15 mars 2017
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 15/13452

6e Chambre D

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D



ARRÊT AU FOND

DU 15 MARS 2017

F.T.

N° 2017/67













Rôle N° 15/13452







[V] [I] [C]





C/



[N] [A]





















Grosse délivrée

le :

à :



Me Roselyne SIMON-THIBAUD



Me Philippe BOSSUT









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 12 Mai 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 12/08878.





APPELANT



Monsieur [V] [I] [C]

né le [Date naissance 1] 1960 à SURESNE (92)

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Philippe BOSSUT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN





INTIMEE



Madame [N] [A],

née le [Date naissance 2] 1945 à PARIS (75006)

demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat Me Laurent BESSON, avocat au barreau de PARIS.





COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 22 Février 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme Florence TESSIER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.



La Cour était composée de :



Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente

Mme Michèle CUTAJAR, Conseiller

Mme Florence TESSIER, Conseiller



qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.



Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Mars 2017.





ARRÊT



Contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Mars 2017,



Signé par Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






***



FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES



[S] [C] est décédé à [Adresse 3] le [Date décès 1] 2002, laissant pour lui succéder son épouse en secondes noces, Madame [N] [A] et son fils issu d'une première union : Monsieur [V] [C] et en l'état :

-de plusieurs testaments olographes, le dernier, en date du 2 octobre 1994, désignant ce dernier en qualité d'héritier et léguant à l'épouse l'usufruit de la part des maisons dont le de cujus était propriétaire sur la commune de [Localité 1], lieudit [Adresse 4], ainsi que la pleine propriété de tous les meubles et objets s'y trouvant et la somme de 800.000 francs en valeurs mobilières de ses portefeuilles,

-d'une donation au dernier des vivants consentie par le défunt à son conjoint par acte authentique en date du 30 septembre 1999.

Madame [N] [A] veuve [C] a opté pour un quart en pleine propriété et trois-quarts en usufruit des biens dépendant de la succession de [S] [C].



Par jugement en date du 6 juillet 2007, le tribunal de grande instance de Draguignan a principalement :

-ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision ayant existé entre [S] [C] et Madame [N] [A] veuve [C],

-désigné la SCP [T], notaire à Cogolin, pour y procéder, ordonné l'attribution préférentielle à la veuve de l'immeuble sis à [Adresse 5],

-dit que Madame [N] [A] veuve [C] devra rapporter à la succession la moitié de la valeur au jour du décès du bien immobilier sis à [Adresse 6], ainsi que la fraction excédant la valeur de ses droits sur le bien sis à [Localité 1], lieudit [Adresse 4], vendu par acte authentique du 24 avril 2002,

-débouté Monsieur [V] [C] de ses demandes tendant à l'annulation de la donation au dernier des vivants du 30 septembre 1999, au rapport par la veuve de la valeur de l'immeuble acquis par la SCI LE VERSEAU le 15 juin 2001 et à la déclaration de recel successoral.



Par arrêt en date du 5 février 2009, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a :

-constaté que l'acte de notoriété du 9 mai 2003 par la SCP [T], notaire, n'a pas été signé par Monsieur [V] [C], ce défaut de signature étant dépourvu de conséquence,

-confirmé le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a désigné la SCP [T] et désigné en ses lieu et place le président de la chambre des notaires du Var ou son délégataire,

-débouté Monsieur [V] [C] de ses demandes de nullité et tendant à l'obtention de dommages et intérêts,

-débouté Madame [N] [A] veuve [C] de sa prétention tendant à l'octroi de dommages et intérêts,

-renvoyé les parties devant le notaire liquidateur.

Le pourvoi diligenté par Monsieur [V] [C] à l'encontre de cette décision a été déclaré non avenu par arrêt de la cour de cassation en date du 2 mars 2010.



Le 17 février 2012, Maître [O] [O], notaire commis en remplacement de la SCP [T], a dressé un procès-verbal de difficultés, Monsieur [V] [C] ayant refusé de signer le projet d'acte liquidatif



Par acte d'huissier en date du 20 novembre 2012, Madame [N] [A] veuve [C] a fait assigner Monsieur [V] [C] devant le tribunal de grande instance de Draguignan aux fins de voir :

-constater la carence de Monsieur [V] [C],

-constaté qu'il est expressément indiqué, en page 30 de l'acte de partage, que « les copartageants se reconnaissent entièrement remplis de leurs droits et renoncent à élever toute contestation à ce sujet »,

-homologuer le partage,

-condamner Monsieur [V] [C] à lui payer les sommes de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire.



