2 mars 2016
Cour d'appel de Paris
RG n° 13/22250

Pôle 5 - Chambre 4

Texte de la décision

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4



ARRÊT DU 02 MARS 2016



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/22250



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Novembre 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 13/000561



APPELANT



Maître [E] [A] agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société JALYNE

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]



Représenté par Maître Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

Ayant pour avocat plaidant Maître Patrice MIHAILON, avocat au barreau de PARIS





INTIMÉE



SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE - DCF

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : B42 826 802 3

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Maître Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

Ayant pour avocat plaidant Maître Julien FAUCHER, avocat au barreau de PARIS, toque : K0061 substituant Maître Catherine OTTAWAY de la SELARL HOCHE SOCIETE D AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0061





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Janvier 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de chambre, chargée du rapport et Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère.



Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de chambre, rédacteur

Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère

Monsieur François THOMAS, Conseiller

qui en ont délibéré,



Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Françoise COCCHIELLO dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile,



Greffier, lors des débats : M. Vincent BRÉANT



ARRÊT :



- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente et par Monsieur Vincent BRÉANT, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.






FAITS ET PROCÉDURE



La société anonyme Jalyne avait pour actionnaires la société Sopprieu, les consorts [W] et ITM Entreprise. Madame [W] est présidente du conseil d'administration. La société Jalyne exploitait un supermarché et une station de carburant sous l'enseigne Intermarché à [Localité 3] dans des locaux loués à la société civile immobilière Les Grands Champs, bailleresse et filiale immobilière du groupe Intermarché.



En 2005, la société Jalyne qui était en litige avec la société ITM Entreprise et ITM Centre Est, a décidé de se rapprocher de la SAS Distribution Casino France (DCF) dans le but de changer d'enseigne. Des pourparlers ont eu lieu.



En septembre 2005, la société Jalyne a conclu avec la SAS Distribution Casino France un contrat d'approvisionnement.



Les 28 janvier et 4 février 2008, les deux sociétés ont conclu un contrat de franchise à effet rétroactif au 3 octobre 2005 pour une durée de 5 ans.



Le 10 juin 2008, la société Les Grands Champs a donné congé au preneur pour le 31 décembre 2008 avec refus de renouvellement du bail commercial et offre d'indemnité d'éviction. L'occupation des locaux s'est poursuivie et la société Intermarché n'a pas engagé de procédure d'éviction contre la société Jalyne.



Par courrier du 24 mars 2010, la société Jalyne a dénoncé le contrat de franchise qui la liait à la société Distribution Casino France avec effet au 3 octobre 2010 «pour éviter sa tacite reconduction et permettre le versement d'un budget attaché à la signature d'un nouveau contrat».



Par courrier en date du 17 mai 2010, la société Distribution Casino France mettait en demeure la société Jalyne de régler la somme de 597 007,62 euros TTC correspondant à six factures impayées, rappelant les dispositions du contrat plus particulièrement celles de l'article 11 qu'elle serait obligée d'appliquer à défaut de paiement. Elle lui a à nouveau adressé une mise en demeure le 15 juillet 2010 dans les mêmes termes pour paiement d'une somme de 676 351, 70 euros.



Dans le même temps, les deux sociétés discutaient la cession du fonds de commerce de la société Jalyne au profit de la société Distribution Casino France. Aucun accord n'a pu être conclu.



Le 8 octobre 2010, la société Jalyne signait avec la société Distribution Casino France un contrat d'approvisionnement pour une durée de 3 mois jusqu'au 31 décembre 2010.



Une prorogation de l'enseigne et de l'approvisionnement était décidée jusqu'au 31 mars 2011, à la demande de la société Jalyne qui exposait dans un courrier du 22 décembre 2010 que le délai lui était nécessaire pour cesser l'activité sans lui nuire inutilement.



Par acte du 2 février 2011, la société DCF a assigné la société Jalyne devant le tribunal de commerce de Paris.



