justifier.

- JUGER que l'indemnité d'occupation sera liquidée lors des opérations de liquidation et de partage du bien indivis.

- ATTRIBUER à Madame [L] le véhicule Renault Laguna.

- JUGER que cette attribution ne donnera lieu à aucune soulte au profit de Monsieur [R].

- ATTRIBUER à Monsieur [R] le véhicule Renault Clio.

- JUGER que cette attribution ne donnera lieu à aucune soulte au profit de Madame [L].

- JUGER que chaque partie conservera la charge de ses dépens.



L'appelante reproche au premier juge de l'avoir déboutée de sa demande d'indemnité d'occupation au motif qu'elle ne démontrait pas ne pas avoir pu jouir du bien, alors que la concluante a dû quitter l'appartement qui constituait la résidence de la famille le 18 novembre 2017 avec les trois enfants, en l'état des tensions conjugales aggravées par la consommation d'alcool de Monsieur [R] et de la nécessité de protéger ces derniers, et alors que, en tout état de cause, tenant ses faibles ressources, elle ne pouvait régler les frais de ce logement, à savoir l'emprunt et les charges de copropriété, d'autant que Monsieur [R] ne versait aucune contribution à l'entretien et l'éducation des enfants.



Elle souligne que depuis 2020 elle se heurte à l'inertie de Monsieur [R] qui refuse la vente du bien alors que les dettes se sont accumulées.



Madame [L] fait valoir que la valeur locative du bien doit être retenue à 800 euros par mois, à laquelle il convient d'appliquer un abattement de 20%, de sorte que l'indemnité d'occupation doit être fixée à 320 euros par mois à compter de novembre 2017.



S'agissant des deux véhicules indivis, l'appelante reproche au premier juge de l'avoir déboutée de ses demandes d'attribution aux motifs qu'elle ne démontrait pas avoir acquis le véhicule Renault Laguna et ne démontrait pas que Monsieur [R] soit toujours propriétaire du véhicule Renault Clio.



Elle soutient que, si compte tenu de l'ancienneté de l'acquisition du véhicule Renault Laguna, le garage n'a pu retrouver la facture, elle verse aux débats le justificatif de l'emprunt souscrit par son acquisition, les mensualités ayant été réglées avec les fonds du compte commun. Elle précise que le véhicule n'est plus coté à l'Argus, de sorte qu'il doit lui être attribué sans donner lieu à fixation d'une soulte.



Quant au véhicule Renault Clio, Madame [L] indique que si elle n'est pas en mesure, tenant l'inertie de Monsieur [R], de démontrer qu'il en soit toujours propriétaire, il n'en reste pas moins qu'il a été acquis au moyen de fonds indivis et qu'à supposer que Monsieur [R] l'ait vendu, il aurait dû lui régler la moitié du prix de vente. Elle indique ne pas réclamer de soulte.



Il est fait renvoi aux écritures de l'appelante pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.




MOTIFS DE LA DÉCISION :



La déclaration d'appel et les conclusions de la partie appelante ont été signifiées à la partie intimée par acte du 23 juin 2023, remis en étude après vérification de la réalité du domicile (le nom figurant sur l'interphone et la boîte aux lettres), indiquant à la partie intimée que faute pour elle de constituer avocat dans un délai de 15 jours à compter de celle ci, elle s'exposait à ce qu'un arrêt soit rendu contre elle sur les seuls éléments fournis par son adversaire. La partie intimée n'ayant pas constitué avocat, il sera statué par arrêt par défaut conformément aux dispositions de l'article 473 du code de procédure civile.



Au cas de défaut de comparution de l'intimé, la cour ne doit, par application de l'article 472, alinéa 2, du code de procédure civile, faire droit à la demande de l'appelant que dans la mesure où elle l'estime régulière, recevable et bien fondée.



1/ Sur la demande d'indemnité d'occupation :



L'article 815-9 alinéa 2 du code civil dispose que 'l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.'



La jouissance privative d'un immeuble indivis par un des coindivisaires résulte de l'impossibilité de droit ou de fait, pour les autres coindivisaires, d'user de la chose.



En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.



Le premier juge a débouté Madame [L] de sa demande de condamnation de Monsieur [R] à payer une indemnité d'occupation du bien indivis, considérant qu'elle ne justifiait pas avoir été placée dans l'impossibilité d'user du bien indivis et ne démontrait donc pas la jouissance privative et exclusive du bien par Monsieur [R] qu'elle alléguait, n'ayant produit aux débats que des avis de valeur locative établis par des agences immobilières.



