8 juillet 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-70.010

Autre - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:AV15012

Titres et sommaires

SANTE PUBLIQUE - Lutte contre les maladies et les dépendances - Lutte contre les maladies mentales - Modalités de soins psychiatriques - Droits des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques - Mesures d'isolement et de contention - Contrôle par le juge des libertés et de la détention (non) - Irrégularité de la mesure - Mainlevée limitée à la mesure d'isolement ou de contention

A l'occasion du contrôle systématique d'une mesure de soins psychiatriques sans consentement prenant la forme d'une hospitalisation complète, d'une demande de mainlevée de cette mesure ou d'une saisine d'office, le constat, par le juge des libertés et de la détention, d'une irrégularité affectant une mesure d'isolement ou de contention ne peut donner lieu à la mainlevée que de l'une ou l'autre de ces dernières mesures. Si cette mainlevée est intervenue avant que le juge ne se prononce, il n'y a plus lieu de statuer à leur égard

SANTE PUBLIQUE - Lutte contre les maladies et les dépendances - Lutte contre les maladies mentales - Modalités de soins psychiatriques - Droits des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques - Mesures d'isolement et de contention - Contrôle par le juge des libertés et de la détention (non) - Mainlevée intervenue avant le prononcé de la décision - Office du juge - Non lieu à statuer

Texte de la décision

Demande d'avis
n°H 21-70.010

Juridiction : le tribunal judiciaire de Versailles




IB





Avis du 8 juillet 2021



n° 15012 B






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

COUR DE CASSATION
_________________________

Première chambre civile


Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile :

La Cour de cassation a reçu le 30 avril 2021 une demande d'avis formée le 16 avril 2021 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Versailles, dans une instance concernant le directeur du centre hospitalier de [Localité 1], M. [I] [T], Mme [B] [T] et le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Versailles.

La première chambre civile de la Cour de cassation a rendu le présent avis sur le rapport de Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire, et les observations écrites et orales de Mme Marilly, avocat général référendaire.

Énoncé de la demande d'avis

1. La demande est ainsi formulée :

« Le constat par le juge des libertés et de la détention, à l'occasion du contrôle systématique d'une mesure de soins psychiatriques sans consentement prenant la forme d'une hospitalisation complète, ou d'une demande de levée de cette mesure ou d'une saisine d'office de la juridiction, d'une irrégularité affectant une mesure d'isolement ou de contention mise en oeuvre à l'occasion de cette hospitalisation, peut-il être sanctionné par la levée de la mesure d'hospitalisation complète, en particulier lorsque l'isolement ou la contention n'est plus en vigueur lorsque la juridiction statue, dès lors qu'il est établi que l'irrégularité relevée a porté atteinte aux droits du patient ? »

Examen de la demande d'avis

2. Aux termes de l'article L. 3222-5-1, I, du code de la santé publique, l'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d'un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en ?uvre doit faire l'objet d'une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l'établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.

3. Selon l'alinéa 3, du II, de ce même article, lorsque, à titre exceptionnel, le médecin renouvelle une mesure d'isolement ou de contention, au-delà des durées totales prévues par ce texte, il en informe sans délai le juge des libertés et de la détention, qui peut se saisir d'office pour mettre fin à la mesure. Il informe également les personnes mentionnées à l'article L. 3211-12, dès lors qu'elles sont identifiées, et leur fait part de leur droit de saisir ce juge aux fins de mainlevée de la mesure et des modalités pour le faire. En cas de saisine, le juge des libertés et de la détention statue dans un délai de vingt-quatre heures.

4. En vertu de l'article R. 3211-39, si le juge ne statue pas dans ce délai, il est mis fin à la mesure.

5. Sur le fondement de l'article L. 3211-12, le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil peut être saisi, à tout moment, par le patient, ses proches, la personne ayant formulé la demande de soins ou le procureur de la République, aux fins d'ordonner, à bref délai, la mainlevée immédiate d'une mesure de soins psychiatriques prononcée en application des chapitres II à IV du titre Ier ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale, quelle qu'en soit la forme. Il peut, également, être saisi par les mêmes personnes aux fins de mainlevée d'une mesure d'isolement ou de contention prise en application du troisième alinéa du II de l'article L. 3222-5-1. Il peut, enfin, se saisir d'office, à tout moment. A cette fin, tout intéressé peut porter à sa connaissance les informations qu'il estime utiles sur la situation d'une personne faisant l'objet de l'une des mesures de soins psychiatriques précitées ou d'une mesure d'isolement ou de contention. Le juge des libertés et de la détention ordonne, s'il y a lieu, la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète, d'isolement ou de contention.

6. Lorsque, saisi sur le fondement de l'article L. 3211-12-1, soit par le directeur de l'établissement, soit par le représentant de l'Etat dans le département, d'une demande de poursuite d'une mesure d'hospitalisation complète, il n'ordonne pas la mainlevée de cette mesure, le juge des libertés et de la détention statue, le cas échéant, y compris d'office, sur le maintien de celle d'isolement ou de contention.

7. Il en résulte que les mesures d'isolement ou de contention, au sens de ces textes, sont des mesures médicales qui, si elles ne peuvent concerner que les patients en hospitalisation complète sans consentement, ne sont pas nécessairement mises en oeuvre et doivent au contraire être de dernier recours. Décidées par un psychiatre, elles présentent un caractère autonome à l'égard de la décision de soins psychiatriques sans consentement prise par le directeur de l'établissement de santé, le représentant de l'Etat dans le département ou l'autorité judiciaire.

8. Le contrôle de ces mesures est spécifique, quel que soit le mode de saisine du juge des libertés et de la détention, et conduit, en cas d'irrégularité constatée, au prononcé de leur mainlevée.

9. Il s'en déduit qu'à l'occasion du contrôle systématique d'une mesure de soins psychiatriques sans consentement prenant la forme d'une hospitalisation complète, d'une demande de mainlevée de cette mesure ou d'une saisine d'office, le constat, par le juge des libertés et de la détention, d'une irrégularité affectant une mesure d'isolement ou de contention ne peut donner lieu à la mainlevée que de l'une ou l'autre de ces dernières mesures.

10. Si cette mainlevée est intervenue avant que le juge ne se prononce, il n'y a plus lieu de statuer à leur égard.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

EST D'AVIS QUE

A l'occasion du contrôle systématique d'une mesure de soins psychiatriques sans consentement prenant la forme d'une hospitalisation complète, d'une demande de mainlevée de cette mesure ou d'une saisine d'office, le constat, par le juge des libertés et de la détention, d'une irrégularité affectant une mesure d'isolement ou de contention ne peut donner lieu à la mainlevée que de l'une ou l'autre de ces dernières mesures.

Si cette mainlevée est intervenue avant que le juge ne se prononce, il n'y a plus lieu de statuer à leur égard.

Fait à Paris et mis à disposition au greffe de la Cour le 8 juillet 2021, après examen de la demande d'avis lors de la séance du 6 juillet 2021 où étaient présents, conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire : M. Chauvin, président, Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, M. Hascher, Mme Antoine, M. Vigneau, Mmes Poinseaux, Guihal, M. Fulchiron, Mme Dard, conseillers, Mmes Mouty-Tardieu, Gargoullaud, Azar, M. Buat-Ménard, conseillers référendaires, Mme Marilly, avocat général référendaire, Mme Berthomier, greffier de chambre.

Le présent avis est signé par le conseiller rapporteur, le président et le greffier de chambre.

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