21 décembre 2006
Cour de cassation
Pourvoi n° 04-43.886

Chambre sociale

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

PRUD'HOMMES - procédure - demande - demande initiale - demande en exécution du contrat de travail - modification en cours d'instance par une prise d'acte de la rupture - possibilité - contrat de travail, rupture - prise d'acte de la rupture - prise d'acte par le salarié - cause - manquements reprochés à l'employeur - manquements faisant l'objet d'une procédure prud'homale en cours - portée

Un salarié qui agit en justice contre son employeur en exécution d'une obligation née du contrat de travail peut toujours prendre acte de la rupture du contrat, que ce soit en raison des faits dont il a saisi le conseil de prud'hommes ou pour d'autres faits ; une telle prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, et d'une démission dans le cas contraire.

Texte de la décision

Attendu que Mme X... a été engagée par la société Tomy France à compter du 1er mars 1998 en qualité de chef de produit ; qu'elle bénéficiait, au titre de sa rémunération, d'une prime annuelle de motivation dite "incentive" ; que n'ayant obtenu, à la suite d'une action en référé, le paiement que d'une partie de la prime due, elle a saisi la juridiction prud'homale le 20 octobre 2000, afin d'obtenir le paiement de la partie manquante ; que le 14 novembre 2000, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail en reprochant à son employeur le non-paiement complet de la prime dite "incentive" ;


Sur le premier moyen :


Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué (Chambéry, 30 mars 2004) d'avoir dit que la rupture du contrat de travail de la salariée dont elle avait pris acte le 14 novembre 2000 s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de l'avoir en conséquence condamnée au paiement de diverses sommes et de l'avoir déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour non-respect du préavis, alors, selon le moyen, que lorsque le salarié a engagé une action contre son employeur tendant à l'exécution de son contrat de travail, il n'est pas en droit pendant le cours de l'instance de prendre acte de la rupture à raison des faits dont il a saisi la juridiction prud'homale, qu'il peut seulement le cas échéant saisir la juridiction d'une demande additionnelle tendant à voir prononcer par celle-ci la résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'en l'espèce, il était constant que Mme X... avait pris acte de la rupture de son contrat de travail le 14 novembre 2000 à raison du non-paiement par la société Tomy France d'un solde de prime incentive, postérieurement à sa saisine de la juridiction prud'homale le 20 octobre 2000 d'une demande tendant au paiement de cette même prime ; qu'en décidant que la salariée avait pu valablement prendre acte de la rupture de son contrat de travail avant l'audience de conciliation devant la juridiction prud'homale, et en faisant produire les effets d'un licenciement abusif à ladite prise d'acte, la cour d'appel a violé les articles L. 122-4 et L. 122-14-3 du code du travail ;


Mais attendu qu'un salarié qui agit en justice contre son employeur en exécution d'une obligation née du contrat de travail peut toujours prendre acte de la rupture du contrat, que ce soit en raison des faits dont il a saisi le conseil de prud'hommes ou pour d'autres faits ;


qu'une telle prise d'acte produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ;


Et attendu que la cour d'appel a souverainement apprécié la gravité du manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles ;


que le moyen n'est pas fondé ;


Mais sur le second moyen :


Vu les articles L. 223-11 et L. 223-14 du code du travail ;


Attendu que pour confirmer la condamnation de l'employeur à payer une somme à titre d'indemnité de congés payés afférents à la prime dite "incentive", la cour d'appel retient que les congés payés n'ont pas été inclus dans la prime "incentive" reconnue au moment de l'audience de référé du 11 octobre 2000, et que le conseil de prud'hommes n'a pas fait d'erreur en calculant les congés payés sur la totalité de la prime ;


Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'indemnité de congés payés afférente à la partie de la prime réglée lors de l'audience de référé n'avait pas été payée après cette audience, ainsi qu'il était mentionné dans le bulletin de paie de novembre 2000, de sorte que l'employeur n'était plus redevable que d'un solde et non de la totalité de l'indemnité de congés payés afférente à l'ensemble de la prime, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que l'arrêt a déclaré non fondé l'appel incident de la société Tomy France, en ce qu'il demandait la condamnation de Mme X... au paiement d'une somme de 973,04 euros à titre de trop perçu sur l'indemnité compensatrice de congés payés, l'arrêt rendu le 30 mars 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;


Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;


Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille six.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.