13 septembre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-16.884

Chambre commerciale financière et économique - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:CO00550

Titres et sommaires

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accords et conventions divers - Convention de Lugano du 30 octobre 2007 - Etat lié par la Convention - Royaume-Uni - Accord du 24 janvier 2020 sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne - Période de transition

Les modalités de sortie de l'Union européenne du Royaume-Uni ont été réglées dans l'Accord du 24 janvier 2020 sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique (l'Accord). En application de cet Accord, entré en vigueur le 1er février 2020, le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne est devenu total à compter du 1er janvier 2021. En ses articles 126 et 127, l'Accord prévoit une période de transition jusqu'au 31 décembre 2020, pendant laquelle, sauf dispositions contraires, le droit de l'Union européenne reste applicable au Royaume-Uni et sur son territoire, de sorte que cet Etat demeure lié pendant cette période par les obligations découlant des accords internationaux conclus par l'Union européenne. La Convention de Lugano du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, par laquelle le Royaume-Uni était lié comme Etat membre de l'Union européenne, n'est ni citée, ni visée, même implicitement, par les dispositions de l'article 127 de l'Accord relatives aux traités et actes adoptés par les institutions, organes et organismes de l'Union européenne déclarés, par exception, non applicables au Royaume-Uni et sur son territoire pendant la période de transition. Il en résulte que le Royaume-Uni est demeuré lié par la Convention de Lugano jusqu'au 31 décembre 2020, date d'expiration de la période de transition. En conséquence, c'est à bon droit qu'après avoir, d'une part, énoncé que l'application de la Convention de Lugano est subordonnée au fait qu'une des parties au moins est domiciliée sur le territoire d'un Etat lié par cette Convention, à la désignation d'un tribunal du ressort d'un Etat lié par cette Convention et à la reconnaissance du caractère international du litige, d'autre part, relevé que le Royaume-Uni, sur le territoire duquel se trouve la juridiction désignée par la clause, était encore membre de l'Union européenne au moment de l'introduction de l'instance le 18 avril 2019, une cour d'appel en a déduit que le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne était sans effet quant à l'application de la Convention de Lugano au litige et que la validité de la clause attributive de juridiction devait être soumise aux conditions de forme prévues à l'article 23 de cette Convention et non aux règles découlant des dispositions du droit national

UNION EUROPEENNE - Accord du 24 janvier 2020 sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne - Période de transition - Convention de Lugano du 30 octobre 2007 - Application au litige

CONFLIT DE JURIDICTIONS - Compétence internationale - Clause attributive de juridiction - Règles de conflit de juridictions - Convention de Lugano du 23 octobre 2007 - Etat lié par la Convention - Royaume-Uni - Accord du 24 janvier 2020 sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne - Période de transition

Texte de la décision

COMM.

DB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 septembre 2023




Cassation


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 550 FS-B

Pourvoi n° H 22-16.884




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 SEPTEMBRE 2023

1°/ La société Trans Service Line, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4], [Localité 6],

2°/ la société Bolloré Logistics Suisse, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3], [Localité 7] (Suisse),

ont formé le pourvoi n° H 22-16.884 contre l'arrêt rendu le 5 avril 2022 par la cour d'appel de Paris (chambre commerciale internationale) (pôle 5, chambre 16), dans le litige les opposant à la société MSC - Mediterranean Shipping Company, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 2] (Suisse) et prise chez son agent MSC France, dont le siège est [Adresse 8], [Localité 5], défenderesse à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de la société Trans Service Line et de la société Bolloré Logistics Suisse, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société MSC - Mediterranean Shipping Company, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 13 juin 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, Mmes Vallansan, Bélaval, M. Riffaud, Mmes Boisselet, Guillou, M. Bedouet, conseillers, Mmes Barbot, Kass-Danno, M. Boutié, conseillers référendaires, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 avril 2022) et les productions, cinquante-sept fûts de produits chimiques devaient être acheminés par la société suisse Mediterranean Shipping Company (la société MSC) depuis le port du [Localité 5] jusqu'à [Adresse 10] (Afrique du Sud), via le port de [Localité 9] (Afrique du Sud), sous couvert de deux connaissements émis par la société française Trans Service Line (la société TSL).

2. La société Bolloré Logistics Suisse (la société Bolloré Logistics) a réservé le transport auprès de la société MSC (le transporteur maritime) selon un booking reservation du 9 février 2018.

3. Les fûts ont été empotés dans un conteneur qui été embarqué au [Localité 5] sur le navire MSC Giselle en exécution d'un sea waybill n° MSCUKL646698 (la lettre de transport) du 20 février 2018.

4. Après son acheminement par voie maritime jusqu'au port de [Localité 9] et le transbordement du conteneur, la marchandise devait être transportée par voie terrestre jusqu'à sa destination finale, [Adresse 10].

5. Le 19 mars 2018, durant le transport terrestre effectué par la société PCM Solutions (le voiturier), l'ensemble routier transportant le conteneur s'est renversé dans un virage, entraînant la perte de la marchandise.

