24 mai 2000
Cour de cassation
Pourvoi n° 99-87.839

Chambre criminelle

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

CASSATION - juridiction de renvoi - chambre d'accusation - pouvoirs - etendue - cassation portant sur des nullités de procédure - circonstances de l'espèce - appréciation souveraine - convention europeenne des droits de l'homme - article 5.2 - douanes - rétention douanière - droit pour toute personne arrêtée d'être informée dans le plus court délai des raisons de son arrestation - délai - agent des douanes - retenue préventive - convention européenne des droits de l'homme - article 5, paragraphe 2 - nullité non soulevée devant la chambre d'accusation initialement saisie - irrecevabilité

La chambre d'accusation statuant comme juridiction de renvoi après cassation apprécie souverainement les circonstances de l'espèce. Dès lors, n'excède pas ses pouvoirs la chambre d'accusation qui interprète un procès-verbal établi par les agents des Douanes dans un sens différent de celui qu'avait retenu la chambre d'accusation initialement saisie(1).

Texte de la décision

REJET du pourvoi formé par :

- X...,

contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, en date du 17 novembre 1999, qui, sur renvoi après cassation dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et contrebande, a rejeté sa demande d'annulation d'actes de la procédure.

LA COUR,

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, du 13 mars 2000, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 5, paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 174, 593 et 609-1 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense :

" en ce que l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi de cassation, a dit n'y avoir lieu à annulation ;

" aux motifs qu'il résulte du procès-verbal de constat établi par les agents des Douanes (D 20) qu'à 10 heures 30, après avoir subi un test EMIT qui s'est révélé positif, X... a été informé qu'il était retenu pour le soumettre à un examen de dépistage de la présence de stupéfiants dans son organisme ; qu'il a ainsi nécessairement eu connaissance dans le plus court délai des raisons de son arrestation au sens de l'article 5, paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'il importe peu qu'il ne lui ait pas alors été donné connaissance que, s'il persistait dans son refus après notification d'une éventuelle ordonnance du président du tribunal de grande instance, il se rendrait alors coupable d'un délit ;

" alors, d'une part, que la chambre d'accusation, statuant comme juridiction de renvoi après cassation d'un arrêt ayant prononcé sur des nullités de procédure, ne saurait, sans excéder ses pouvoirs, modifier l'interprétation qui a été donnée, par la juridiction initialement saisie, à des actes de l'information, lorsque cette interprétation n'a pas été censurée par l'arrêt de cassation intervenu ; qu'en l'espèce il résultait de la décision initiale que, interpellé à 10 heures 15 et retenu ensuite contre son gré, X... n'avait été informé que 3 heures plus tard des raisons pour lesquelles il était privé de liberté, ce que l'arrêt de cassation avait lui-même constaté ; que la décision initiale avait été censurée pour ne pas avoir expliqué les raisons qui empêchaient les agents des Douanes d'informer plus tôt X... des motifs de son interpellation et de sa rétention ; qu'en affirmant que l'intéressé avait été nécessairement informé des raisons de sa rétention dès 10 heures 30, la chambre d'accusation de renvoi a excédé ses pouvoirs ;

" alors, d'autre part, que toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ; que cette information doit être expresse et complète ; qu'il ne résulte pas du procès-verbal visé par la chambre d'accusation ni d'aucune pièce que X... a été expressément et complètement informé avant 13 heures des raisons de son arrestation et de sa rétention, ni des risques encourus en cas de refus de se soumettre à un examen médical ; que le seul fait de lui avoir indiqué, à 10 heures 30, qu'il allait être soumis à un examen de dépistage ne constitue pas une telle information ;

" alors, enfin, qu'en tout état de cause il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que X... a été interpellé dès 10 heures 15 et que les agents ne lui ont pas fait connaître immédiatement les raisons de son arrestation " ;

Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que, le 4 février 1998, à 10 heures 15, X... a été interpellé, à l'aéroport de Roissy, par les agents des Douanes, et soumis à un test EMIT, qui s'est révélé positif ; que, devant son refus de subir tout autre examen clinique ou radiologique, les agents des Douanes ont avisé le délégué du président du tribunal de grande instance, lequel, en application de l'article 60 bis du Code des Douanes, a rendu, à 13 heures, une ordonnance enjoignant à X... de se soumettre à une visite médicale, mesure à laquelle l'intéressé s'est opposé ; qu'à 15 heures 20, il a été remis au service de l'immigration, dont les agents, officiers de police judiciaire, l'ont placé en garde à vue à compter de 10 heures ; qu'à l'issue de cette garde à vue, il a été mis en examen pour infractions à la législation sur les stupéfiants et contrebande ;

Attendu que, pour écarter le moyen par lequel X... faisait valoir qu'il avait été informé tardivement des motifs de son interpellation et de sa rétention, la chambre d'accusation relève qu'il résulte des mentions du procès-verbal établi par les agents des Douanes qu'à 10 heures 30, après que le test EMIT eut été pratiqué sur lui, X... a été informé qu'il était retenu pour être soumis à un examen de dépistage de la présence de stupéfiants dans son organisme et qu'ainsi il a nécessairement eu connaissance dans le plus court délai des raisons de son arrestation au sens de l'article 5.2 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, répondant aux exigences de l'article 5.2 de la Convention européenne des droits de l'homme, la chambre d'accusation qui, statuant sur renvoi de cassation, disposait du pouvoir souverain d'apprécier les circonstances de l'espèce, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 174, 593 et 609-1 du Code de procédure pénale :

" en ce que l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi de cassation, a dit n'y avoir lieu à annulation ;

" aux motifs que, par application de l'article 174 du Code de procédure pénale, l'exception de nullité tirée de la violation de l'article 63-1 du Code de procédure pénale, qui n'avait été soulevée ni dans la requête en annulation ni dans les mémoires régulièrement déposés avant l'audience de la chambre d'accusation de Paris, ne peut être soulevée pour la première fois devant la chambre d'accusation statuant comme Cour de renvoi après arrêt de cassation ; que l'exception de nullité doit en conséquence être rejetée ;

" alors, qu'en cas de cassation d'un arrêt de chambre d'accusation qui a dit n'y avoir lieu à annulation, tous moyens de nullité de la procédure peuvent être proposés à la chambre d'accusation de renvoi " ;

Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité tirée du caractère tardif de la notification des droits prévue à l'article 63-1 du Code de procédure pénale, la cour d'appel relève que cette exception ne peut être soulevée pour la première fois devant la chambre d'accusation statuant comme Cour de renvoi après arrêt de cassation ;

Attendu qu'en cet état, la chambre d'accusation a fait l'exacte application des articles 174 et 609-1 du Code de procédure pénale ;

Qu'il s'ensuit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.

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