18 mai 2022
Cour d'appel d'Agen
RG n° 21/00578

CHAMBRE CIVILE

Texte de la décision

ARRÊT DU

18 Mai 2022





CV / NC





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N° RG 21/00578

N° Portalis DBVO-V-B7F -C4UP

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[G] [I]



C/



[C] [E]





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GROSSES le

aux avocats









ARRÊT n°











COUR D'APPEL D'AGEN



Chambre Civile









LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,









ENTRE :



Monsieur [G] [I]

né le 19 février 1989 en ARMENIE

de nationalité française, salarié

domicilié : [Adresse 1]

Le domaine d'Artix

[Localité 2]



représenté par Me Emilie GEFFROY, SELARL CAD AVOCATS, avocate au barreau du LOT





APPELANT d'une ordonnance de référé du tribunal judiciaire de CAHORS en date du 06 avril 2021, RG 12-21-000019



D'une part,







ET :



Madame [C] [E]

née le 04 avril 1970 à [Localité 6] (47)

de nationalité française, secrétaire comptable

domiciliée : [Adresse 4]

[Localité 3]



représentée par Me Vincent DUPOUY, membre de la SCP DUPOUY, avocat au barreau d'AGEN





INTIMÉE

D'autre part,









COMPOSITION DE LA COUR :



l'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 16 mars 2022, sans opposition des parties, devant la cour composée de :



Cyril VIDALIE, Conseiller



qui en a rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre lui-même de :



Valérie SCHMIDT et Jean-Yves SEGONNES, Conseillers



en application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, et après qu'il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,





Greffière : Nathalie CAILHETON





ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile




' '

'





Faits et procédure :



Mme [C] [E] a acquis le 7 octobre 2019 auprès de M. [G] [I] un véhicule Fiat Doblo immatriculé [Immatriculation 5] au prix de 1 500 euros.



Elle a fait procéder au remplacement de sa courroie de distribution par un préposé d'un établissement de l'enseigne Norauto.



Le véhicule étant tombé en panne le 3 novembre 2019, une expertise a été diligentée par l'assureur de Mme [C] [E].



Après une vaine tentative de conciliation, par acte du 2 février 2021, Mme [C] [E] a assigné M. [G] [I] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Cahors, afin de solliciter une provision de 3 270,61 € sur le fondement de la garantie des vices cachés.



Par ordonnance du 6 avril 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Cahors a :



- condamné M. [G] [I] à payer à Mme [C] [E] une provision de 1 500 euros,

- condamné M. [G] [I] à payer à Mme [C] [E] une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné M. [G] [I] aux dépens,

- rappelé le caractère exécutoire de la décision.



Faisant application de l'article 853 du Code de procédure civile, le juge des référés a considéré que les éléments produits montraient que la casse du moteur était due à un calage défectueux lors de l'installation du kit de distribution antérieur à la vente, ce qui rendait le véhicule impropre à sa destination, que l'obligation de garantie de ce vice caché incombant au vendeur n'était pas sérieusement contestable, et qu'il n'entrait pas dans les pouvoirs du juge des référés de déterminer si le vendeur en avait connaissance, de sorte que seule une provision égale au prix de vente pouvait être allouée.





M. [G] [I] a formé appel le 27 mai 2021, désignant en qualité d'intimée Mme [C] [E], et visant dans sa déclaration la totalité des dispositions de l'ordonnance.



Mme [C] [E] s'est constituée le 15 juin 2021.



L'avis de fixation à bref délai à été délivré le 30 juin 2021.



M. [G] [I] a déposé ses conclusions le 1er juillet 2021.



Mme [C] [E] a déposé ses conclusions le 29 juillet 2021.







