20 mars 2002
Cour de cassation
Pourvoi n° 99-16.065

Troisième chambre civile

Texte de la décision

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


I - Sur le pourvoi n° H 99-16.065 formé par la société BPM, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,


en cassation d'un arrêt rendu le 29 mars 1999 par la cour d'appel de Lyon (1re et 2e chambres réunies), au profit :


1 / de la société Sofapi, société anonyme, venant aux droits de la banque Worms, dont le siège est ...,


2 / de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence, Côte-d'Azur, venant aux droits de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes, dont le siège est ...,


3 / de la société CDR Créances, société anonyme, venant aux droits de la Banque Parisienne de Gestion et de Dépôts, dont le siège est ...,


4 / de la société International Azur Immobllier (IAI), société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,


5 / de la Banque Worms, société anonyme, dont le siège est ...,


défenderesses à la cassation ;


II - Sur le pourvoi n° B 99-17.555 formé par la société CDR Créances, société anonyme, dont le siège est ..., venant aux droits de la Banque Parisienne de Gestion et de Dépôts,


en cassation du même arrêt rendu, au profit :


1 / de la société International Azur Immobilier (IAI),


2 / de la société Sofapi,


3 / de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence, Côte-d'Azur, venant aux droits de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes,


4 / de la société BPM,


5 / de la Banque Worms,


défenderesses à la cassation ;


Sur le pourvoi n° H 99-17.065 :


La demanderesse invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;


Sur le pourvoi n° B 99-17.555 :


La demanderesse invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;


Vu la communication faite au Procureur général ;


LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 12 février 2002, où étaient présents : M. Weber, président, Mme Gabet, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Villien, Cachelot, Martin, Mme Lardet, conseillers, Mmes Fossaert-Sabatier, Boulanger, Nési, M. Jacques, conseillers référendaires, M. Baechlin, avocat général, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;


Sur le rapport de Mme Gabet, conseiller, les observations de Me Hémery, avocat de la société BPM, de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société CDR Créances, venant aux droits de la Banque Parisienne de Gestion et de Dépôts, de la SCP Bachellier et Potier de la Varde, avocat de la société Sofapi et de la banque Worms, de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de la société International Azur Immobilier, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence, Côte-d'Azur, venant aux droits de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes, les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen de chacun des deux pourvois, réunis :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 29 mars 1999) rendu sur renvoi après cassation (CIV 3, 9 juillet 1997, n° 1182 D), que la société International azur immobilier (IAI), par convention du 18 décembre 1990 et avenant du 24 janvier 1991, a cédé à la société BPM, sous diverses conditions suspensives, le bénéfice d'un permis de construire avec les droits de surélévation et d'édification de niveaux de garages ; que la Banque parisienne de gestion et de dépôts, subrogée dans les droits de la société BPM a réglé à la société IAI, partie de l'acompte de quatre millions, pouvant devenir indemnité d'immobilisation en cas de renonciation de l'acquéreur, contre le cautionnement donné au profit de la société IAI par la banque Worms, aux droits de laquelle la société Sofapi a été subrogée, et la Caisse régionale de Crédit agricole ; que la société BPM ayant renoncé à l'acquisition, la Banque parisienne de gestion et de dépôts a sollicité la condamnation de la banque Worms et de la Caisse régionale de Crédit agricole à la restitution de l'acompte versé en invoquant la non-réalisation de la condition suspensive relative à l'obtention du permis de construire modificatif ; que reconventionnellement la société IAI a invoqué la caducité des accords et sollicité le versement du solde de l'indemnité d'immobilisation ; que par arrêt en date du 7 avril 1995, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a condamné la banque Worms et la Caisse régionale de Crédit agricole à restituer à la Banque parisienne de gestion et de dépôts l'acompte versé ; que cette décision a été cassée par arrêt en date du 9 juillet 1997 ;


Attendu que la société BPM et la société CDR créances, venant aux droits de la Banque parisienne de gestion et de dépôts font grief à l'arrêt de déclarer la société CDR irrecevable faute de justification de sa qualité pour agir, alors, selon le moyen :


1 / qu'il résulte de l'article 372.1 de la loi du 24 juillet 1966 que la fusion entraîne la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires de sorte que la société absorbante se trouve de plein droit substituée à la société absorbée ; qu'en l'espèce, la société CDR créances avait, au terme d'un acte régulièrement publié le 20 novembre 1996 et donc opposable aux tiers, absorbé la société Banque parisienne de gestion et de dépôts, ainsi qu'elle l'avait fait connaître à toutes les parties en cause aux termes d'une communication d'avoué à avoué, en date du 16 juillet 1998 ; qu'en faisant cependant droit au moyen de défense des sociétés intimées, selon lequel la société CDR créances aurait été tenue, dans les circonstances de l'espèce, de justifier sa qualité à agir, la cour d'appel a violé tant l'article 372.1 de la loi du 24 juillet 1966 que l'article 255 du décret du 23 mars 1967 ;


2 / que prive sa décision de base légale au regard des articles 471, 472 et des articles 14 et 16 du nouveau Code de procédure civile l'arrêt qui "ordonne la restitution des sommes remboursées par International azur immobilier à la suite de l'arrêt cassé" sans préciser la partie à l'encontre de laquelle intervient ladite condamnation et sans rechercher si ladite partie a été véritablement présente ou représentée dans le débat ;


