23 septembre 2016
Cour d'appel de Paris
RG n° 15/19762

Pôle 5 - Chambre 11

Texte de la décision

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 11



ARRET DU 23 SEPTEMBRE 2016



(n° , 7 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 15/19762 (absorbant le RG 15/19816)



Sur renvoi après un arrêt de la Cour de cassation prononcé le 29 septembre 2015 emportant cassation d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris (pôle 5 - chambre 11) le 4 avril 2014, sur appel d'un jugement rendu le 8 novembre 2013 par le Tribunal de commerce de Paris, sous le n° RG 20100005095.







DEMANDERESSES À LA SAISINE



Maître [K] [U] es qualité de commissaire à l'exécution du plan de SOREPLA INDUSTRIE

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représenté par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Représenté par Me Jean-Jacques DIEUMEGARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C0715





SA SOREPLA INDUSTRIE agissant poursuites et diligences de son Directeur Général y domicilié en cette qualité

[Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : 382 945 467 (Epinal)



Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Représentée par Me Jean-Jacques DIEUMEGARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C0715





SARL SITA NEGOCE, agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 3]

N° SIRET 407 878 107 (Nanterre)



Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Représentée par Me Valérie LEDOUX de la SELARL RACINE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0301



DÉFENDERESSES À LA SAISINE



Maître [K] [U] es qualité de commissaire à l'exécution du plan de SOREPLA INDUSTRIE

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représenté par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Représenté par Me Jean-Jacques DIEUMEGARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C0715



SA SOREPLA INDUSTRIE agissant poursuites et diligences de son Directeur Général y domicilié en cette qualité

[Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : 382 945 467 (Epinal)



Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Représentée par Me Jean-Jacques DIEUMEGARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C0715



SARL SITA NEGOCE agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 3]

N° SIRET : 407 878 107 (Nanterre)



Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Représentée par Me Valérie LEDOUX de la SELARL RACINE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0301









COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 02 Juin 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :



Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de la chambre, chargé du rapport

Madame Michèle LIS-SCHAAL, Présidente de chambre

Madame Claudette NICOLETIS, Conseillère



qui en ont délibéré





Greffier, lors des débats : Mme Patricia DARDAS



ARRET :



- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, président et par Madame Patricia DARDAS, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.




Faits et procédure





La SARL Sita Négoce, qui a pour activité la reprise de matières valorisables issues du tri sélectif des déchets, a conclu avec la SA Sorepla Industrie, spécialisée dans le recyclage des emballages plastiques, un contrat le 27 janvier 2006 d'une durée de six ans venant à échéance le 27 janvier 2012. Aux termes de ce contrat, Sita Négoce s'engageait à livrer à Sorepla des quantités garanties de matières plastiques, Sorepla s'engageant pour sa part à garantir un prix d'achat ou de reprise minimum quel que soit le cours des polymères.



La société Sita Négoce ayant résilié le contrat le 21 juillet 2009, la société Sorepla l'a assignée en indemnisation des préjudices résultant de cette résiliation. Par jugement du 30 octobre 2012 du tribunal de commerce d'Epinal, la société SOREPLA a été placée sous sauvegarde de justice, la SELARL KREBS SUTY GELIS et Maître [U] étant respectivement désignés administrateur judiciaire avec une mission d'assistance du débiteur et mandataire judiciaire. Par jugement du 4 décembre 2013, ce même tribunal a adopté un plan de continuation, Maître [U] étant désigné commissaire à l'exécution du plan.



Par jugement du 8 novembre 2013, le tribunal de commerce de Paris a condamné la SAS Sita Négoce à payer à la Sorepla Industrie les sommes de 2.200.000 euros, outre intérêts légaux à compter du 28 décembre 2008, 100.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, débouté les parties du surplus de leurs demandes et condamné la SARL Sita Négoce aux dépens et ordonné l'exécution provisoire.



Les juges ont considéré comme fautive la rupture sans aucune motivation par la société Sita Négoce avant son terme du contrat cadre qui la liait jusqu'en 2012 à la société Sorepla.