Les enseignes étaient déposées le 29 mars 2011 et un procès-verbal était dressé par un huissier des opérations de démontage des enseignes, caisses et matériels.



La société Jalyne a été placée en redressement judiciaire le 8 novembre 2011. La société Distribution Casino France a déclaré sa créance au passif de la société. Le 8 novembre 2012, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire. Maître [A] a été désigné mandataire liquidateur.





Par jugement en date du 5 novembre 2013, le tribunal de commerce de Paris a :

' Mis hors de cause Maitre [X], ès qualités dont les fonctions d'administrateur judiciaire ont pris fin,

' Fixé la créance de la SAS Distribution Casino France DGF au passif de la liquidation judiciaire de la SA Jalyne à la somme de 597 007 euros, avec intérêt contractuel égal à deux fois le taux légal, à compter :

- du 24 mars 2010 a hauteur de 93 102,26 euros

- du 31 mars 2010 à hauteur de 151 383,91 euros

- du 10 avril 2010 a hauteur de 75 829,73 euros

- du 20 avril 2010 a hauteur de 110 248,60 euros

- du 30 avril 2010 a hauteur de 79 344,08 euros

- du 10 mai 2010 a hauteur du solde.

Et ce jusqu'au 8 novembre2011, date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire de la SA Jalyne. De ce montant seront déduites les sommes dues par la SAS Distribution Casino France - DCF à la SA Jalyne de 77 211,63 euros au titre du soutien publicitaire et de 142 694,08 euros au titre des bons de réduction et diverses factures impayées par la SAS Distribution Casino France - DCF, le tout avec intérêt au taux légal à compter du 13 mars 2012, date des demandes exprimées reconventionnellement par la SA Jalyne devant ce tribunal, et ce avec anatocisme.

' Dit n'y avoir lieu a l'application de I'articIe 700 du code de procédure civile,

' Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

' Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,

' Condamné Maitre [A], és-qualités aux dépens.





Vu l'appel interjeté par la Me [E] [A], ès qualités le 21 novembre 2013,




Vu les dernières conclusions de la Me [E] [A] signifiées le 6 juin 2014 par lesquelles il est demandé à la cour de :

' Dire Maître [A] ès qualités, recevable et bien fondé en son appel.

' Confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a reconnu le bien fondé des demandes formées au titre du paiement du budget publicitaire, des bons de réduction et de diverses factures impayées par la société Distribution Casino France, majorées d'intérêts capitalisés.



' L'infirmer pour le surplus.



Vu les dispositions de l'article 1134, 1289 et 1290 du Code civil.



' Constater que la créance alléguée par la société Distribution Casino France est contestée,

' Dire que la société Distribution Casino France ne justifie pas de la créance qu'elle allègue,

' Condamner la société Distribution Casino France au paiement d'une somme totale de 845 116 euros, sauf à parfaire,



En application des dispositions des articles 1153-1 et 1154 du Code civil, assortir cette condamnation de la production d'intérêts et de leur capitalisation, à compter du 21 Juillet 2009, date de mise en demeure,



Vu les dispositions des articles 1134 alinéa 3 et 1147 du Code civil,



' Constater l'existence de pourparlers de reprise en connaissance de l'incertitude pesant sur le renouvellement du bail,

' Constater l'intérêt objectif de la société Distribution Casino France à une minoration de la valeur de la société Jalyne et de son fonds de commerce,

' Dire que dans cette perspective, de mauvaise foi et de façon malveillante, la société Distribution Casino France a fautivement retenu le paiement de sommes dues à la société Jalyne et lui a réservé des conditions commerciales désavantageuses, dans une mesure qui a compromis l'exercice normal de son activité,



En conséquence, condamner la société Distribution Casino France au paiement des sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :



' 1 515 318 euros, au titre du préjudice de rentabilité ;

' 2 651 658 euros, au titre du préjudice de valorisation du fonds,



En application des dispositions des articles 1153-1 et 1154 du Code civil, assortir cette condamnation de la production d'intérêts et de leur capitalisation,



' Débouter la société Distribution Casino France de l'ensemble de ses demandes,

' Condamner la société Distribution Casino France au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Condamner la société Distribution Casino France aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.





