5 mars 2014
Cour d'appel de Douai
RG n° 13/01278

CHAMBRE 1 SECTION 2

Texte de la décision

République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 05/03/2014



***



N° de MINUTE :

N° RG : 13/01278



Jugement (N° 12/01595)

rendu le 15 Janvier 2013

par le Tribunal de Grande Instance de BOULOGNE SUR MER

REF : DD/VC



APPELANTS

Monsieur [R] [C]

né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 1]

Madame [E] [D] épouse [C]

née le [Date naissance 2] 1982 à [Localité 2]

Demeurant ensemble

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentés par Me François DEROUET, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER





INTIMÉE

Madame [J] [H]

née le [Date naissance 3] 1949 à [Localité 2]

Demeurant

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Pierre FAUCQUEZ, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER, substitué à l'audience par Me Emilie CAMUZET-FLECKENSTEIN, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER







DÉBATS à l'audience publique du 11 Décembre 2013, tenue par Dominique DUPERRIER magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe



GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Martine ZENATI, Président de chambre

Fabienne BONNEMAISON, Conseiller

Dominique DUPERRIER, Conseiller



ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 Mars 2014 après prorogation du délibéré en date du 12 Février 2014 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame Martine ZENATI, Président et Claudine POPEK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.




ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 4 décembre 2013



***



Le 19 décembre 1989 Mme [W] [F] épouse [B] a bénéficié d'un arrêté du maire de la commune de [Localité 3] l'autorisant à lotir en quatre parcelles affectées principalement à l'habitation, un terrain cadastré section AK numéro [Cadastre 5] pour 53 ares 31 centiares provenant de la réunion de quatre parcelles cadastrées section AK numéro [Cadastre 1], [Cadastre 4], [Cadastre 2] et [Cadastre 3] ;



Cette parcelle [Cadastre 5] a été divisée en plusieurs parcelles à bâtir cadastrées AK numéros [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 13], [Cadastre 10] (à usage commun) et [Cadastre 9] intitulée « [Adresse 3] » à vocation de desserte pour les différents lots jusqu'à la voie publique ;



Suivant acte reçu le 26 juillet 1990 par maître [L], notaire associé à Calais, Mme [B] a vendu à Mme [J] [H], deux parcelles de terrains à bâtir issues de la division précitée, cadastrées section AK numéro [Cadastre 13] et [Cadastre 12], soit ensemble 500 m², ainsi que les quatre cent quatre vingt cinq/ trois mille trois cent cinquantième (485/3350ème) de la voirie intérieure et des réseaux divers du lotissement figurant au cadastre section AK numéro [Cadastre 9] (voirie) et [Cadastre 10] (espace commun) pour 3a 20 ca ;



Suivant acte reçu le 24 janvier 2011 par maître [T] [N], notaire associée à Calais, M. [R] [C] et Mme [E] [D] épouse [C] ont acquis de M. [P] [B], de M. [A] [B], et de M. [Y] [B], la parcelle située [Adresse 2] cadastrée section AK numéro [Cadastre 11] d'une contenance de 14 ares 82 centiares, contiguë notamment à la parcelle cadastrée section AK numéro [Cadastre 9] intitulée « [Adresse 3] » ;



M. [R] [C] et Mme [E] [D]-[C] ont informé Mme [H] de leur décision de créer un accès entre leur fonds et la voie publique par le lot AK [Cadastre 9] intitulé « [Adresse 3] » ;



Cette dernière a manifesté son opposition par deux lettres recommandées des 31 mai et 23 juillet 2011 et a fait constater l'état des lieux suivant acte dressé le 30 mai 2011 par maître [K], huissier de justice à Calais ;



M. [R] [C] et Mme [E] [D]-[C] ont procédé à la dépose de la clôture délimitant cette voie privée et ont créé un accès à leur domicile par celle-ci depuis ou vers la voie publique pour desservir le parking pour quatre véhicules édifié entre leur habitation et l'impasse ;



Les époux [C] [D] ont relevé appel du jugement rendu le 15 janvier 2013 par le tribunal de grande instance de Boulogne sur mer, lequel a :





déclaré Mme [H] recevable en son action,

ordonné à M. [R] [C] et son épouse, Mme [E] [D] [C], de supprimer l'accès créé par eux sur l'[Adresse 3] cadastrée section AK [Cadastre 9] pour rejoindre leur propriété cadastrée AK [Cadastre 11], sous astreinte de 120 euros par jour de retard passé un délai de deux mois suivant la signification du jugement,

ordonné à M. [R] [C] et son épouse, Mme [E] [D] [C], de remettre en état les ouvrages existants dans leur état avant la voie de fait, sous astreinte provisoire de 120 euros par jour de retard passé un délai de deux mois suivant la signification du jugement, notamment :

en procédant à la réparation des dommages causés au goudron à la jonction du parking privé qu'il a créé,

en supprimant tout branchement au réseau d'assainissement indivis,

et en réimplantant une clôture grillagée de même type que celle qui figurait au constat d'huissier de maître [M] [K], huissier de justice à Calais, en date du 30 mai 2011,

condamné M. [R] [C] et son épouse, Mme [E] [D] [C] à payer à Madame [H], les sommes de :


1,00 euro à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

2.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

et aux dépens ;





Dans leur dernières conclusions remises et signifiées le 7 novembre 2013, les époux [C] [D] demandent à la cour de :



-réformer le jugement déféré,

-dire et juger irrecevable et subsidiairement mal fondée la demande de Mme [H],

-débouter Mme [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-condamner Mme [H] à leur les sommes de :