Par un arrêt du 4 avril 2014, la Cour d'appel de Paris a retenu que les deux parties avaient commis des manquements contractuels, dit que la résiliation du contrat cadre du 27 janvier 2006 est prononcée au 21 juillet 2009 aux torts réciproques et partagés par moitié entre les parties et condamné la SARL Sita Négoce à payer à la SARL Sorepla Industries les sommes de 593.152 euros à titre de dommages et intérêts et de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.



Sur pourvoi formé par la société Sorepla, la Cour de cassation, par arrêt du 29 septembre 2015, a cassé et annulé l'arrêt rendu par la Cour d'appel le 4 avril 2014, remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée, considérant que la Cour d'appel avait privé sa décision de base légale en jugeant que la rupture des relations contractuelles pouvait incomber pour moitié à chacune des parties, sans constater que la société Sita Négoce rapportait la preuve, à la date de la résiliation unilatérale du contrat, d'une faute de la société de la société Sorepla caractérisée et suffisamment grave pour justifier sa rupture plus de deux ans avant son terme.



Par une déclaration du 8 octobre 2015, la Cour d'appel de Paris a été saisie.






Prétentions des parties



La société Sorepla Industries, par conclusions signifiées le 17 mai 2016, demande à la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la rupture du contrat d'approvisionnement comme étant effectuée par la société Sita Négoce de manière fautive et brutale et en ce qu'il a condamné Sita Négoce à verser à Sorepla la somme de 100.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- l'infirmer en ce qu'il n'a retenu le préjudice subi par la société uniquement à hauteur de la somme de 2.200.000 euros correspondant pour partie à la perte de marge que Sorepla a subie entre 2009 et 2012, mais non à la valeur de l'ensemble des préjudices qui lui ont été causés par Sita Négoce suite à la résiliation fautive du contrat ;

En conséquence,

- condamner Sita Négoce à verser à Sorepla la somme de 4.612.227,92 euros HT à titre de dommages et intérêts pour l'indemnisation de la perte de marge qu'elle a subie du fait de la résiliation du contrat, avec intérêt au taux légal à compter du 28 décembre 2009,

- condamner Sita Négoce à verser à Sorepla la somme de 3.287.774 euros HT à titre de dommages et intérêts pour l'indemnisation de la perte de clientèle qu'elle a subie du fait de la résiliation du contrat,

- condamner Sita Négoce à verser à Sorepla la somme de 150.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



La société Sorepla soutient que la société Sita Négoce a résilié abusivement et unilatéralement le contrat cadre à durée déterminée qui les liait. Elle précise qu'aucune faute de sa part ne pouvait justifier une résiliation anticipée. Elle ajoute enfin que les aménagements contractuels réalisés au premier semestre de l'année 2009 suite au bouleversement économique du contrat ont été consenti par la société Sita Négoce et ne peuvent donc pas non plus être de nature à justifier une résiliation anticipée.



Elle fait valoir en outre que la société Sita Négoce a commis des manquements dans l'exécution de ses engagements contractuels consistant en la livraison de marchandises quantitativement et qualitativement non conformes.



Elle fait par ailleurs valoir que son préjudice lié à la perte de marge suite à la rupture fautive du contrat cadre inclue de nombreux éléments qui n'ont pas été pris en compte par les juges et notamment : les surcoûts d'approvisionnements à la tonne, la baisse du taux de rendement à la tonne, et l'augmentation des coûts de production. Elle demande ainsi que ce préjudice soit ré évalué par la Cour.





