6 avril 2004
Cour de cassation
Pourvoi n° 04-80.579

Chambre criminelle

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

INSTRUCTION - ordonnances - appel - appel de la partie civile - ordonnance de mise en accusation - ordonnance ayant requalifié les faits - recevabilité (non) - chambre de l'instruction - appel des ordonnances du juge d'instruction - convention europeenne des droits de l'homme - article 6.1 - equité - droit d'appel accordé à la personne mise en examen et non à la partie civile - compatibilité - appel irrecevable - convention européenne des droits de l'homme

L'ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises ayant requalifié les faits de la poursuite ne fait pas grief, au sens de l'article 186, alinéa 2, du Code de procédure pénale, aux intérêts de la partie civile, dont les droits demeurent entiers devant la juridiction de jugement. Est dès lors irrecevable l'appel de cette ordonnance par la partie civile.

Texte de la décision

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le six avril deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET et les observations de Me SPINOSI, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;


Statuant sur le pourvoi formé par :


- X... Karim, partie civile,


contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 7 novembre 2003, qui a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance renvoyant Rida Y... devant la cour d'assises du RHONE sous l'accusation de violences mortelles et de violences avec arme ;

Vu l'article 575, alinéa 2, 6, du Code de procédure pénale ;


Vu le mémoire produit ;


Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article préliminaire et des articles 186, alinéa 2, et 593 du Code de procédure pénale ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable l'appel de la partie civile contre l'ordonnance de mise en accusation déférée ;


"aux motifs que "la chambre de l'instruction n'est saisie que du seul appel d'une des parties civiles, Karim X... ; qu'aux termes de l'article 186, alinéa 2, du Code de procédure pénale, la partie civile peut interjeter appel des ordonnances de non informer, de non-lieu et des ordonnances faisant grief à ses intérêts civils ;


que cette énumération limitative ne comprend pas l'ordonnance de mise en accusation introduite par la loi du 15 juin 2000 et prévue par l'article 181 du Code de procédure pénale, alors que l'alinéa 1er, de l'article 186 visé en préliminaire, dans sa rédaction issue de la loi précitée, prévoit spécifiquement le droit pour la personne mise en examen, de relever appel d'une telle ordonnance ; que l'ordonnance de mise en accusation des chefs de crime de violences volontaires mortelles sur la personne de Chabanne X... et des délits connexes de violences volontaires avec arme sur la personne de Karim X... et celle de Xudang Z... ayant entraîné une ITT supérieure à 8 jours, après requalification des faits de la poursuite initialement qualifiés d'homicide volontaire et de tentative d'homicide volontaire, laisse intact le droit à indemnisation de la partie civile devant la juridiction de jugement ; qu'elle ne peut donc être considérée comme faisant grief à ses intérêts civils ; que, par conséquent, l'appel de Karim X... contre l'ordonnance de mise en accusation déférée, doit être déclaré irrecevable" ;


"alors que, d'une part, l'ordonnance de mise en accusation, au dispositif de laquelle les questions à la cour d'assises et au jury doivent se conformer, fixe la qualification des faits ; que l'intérêt de la victime ne se limite pas à la réparation du dommage mais consiste aussi en la condamnation de l'auteur du dommage pour les faits qu'il a commis, justement qualifiés ; que l'ordonnance de mise en accusation qui procède à une disqualification, fait grief aux intérêts de la partie civile qui ne peut débattre de la question de la qualification devant la cour d'assises ;


qu'en déclarant irrecevable l'appel de la partie civile, la chambre de l'instruction a violé l'article 186, alinéa 2, du Code de procédure pénale ;


"alors que, d'autre part, depuis la loi du 15 juin 2000, l'article 186, alinéa 2, du Code de procédure pénale, prévoit que le mis en examen peut faire appel devant la chambre de l'instruction, de l'ordonnance de mise en accusation ; que le principe d'égalité des armes s'oppose à ce que soit refusé à la partie civile un droit expressément conféré par la loi, au mis en examen" ;


Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que l'ordonnance de clôture de l'information rendue par le juge d'instruction, après avoir requalifié les faits de meurtre sur la personne de Chabanne X... et de tentative de meurtre sur celles de Karim X... et de Xudong Z..., pour lesquels Rida Y... était mis en examen, a renvoyé celui-ci devant la cour d'assises du Rhône, sous l'accusation de violences mortelles et de violences aggravées ;


Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel de cette ordonnance interjeté par Karim X..., l'arrêt retient que, à la différence de la personne mise en examen, la partie civile ne peut interjeter appel d'une ordonnance de mise en accusation, l'article 186, alinéa 2, du Code de procédure pénale lui permettant d'exercer cette voie de recours contre les seules ordonnances de non-informer, de non-lieu et celles faisant grief à ses intérêts civils ;


Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, dès lors que, contrairement à ce que soutient le demandeur, le texte précité n'est pas incompatible avec les dispositions légales et conventionnelles invoquées, la requalification opérée par le juge d'instruction laissant intact le droit de la partie civile d'obtenir la réparation de son préjudice devant la juridiction de jugement ;


D'où il suit que le moyen doit être écarté ;


Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;


Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;


Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Blondet conseiller rapporteur, MM. Farge, Palisse, Le Corroller, Castagnède conseillers de la chambre, Mmes Agostini, Beaudonnet, Gailly, M. Chaumont conseillers référendaires ;


Avocat général : Mme Commaret ;


Greffier de chambre : Mme Lambert ;


En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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