10 mars 2016
Cour d'appel de Paris
RG n° 15/14228

Pôle 5 - Chambre 9

Texte de la décision

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 10 MARS 2016



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/14228



Décision déférée à la Cour : Jugement proposé le 24 Juin 2015 par la 11ème Chambre du Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2015022018



APPELANTE



SNC BADICO

immatriculée au RCS de Paris sous le n° 510 580 954

ayant son siège [Adresse 3]

[Adresse 4]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

ayant pour avocat plaidant Gontran SIMONNET, de la Selas LANTOURNE & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0163 substituant Me Flavie HANNOUN, de la Selas LANTOURNE & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0163



INTIMÉES



1) SELARL [F] - [U] prise en la personne de Maître [E] [U]

ès qualités de Liquidateur judiciaire de la Snc Badico

ayant son siège [Adresse 1]

[Adresse 4]



représentée par Me Olivier PECHENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : B0899



2) SELARL [F] - [U] prise en la personne de Maître [U]

ès qualités de Liquidateur judiciaire de la SA Interface Cosmétiques et Parfums

[Adresse 1]

[Adresse 4]



représentée par Me Olivier PECHENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : B0899



3) ASSOCIATION [Adresse 6]

ès qualités de gestionnaire de l'AGS et de contrôleur aux opérations de liquidation judiciaire de la Société Interface Cosmétiques et Parfums

ayant son siège [Adresse 2]

[Adresse 5]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



n'ayant pas constitué avocat





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Février 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Michèle PICARD, Conseillère et Madame Christine ROSSI, Conseillère.



Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Michèle PICARD, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Christine ROSSI, Conseillère

Monsieur Laurent BEDOUET, Conseiller appelé d'une autre Chambre afin de compléter la Cour

qui en ont délibéré,



Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Christine ROSSI, Conseillère, dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.



Greffier, lors des débats : Monsieur Xavier FLANDIN-BLETY



MINISTERE PUBLIC : l'affaire a été communiquée au Ministère Public.





ARRÊT :



- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Michèle PICARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Monsieur Xavier FLANDIN-BLETY, Greffier présent lors du prononcé.



*



La société Badico, constituée en 2009 par monsieur [Z] [I], a pour activité l'acquisition, l'administration et la gestion de biens immobiliers. Le 1er janvier 2009, elle a constitué un bail portant sur un ensemble immobilier situé à [Localité 1] avec la société Interface Cosmétiques et Parfums - ICP - dont monsieur [I] est également le dirigeant. Le bail prévoyait un loyer annuel de 150.000 euros hors taxes, majoré de 10% chaque année, soit un loyer mensuel de 12.500 euros hors tva à partir du 1er janvier 2009.



Par un jugement du 17 décembre 2013, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société ICP, la société Badico y a régulièrement déclaré sa créance pour un montant de 854.726, 02 euros correspondant aux arriérés des loyers. Maitre [V] a été désigné en qualité d'administrateur judiciaire et la selarl [F] -[U], en la personne de maitre [U], a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.



Le plan de cession de la société ICP en faveur de la société Eurasia Groupe a été arrêté par le tribunal de commerce de Paris le 16 avril 2014.









Le 24 juin 2014, le tribunal de commerce de Paris a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et maitre [U] a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.



Par un jugement du 24 juin 2015, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris, saisi par maitre [U], a étendu la procédure de liquidation judiciaire à la société Badico.



La société Badico a interjeté appel de ce jugement le 21 juillet 2015.



Par une ordonnance du 21 septembre 2015, le premier président a arrêté l'exécution provisoire du jugement déféré.




***



Dans ses dernières conclusions auxquelles il est expressément référé, notifiées par voie électronique le 22 janvier 2016, la société Badico demande à la cour d'appel, au visa de l'article L. 621-2 du code de commerce, de constater que la demande d'extension de la procédure de liquidation judiciaire est irrecevable, les critères d'extension n'étant pas réunis. Elle sollicite l'infirmation du jugement du tribunal de commerce de Paris du 24 juin 2015 et la condamnation de la procédure collective de la société ICP au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



Dans ses dernières écritures auxquelles il est expressément référé, notifiées par voie électronique le 22 janvier 2016, la selarl [F] -[U], prise en la personne de maitre [U], demande à la cour d'appel, au visa des articles L. 621-2 alinéa 2 et L. 641-1 I du code de commerce, de constater l'existence de flux financiers anormaux, de confirmer le jugement déféré et de dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.






