23 février 2023
Cour d'appel de Paris
RG n° 22/04413

Pôle 1 - Chambre 10

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10



ARRÊT DU 23 FÉVRIER 2023

(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/04413 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFLYF



Décision déférée à la cour :

Jugement du 14 février 2022-Juge de l'exécution de PARIS-RG n° 21/81935



APPELANT



Monsieur [L] [P]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945

Ayant pour avocat plaidant Me Eva ABBOU-COHEN, avocat au barreau de PARIS



INTIMÉE



Madame [K] [I] veuve [V]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Philippe CHEVALIER, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 8



COMPOSITION DE LA COUR



L'affaire a été débattue le 26 janvier 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller



qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.



GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER



ARRÊT

-contradictoire

-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.




















Par jugement du 6 mai 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Créteil, siégeant au tribunal de proximité de Sucy-en-Brie, a notamment :


condamné M. [L] [P] solidairement avec Mme [C] [Y] et M. [E] [P] à payer à Mme [K] [I] épouse [V] la somme de 18.218 euros au titre des loyers et charges impayés, arrêtés au 11 août 2020, avec intérêts au taux légal à compter du 26 février 2020 pour la somme de 12.506 euros et à compter du 10 février 2021,

condamné M. [L] [P] in solidum avec Mme [C] [Y] et M. [E] [P] à payer à Mme [K] [I] épouse [V] la somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné M. [L] [P] in solidum avec Mme [C] [Y] et M. [E] [P] aux dépens.




Selon procès-verbal d'huissier du 11 août 2021, dénoncé au débiteur le 16 août suivant, une saisie-attribution a été pratiquée à l'encontre de ce dernier entre les mains de la banque Crédit Lyonnais, en exécution de ce jugement.



Par actes d'huissier des 7 et 8 septembre 2021, M. [L] [P] a assigné Mme [C] [Y], M. [E] [P] et Mme [K] [V] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris aux fins de contestation de la saisie-attribution pratiquée le 11 août 2021.



Par jugement du 14 février 2022, le juge de l'exécution a :


débouté M. [L] [P] de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 11 août 2021 ;

condamné M. [L] [P] à payer à Mme [K] [V] la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté M. [L] [P] de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné M. [L] [P] aux dépens de l'instance.




Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a tout d'abord constaté que M. [L] [P] justifiait de la recevabilité de sa contestation. Mais, rappelant que l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution interdit au juge de l'exécution de modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites et, partant, d'apprécier les circonstances qui ont amené le juge des contentieux de la protection à condamner M. [L] [P], il a constaté que Mme [K] [V] justifiait d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible à l'encontre de ce dernier.



Par déclaration du 24 février 2022, M. [L] [P] a interjeté appel de ce jugement.



Par conclusions signifiées le 28 novembre 2022, il demande à la cour de :


déclarer sans objet l'appel du jugement entrepris, sauf pour ce qui concerne la demande de dommages-intérêts et l'article 700 du code de procédure civile ;


Et statuant à nouveau,


condamner Mme [K] [V] à lui payer la somme de 5000 euros à titre de dommages-intérêts ;

condamner Mme [K] [V] à lui payer la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner Mme [K] [V] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Eva Abbou-Cohen, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.










A cet effet, il se prévaut d'une ordonnance du premier président du 14 avril 2022, ordonnant l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement du 6 mai 2021 du juge des contentieux de la protection, en considérant qu'il justifiait d'un moyen sérieux de réformation du jugement dont appel, et pour cause puisqu'il justifie avoir adressé à M. [V], son bailleur, une lettre de congé dès le 1er septembre 2003, pris en compte par le bailleur puisque celui-ci avait adressé des quittances de loyer après cette date à Mme [Y] seule, de même qu'un congé pour vendre le 4 décembre 2019. Il fait valoir que Mme [K] [V] en a tenu compte puisqu'elle a donné mainlevée pure et simple de la saisie-attribution le 17 mai 2022 et, dans le cadre de la procédure au fond, a déclaré renoncer au bénéfice du jugement du 6 mai 2021 ; qu'ainsi les époux [V], qui avaient accepté la novation parfaite du contrat de bail, le libérant ainsi de ses obligations depuis plus de 18 ans, ont diligenté une procédure au fond et une mesure d'exécution de manière abusive et de mauvaise foi.



