4 octobre 2000
Cour de cassation
Pourvoi n° 98-10.052

Première chambre civile

Titres et sommaires

(SUR LA 1èRE BRANCHE) CHOSE JUGEE - décisions successives - arrêt statuant sur la garantie due par un assureur à l'égard de la victime d'un dommage et décidant du plafond opposable à celle - ci - portée à l'égard de l'assuré, condamné à réparer la totalité du dommage, dans son recours en garantie contre l'assureur

Texte de la décision

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le pourvoi formé par la Mutuelle des architectes français (MAF), société à forme mutuelle et à cotisations variables, dont le siège est ...,


en cassation d'un arrêt rendu le 9 octobre 1997 par la cour d'appel de Paris (19e Chambre civile, Section B), au profit de M. Jean-Jacques X..., demeurant ...,


défendeur à la cassation ;


La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;


LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 27 juin 2000, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Aubert, conseiller rapporteur, M. Sargos, conseiller, M. Roehrich, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;


Sur le rapport de M. Aubert, conseiller, les observations de la SCP Philippe et François-Régis Boulloche, avocat de la Mutuelle des architectes français, de Me Hémery, avocat de M. X..., les conclusions de M. Roehrich, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que, en 1966, la société Anaro a fait construire un centre commercial dont M. X..., avec deux autres architectes, a été chargé de réaliser l'étude et la conception du projet ; que ces architectes étaient assurés par la Mutuelle des architectes français (MAF) ; que, des désordres étant survenus, les architectes et un entrepreneur, ainsi que leurs assureurs respectifs, ont été condamnés à les réparer ; que la société Anaro a, ensuite, recherché la réparation de son préjudice commercial et obtenu la condamnation des architectes et des assureurs à lui payer, "dans les limites de leur contrat" pour ces derniers, une somme de 5 797 616 francs, "valeur décembre 1986", par un arrêt du 28 avril 1988 ; que, par arrêts interprétatifs des 24 janvier et 11 juillet 1990, il a été précisé que l'expression "dans les limites du contrat" avait pour conséquence "que la MAF serait tenue à un plafond global de garantie de 4 millions de francs au titre des deux désordres imputables à la maîtrise d'oeuvre de conception, soit deux millions de francs par sinistre" ; qu'il a ensuite été jugé que la société Anaro était en droit de réclamer à la MAF le montant maximum en principal des deux plafonds de garantie ; que M. X... a alors assigné la MAF aux fins de voir cet assureur condamné à le garantir de l'intégralité des condamnations prononcées contre lui au profit de la société Anaro ; que l'arrêt attaqué a accueilli cette demande ;


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :


Attendu que la MAF fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors que, en décidant que la condamnation prononcée par l'arrêt du 28 avril 1988, limitant la garantie de l'assureur, n'avait pas autorité de chose jugée à l'égard de M. X..., partie aux arrêts ayant prononcé et interprété cette condamnation plafonnée, la cour d'appel aurait violé les articles 1351 du Code civil et 480 du nouveau Code de procédure civile ;


Mais attendu que, ayant relevé que si les décisions visées avaient statué sur la garantie de la MAF à l'égard des architectes pour l'opération de construction litigieuse, le problème de l'étendue des plafonds de garantie n'avait été abordé, lors des précédents débats, que sous l'angle de leur opposabilité aux victimes des désordres et que c'était donc pour la première fois que le Tribunal avait examiné la garantie de la MAF dans le cadre du recours en garantie exercé par M. X... contre son assureur, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui a ainsi constaté que les demandes n'étaient ni les mêmes, ni formées par les parties, entre elles et contre elles, en la même qualité, s'est prononcée comme elle a fait ; que le moyen n'est donc pas fondé ;


Mais, sur la seconde branche du moyen :


Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;


Attendu que l'arrêt condamne la MAF à garantir M. X... de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre au profit de la société Anaro ;


Attendu, cependant, que l'assureur faisait valoir que M. X..., pour s'opposer à la requête en interprétation de l'arrêt du 28 avril 1988, formée par la société Anaro, avait objecté que la cour d'appel avait utilisé la formule "dans les limites du contrat" afin d'éviter que les assureurs garantissant les responsables fussent condamnés au-delà des limites contractuelles, admettant ainsi que la garantie de l'assureur ne devait pas dépasser ces limites ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 octobre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;


remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;


Condamne M. X... aux dépens ;


Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer la somme de 12 000 francs à la Mutuelle des architectes français ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille.

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