Vu les dernières conclusions de la SAS Distribution Casino France DCF signifiées le 7 avril 2014 par lesquelles il est demandé à la cour de':



' Confirmer le Jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris en date du 5 novembre

2013 (RG n°2013000561) en ce qu'il a :


Fixé la créance de la société Distribution Casino France au passif de la liquidation judiciaire de Jalyne à hauteur de la somme de 597 007 euros TTC, en appliquant le taux d'intérêt conventionnel ;

Rejeté la demande Maître [A], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Jalyne, au titre d'un budget d'enseigne prévu au contrat de franchise mais non exigible ;

Rejeté le grief de Maître [A], ès qualités de liquidateur judiciaire de la sociétéJalyne, tenant à la fourniture de carburant et la mise en place d'un distributeur de billets pour le franchisé ;

Rejeté les demandes d'indemnisation de Maître [A], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Jalyne, tant pour le préjudice de rentabilité que pour le préjudice de valorisation du fonds allégués par Jalyne ;




' Infirmer le surplus



Statuant à nouveau :



' Débouter Maître [A], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Jalyne, de sa demande de paiement du budget de soutien publicitaire ;

' Debouter Maître [A], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Jalyne, de sa demande de paiement au titre des bons de réduction et des factures de livraisons litigieuses ;

' Constater que la société Distribution Casino France n'a commis aucune faute dans le cadre de la pose des enseignes ;

' Débouter Maître [A], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Jalyne, de l'ensemble de ses demandes indemnitaires ;



En tout état de cause :



' Condamner Maître [A], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Jalyne, aux entiers dépens de première et d'appel qui seront recouvrés par Maître Frédéric Lallement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;




MOTIFS

Considérant que Maître [A] ès qualités fait valoir que la société DCF a commis de nombreuses fautes contractuelles au cours de l'exécution du contrat et que, souhaitant acquérir la société Jalyne, elle a agi de façon malveillante et déloyale dans cette perspective d'acquisition, retenant fautivement le paiement de somme dues et lui réservant des conditions commerciales désavantageuses ; que DCF conteste les reproches qui lui sont faits, expose qu'elle n'a pas agi dans le but prétendu exposé par Jalyne et explique que les difficultés de la société Jalyne sont liées à la gestion des dirigeants et à diverses circonstances entourant les discussions, notamment liées au bail commercial,





Sur les manquements imputes a DCF :



Considérant que la société Jalyne expose que la société DCF ne lui pas apporté les prestations essentielles nécessaires à son activité (enseigne, fourniture de carburant, carence dans l'approvisionnement du point de vente, défaillance de l'informatique), qu'elle a eu un positionnement de prix non compétitif, qu'elle a retenu les sommes qui lui étaient dues au titre du budget d'enseigne, du budget publicitaire, au titre du soutien dans le placement des prix, en ne lui réglant pas les factures relatives aux avaries, manquements à la livraison;



Considérant que la société DCF conteste les différents reproches et expose que les difficultés de Jalyne sont liées à une condamnation antérieure prononcée au profit de la société Intermarché pour une somme de 767 274, 33 euros, à la gestion de ses dirigeants, qu'elle constate que la société Jalyne ne conteste pas devoir des factures pour la somme totale de 597 007 euros, outre les intérêts au taux contractuel depuis le 24 mars 2010 jusqu'au 8 novembre 2011,



Considérant qu'il convient d'examiner l'existence des manquements et leur caractère déloyal :



Sur les défaillances :



Sur l'enseigne :