Par conclusions signifiées le 1er juin 2022, Mme [K] [V] demande à la cour de :


déclarer la présente procédure sans objet,

« acter » son renoncement au bénéfice du jugement du juge des contentieux de la protection du 6 mai 2021,

laisser à la charge de chacune des parties ses propres dépens.




L'intimée expose que, au vu de l'ordonnance rendue par le premier président de la cour d'appel le 14 avril 2022, qui a suspendu l'exécution provisoire du jugement rendu par le juge des contentieux de la protection, elle a décidé de renoncer au bénéfice de ce jugement et a fait donner mainlevée de la saisie dès le 17 mai 2022.




MOTIFS



L'appel devient en effet sans objet, Mme [K] [V] ayant donné mainlevée de la saisie-attribution dès le 17 mai 2022 au vu de l'ordonnance du premier président arrêtant l'exécution provisoire du jugement du juge des contentieux de la protection du 6 mai 2021, qui constituait le titre exécutoire fondant la mesure d'exécution, et au bénéfice duquel elle a alors expressément renoncé.



Sur la demande en dommages-intérêts pour procédure et saisie abusives



M. [L] [P] fonde sa demande sur les dispositions de l'article 1240 du code civil, soutenant que la connaissance par Mme [K] [V] de ce qu'il était devenu complètement étranger au bail et l'acceptation de son congé résultant de la délivrance des quittances de loyers à Mme [Y] seule ont parfaitement été retenues par la cour dans son ordonnance de référé du 14 avril 2022, et que ces circonstances caractérisent la mauvaise foi de la bailleresse, intimée, et l'abus qui a consisté à obtenir un titre exécutoire contre lui et à faire pratiquer une saisie à son encontre.



Or il ressort des pièces produites par M. [L] [P] lui-même que c'est M. [J] [V] qui avait pris acte de son départ du logement selon lettre adressée à M. [V], et non pas à Mme [K] [V], le 1er septembre 2003, et avait adressé depuis lors des quittances de loyer à Mme [Y] seule. Il ressort du jugement du 6 mai 2021 que M. [J] [V] est décédé en 2020, et Mme [K] [V] est aujourd'hui âgée de 86 ans ; que devant le juge des contentieux de la protection, M. [L] [P] a été assigné selon procès-verbal de recherches infructueuses. Il en résulte que Mme [K] [V] n'avait pas nécessairement conscience de ce que celui-ci était devenu « étranger » au bail, contrairement à ce que prétend celui-ci, le fait que l'un des co-locataires quitte les lieux en en informant son bailleur ne l'exonérant pas nécessairement de l'obligation solidaire de paiement des loyers.







Quoi qu'il en soit, dès le prononcé de l'ordonnance de référé du 14 avril 2022 (qui n'est pas produite en totalité devant la cour, la page 2 contenant les motifs étant manquante), Mme [K] [V] a fait lever la saisie-attribution et a renoncé au bénéfice du jugement dont appel (appel auquel elle était intimée). La cour relève qu'elle a ainsi fait preuve de bonne foi et n'a commis aucune faute en diligentant l'action au fond contre l'ensemble des co-débiteurs solidaires de la dette locative (y compris la caution) et la saisie-attribution sur le fondement d'un jugement assorti, de plein droit, de l'exécution provisoire.



La demande en dommages-intérêts de M. [L] [P] doit donc être rejetée.



Sur les demandes accessoires



L'intimée propose à la cour de laisser à la charge de chacune des parties ses propres dépens, tandis que l'appelant demande au contraire que l'intimée en supporte seule la charge et soit condamnée à lui payer une indemnité en compensation de ses frais irrépétibles.



Au vu de l'issue du litige et des circonstances de la cause, il y a lieu de laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, et de débouter l'appelant de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS



Constate que l'appel du jugement rendu par le juge de l'exécution le 14 février 2022 est devenu sans objet ;



Déboute M. [L] [P] de sa demande en dommages-intérêts ;



Déboute M. [L] [P] de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;



Laisse à chaque partie la charge de ses dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



Le greffier, Le président,

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