SUR CE,



Aux termes de l'article L. 621-2 alinéa 2 du code de commerce 'A la demande de l'administrateur judiciaire, du mandataire judiciaire, du débiteur ou du ministère public, la procédure ouverte peut être étendue à une ou plusieurs personnes autres personnes, en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale.'



Aux termes de l'article L. 641-1-I du même code l'article précité est applicable à la procédure de liquidation judiciaire.



Pour contrer la demande d'extension, la société Badico soutient à titre liminaire que conformément à l'article L. 621-2 du code de commerce et à une jurisprudence constante, la demande en extension d'une procédure collective n'est recevable que s'il n'a pas été définitivement statué sur le sort de l'entreprise, or, elle entend faire valoir qu'en l'espèce, le plan de cession totale adopté par le tribunal le 16 avril 2014, a mis fin à la procédure de liquidation judiciaire.





Cependant, comme l'oppose valablement la selarl [F] -[U], et conformément aux termes des articles L. 631-22 et R. 631-42 du code de commerce issus de la loi dite de Sauvegarde n° 2005-845 du 26 juillet 2005, le plan de cession qu'il soit total ou partiel n'est qu'une opération de réalisation des actifs qui ne détermine pas le sort de la personne morale qui exploitait l'entreprise et dont les actifs ont été cédés. Ainsi ,et même à l'issue d'une cession totale des dits actifs, la procédure collective se poursuit. Il en résulte qu'est possible l'extension de la procédure collective de la société ICP à l'égard de la société Badico.



Ceci posé, il convient de rechercher si la preuve est faite par le liquidateur juudiciaire des éléments fondant de prononcer l'extension sollicitée.



La discussion porte sur l'existence ou non de flux financiers anormaux ou de relations financières anormales entre sociétés que sont susceptibles de caractériser des transferts patrimoniaux effectués par action ou par abstention, sans justification, et entraînant un déséquilibre patrimonial significatif. Ainsi, l'anormalité se déduira de l'absence de toute contrepartie.



Il importe de souligner, d'une part, contrairement à ce qui est prétendu par la société Badico que cette dernière et la société ICP, qui ont un dirigeant commun, monsieur [Z] [I], associé avec son épouse des deux sociétés, n'ont en revanche pas de liens capitalistiques entre elles et n'appartiennent pas à un même groupe de sociétés.



Il ne peut qu'être constaté, d'autre part, que durant cinq années, la société Badico, en contrariété avec son objet social portant sur la location de terrain et de biens immobiliers parmi lesquels l'ensemble immobilier situé à [Adresse 7], est demeurée passive en l'absence de toute contrepartie face au non paiement de ses loyers par la société ICP ; aucun commandement de payer visant la clause résolutoire n'a été délivré à la locataire défaillante, ni aucune demande sous quelque forme tendant à obtenir le paiement dû.



La société Badico prétend qu'un paiement serait intervenu le 31 octobre 2013 - soit un mois avant la déclaration de cessation des paiements de la société ICP - à hauteur de la somme de 294.924,23 euros correspondant à deux années de loyers par la société Unipar, société elle-même en liquidation judiciaire depuis le 27 juillet 2014, dont monsieur [I] était également le gérant et qui aurait bénéficié d'une délégation de paiement de la société ICP.



Cependant, et même passé outre les circonstances d'une telle délégation, il reste que la réalité n'en est pas démontrée, et que le paiement prétendu est de plus contredit par la déclaration de créance de la société Badico au passif de la procédure collective de la société IPC, pour un montant au titre de la dette de loyers de 854.726,02 euros ne prenant pas en compte le réglement aujourd'hui allégué afin de caractériser l'interruption de relations financières anormales et partant l'absence de volonté systématique de telles relations proscrites.



Ainsi, les développements qui précèdent caractérisent la réalité de flux financiers ayant conduit à une confusion des patrimoines des deux sociétés, au sens de l'article L. 621-2 alinéa 2 précité du code de commerce, et permis de poursuivre des activités déficitaires au détriment des créanciers.



Les demandes de la société Badico seront en conséquence toutes rejetées et la décision déférée confirmée en toutes ses dispositions.





PAR CES MOTIFS



Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 24 juin 2015 par le tribunal de commerce de Paris ;



Rejette toute autre demande ;



Dit que les dépens d'appel seront employés en frais de procédure collective.





LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE







Xavier FLANDIN-BLETY Michèle PICARD

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