Considérant que la société Jalyne fait valoir que les enseignes ont été fournies neuf mois après le début de son activité et soutient que la remise des enseignes n'était pas tributaire de la réalisation de travaux de peinture ; que, selon DCF la pose tardive de l'enseigne est imputable à Jalyne,



Mais considérant qu'il apparaît au regard des mails échangés par les parties entre le 11 mai et le 30 mai 2006 que la façade devait être repeinte préalablement à la pose des enseignes et que les travaux ont été terminés le 30 mai, selon mail de Monsieur [H], de sorte que leur pose «en juin», selon Jalyne qui ne fournit aucune autre précision et alors que la signature du contrat de franchise avait un effet rétroactif dont les modalités ne sont pas précisées à la cour, ne constitue pas, à défaut d'élément probant, une défaillance de la société DCF ;



Sur la fourniture de carburant et sur le distributeur de billets :



Considérant que Jalyne expose que la société DCF lui a refusé tout approvisionnement par l'intermédiaire de sa filiale, la société Distridyn, conditionnant celui-ci à la fourniture préalable d'un nantissement sur le fonds de commerce, ce que la DGCCRF a dénoncé comme une pratique illégale, qu'elle a du s'approvisionner auprès d'autres pétroliers dans des conditions moins avantageuses, que la société DCF ne peut soutenir que sa filiale est indépendante,



Mais considérant comme DCF le fait valoir, que le contrat de franchise ne comportait aucune obligation relative à l'approvisionnement d'un point carburant par DCF ; que Distridyn est une société filiale indépendante de DCF et que le contrat de fourniture de carburant ne pouvait être conclu qu'avec la société Distridyn à qui il appartenait de faire savoir à Jalyne quelles en étaient les conditions, notamment la constitution de garanties, peu important à cet égard que ce soit la société DCF qui ait exposé dans un mail du 3 mars 2008 quel était le montant de la garantie carburant ;



Considérant encore que rien ne prévoyait non plus dans le contrat des obligations concernant un distributeur de billets à la charge de DCF,



Qu'il n' y a pas de défaillance contractuelle de DCF,



Sur la carence dans l'approvisionnement des points de vente :



Considérant selon Jalyne, que de multiples incidents ont perturbé l'approvisionnement, qui ont eu des répercussions graves sur son fonctionnement, notamment pour les objets en promotion,



Considérant en effet qu'il apparaît que des courriels ont été adressés à plusieurs reprises à diverses personnes dont la qualité est ignorée pour faire état d'incidents, retards ou avances dans les horaires de livraison, objets manquants, erreurs, avaries, mais rien ne permet de constater que ces incidents dépassent ce qui est la marge acceptable, et rien enfin ne permet de justifier que l'activité du magasin en a souffert,



Sur la défaillance de l'informatique :



considérant que Jalyne fait valoir que le matériel informatique que DCF s'était engagée contractuellement à lui fournir afin de permettre l'exploitation du point de vente était insuffisant et défaillant, que DCF n'a pas remédié aux difficultés rencontrées,



considérant que les pièces versées aux débats (pièce 109) démontrent de nombreux échanges entre les parties, que des explications ont été fournies et des solutions ont été proposées ; qu'en l'espèce, rien enfin ne permet de justifier que la gestion normale du magasin en a souffert,



Sur le défaut de positionnement prix compétitifs et de soutien dans le placement des prix :



Considérant que Jalyne fait valoir que la société DCF n'a pas été loyale ; qu'elle explique que les politiques tarifaires de Casino ne lui permettait pas d'être compétitive, les prix étant supérieurs de 8 % à ceux de la surface Super U proche de 100 mètres, ce que rien ne peut expliquer et que le respect de la politique de prix de DCF rendait illusoire la liberté qu'elle avait de fixer elle-même ses prix ; qu' elle n'a pu trouver l'équilibre financier, ne pouvant dégager qu'une marge symbolique ; que Casino qui avait intérêt en sa qualité d'acquéreur de l'entreprise à diminuer le prix de celle-ci, l' a exposée à une baisse de son chiffre d'affaires,