La société Sita Négoce, par conclusions signifiées le 27 mai 2016, demande à la Cour de :

- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

À titre principal, dire que Sorepla et Sita Négoce sont convenues de mettre un terme anticipé au contrat du 27 janvier 2006 et que ledit contrat n'a pas été rompu unilatéralement par Sita Négoce ;

À titre subsidiaire, dire que Sita Négoce a légitimement rompu le contrat du 27 janvier 2006 en application de l'article 4 dudit contrat et en, tout état de cause, eu égard à la gravité de l'inexécution par Sorepla de ses obligations de prendre livraison et de payer les volumes contractuels ;

À titre très subsidiaire, dire que le contrat du 27 janvier 2006 s'est trouvé résolu de plein droit en application de l'article 1657 du code civil, Sorepla ayant manqué à son obligation de retirement ;

À titre infiniment subsidiaire, débouter Sorepla de l'intégralité de sa demande d'indemnisation ;

En conséquence,

- débouter Sorepla de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'égard de Sita Négoce ;

- condamner Sorepla à payer à Sita Négoce la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner en tous les dépens et admettre l'avocat postulant au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.



Elle conteste que la cessation anticipée du contrat soit fautive. Elle soutient que le contrat a été résilié d'un commun accord entre elle et la société Sorepla qui a manifesté cette intention par un courriel du 21 janvier 2009.



Au cas où il serait considéré que la résiliation est bien intervenue de manière unilatérale, la société Sita Négoce soutient, de manière subsidiaire, qu'elle a procédé à cette résiliation conformément au contrat cadre litigieux, c'est à dire après concertation de la société Sorepla et parce qu'aucune autre solution ne s'avérait possible du fait du bouleversement économique du contrat.



Enfin, la société Sita Négoce conteste les moyens selon lesquels elle aurait commis des manquements dans la réalisation de ses obligations contractuelles.






MOTIFS





Sur la résiliation du contrat du 7 janvier 2012



Considérant que les sociétés Sita Négoceet Sorepla ont, 27 janvier 2006, conclu un contrat cadre d'une durée de six ans, venant à échéance le 27 janvier 2012, aux termes duquel :

- Sita Négoce s'engageait à livrer sur une période de six ans, soit de 2006 à 2011 inclus, des quantité minimales garanties matières valorisables issues du tri sélectif, pouvant varier de plus ou moins 5 % et être augmentées d'un commun accord, de matières plastiquées, estimées, pour la première année, à 4.000 tonnes et portées, pour les années 2007, 2008, 2009, 2010, à 4.500 tonnes ;

- S orepla s'engageait, quels que soient le cours des polymères, à garantir un prix d'achat, ou de reprise minimum par qualité livrée qui devait être le plus avantageux entre le prix calculé selon une formule définie et celui du cours des polymères ;



Que, Sita Négoce ayant résilié ce contrat le 25 mai 2009, Sorepla l'a assignée en indemnisation des préjudices résultant de cette résiliation anticipée ;



Considérant que les conventions stipulées à durée déterminée doivent s'exécuter jusqu'à leur terme ; que la gravité du comportement d'une partie à un contrat peut toutefois justifier que l'autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls ;



Considérant que Sita Négoce fait valoir que le motif essentiel de la cessation du contrat était que celui-ci avait pris fin depuis la fin janvier 2009, en raison de l'arrêt de toutes les livraisons à la demande de Sorepla ;



Considérant que la lettre de résiliation fait état d'une part, du non-respect, par Sorepla, de son engagement financier, d'autre part, de la suspension des livraisons à la demande de Sorepla (pièce n° 13 de Sita Négoce) ;



Mais considérant que, sur le premier point, Sita Négoce a reconnu, dans un courrier du 21 juillet 2009, que le motif du non-respect des obligations de paiement était inexact ;

Que, sur le second point, s'il a été décidé de suspendre temporairement les livraisons de produits par Sita Négoce, le temps, pour Sorepla, de régler les sommes qu'elle devait aux termes d'un échelonnement négocié par les cocontractants ' échelonnement indiqué par le courriel du 5 mai 2009,

