27 mai 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-24.286

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:C200523

Texte de la décision

CIV. 2

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 mai 2021




Cassation partielle


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 523 F-D

Pourvoi n° R 19-24.286




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 MAI 2021

Mme [D] [E], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 19-24.286 contre l'arrêt rendu le 12 septembre 2019 par la cour d'appel de Versailles (3e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MMA IARD, société anonyme,

2°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles, société d'assurances mutuelles à cotisations fixes,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 2], et venant aux droits de la société Covea Risks,

défenderesses à la cassation.

Les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de Mme [E], de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat des sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 avril 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 septembre 2019), afin de bénéficier de la réduction d'impôts sur le revenu prévue par l'article 199 undecies B du code général des impôts, au titre du dispositif dit « Girardin industriel », Mme [E] a souscrit à un projet, monté par la société Diane, consistant dans un investissement dans des centrales photovoltaïques sur l'Ile de la Réunion.

2. Mme [E] a ainsi versé à la société Diane la somme de 14 562 euros, et a bénéficié d'une réduction d'impôts sur ses revenus 2010 à hauteur de 15 240 euros.

3. Cependant, l'administration fiscale a estimé qu'une installation dans le secteur photovoltaïque devait être considérée comme constitutive d'un investissement réalisé, ouvrant droit à réduction d'impôt, uniquement à compter de la date de raccordement au réseau électrique ou du dépôt d'un dossier complet de demande de raccordement. Dans la mesure où ces démarches n'avaient pas été effectuées, au 31 décembre de l'année considérée, pour les installations concernées par l'investissement de Mme [E], une procédure de rectification a été engagée contre elle.

4. Mme [E], estimant avoir subi un préjudice du fait des sociétés Diane et Gesdom, a assigné en indemnisation l'assureur de ces dernières, la société Covea Risks, aux droits de laquelle sont venues les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles (les assureurs).


Examen du moyen relevé d'office

5. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de
procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article L. 124-1-1 du code des assurances :

6. Les dispositions du texte susvisé consacrant la globalisation des sinistres
ne sont pas applicables à la responsabilité encourue par un professionnel
en cas de manquements à ses obligations d'information et de conseil, celles-ci, individualisées par nature, excluant l'existence d'une cause technique, au sens de ce texte, permettant de les assimiler à un fait dommageable unique.

7. Pour dire que les plafonds de garantie contenus dans les trois polices souscrites par la Chambre nationale des conseillers en investissements financiers, par la société Diane et par la société Gesdom sont opposables à Mme [E] et appliqués de façon globale pour l'ensemble des tiers lésés par les sociétés Gesdom et Diane et désigner la Caisse des dépôts et consignations comme séquestre, avec pour mission de conserver les fonds alloués à Mme [E] et garantis par les assureurs au titre des trois polices dans l'attente des décisions définitives tranchant les réclamations formées à l'encontre des sociétés Diane et Gesdom dans lesquelles le dommage a la même cause, sans que cette conservation ne puisse excéder cinq ans à compter de la date à laquelle l'arrêt deviendra définitif, l'arrêt énonce qu'aux termes de l'article L. 124-1-1 du code des assurances, constitue un sinistre tout dommage ou ensemble de dommages causés à des tiers, engageant la responsabilité de l'assuré, résultant d'un fait dommageable et ayant donné lieu à une ou plusieurs réclamations, que le fait dommageable est celui qui constitue la cause génératrice du dommage et qu'un ensemble de faits dommageables ayant la même cause technique est assimilé à un fait dommageable unique. L'arrêt retient que le plafond de garantie, opposable à Mme [E], doit être appliqué de façon globale pour l'ensemble des tiers lésés et que dès lors que les assureurs font l'objet de très nombreuses procédures conduites par des investisseurs se considérant comme victimes des agissements des sociétés Gesdom et Diane, il est possible que, si ces demandes devaient aboutir, le plafond de garantie soit dépassé et qu'une répartition au marc l'euro doive être effectuée.