-2.500,00 euros à titre de dommages et intérêts,

- 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-la condamner aux dépens ;



Dans ses dernières conclusions remises et signifiées le 5 août 2013, Mme [H] demande à la cour au visa de l'article 1264 du code de procédure civile et 544 du code civil, de :



-confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf celles relatives au montant des dommages et intérêts alloués,

-statuant à nouveau,

-condamner les époux [C] [D] à lui payer la somme de :

- 5.000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de jouissance et moral,

-condamner les époux [C] [D] à lui payer les sommes de :

- 3.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-les condamner aux entiers dépens, y compris les frais de constats d'huissier, dont distraction au profit de maître Pierre Faucquez, avocat ;



L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 décembre 2013 ;



Il est renvoyé aux écritures des parties pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens ;



Sur ce :



1. sur l'appel principal :



Les époux [C] [D] ont procédé à la dépose de la clôture située entre leur lot et la parcelle [Cadastre 9] à usage d'impasse, dans un premier temps sur une largeur correspondant au parking qu'ils ont créé pour quatre véhicules entre l'habitation et l'[Adresse 3] et depuis lors, empruntent ce passage avec leurs véhicules automobiles et ceux de leurs visiteurs y compris ceux des entreprises qui ont participé aux travaux de rénovation de leur immeuble ;



Cet état de fait est avéré par deux constats d'huissier respectivement daté du 30 mai 2011 établi à la demande de Mme [H] pour la conservation de ses droits avant toute transformation et un second daté du 24 avril 2012, postérieurement aux travaux réalisés par les époux [C] comprenant la dépose de la clôture et la création du parking ;



Engagée suivant acte délivré le 26 avril 2012, soit d'une part, dans l'année du trouble (postérieur au 30 mai 2011), et d'autre part, bénéficiant d'une possession qui était jusque là paisible depuis l'acquisition de l'immeuble par Madame [H], et à tout le moins depuis une année avant l'apparition du trouble, l'action de Madame [H] est recevable sur le fondement de la protection possessoire ;



La démolition de la clôture séparant les deux propriétés et l'usage de l'impasse par les époux [C] et toutes personnes de leur chef, à pied ou au moyen d'un véhicule automobile, constituent un trouble manifeste à la possession ;



Aux termes de l'article 1267 du code de procédure civile, les époux [C] [D], défendeurs au possessoire ne peuvent agir au fond qu'après avoir mis fin au trouble ;



Tel n'est pas le cas ainsi qu'il résulte du procès-verbal de constat d'huissier dressé le 30 mai 2013 puisque depuis le jugement déféré, les époux [C] [D] ont procédé d'une part, à l'enlèvement de l'intégralité de la clôture séparant les parcelles [Cadastre 11] et [Cadastre 9], et d'autre part, ont condamné l'accès direct de leur immeuble sur la voie publique par la pose de panneaux obturant leur portail à double battant ;



Il en résulte que depuis au moins le 30 mai 2013 et malgré le jugement rendu le 15 janvier 2013, les époux [C] [D] accèdent à la voie publique uniquement par l'accès qu'ils ont créé sur la parcelle AK [Cadastre 9] à usage d'impasse ;



A titre subsidiaire, les époux [C] [D] objectent qu'ils ne peuvent être condamnés à se clore et à reposer la clôture qui leur appartient privativement ;



Cette considération, outre que le caractère privatif n'est pas démontré, est indifférente dans le présent litige, puisqu'il s'agit de mettre fin à un trouble de la possession par la remise en état des lieux ;



Les époux [C] [D] soutiennent encore que la preuve n'est pas rapportée qu'ils ont raccordé leur réseau d'eaux usées au réseau du lotissement situé dans l'impasse, puisqu'en réalité, le lotissement ne dispose pas d'un réseau privé mais d'un réseau commun avec leur propre fonds ;



Or, l'arrêté de lotissement prévoit expressément la création d'un réseau d'évacuation des eaux usées dont le regard est situé dans l'impasse ;



Il résulte des photographies produites aux débats, que les époux [C] [D] ont installé sur leur fonds en limite de l'ancienne clôture un égout qui a été raccordé à celui du lotissement ;



Il s'en suit que le jugement déféré mérite confirmation en ses dispositions relatives à la remise en état des lieux ;



2. sur l'appel incident :



Les aménagements effectués par les époux [C] et la circulation des véhicules et leur stationnement devant les fenêtres de son séjour, sont constitutifs d'une faute et à l'origine d'un préjudice moral et de jouissance qu'il convient de réparer par l'octroi de la somme de 1.000,00 euros à titre de dommages et intérêts ;



Le jugement déféré est infirmé de ce chef ;



3. sur les mesures accessoires :



Les époux [C] [D], partie perdante, sont condamnés aux dépens d'appel et à payer à Mme [H] la somme de 1.500,00 euros au titre des frais irrépétibles comprenant les frais du constat d'huissier du 30 mai 2013 ;





PAR CES MOTIFS



Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné les époux [C] [D] à payer à Mme [H] la somme de :





un euro (1,00 euro) à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,





Statuant à nouveau de ce chef,



Condamne les époux [C] [D] à payer à Mme [H] la somme de :





mille euros (1.000,00 euros) à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,



Confirme le jugement déféré pour le surplus,



Y ajoutant,



Condamne les époux [C] [D] à payer à Mme [H] la somme de :





mille cinq cents euros (1.500,00 euros) au titre des frais irrépétibles,





Condamne les époux [C] [D] aux dépens d'appel.



Le GreffierLe Président,









C. POPEKM. ZENATI

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