Considérant que pour la DCF, le franchisé avait la liberté de ses tarifs et que les dirigeants de la société franchisée n'étaient pas des profanes, que Casino qui n'est pas une enseigne discount, se positionne en termes plus qualitatifs que tarifaires, qu'elle conseille les prix mais n'a donné aucune garantie de marge ; qu'elle n'a jamais du et reconnu quoi que ce soit en réparation de son positionnement de prix,



Mais considérant que la société Jalyne était dirigé par des personnes qui avaient exploité, avant la franchise Casino, un magasin Intermarché depuis 1993 dans les mêmes locaux ; que Jalyne connaissait ainsi parfaitement le contexte concurrentiel local et le positionnement de Casino dont elle avait voulu rejoindre le réseau ; qu'en outre, elle savait que les marges bénéficiaires n'étaient pas garanties et qu'elle avait, selon l'article 3.3 du contrat, la maîtrise des prix de revente qu'elle se devait d'adapter par rapport à ceux de la concurrence locale qu'elle connaissait ; qu'elle ne justifie nullement que la société DCF avait une politique de prix inadaptée au magasin d'[Localité 3] par la production aux débats de l'étude Opuscan qui compare les prix pratiqués pour le consommateur par les magasins Casino [Localité 3] et Super U de [Localité 4], alors que la fixation des prix relève de sa propre politique en matière de prix et de sa gestion ; que DCF n'a jamais reconnu une quelconque faute et la facture émise par Jalyne le 25 février 2010 on ne sait dans quelles circonstances pour «'ristourne exceptionnelle» n'est nullement probante ;



Considérant qu'il n'apparaît pas que la société DCF ait eu un un positionnement inadéquat fautif,





la retenue du paiement de sommes dues au distributeur :



le budget d'enseigne (aide au lancement) :



Considérant selon Jalyne que ce budget ( 624 000 euros) devait être versé en deux fois, la première moitié un mois après la signature du contrat, la seconde moitié après la fourniture de garantie et la mise au concept du point de vente, ce que la société Casino n'a pas permis par son refus de communiquer le détail des standards, et par son exigence d' une garantie qui n'était pas la caution bancaire prévue dans le contrat,



Considérant que DCF rappelle les dispositions de l'article 9 § a du contrat selon lesquelles le paiement de la seconde moitié du budget est subordonné à la constitution définitive de toutes les garanties et à la réalisation de la mise au concept du point de vente et que ces deux conditions cumulatives n'étaient pas respectées par le franchisé, qu'aucune faute à cet égard ne peut être reprochée à DCF,



Mais considérant selon l'article 9 a) du contrat : «assistance publicitaire d'ouverture accordée au franchisé», que, pour permettre au franchisé de faire toute action nécessaire à l''aménagement, à la mise en conformité de son magasin aux critères spécifiques de l'enseigne Casino, toute action promotionnelle et toute dépense qu'il jugera utile ou nécessaire, le franchiseur devait lui verser la somme forfaitaire de 594 000 euros hors taxes, payable et remboursable le cas échéant selon les modalités précisées en annexe 10 ; qu' en point 1.2 de cette annexe, la somme était versée sur présentation d'une facture, 50 % versée 30 jours après la signature du contrat, le solde, dans un délai de trois mois du premier versement et sous réserve que la totalité des garanties consenties au franchiseur par le franchisé au titre du contrat de franchise ait été constituée et que la mise au concept du point de vente ait été effectuée ; que ce texte imposait au franchisé de justifier que se trouvaient remplies plusieurs conditions cumulatives, la garantie financière, la mise en conformité outre la présentation de factures et à défaut de l'une de ces conditions, le solde ne pouvait être versé ; que selon les documents produits, le conseil d'administration de Jalyne avait donné son autorisation pour consentir un nantissement à hauteur de 300 000 euros, mais rien ne justifie qu'il a été constitué effectivement ; que s'il est soutenu que DCF n'avait en aucune façon l'intention de verser le solde, rien ne permet de soutenir que c'est en raison de la carence du franchiseur que les travaux n' ont pu être réalisés ; que par conséquent, les conditions relatives au versement du solde ne sont pas remplies et que la demande de Jalyne n'est pas justifiée ;



le budget publicitaire de 5 % :



