20 juin 1997
Cour d'appel de Versailles
RG n° 1996-1933

Texte de la décision

Madame X... a fait l'objet d'une hospitalisation dite de jour au sein du CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL DE PARLY II le 3 décembre 1991.

L'intervention chirurgicale a eu lieu le matin et postérieurement à cette intervention, alors qu'elle se trouvait dans un couloir, Madame X... a fait une chute qui lui a occasionné une plaie péri-orbitaire et une plaie de la joue gauche.

C'est dans ces conditions que Madame X... a assigné le CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL DE PARLY II devant le Tribunal d'Instance de

VERSAILLES.

Par jugement rendu le 11 décembre 1995, ce tribunal a :

- déclaré la Société GERANCE DES CLINIQUES DU PARC responsable du dommage causé à Madame X... le 3 décembre 1991,

- condamné la Société GERANCE DES CLINIQUES DU PARC à payer à Madame X... les sommes de :

[* 20.000 francs en réparation du préjudice esthétique,

*] 5.000 francs en réparation du préjudice lié à la souffrance,

* 2.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- condamné la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES à payer à la Société GERANCE DES CLINIQUES DU PARC la somme de 2.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- ordonné l'exécution provisoire.

LE CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL DE PARLY II, la Société GERANCE DES CLINIQUES DU PARC, la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES THIARD, ont relevé appel de cette décision.

LE CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL et la Compagnie LA PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES fait valoir que Madame X... était liée à la clinique par un contrat d'hospitalisation qui comporte d'une part, une obligation d'hébergement et d'autre part, une obligation de soins et qu'il appartient les cas échéant au médecin, exerçant de façon indépendante par rapport à la clinique, d'assurer la surveillance du malade.

Ils soutiennent que, dans une telle hypothèse, la responsabilité de la clinique ne peut être contractuelle dans la mesure où le dommage se situe en cours d'exécution du contrat et que cette responsabilité est nécessairement quasi-délictuelle.

LE CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL et son assureur demandent, par conséquent, à la Cour de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES à l'encontre du jugement rendu par le Tribunal d'Instance de VERSAILLES le 11 décembre 1995,



- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu la dette de responsabilité de la Société GERANCE DES CLINIQUES DU PARC et la garantie de la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES,

Et statuant à nouveau,

- dire et juger que la responsabilité de la clinique ne peut être contractuelle que dans la mesure où le dommage se situe en cours d'exécution du contrat médical,

- dire et juger, qu'en l'espèce, la chute dont a été victime Madame X... est survenue postérieurement à l'intervention chirurgicale,

- dire et juger que la surveillance du malade postérieurement à l'intervention chirurgicale incombe exclusivement au médecin,

- dire et juger, par suite, que la responsabilité de la clinique doit nécessairement s'apprécier au regard des règles de la responsabilité quasi délictuelle,

- dire et juger que Madame X... ne rapporte pas la preuve d'une faute imputable à la clinique au sens de l'article 1382 et 1383 du Code civil, ni le caractère de l'anormalité du sol en application de l'article 1384 alinéa 1° du Code Civil,

- dire et juger par suite que la responsabilité de la clinique n'est pas engagée,

- dire et juger que l'éventuelle reconnaissance de responsabilité de la clinique vis-à-vis de Madame X... serait inopposable à la Compagnie LA PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES conformément aux dispositions de l'article L.124-2 du Code des Assurances,

- débouter par suite Madame X... de ses éventuelles demandes à l'encontre de la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES en l'absence de dette de responsabilité effective de la clinique,

- prononcer, en conséquence, la mise hors de cause pure et simple de la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES,

A titre tout-à-fait subsidiaire,

- réduire à de plus justes proportions les prétentions de Madame X...,

- condamner la Société GERANCE DES CLINIQUES DU PARC à verser à la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES une indemnité de 6.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par de nouvelles conclusions signifiées le 20 janvier 1997, le CENTRE MEDICO CHIRURGICAL DE PARLY II prient la Cour de :

- lui donner acte de ce qu'il intervient aux lieu et place de la SOCIETE GERANCE DES CLINIQUES DU PARC par suite du changement de dénomination de la clinique,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la clinique responsable du dommage causé à Madame X... le 3 décembre 1991 et en ce qu'il a fait droit à la demande en indemnisation du préjudice formé par cette dernière,

- dire et juger que la responsabilité du CENTRE MEDICO CHIRURGICAL DE PARLY II n'est pas engagé,

Subsidiairement,

- réduire à de plus justes proportions les prétentions de Madame X...,

En tout état de cause,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES tenue à garantie de toutes les condamnations susceptibles d'être mises à la charge de la clinique,

- condamner la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES à verser au CENTRE MEDICO CHIRURGICAL DE PARLY II la somme supplémentaire de

5.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Madame X..., qui invoque les dispositions de l'article 720-40 du Code de la Santé Publique, conclut à la confirmation du jugement déféré et sollicite, par voie d'appel incident, la somme de 10.000 francs au titre de son pretium doloris et celle de 6.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LA PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES réplique que les dispositions de

l'article D.712-40 sont inapplicables au cas d'espèce, les faits étant survenus antérieurement à l'entrée en vigueur de ces textes, que quand bien même, ces textes auraient été applicables, la responsabilité de l'établissement n'aurait pas été engagée.