8. En statuant ainsi, alors que la responsabilité des assurées était recherchée au titre de leurs manquements dans l'exécution d'obligations dont elles étaient spécifiquement débitrices à l'égard de Mme [E], la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l'arrêt relatives à la globalisation des plafonds de garantie et à la désignation d'un séquestre entraîne, par voie de conséquence, celle des chefs de dispositif disant qu'une seule franchise doit être appliquée à l'ensemble des sinistres et qu'aucune franchise contractuelle ne sera appliquée individuellement à Mme [E], condamnant in solidum les assureurs à lui payer la somme de 17 758 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 janvier 2018 devant être capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil et rejetant la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les moyens du pourvoi principal et sur le moyen du pourvoi incident, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que les plafonds de garantie contenus dans les trois polices souscrites par la Chambre nationale des conseillers en investissements financiers, par la société Diane et par la société Gesdom sont opposables à Mme [E] et appliqués de façon globale pour l'ensemble des tiers lésés par les sociétés Gesdom et Diane, dit qu'une seule franchise doit être appliquée à l'ensemble de sinistres et qu'aucune franchise contractuelle ne sera appliquée individuellement à Mme [E], condamne in solidum les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles à payer à Mme [E] la somme de 17 758 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 janvier 2018, les intérêts étant capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil, désigne la Caisse des dépôts et consignations comme séquestre, avec pour mission de conserver les fonds alloués à Mme [E] et garantis par les assureurs au titre des trois polices dans l'attente des décisions définitives tranchant les réclamations formées à l'encontre des sociétés Diane et Gesdom dans lesquelles le dommage a la même cause, sans que cette conservation ne puisse excéder cinq ans à compter de la date à laquelle l'arrêt sera définitif, et rejette la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par Mme [E], l'arrêt rendu le 12 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour Mme [E].

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que les plafonds de garantie contenus dans les polices d'assurance n° 112 788 909, 120 137 363 et 114 247 742 sont opposables à Mme [E] et appliqués de façon globale pour l'ensemble des tiers lésés par les sociétés Gesdom et Diane et d'avoir désigné la Caisse des dépôts et consignations comme séquestre, avec pour mission de conserver les fonds alloués à Mme [E] et garantis par les assureurs au titre des trois polices dans l'attente des décisions définitives tranchant les réclamations formées à l'encontre des sociétés Diane et Gesdom dans lesquelles le dommage a la même cause, sans que cette conservation ne puisse excéder 5 ans à compter de la date à laquelle son arrêt deviendra définitif ;

AUX MOTIFS QUE

« Sur la garantie des MMA

C'est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a jugé que la police n° 112 788 909 souscrite par la Chambre nationale des conseillers en investissements financiers au profit de ses membres auprès de la société Covea Risks avait vocation à s'appliquer, étant observé que la société Gesdom comme la société Diane avaient la qualité de CIF ;

[?]

Aux termes de l'article L. 124-1-1 du code des assurances, constitue un sinistre tout dommage ou ensemble de dommages causés à des tiers, engageant la responsabilité de l'assuré, résultant d'un fait dommageable et ayant donné lieu à une ou plusieurs réclamations ; Le fait dommageable est celui qui constitue la cause génératrice du dommage ; Un ensemble de faits dommageables ayant la même cause technique est assimilé à un fait dommageable unique ;

Le plafond de garantie, opposable à Mme [E], est alors appliqué de façon globale pour l'ensemble des tiers lésés ;

Mme [E] soutient, s'agissant de la police 112.788.909, qu'aucun plafond de garantie n'est stipulé pour les activités exercées par Diane à savoir l'ingénierie financière et l'assistance à la déclaration de revenus ;

Cette analyse du contrat est inexacte ; En effet, dans la description des activités assurées (page 3), l'activité d'ingénierie financière est associée à celle de conseil financier ; Or, le plafond de garantie stipulé au contrat d'assurance de responsabilité civile est fixé à 2 500 000 euros "par sinistre", s'agissant notamment de l'activité de conseiller en investissement financier (page 7 de la police), qui inclut donc celle d'ingénierie financière ; D'ailleurs, l'attestation d'assurance délivrée le 17 février 2011 fait état de ce que la société Diane a souscrit la police 112.788.909 aux termes de laquelle la garantie accordée pour les activités de conseil en gestion de patrimoine et activités annexes telles que démarchage en produits bancaires ou financiers, intermédiaires en produits bancaires ou financiers, intermédiation en opérations de banque, conseils en investissements financiers/CIF, agent ou intermédiaire immobilier (sans maniement et détention de fonds) est plafonnée à 3 000 000 euros par sinistre, sans limite par an ;

[?]