Considérant que Jalyne fait valoir que le paiement de ce budget n'est pas conditionné, comme le soutient DCF, à la présentation de factures aux fournisseurs, dans la mesure où il s'agit d'une subvention forfaitaire,



Considérant, selon DCF, que des conditions supplémentaires au paiement de ce budget n'ont pas été exigées en violation des dispositions contractuelles, puisque le paiement est subordonné selon l'article 2.2 à la présentation d'une facture conforme accompagnée des justificatifs de la réalisation des opérations publicitaires, documents que Jalyne n'a pas fournis et qu'elle ne peut en justifier par la production d' un extrait de son Grand Livre,



Mais considérant que selon l'article 9 a) du contrat : «assistance publicitaire d'ouverture accordée au franchisé», qu' un budget de soutien publicitaire initial devait être également alloué dans les conditions prévues en annexe 10, que le point 2.2 de cette annexe précise que l'assistance du franchiseur se traduit par le versement d'un budget de soutien publicitaire pendant les vingt-quatre premiers mois d'exploitation, d'un montant ne pouvant excéder 0,50% du chiffre d'affaires TTC du magasin hors carburant, et versé «sur présentation d'une facture conforme accompagnées de justificatifs de la réalisation des opérations publicitaires et/ou promotionnelles»,



Considérant que le budget consenti n'est pas «forfaitaire», que son montant maximal est fixé («'il ne peut excéder...'») et n'est pas établi'sur la base de 0,50% de la valeur du chiffre d'affaires, comme le soutient Jalyne ; que ce budget est versé sur production de justificatifs de la réalisation des opérations commerciales locales ; qu' au surplus, entre commerçants, la preuve est libre et que selon l'article L 123-23 du code de commerce, la comptabilité régulièrement tenue peut être admise en justice pour faire preuve entre commerçant pour faits de commerce ; qu'ainsi, il n'est pas nécessaire de justifier de factures acquittées auprès de fournisseurs locaux ; que l'inscription des sommes engagées dans le Grand Livre à hauteur de 63 835,13 euros apparaît suffisante pour satisfaire les exigences contractuelles ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a accueilli la demande mais que le quantum de la demande, sera modifié ;



sur les factures impayées :



Considérant selon Jalyne que DFC ne lui a pas remboursé le montant des bons de réduction, de bons d'achat ; que de même les factures liées à des litiges survenus lors de la livraison n'ont pas été remboursées,



Considérant, selon DCF que les bons de réduction n'ont pas été fournis en original, et que son préposé n'a pu les vérifier sur le site de Jalyne ; qu'enfin, les factures qui correspondraient à des litiges ne sont pas probantes,



Mais considérant pour ce qui concerne le remboursement par DCF des bons de réduction que le contrat de franchise ne donne aucune précision sur ce point ; que les parties se sont opposées sur les modalités pratiques pour leur remboursement, s'il fallait les adresser à DCF par courrier ou si DCF devait les faire vérifier sur place ; qu'en l'état, pour qu'il soit fait droit aux prétentions de Jalyne, il appartient à celle-ci de justifier de l'existence de ces bons (bons de réduction, Ecobons), ce qu'elle fait par dans la pièce 103 pour le montant global de 99 772, 20 euros,



