3 octobre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 23-84.236

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:CR01255

Texte de la décision

N° M 23-84.236 F-D

N° 01255


MAS2
3 OCTOBRE 2023


CASSATION


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 3 OCTOBRE 2023



M. [R] [S] a formé un pourvoi contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 27 juin 2023, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de complicité de tentative de meurtre en bande organisée, a ordonné la prolongation exceptionnelle de sa détention provisoire.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Chaline-Bellamy, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [R] [S], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 octobre 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Chaline-Bellamy, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Par arrêt de la cour d'assises en date du 24 juin 2022, M. [R] [S] a été déclaré coupable de complicité de tentative de meurtre en bande organisée et condamné à la peine principale de seize ans de réclusion criminelle.

3. Le 30 juin 2022, M. [S] a relevé appel de cette décision.

4. Par requête du 12 mai 2023, le procureur de la République a sollicité la prolongation exceptionnelle de la détention provisoire de M. [S].

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l'ordonnée attaquée en ce qu'elle a constaté l'existence de raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement dans le délai légal d'un an, de l'appel formé par lui, et a ordonné, à titre exceptionnel, la prolongation de sa détention provisoire pour une durée de six mois, alors « que lorsque l'audience sur le fond ne peut se tenir devant la cour d'assises statuant en appel dans le délai d'un an à compter de l'appel de l'accusé détenu, seul le président de la chambre de l'instruction peut, à titre exceptionnel, et par une décision mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation de la détention de l'accusé pour une nouvelle durée de six mois ; qu'en l'espèce, il résulte des mentions de l'ordonnance attaquée, d'une part, que trois magistrats, présents lors des débats, ont délibéré seuls conformément à l'article 200 du code de procédure pénale (p. 2), et d'autre part, que le président de la chambre de l'instruction a statué en audience publique après en avoir délibéré conformément à la loi (p. 10) ; qu'ainsi, l'ordonnance dont les mentions contradictoires ne mettent pas la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la régularité de la composition de la juridiction statuant sur la prolongation exceptionnelle de la détention de M. [S], viole les articles 380-3-1, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 380-3-1 et 592 du code de procédure pénale :

6. Selon le premier de ces textes, lorsque l'accusé est détenu, si l'audience ne peut se tenir devant la cour d'assises d'appel avant l'expiration du délai d'un an à compter de l'appel, le président de la chambre de l'instruction peut, à titre exceptionnel, par une décision mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle durée de six mois, qui peut être renouvelée une fois dans les mêmes formes.

7. Selon le second, les décisions des juridictions pénales sont déclarées nulles lorsqu'elles ne sont pas rendues par le nombre de juges prescrit.

8. Si, d'une part, la décision critiquée est qualifiée d'ordonnance rendue sur le fondement de l'article 380-3-1 du code de procédure pénale et comporte un dispositif selon lequel le président a délibéré conformément à la loi, elle mentionne également, d'autre part, que les débats se sont déroulés devant une formation collégiale composée du président et de deux conseillères, qui ont délibéré à l'issue des débats.

9. En l'état de ces énonciations, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer de la régularité de la composition de la juridiction ayant rendu la décision.

10. La cassation est par conséquent encourue.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance susvisée du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 27 juin 2023, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'ordonnance annulée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille vingt-trois.

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