Prétentions :



Par dernières conclusions du 23 août 2021, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, M. [G] [I] demande à la Cour de :



- réformer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a :

- condamné M. [G] [I] à payer à Mme [C] [E] une provision de 1 500 euros,

- condamné M. [G] [I] à payer à Mme [C] [E] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné M. [G] [I] aux dépens,



- statuant à nouveau,

- juger que le juge des référés a excédé ses pouvoirs en tranchant sa responsabilité sur le fondement de la garantie des vices cachés,

- juger qu'il existe plusieurs obligations sérieusement contestables,

- faisant échec à la demande de provision formulée par Mme [C] [E],

- débouter Mme [C] [E] de sa demande de provision,

- débouter Mme [C] [E] de sa demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens,

- y ajoutant,

- débouter Mme [C] [E] de ses prétentions en cause d'appel,

- condamner Mme [C] [E] à verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,

- condamner Mme [C] [E] aux entiers dépens de la procédure d'appel.



M. [G] [I] présente l'argumentation suivante :



- l'appréciation du caractère caché du vice relève du juge du fond, et il existe des contestations sérieuses portant sur son origine, son antériorité à la vente, et son caractère caché,



- l'ordonnance s'est fondée sur le rapport de M. [Y] [X], sans tenir compte de l'analyse différente du cabinet Fontes qui évoque la possibilité d'un décalage lors de l'intervention de l'établissement Norauto, dont il retient la responsabilité, M. [Y] [X] ayant d'ailleurs indiqué dans un courrier du 9 juin 2020 que la casse de la courroie après 2 300 kms révélait un défaut de montage,



- l'acheteur profane d'un véhicule d'occasion doit faire preuve d'une vigilance plus étendue qu'en cas d'achat d'un véhicule neuf, or le défaut du véhicule était signalé dans l'annonce de mise en vente, et l'acquéreur ne l'a pas présenté à un professionnel malgré l'avertissement du vendeur, mais utilisé sans précaution pour effectuer un long trajet sur autoroute,











- la provision allouée correspond au prix de vente ce qui constitue la conséquence de l'action rédhibitoire, mais n'a pas ordonné la restitution du véhicule qui doit alors être ordonnée,



- la demande d'expertise judiciaire ne peut prospérer, le démontage du véhicule ne permettant pas la réalisation de constatations et la détermination de l'origine de la panne.





Par uniques conclusions du 29 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, Mme [C] [E] demande à la cour de :



- constater l'existence d'un vice caché lors de la vente réalisée le 7 novembre 2019,

- condamner M. [G] [I] au paiement d'une provision de 3 270,61 €,

- condamner M. [G] [I] au paiement d'une somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens et frais d'exécution,



- à titre subsidiaire,

- ordonner une expertise du véhicule Fiat Doblo immatriculé [Immatriculation 5],

- réserver les dépens.



Mme [C] [E] présente l'argumentation suivante :



- l'existence d'un vice caché antérieur à la vente rendant le véhicule inutilisable est avérée par l'expertise,



- la casse de la courroie postérieure à la vente confirme l'existence d'un vice antérieur,



- l'annonce ne permettait pas de connaître l'existence du vice, n'évoquant qu'un problème de démarrage qui n'empêchait pas le fonctionnement du véhicule, et précisant que le vendeur l'utilisait quotidiennement,



- elle est fondée à obtenir une provision au titre du préjudice matériel subi, et du préjudice de jouissance, ayant été contrainte de louer un véhicule de remplacement, puis à acheter un véhicule à bas coût de moindre capacité que l'utilitaire correspondant à son besoin.








Motifs



Selon l'article 835 du Code de procédure civile le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.



Mme [C] [E] verse aux débats, au soutien de ses prétentions, la copie de l'annonce de mise en vente du véhicule faisant état d'un entretien du véhicule lors qu'il présentait un kilométrage de 148 000 kms portant sur le kit distribution avec pompe à eau, filtre gasoil, 2 barres stabilisatrices arrière, et une vidange, et signalant un défaut de démarrage du véhicule, utilisé cependant 'tout la journée, tout la semaine'.



Elle produit également le certificat attestant de la cession en date du 7 octobre 2019, deux factures du garage ALS Racing des 20 novembre 2019 (transport du véhicule au prix de 200 euros, et démontage, inspection, nettoyage, diagnostic, au prix de 150 euros), un devis de ce garage du même jour, relatif au remplacement du moteur par un moteur d'occasion au prix de 1 430 euros.