3 / que l'arrêt cassé rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence avait prononcé la condamnation de la banque Worms et de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel à verser une somme de un million de francs chacune de sorte que l'arrêt présentement attaqué qui ordonne la restitution de ces sommes au profit de la société International azur immobilier sans nullement s'expliquer sur ce changement de créancier, viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;


4 / que la SARL BPM, dans ses conclusions du 30 mars 1998 avait fait siennes les écritures, les moyens et les demandes développées par la société CDR créances, en demandant à la cour d'appel d'accueillir toutes les demandes de la société CDR créances venant aux droits de la Banque parisienne à l'encontre du Crédit agricole et de la banque Worms, cette société justifiant par la production du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 13 novembre 1996 dûment enregistré et publié, qu'elle avait absorbé la BPGD ; qu'en jugeant que ces écritures étaient irrecevables faute pour la société CDR créances de justifier de sa qualité à agir, la cour d'appel a dénaturé les conclusions précitées et violé l'article 1134 du Code civil ;


Mais attendu qu'ayant relevé que la société CDR créances ne justifiait pas comment elle venait aux droits de la Banque parisienne de gestion et de dépôt, qui était régulièrement subrogée dans tous les droits de la société BPM, la cour d'appel a pu retenir que la société CDR créances ne rapportait pas la preuve de sa qualité pour agir ;


D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


Sur le second moyen du pourvoi n° H 99-16.065 :


Attendu que la société BPM fait grief à l'arrêt d'ordonner la restitution des sommes remboursées par la société International Azur immobilier en suite de l'arrêt cassé, alors, selon le moyen :


1 / que toute partie a droit de faire valoir par un recours effectif et direct au juge, lequel devra se prononcer sur tout ce qui lui est demandé et juger de leur bien ou mal fondé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel était saisie d'un moyen tiré de ce que la condition suspensive contractuelle n° 3 de la convention du 18 novembre 1990 n'avait pas été remplie par la faute de la société IAI, celle-ci ayant, en violation de ses obligations contractuelles, demandé et obtenu un permis de construire avec une SHON supérieure aux stipulations contractuelles ; qu'en refusant à la société BPM le droit de se prévaloir de ce moyen devant elle au prétexte que ce moyen n'avait pas été allégué "à l'époque", la cour d'appel a méconnu son office et violé les articles 4, 5, 6, 30 et 31 du nouveau Code de procédure civile et 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme ;


2 / que la renonciation à un droit ne se présume pas ; qu'en l'espèce, si elle entendait refuser à la société BPM le droit de se prévaloir de la condition suspensive prévue en cas de non obtention d'un permis de construire conforme aux stipulations contractuelles, la cour d'appel se devait, au préalable, de constater que la société BPM avait renoncé expressément à ce droit contractuel ; qu'en ne le faisant pas, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard des articles 1134, 1315, 1341 et 1349 et suivants du Code civil ;


3 / qu'il résulte des propres énonciations de l'arrêt que constituait une condition suspensive la "délivrance au nom du vendeur d'un permis de construire portant sur la réalisation de 5000 mètres carrés de plancher environ plus deux niveaux de garage, avec faculté d'augmentation ou de diminution de 10 % soit 500 mètres carrés de SHON, le permis devait être délivré dans les dix huit mois suivant la convention sous peine de caducité" et que le 31 juillet, conformément aux accords contractuels, la société IAI avertissait la société BPM de l'existence de recours contre le permis de construire et lui demandait de donner son accord définitif dans le délai de quatre mois ou de renoncer à acquérir ; que dès lors qu'il était constant que le permis obtenu n'était pas conforme aux stipulations contractuelles et que la société BPM avait renoncé dans le délai de quatre mois qui lui avait été imparti le 31 juillet 1991, la cour d'appel qui a dit que la société BPM, en ne versant pas le complément d'acompte, n'avait pas respecté ses obligations contractuelles et que de ce fait la convention était caduque, n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et a violé l'article 1134 du Code civil ;


Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que le 15 mai 1991 la société IAI avait notifié à la société BPM la délivrance du permis de construire obtenu le 30 avril 1991, que le dépôt d'un recours à l'encontre d'un permis de construire ne dispensait pas la société BPM de verser à la société IAI le solde de l'acompte convenu qui devait être versé dans les huit jours de la notification du permis de construire et qu'à aucun moment, à l'époque, la société BPM n'avait allégué le dépassement de la surface hors oeuvre net (Shon) dans le permis de construire de sorte qu'elle ne pouvait se prévaloir de cet argument pour dire que la sociét IAI n'avait pas respecté ses obligations contractuelles, la cour d'appel, sans modifier l'objet du litige et répondant aux conclusions, a pu en déduire qu'il résultait de l'analyse de la volonté des parties que la société BPM n'avait pas respecté ses obligations, que la convention était caduque et que l'acompte de 2 000 000 francs restait acquis à la société IAI ;


D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi n° B 99-17.555 :


REJETTE les pourvois ;


Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;


Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne, ensemble, la société CDR Créances et la société BPM à payer à la société International azur immobilier et à la Caisse régionale de Crédit agricole mutuelle Provence, Côte-d'Azur, chacune, la somme de 1 900 euros ;


Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société BPM ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille deux.

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