6. Le 18 décembre 2018, la société TSL a reçu une réclamation amiable d'un montant de 287 738 francs suisses de la part de la société Givaudan Suisse, se prévalant de la qualité de cessionnaire des droits des chargeurs et destinataires de la marchandise, et de la société Chubb Versicherungen (la société Chubb), agissant en qualité d'assureur facultés de ces mêmes marchandises.

7. Le 18 mars 2019, les sociétés Givaudan Suisse et Chubb ont assigné la société TSL devant le tribunal de commerce de Paris en indemnisation de leurs préjudices résultant de la perte de la marchandise.

8. Le 18 avril 2019, les sociétés TSL et Bolloré Logistics ont assigné la société MSC devant le même tribunal en garantie des condamnations qui pourraient éventuellement être prononcées à leur encontre au bénéfice des sociétés Chubb et Givaudan Suisse dans la première instance, dont la jonction a été refusée.

9. Dans cette seconde instance, la société MSC a soulevé l'incompétence des juridictions françaises en se prévalant d'une clause attributive de compétence désignant la High Court of Justice of London (Royaume-Uni).

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

10. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font grief à l'arrêt de déclarer la cour d'appel de Paris incompétente, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en statuant sur sa propre compétence cependant qu'elle était saisie d'un appel contre un jugement du tribunal du commerce de Paris ayant statué sur sa compétence et que l'objet du litige était limité à la compétence de cette juridiction pour connaître du litige, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ».

Réponse de la Cour

11. Sous le couvert du grief non fondé de violation de l'article 4 du code de procédure civile, le moyen ne tend qu'à dénoncer une erreur matérielle affectant le dispositif de l'arrêt, laquelle n'est pas attaquable par la voie du pourvoi et doit donner lieu à la procédure prévue à l'article 462 du même code.

12. Le moyen n'est donc pas recevable.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

13. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il rejette l'exception d'incompétence soulevée par la société MSC et dit le tribunal de commerce de Paris compétent et, statuant à nouveau, de les renvoyer à mieux se pourvoir, alors « que l'article 23 de la Convention de Lugano concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale du 30 octobre 2007 ne trouve à s'appliquer que si la clause attributive de juridiction désigne un tribunal ou des tribunaux d'un État lié par cette convention ; que lorsque la clause attributive de juridictions désigne le tribunal d'un État tiers, le juge doit apprécier la validité de la clause en fonction du droit applicable au lieu où il siège ; que, par ailleurs, le Royaume-Uni doit être considéré comme un État tiers à la Convention de Lugano, y compris pour les actions engagées avant son retrait de l'Union Européenne, dès lors que ce texte ne compte pas parmi ceux dont les articles 67 et suivants de l'accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique (2019/C 384 I/01) maintient l'application au Royaume-Uni aux actions intentées pendant la période de transition courant jusqu'au 31 décembre 2020 ; qu'il s'en déduit que même saisi avant le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, d'une clause attributive de juridiction désignant une juridiction britannique, le juge français doit en apprécier la validité au regard de ses règles de droit interne ; qu'en jugeant que le retrait du Royaume-Uni n'avait pas d'effet sur l'application de l'article 23 de la Convention de Lugano s'agissant d'un contrat conclu et d'une action introduite avant le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne et avant la fin de la période de transition le 31 décembre 2020, la cour d'appel a violé les textes précités, ensemble l'article 48 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

14. Les modalités de sortie de l'Union européenne du Royaume-Uni ont été réglées dans l'Accord du 24 janvier 2020 sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique (l'Accord).

15. En application de cet Accord, entré en vigueur le 1er février 2020, le retrait du Royaume-Uni de l'Union est devenu total à compter du 1er janvier 2021.

16. En ses articles 126 et 127, l'Accord prévoit une période de transition jusqu'au 31 décembre 2020, pendant laquelle, sauf dispositions contraires, le droit de l'Union reste applicable au Royaume-Uni et sur son territoire, de sorte que le Royaume-Uni demeure lié pendant cette période par les obligations découlant des accords internationaux conclus par l'Union.

17. La Convention de Lugano concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale du 30 octobre 2007 (la Convention de Lugano), par laquelle le Royaume-Uni était lié comme Etat membre de l'Union européenne, n'est ni citée ni visée, même implicitement, par les dispositions de l'article 127 de l'Accord relatives aux traités et actes adoptés par les institutions, organes et organismes de l'Union déclarés, par exception, non applicables au Royaume-Uni et sur son territoire pendant la période de transition.

18. Il en résulte que le Royaume-Uni est demeuré lié par la Convention de Lugano jusqu'au 31 décembre 2020, date d'expiration de la période de transition.

19. Après avoir, d'une part, énoncé que l'application de la Convention de Lugano est subordonnée au fait qu'une des parties au moins est domiciliée sur le territoire d'un Etat lié par cette convention, à la désignation d'un tribunal du ressort d'un Etat lié par cette convention et à la reconnaissance du caractère international du litige, d'autre part, relevé que le Royaume-Uni, sur le territoire duquel se trouve la juridiction désignée par la clause, était membre de l'Union européenne au moment de l'introduction de l'instance le 18 avril 2019, soit avant son retrait de l'Union européenne et avant la fin de la période transitoire fixée au 31 décembre 2020, la cour d'appel en a exactement déduit que le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne est sans effet quant à l'application de la Convention de Lugano au litige et que la validité de la clause attributive de juridiction devait être soumise aux conditions de forme prévues à l'article 23 de cette convention et non aux règles découlant des dispositions du droit national.

20. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

21. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font le même grief à l'arrêt, alors « que le bon de réservation de transport ("Booking confirmation") mentionnait comme adresse électronique à laquelle les conditions générales de transport MSC étaient consultables "http:www.mscgva. ch/bl_terms/bl.html" ; qu'en retenant, pour considérer que la société Bolloré Logistics avait pu prendre connaissance et accepter ces conditions générales que le bon de réservation renvoyait à l'adresse électronique "http://www.msc.com/che/contract-of-carriage", cependant que ce bon de réservation mentionnait une autre adresse électronique que celle-ci, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document, en violation du principe faisant interdiction au juge de ne pas dénaturer les termes clairs et précis de la clause. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

22. Pour déclarer le tribunal de commerce de Paris incompétent, l'arrêt retient notamment que la clause attributive de compétence au profit de la juridiction londonienne n'apparaît pas retranscrite par écrit sur le contrat de transport mais dans un autre document auquel il renvoie, que le bon de réservation du 9 février 2018 et la LTM du 20 février 2018 mentionnent de façon très apparente et lisible une clause de renvoi aux conditions générales du transporteur sur son site web dont l'adresse électronique est précisée, mettant la partie contractante en mesure, moyennant des diligences normales, de les consulter, sauvegarder ou imprimer avant la conclusion du contrat. Il mentionne ensuite l'adresse figurant selon lui en caractères gras en page 2 du booking reservation. Il en déduit que la condition prévue aux paragraphes 1, a) et 2 de l'article 23 de la Convention de Lugano est remplie et que la clause attributive de juridiction est valide.

23. En statuant ainsi, alors qu'il ne s'agissait pas de l'adresse électronique figurant en caractères gras sur le booking reservation, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.

Sur le deuxième moyen, pris en sa cinquième branche

Enoncé du moyen

24. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font le même grief à l'arrêt, alors « qu'est valable la clause attributive de juridiction conclue sous une forme qui est conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles ; qu'en se bornant à relever, pour dire valable, la clause attributive de juridiction dont se prévalait la société MSC l'existence d'un courant d'affaires entre les parties et la soumission de ces relations d'affaires aux conditions générales de transport MSC, sans constater que le contrat litigieux avait été conclu sous une forme qui était conforme aux habitudes que les parties avaient établies entre elles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 23.1 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 23.1 de la Convention de Lugano :

25. Ce texte dispose :

« Si les parties, dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un État lié par la présente convention, sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un État lié par la présente convention pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. Cette convention attributive de juridiction est conclue :
a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite ; ou
b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles ; ou
c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée. »

26. Pour déclarer le tribunal de commerce de Paris incompétent, l'arrêt retient que la société MSC justifie, par la production des listings des transports de Bolloré Logistics 2015-2018, d'un courant d'affaires régulier avec la société TSL / BL suisse et même d'un flux récurrent sur cette ligne de transport aux mêmes conditions, qui permet de considérer qu'elles étaient habituées à la présence de cette clause.

27. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'existence d'habitudes établies pendant cette période entre les parties quant à la conclusion d'une telle clause attributive de compétence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le deuxième moyen, pris en sa sixième branche

Enoncé du moyen

28. Les sociétés TSL et Bolloré Logistics font le même grief à l'arrêt, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en affirmant qu'il n'est pas contesté que la clause d'élection de for désignant la High Court de Londres correspond à un usage largement connu et régulièrement observé dans le secteur du transport international de marchandises, cependant que les sociétés Bolloré Logistics et TSL contestaient l'existence d'un usage en la matière en raison de la diversité des clauses de règlement de litige insérées dans les connaissements, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

29. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

30. Pour déclarer le tribunal de commerce de Paris incompétent, l'arrêt retient également qu'il n'est pas contesté que la clause attributive de compétence au profit de la juridiction londonienne correspond à un usage largement connu et régulièrement observé dans le secteur du transport international de marchandises dans lequel les sociétés TSL et Bolloré Logistics sont des opérateurs internationaux connus.

31. En statuant ainsi, alors que, dans leurs conclusions d'appel, ces deux sociétés contestaient l'existence d'un usage en la matière en raison de la diversité des clauses insérées dans les connaissements, en soutenant que les clauses stipulées par les transporteurs ne renvoient pas systématiquement à la High Court of Justice of London, que certaines se réfèrent à la « principal place of business », que la rédaction des clauses de juridiction varie selon le bon vouloir du transporteur maritime, qu'on ne peut pas parler de clause type et que le seul usage qui puisse être établi consiste dans la répétition de l'insertion d'une clause de juridiction dans les connaissements, dont la rédaction varie et dépend de la seule volonté du transporteur maritime, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société MSC - Mediterranean Shipping Company aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois et signé par lui et Mme Vaissette, conseiller doyen qui en a délibéré, en remplacement de Mme Fontaine, conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

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