Elle verse également aux débats le rapport d'expertise amiable, contradictoire, établi par M. [Y] [X], duquel il ressort que lors de la vente, une facture d'achat d'un kit de distribution a été remise à l'acheteur ne mentionnant pas de main d'oeuvre, la courroie de distribution s'est rompue le 2 novembre 2019 et a été remplacée par un préposé d'un établissement Norauto, que le véhicule est de nouveau tombé en panne le 3 novembre 2019, et que le vendeur a déclaré avoir vendu le véhicule car il ne parvenait pas à régler son problème de démarrage.





M. [Y] [X] a constaté en présence des parties que :



- la vis de fixation de la poulie d'arbre à cames est cassée ainsi que la clavette de maintien de la poulie, les poussoirs sont cassés et fendus, la culasse est fendue, la courroie de distribution est marquée et présente des traces d'usure prématurée, son usure est due à un mauvais fonctionnement du moteur,

- le galet enrouleur présente un aspect non neuf et est fortement graissé alors qu'un montage à sec est obligatoire.



Il a validé le devis de réparation précité, et conclu que la casse de la culasse est due à un mauvais calage de la distribution, que la casse de la courroie après 2 500 kms laisse supposer un mauvais montage, de même que la présence de graisse sur le galet enrouleur et observé en outre que le vendeur s'est refusé à indiquer qui avait remplacé le kit de distribution.



Ces éléments démontrent de manière non sérieusement contestable que le véhicule a présenté une panne majeure le rendant inutilisable à la suite d'un remplacement du kit de distribution par le vendeur dans des conditions non conformes aux règles de l'art, qui a engendré la rupture de la courroie le 2 novembre 2019, moins d'un mois après son achat.



Il ne peut être envisagé de responsabilité d'un autre intervenant, préposé d'un établissement Norauto, puisqu'il a remplacé la courroie rompue et a posé une courroie de remplacement qui n'a pas rompu, mais a été détériorée en raison du mauvais fonctionnement du moteur et n'est pas intervenu sur les accessoires composant le kit de distribution, qui ont été installés de manière non conforme aux règles de l'art, dans des conditions que le vendeur a refusé d'indiquer.



Le rapport invoqué par l'appelant, émanant du cabinet Fontes, ne peut être utilement opposé, ayant été établi par M. [K] [V] qui a mené cette investigation hors la présence du vendeur, dont il était le mandant.



Outre qu'il n'est ni contradictoire ni impartial, émanant du représentant d'une partie au litige, ce rapport conclut que le symptôme était clairement indiqué dans l'annonce de mise en vente, ce qui est faux, puisqu'il n'était signalé qu'un problème de démarrage et que l'annonce tendait à rassurer l'acquéreur au sujet de l'état de la distribution du véhicule alors qu'il est avéré qu'elle avait été remplacée en violation des règles de l'art.



L'obligation de garantie du vendeur n'est donc pas sérieusement contestable.



Le montant de la provision allouée, s'il ne peut correspondre au prix de la vente, doit être évalué au regard de la moins-value résultant du défaut du véhicule, soit en l'espèce le montant de la réparation s'élevant à 1 430 euros.



L'ordonnance sera infirmée sur le montant de la provision allouée.



La demande d'indemnisation du préjudice subi ne peut être accueillie en l'absence de démonstration de la connaissance du vice par le vendeur.



Les dépens d'appel seront supportés par M. [G] [I], partie perdante.



M. [G] [I] sera condamné à verser à Mme [C] [E] 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.







PAR CES MOTIFS :



La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition et en dernier ressort,



Confirme l'ordonnance de référé du 6 avril 2021, SAUF en ce qu'elle a condamné M. [G] [I] à payer à Mme [C] [E] 1 500 euros à titre de provision,



Statuant à nouveau,



Condamne M. [G] [I] à payer à Mme [C] [E] à titre de provision 1 430 euros,



Y ajoutant,



Condamne M. [G] [I] aux dépens d'appel,



Condamne M. [G] [I] à payer à Mme [C] [E] 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.



Le présent arrêt a été signé par Cyril VIDALIE, président, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



La Greffière,Le Président,

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