L'article L. 124-3 dispose que l'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré ;

Il en résulte qu'un assureur, qui a connaissance de la pluralité de victimes disposant de droits sur l'indemnité d'assurance et alors qu'il existe un risque réel de dépassements de garantie en raison du cumul des demandes, ne peut payer un tiers lésé avant un autre et que le paiement se fait alors au marc l'euro et non "au prix de la course" ;

Il est constant que les MMA font l'objet de très nombreuses procédures conduites par des investisseurs se considérant comme victimes des agissements des sociétés Gesdom et Diane ; Si ces demandes devaient aboutir il est possible que le plafond de garantie soit dépassé et qu'une répartition au marc l'euro doive être effectuée ;

Il y a lieu en conséquence de désigner un séquestre pour l'ensemble des sommes allouées à Mme [E], dues par les MMA au titre des trois polices d'assurance, selon les modalités précisées au dispositif de l'arrêt ;

S'agissant d'un sinistre sériel, une seule franchise doit être appliquée à l'ensemble des sinistres et aucune franchise contractuelle ne saurait être appliquée individuellement à Mme [E] ;



Mme [E] n'est pas fondée à demander que les intérêts des sommes séquestrées lui bénéficient dès lors que, dépossédées des fonds remis au séquestre, les MMA ne sont plus redevables des intérêts, lesquels cessent de courir ;

Pour des raisons de meilleure compréhension, le jugement sera infirmé en sa disposition relative aux sommes allouées ainsi qu'en toutes celles s'y rattachant » ;

1°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; qu'en affirmant que l'activité de conseiller en investissement financier, pour laquelle la police d'assurance n° 112 788 909 prévoyait un plafond de garantie de 2 500 000 d'euros par sinistre, ultérieurement porté à 3 000 000 d'euros, incluait celle d'ingénierie financière, ce dont elle a déduit que cette activité était concernée par ce plafond de garantie, cependant que l'article 1 du Chapitre I de la police d'assurance distingue expressément, d'une part, les activités de « Conseil financier, Ingénierie financière », d'autre part, celles de « Conseiller en Investissements Financiers conformément aux articles L. 541-1 et suivants du CODE MONETAIRE ET FINANCIER » (p. 3 de la police), et que l'article C du Chapitre II (p. 7 de la police) prévoit un plafond de garantie applicable aux sinistres se rapportant à des activités limitativement énumérées, parmi lesquelles les activités de « Conseiller en Investissements Financiers », sans viser l'activité d'ingénierie financière, ce dont il résulte que cette dernière activité ne comporte pas de plafond de garantie, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de la police d'assurance n° 112 788 909, a violé le principe susvisé ;

2°) ALORS QU'en retenant que l'attestation d'assurance du 17 février 2011 confirmait l'existence d'un plafond de garantie relativement à l'activité litigieuse d'ingénierie financière, quand cette attestation ne visait pas cette activité mais celle de conseil en investissement financier, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document, et a violé l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les écrits qui lui sont soumis ;

3°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE l'existence d'un risque que le montant de la garantie contractuellement plafonné s'avère insuffisant pour dédommager l'ensemble des victimes d'un sinistre sériel ne fait pas obstacle à ce que l'assureur procède à l'indemnisation des victimes au fur et à mesure des demandes qui lui sont présentées par celles-ci ; qu'en affirmant néanmoins, pour ordonner le séquestre des sommes allouées à Mme [E] en réparation de son préjudice matériel dans l'attente des décisions à intervenir tranchant les réclamations de toutes les victimes des sociétés Diane et Gesdom afin qu'il puisse être procédé, le cas échéant, à une répartition proportionnelle de l'indemnité d'assurance entre l'ensemble des victimes, qu'un assureur, qui a connaissance de la pluralité de victimes disposant de droits sur l'indemnité d'assurance, ne peut, lorsqu'il existe un risque réel de dépassement de garantie en raison du cumul des demandes, payer un tiers lésé avant un autre et que le paiement doit se faire au marc l'euro et non au prix de la course, la cour d'appel a violé l'article L. 124-3 du code des assurances ;

4°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE tenu de motiver sa décision, à peine de nullité de celle-ci, le juge ne peut statuer par voie de simple affirmation, sans viser, ni analyser, même sommairement, les éléments de preuve sur lesquels il se fonde ; qu'en se bornant à affirmer que si les demandes des autres investisseurs se considérant victimes des sociétés Gesdom et Diane devaient aboutir, il est possible que le plafond de garantie soit dépassé et qu'une répartition au marc l'euro doive être effectuée, sans viser ni analyser les éléments de preuve d'où elle tirait la constatation d'un tel risque, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; qu'un motif hypothétique équivaut à un défaut de motifs ; qu'en affirmant que si les demandes des autres investisseurs se considérant victimes des sociétés Gesdom et Diane devaient aboutir, il est possible que le plafond de garantie soit dépassé et qu'une répartition au marc l'euro doive être effectuée, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif hypothétique, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