Devant la cour, Madame [L] produit pour seul élément, au soutien de sa demande de fixation de l'indemnité d'occupation, un courrier daté du 19 juillet 2020 adressé par Monsieur [R] à son conseil par lequel celui-ci, en réponse au courrier du 23 juin 2020 du conseil de Madame qui évoquait la possibilité pour celle-ci de solliciter une indemnité d'occupation, indique :

'Au sujet de l'indemnité d'occupation, je vous rappelle que c'est madame qui a librement décidé de quitter le domicile conjugal courant le mois de novembre 2017, qu'elle pouvait y revenir quand elle voulait.'



Dans ces conditions, faute pour l'appelante d'établir avoir été placée dans l'impossibilité d'user du bien indivis (ses allégations quant aux difficultés conjugales et à l'état d'alcoolisation de Monsieur [R] aggravant les tensions et nécessitant de protéger les enfants n'étant étayées d'aucun élément), le jugement déféré doit être confirmé.



2/ Sur les demandes d'attribution des deux véhicules :



- Concernant le véhicule Renault Laguna :

Le premier juge a débouté Madame [L] de sa demande d'attribution au motif qu'elle ne produisait aucun document relatif à ce véhicule, ne démontrait pas qu'elle en serait propriétaire indivis, n'établissait pas qu'il était en sa possession, et ne versait aucun document relatif à sa valeur actuelle.



Il relevait que Madame [L] produisait seulement une fiche de synthèse du prêt souscrit auprès du [6] pour un montant de 13.000 euros pour l'acquisition d'un véhicule, portant le nom de Monsieur [R] et la mention 'Mle', remboursable par mensualités de décembre 2009 à novembre 2013, et une facture du 11 décembre 2012 au nom des deux concubins pour un véhicule Renault Clio.



Devant la cour, l'appelante n'apporte pas plus d'élément pour démontrer le caractère indivis de la propriété de ce véhicule. Si elle affirme que le prêt a été souscrit par les deux concubins et que les remboursements des mensualités ont été effectués à partir du compte joint, aucun autre élément que la fiche de synthèse déjà produite en première instance n'est versée aux débats, cette pièce étant insuffisante à établir que le véhicule appartient indivisément aux parties.



En conséquence le jugement ne peut qu'être confirmé de ce chef.



- Concernant le véhicule Renault Clio :

Le premier juge a rejeté la demande d'attribution de ce véhicule à Monsieur [R] sans versement de soulte, en relevant que la seule production de la facture aux deux noms ne démontrait pas que Monsieur [R] était toujours en possession de ce véhicule.



Devant la cour, la preuve est rapportée de ce que Monsieur [R] est resté en possession du véhicule Renault Clio dont la facture en date du 11 décembre 2012, d'un montant de 2.650 euros, est établie aux deux noms. En effet, dans le courrier du 19 juillet 2020 déjà cité, Monsieur [R], après avoir soutenu que les actes d'achat des deux véhicules prouvent qu'ils sont à son seul nom, sollicite la restitution du seul véhicule Laguna, faisant ainsi état implicitement de ce qu'il est toujours en possession du véhicule Renault Clio.



Dans ces conditions, le jugement sera infirmé de ce chef, et il sera fait droit aux demandes de Madame [L] en attribution de ce véhicule à Monsieur [R], sans paiement de soulte.



3/ Sur les dépens :



Madame [L], succombant sur la quasi-totalité de ses demandes, supportera les dépens d'appel.





PAR CES MOTIFS,



LA COUR :



Après en avoir délibéré conformément à la loi,



Statuant publiquement, par défaut, en matière civile et en dernier ressort,



Dans la limite de sa saisine,



Infirme le jugement déféré seulement en ce qu'il a débouté Madame [L] de sa demande d'attribution à Monsieur [R] du véhicule Renault Clio sans versement de soulte,



Statuant à nouveau de ce chef,



Attribue à Monsieur [R] le véhicule Renault Clio sans versement d'une soulte au profit de Madame [L],



Confirme le jugement déféré pour le surplus,



Y ajoutant,



Dit que Madame [L] supportera les dépens d'appel,



Arrêt signé par la Présidente de Chambre et par la Greffière.



LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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