Considérant pour ce qui concerne les factures émises par Jalyne qui correspondraient à des litiges survenus lors de la livraison des marchandises, que certes, des mails ont été adressés à DCF, ainsi qu'il a été dit plus haut, mais les factures émises par Jalyne, dont on ignore à quel litige précis et dénoncé à DCF elles s'appliquent et si la responsabilité en incombe à DCF (avaries notamment), aucun justificatif d'une indemnisation «'habituellement prise en charge par la Centrale'» n'étant fourni, ne peuvent servir de preuve pour réclamer des sommes à ce titre ; que Jalyne sera déboutée de cette demande,





Sur la responsabilite de DCF :



Considérant que Maître [A] ès qualités soutient que compte tenu des discussions en cours concernant le rachat de Jalyne par DCF, les manquements de DCF étaient malveillants et avaient pour objet de déstabiliser l'entreprise, de lui faire perdre sa valeur pour l'acquérir à un prix moindre ; que DCF conteste ce reproche ;



Mais considérant que les manquements reprochés à DCF sont en définitive peu nombreux, s'agissant des sommes retenues au titre du soutien publicitaire et pour le remboursement des bons ; qu'en tant que tels, ils ne sauraient traduire la volonté de DCF de porter atteinte à l'exploitation de Jalyne ; que l'existence de discussions sur un rachat éventuel de Jalyne ne peut révéler objectivement la volonté de DCF de porter atteinte à l'exploitation de la franchise ; que les documents versés aux débats révèlent que de multiples facteurs, extérieurs à DCF, dévalorisent l'entreprise pour un acquéreur tel que Casino, que ce soit les participations de ITM au capital des sociétés Jalyne et Sopprieu jusqu'en 2009, la dénonciation en mars 2008 par la société Les Grands Champs du bail commercial consenti en 2000 à la société Jalyne, outre les multiples litiges en cours entre ces diverses sociétés et Intermarché, la condamnation au profit d'ITM de la société Jalyne à lui verser la somme de 767 274, 33 euros qui a manifestement obéré sérieusement sa situation,



Considérant que Maître [A] ès qualités est défaillant dans la preuve de ce qu'il invoque, que sa demande de dommages-intérêts n'est pas fondée,





Sur les manquements imputes a la societe jalyne :



Considérant que DCF reproche à la société Jalyne de ne pas avoir réglé les factures d'approvisionnement ; que ce fait n'est pas contesté par la société Jalyne, que ces sommes sont dues pour la somme globale de 597 007 euros, outre les intérêts conventionnels,



Sur les comptes :



considérant que la société DCF a déclaré sa créance à la procédure collective, de sorte que celle-ci est opposable aux créanciers de Jalyne ; qu'il résulte des motifs ci dessus exposés que des sommes sont dues par Jalyne à DCF et que des sommes sont dues par DCF à Jalyne au titre du contrat de franchise ; que les comptes doivent être faits ; que la compensation est invoquée ;



Considérant que les créances sont réciproques, nées du même courant d'affaires en exécution du contrat de franchise ; que la compensation est possible à hauteur de la plus faible des deux sommes ; que la créance de DCF sera fixée au passif de la procédure de la société Jalyne à hauteur de (597007 + intérêts au taux contractuel du 24 mars 2010 jusqu'au 8 novembre 2011) ' (63835, 13 + 99772, 20 euros) soit : 433 399, 67 euros outre les intérêts au taux contractuel du 24 mars 2010 jusqu'au 8 novembre 2011





PAR CES MOTIFS :



La COUR,



INFIRME le jugement sur le montant de la créance de la société Distribution Casino France ,



FIXE à la somme de 433 399, 67 euros outre les intérêts au taux contractuel du 24 mars 2010 jusqu'au 8 novembre 2011 la créance de la société DCF à isncrire au passif de la procédure collective de la société Jalyne,



CONFIRME le jugement pour le surplus,



DÉBOUTE les parties de leurs demandes d'indemnité pour frais irrépétibles,



CONDAMNE Maître [A] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société jalyne aux dépens d'appel qui seront recouvrés avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.





Le GreffierLa Présidente





Vincent BRÉANTFrançoise COCCHIELLO

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