6°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen de Mme [E], par lequel celle-ci faisait valoir, pour s'opposer au séquestre des sommes allouées en réparation de son préjudice dans l'attente des décisions à intervenir tranchant les réclamations de toutes les victimes des sociétés Diane et Gesdom, qu'une répartition proportionnelle de l'indemnité d'assurance ne pouvait être mise en oeuvre, puisque d'autres juridictions ayant eu à connaître du même sinistre sériel, telle que la cour d'appel de Paris dans 14 arrêts du 19 février 2018 et 2 arrêts du 4 février 2019, avaient condamné les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles à indemniser des investisseurs sans ordonner le séquestre des sommes dues, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la somme mise à la charge des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, en tant qu'assureurs des sociétés Diane et Gesdom au titre des polices d'assurance n° 112 788 909, 120 137 363 et 114 247 742 au profit de Mme [E] portera intérêts au taux légal à compter du 12 janvier 2018 ;

AUX MOTIFS QUE

« Cette somme [la somme de 17 758 euros] produira intérêts au taux légal à compter du 12 janvier 2018, date du jugement, et les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil » ;

ALORS QUE les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure ; que l'action directe exercée par la victime d'un dommage contre l'assureur de responsabilité du responsable tendant à obtenir le paiement d'une somme d'argent due au titre de la police d'assurance, les intérêts moratoires de la somme mise à la charge de l'assureur en exécution du contrat d'assurance courent du jour de la sommation de payer ; qu'en décidant néanmoins que la somme mise à la charge des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles au titre des polices d'assurance n° 112 788 909, 120 137 363 et 114 247 742 au profit de Mme [E] portera intérêts au taux légal à compter du 12 janvier 2018, date du jugement, la cour d'appel a violé l'article 1231-6 du code civil. Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société MMA IARD.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles à payer à Mme [E] la somme de 17 758 euros en réparation de son préjudice financier et d'AVOIR dit que la Caisse des dépôts et consignations, désignée comme séquestre, aurait pour mission de conserver les fonds « alloués à Mme [E] » ;

AUX MOTIFS QUE l'article L. 124-3 dispose que l'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré ; qu'il en résulte qu'un assureur, qui a connaissance de la pluralité de victimes disposant de droits sur l'indemnité d'assurance et alors qu'il existe un risque réel de dépassements de garantie en raison du cumul des demandes, ne peut payer un tiers lésé avant un autre et que le paiement se fait alors au marc l'euro et non "au prix de la course" ; qu'il est constant que les MMA font l'objet de très nombreuses procédures conduites par des investisseurs se considérant comme victimes des agissements des sociétés Gesdom et Diane ; que si ces demandes devaient aboutir il est possible que le plafond de garantie soit dépassé et qu'une répartition au marc l'euro doive être effectuée ; qu'il y a lieu en conséquence de désigner un séquestre selon les modalités précisées au dispositif de l'arrêt ;

1°) ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; qu'en condamnant, dans son dispositif, les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles à payer à Mme [E] la somme de 17 758 euros en réparation de son préjudice financier, quand, dans ses motifs, elle avait constaté que les MMA faisaient l'objet de nombreuses procédures conduites par des investisseurs se considérant comme victimes des agissements des sociétés Gesdom et Diane, que si ces demandes devaient aboutir, il était possible que le plafond de garantie soit dépassé et qu'il y avait lieu en conséquence de désigner un séquestre, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, lorsqu'un même sinistre est susceptible d'être garanti par l'assureur à l'égard de plusieurs victimes, dans la limite du plafond prévu au contrat d'assurance, l'assureur ne peut être condamné à leur égard, dans cette limite, qu'au paiement d'une indemnité au marc l'euro ; qu'il résulte des propres constatations et énonciations de l'arrêt que de nombreuses procédures étaient engagées à l'encontre des sociétés MMA par des investisseurs s'estimant victimes des agissements des sociétés Gesdom et Diane, que si ces demandes devaient aboutir il était possible que le plafond de garantie, opposable aux tiers lésés, soit dépassé et qu'une répartition au marc l'euro doive être effectuée, de sorte qu'il y avait lieu de désigner un séquestre des sommes qui pourraient être dues à chacun des tiers lésés, dans l'attente des décisions définitives tranchant ces réclamations ; qu'en condamnant néanmoins, d'ores et déjà, les sociétés MMA à payer la somme de 17 758 ? à Mme [E], en indemnisation de son préjudice, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 112-3 et L. 113-5 du code des assurances.

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