- d'une part, la décision de suspension des livraisons est intervenue d'un commun accord entre les parties, ainsi que cela ressort :


du courriel de Monsieur [G] de Sita Négoce en date du 5 mai 2010 ((pièce Sorepla n° 37 : « En confirmation de nos accords avec Monsieur [K] suite à notre rendez vous d'hier, nous validons l'échéancier suivant : règlement de 40 KE + 9 KE au 12 mai, règlement de 50 KE au 31 mai, règlement du solde de 62 KE au 20 juin. Vous comprendrez que nous ne pouvons accepter aucun report de ces échéances en raison des délais déjà négociés a plusieurs reprises et que tout retard déclencherait une procédure de mise en recouvrement. Nous restons dans l'attente de ces règlements afin de pouvoir reprendre nos livraisons hors contrat. ») ;

de la lettre de résiliation de Sita Négoce du 25 mai 2010 ([nous avons] accepté de stopper très rapidement nos livraisons de bouteilles plastiques sur votre site ») ;


- d'autre part, il ne s'est agi, en tout état de cause, que d'une suspension provisoire des livraisons, sans que ne soit, à aucun moment, envisagée une quelconque résiliation du contrat de fourniture ; que la seule mention, portée sur le courriel du 5 mai 2009, d'une 'reprise des livraisons hors contrat' est insuffisante à démontrer que la convention était, dès cette date, résiliée, alors qu'elle ne le sera que le 25 mai 2009 ;



Considérant que Sita ne rapporte, dans ces conditions, la preuve, à la date de la rupture unilatérale du contrat, ni d'une résiliation d'un commun accord entre les parties, ni d'une faute de Sorepla caractérisée et suffisamment grave pour justifier la résiliation anticipée ; que c'est en conséquence à raison que les premiers juges ont retenu que la rupture unilatérale du contrat par Sita était fautive ;





Sur l'indemnisation



Considérant que la rupture fautive d'un contrat à durée déterminée avant le terme contractuel oblige l'auteur de la rupture à indemniser le préjudice résultant pour son cocontractant de cette rupture ; que le cocontractant d'un contrat de prestations de services à durée déterminée est fondé à obtenir une indemnisation correspondant à la perte du volume d'affaires qu'il était en droit d'escompter au titre du contrat de prestations de services à durée déterminé illégitimement rompu avant son terme ;



Considérant que Sorepla invoque deux ordres de préjudices : d'une part, une perte de marge tenant à la nécessité de s'approvisionner en matières premières dans des conditions défavorables par rapport à celles prévues au contrat, d'autre part, une perte de clientèle et une baisse de sa compétitivité sur le marché ;



Sur la perte de marge



Considérant, sur le surcoût d'approvisionnement, que Sorepla était fondée à escompter recevoir de Sita, au titre de la période restant à courir du contrat cadre - 31 mois (juillet 2009 à janvier 2012) - un tonnage non de 4.500 tonnes ' le tonnage contractuel minimum garanti de 4.500 tonnes pouvant être dépassé conformément à l'article 3.4 du contrat et ayant fait l'objet d'un accord des parties - ni de 7.018 tonnes comme le réclame Sorepla ' tonnage de la période janvier 2008 à janvier 2009, dont il ne ressort d'aucun élément qu'il avait vocation à être maintenu sur la période postérieure - mais de la moyenne des trois années d'exécution du contrat (27 janvier 2006 - 26 janvier 2007, 27 janvier 2007 - 26 janvier 2008, 27 janvier 2008 - 27 janvier 2009), soit 5.855 tonnes (4.357 tonnes + 6.191 tonnes + 7.018 tonnes / 3) ;



Que, sur les prix, Sorepla fait état, au vu du rapport de la société Batt Expertise, qui a lui-même pris en compte les évolutions de l'indice Mercuriale, d'une augmentation du prix à la tonne de 96,89 % entre février 2009 et février 2012 pour le PET Q0, de 122 % pour le PET Q 4, de 96 % pour le PET Q5, de 112,2 % pour le PET Q6 et de 56,4 % pour le PEHD, éléments que ne discute pas Sita ; que Sorepla produit la liste de ses fournisseurs pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 ; que Sita ne conteste ni le principe de cette augmentation, ni l'existence d'un surcoût par rapport au prix contractuel ; qu'elle n'oppose aucun élément pertinent aux chiffres communiqués par Sorepla et provenant du rapport de Batt Expertise ; que Sita n'est pas fondée à estimer que le prix moyen/tonne 'post Sita' auquel se réfère Sorepla - 285 euros ' est incohérent, alors que ce montant est proche du prix de référence moyen 2009 ' 2011 de la société Valorplast, présenté par Sita comme plus réaliste ' 271 euros (page 32 des conclusions signifiées le 27 mai 2016 par Sita) ; que la Cour retiendra en conséquence le surcoût de 106 euros par tonne invoqué par Sorepla ; que cette dernière est, dans ces conditions, fondée à obtenir, à ce titre, la somme de 620.630 euros (106 euros/tonne x 5.855 tonnes) pour un an, soit, pour 31 mois, la somme totale de 1.603.294 euros ;