Elle demande que le CENTRE MEDICO CHIRURGICAL DE PARLY II soit condamné à lui reverser les indemnités qu'il a perçues au titre de l'exécution provisoire dont était entaché le jugement frappé d'appel.

A titre subsidiaire, Madame X... prie la Cour, vu l'article 1384 alinéa 5 du Code civil, de déclarer le CENTRE CHIRURGICAL responsable en qualité de commettant du défaut de surveillance et d'assistance commis par son infirmier et de confirmer le jugement entrepris par substitution de motifs.

Assignée à personne habilitée, la C.P.A.M DE PARIS n'a pas constitué avoué.

SUR CE, LA COUR,

Considérant en premier lieu qu'il doit être donné acte au CENTRE MEDICO CHIRURGICAL DE PARLY II de ce qu'il intervient aux lieu et place de la Société "GERANCE DES CLINIQUES DU PARC" par suite du changement de dénomination de la clinique, ainsi que cela résulte des extraits K bis versés aux débats ;

Considérant que Madame X... a subi une intervention chirurgicale au CENTRE MEDICO CHIRURGICAL DE PARLY II le 3 décembre 1991 au matin ;

Qu'elle a ensuite passé la journée dans la clinique avant d'être autorisée à rentrer chez elle ;

Que l'accident a eu lieu à seize heures quarante ;

Qu'il s'est donc produit hors la phase de réveil proprement dite, dont la responsabilité incombe au médecin, à un moment où la patiente se trouvait dans une salle de repos sous la surveillance d'un infirmier ;

Considérant que la chute est intervenue dans le cadre de l'activité à caractère hôtelier pesant sur la clinique ;

Que dans une telle hypothèse, l'établissement est tenu d'une obligation de résultat de sécurité ;

Considérant que la chute de Madame X... ne s'est pas produite dans une partie de la clinique où patients et visiteurs peuvent se déplacer librement mais dans une partie soumise à surveillance des malades ;

Que s'agissant d'une hospitalisation de jour, la clinique est tenue jusqu'à la sortie des personnes ayant subi une intervention de leur assurer un suivi d'autant plus vigilant que le retour de celles-ci est prévu rapidement ;

Que tout doit être mis en oeuvre pour assurer repos et sortie du patient dans les meilleures conditions ;

Considérant qu'il appartient alors à la clinique de mettre à disposition des malades un personnel compétent et attentif :

Que tel n'a pas été le cas, l'infirmier présent n'ayant ni mis en garde Madame X... lorsqu'elle s'est levée, ni accompagné celle- ci, ni prévenu l'accident alors que Madame X... se sentant mal a eu le temps d'en faire part à sa correspondante au téléphone ainsi que celle- ci en atteste ;

Considérant enfin qu'il sera relevé que la pièce où se reposait Madame X... ne comportait pas de poste de téléphone à la tête du lit, contraignant ainsi les malades à un déplacement dans un couloir à un moment où la survenance d'un malaise ne revêt pas un caractère imprévisible ;

Considérant que le jugement doit être confirmé dans toutes dispositions le tribunal ayant procédé à une exacte appréciation du préjudice subi par Madame X... y compris en ce qui concerne le pretium doloris ;

Sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame X... les sommes exposées par elle qui ne sont pas comprises dans les dépens ;

Qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 4.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Qu'en revanche, l'équité ne commande pas qu'il soit fait application de ces dispositions en faveur des appelantes ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort :

Donne acte au CENTRE MEDICO CHIRURGICAL DE PARLY II de ce qu'il intervient aux lieu et place de la Société "GERANCE DES CLINIQUES DU PARC" ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal d'Instance de VERSAILLES le 11 décembre 1995 ;

Y ajoutant :

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne in solidum le CENTRE MEDICO CHIRURGICAL DE PARLY II et son assureur la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES à payer à Madame X... la somme de 4.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Les condamne, en outre, dans les mêmes conditions aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP KEIME ET GUTTIN, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.



Et ont signé le présent arrêt :

Le Greffier,

Le Président,

Sylvie RENOULT

Alban CHAIX

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