Qu'en ce qui concerne les frais financiers ' dont elle aurait fait l'économie si elle n'avait pas dû supporter un surcoût d'approvisionnement - la baisse du taux de rendement de la matière première acquise et l'augmentation du coût de production à la tonne, Sorepla ne justifie ni de la réalité des préjudices invoqués à ces titres, ni, en tout état de cause, du lien direct de ces éléments avec la rupture fautive du contrat, ni des montants sollicités ; que la décision déférée sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a rejeté les demandes présentées de ces chefs ;



Sur le gain manqué



Considérant que Sorepla prétend que, n'ayant pas été en mesure d'acquérir, sur le marché, les volumes non fournis par Sita, elle a connu une baisse de sa production, et que cet élément a entrainé pour elle un gain manqué ;



Considérant qu'il résulte du rapport Batt Expertise (pièce n° 56 communiquée par Sorepla) que :

- la production vendue par Sorepla a été de 17.319 tonnes en 2006, 21.626 tonnes en 2007, 22.291 tonnes en 2008, 14.463 tonnes en 2009, 23.400 tonnes en 2010, 27.890 tonnes en 2011 ;

- le chiffre d'affaires de la production vendue s'est élevé à 19.977.000 euros en 2006, 24.883.000 euros en 2007, 25.349.000 euros en 2008, 16.097.000 euros en 2009, 23.542.000 euros en 2010, 27.945.000 euros en 2011 ;

- le résultat d'exploitation a baissé 2.504.000 euros en 2009 et de 1.044.000 euros en 2011 ;

- le taux de marge brute moyen ressortait à 42,3 % sur la période 2007 ' 2008 et à 39,1 % sur la période 2010 ' 2011 ;



Qu'il s'en déduit que, concomittamment à la résiliation du contrat cadre Sita, Sorepla a connu, en 2009, une baisse de sa production, de son chiffre d'affaires, de son résultat d'exploitation et de sa marge brute de ' 3,2 % ; que ces éléments établissent l'impact de la résiliation du contrat Sipa ;



Considérant que la perte d'exploitation subie par suite de la résiliation fautive d'un contrat doit être évaluée par référence à la perte de marge, non à la perte de chiffre d'affaires ;



Considérant que Sorepla est, dans ces conditions, fondée à obtenir, au titre du gain manqué, une indemnisation correspondant à la perte de marge brute par rapport au chiffre d'affaires moyen réalisé avant la résiliation en 2006, 2007 et 2008, soit 3,2 % x 23.403.000 euros (19.977.000 + 24.883.000 + 25.349.000 / 3) = 748.896 euros, soit pour 31 mois, 1.934.648 euros ; que la décision déférée sera infirmée en ce sens ;



Considérant que l'équité commande de condamner Sita à payer à Sorepla la somme de 20.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;





PAR CES MOTIFS





La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,



INFIRME le jugement entrepris sur le montant des dommages et intérêts.



STATUANT A NOUVEAU de ce chef,



CONDAMNE la SAS Sita Négoce à payer à la SA Sorepla Industrie les sommes de :

- 1.603.294 euros au titre des surcoûts d'approvisionnement, avec intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2009, date de l'assignation,

- 1.934.648 euros au titre du gain manqué,



CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus,



CONDAMNE la SAS Sita Négoce à payer à la SA Sorepla Industrie la somme de 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,



CONDAMNE la SAS Sita Négoce aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.









Le greffier Le président

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