Monsieur [V] [C], dans ses dernières écritures signifiées le 4 octobre 2013, a sollicité du tribunal de voir :

-homologuer le projet de partage en ce qu'il a fait droit à ses demandes,

-lui attribuer l'appartement sis à [Adresse 7], dans la mesure où il a été institué légataire universel de sa grand-mère paternelle, [B] [Y] veuve [C], décédée le [Date décès 2] 2003,



-dire que les meubles meublants de cet appartement n'entrent pas dans la succession de son père et que Madame [N] [A] veuve [C] ne peut en disposer,

-dire que Madame [N] [A] veuve [C] doit rapport à la succession des cent-vingt parts de la SCI LE VERSEAU, qui ont été intégralement financées avec ses deniers personnels,

-dire que Madame [N] [A] veuve [C] n'a droit qu'à un quasi-usufruit sur la totalité des actifs bancaires et créances et ordonner leur conversion en titres nominatifs ou ordonner qu'ils soient déposés chez un dépositaire agréé,

-condamner Madame [N] [A] veuve [C] à lui payer la somme de 5.000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles.



Par jugement contradictoire en date du 12 mai 2015, le tribunal de grande instance de Draguignan a :

-dit que Maître [O] [O], notaire, procédera aux opérations de compte, liquidation et partage conformément au projet de partage et d'état liquidatif établi le 17 février 2012,

-attribué à Monsieur [V] [C] le bien immobilier sis à [Adresse 8] ainsi que les meubles le garnissant conformément au projet de partage précité,

-dit que s'agissant des biens soumis à l'usufruit de Madame [N] [A] veuve [C], les titres au porteur seront, au choix de l'usufruitier convertis en titres nominatifs ou remis chez un dépositaire agréé,

-renvoyé les parties devant ce notaire pour la poursuite des opérations de partage de la succession de [S] [C],

-débouté Madame [N] [A] veuve [C] de sa demande de dommages et intérêts,

-dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-débouté les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,

-ordonné l'exécution provisoire du jugement,

-dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.



Le tribunal a considéré pour l'essentiel que :

-sur l'appartement situé à [Localité 2], ce dernier et les meubles meublants dépendent de la succession de [S] [C], l'immeuble appartenant en nue-propriété au père de celui-ci, la mère du défunt ayant opté pour la totalité de la succession de son mari en usufruit, en sa qualité de légataire universelle,

-il convient d'attribuer cet immeuble à Monsieur [V] [C], tel que prévu au projet d'acte liquidatif,

-Monsieur [V] [C] ne peut solliciter le rapport à la succession par Madame [N] [A] veuve [C] des cent-vingt parts de la SCI LE VERSEAU, le jugement rendu le 6 juillet 2007 par le tribunal de Draguignan, qui l'a débouté de cette prétention, ayant été confirmé par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 5 février 2009, revêtu de l'autorité de la chose jugée,

-en application de l'article 1094-3 du code civil, Monsieur [V] [C] est fondé à solliciter, quant aux biens soumis à l'usufruit, que les titres au porteur soient, au choix de l'usufruitier, convertis en titres nominatifs ou remis chez un dépositaire agréé.



Monsieur [V] [C] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 22 juillet 2015.



Monsieur [V] [C], aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 21 octobre 2015, demande à la cour de :

-exclure de la masse active qui lui est attribuée les meubles garnissant l'immeuble sis à [Adresse 8],

-dire que la valeur de cet immeuble ne peut être supérieure, eu égard au legs universel et au bail contracté par Madame [N] [A] veuve [C], à la somme de 1.002.375 euros,

-dire que Madame [N] [A] veuve [C] doit rapport à la succession des cent-vingt parts de la SCI LE VERSEAU, intégralement financées par le de cujus,

-renvoyer les parties devant le notaire liquidateur,

-condamner l'intimée au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



Monsieur [V] [C] fait valoir les moyens suivants :

-le bien immobilier sis à [Localité 2] lui revient, de droit, la partie intimée en ayant usé sans droit ni titre, en le mettant en location à compter du 1er novembre 2009, au prix de 1.200 euros par mois, le loyer ayant été minoré compte tenu des travaux de réhabilitation totale s'imposant,

-l'appelant vient à la succession de sa grand-mère paternelle, dont il est le légataire universel, en représentation de son père pour la part correspondant à la réserve et directement pour la quotité disponible, l'usufruit de Madame [N] [A] veuve [C] ne pouvant lui être opposé,

-l'appartement sis à [Localité 2] a été surestimé dans le cadre de la succession à la somme de 1.485.000 euros, la totalité des meubles meublants devant lui revenir,

-s'agissant des parts de la SCI LE VERSEAU, elles sont été intégralement financées à l'aide des deniers personnels de son père et doivent être rapportées à la succession de ce dernier.



Madame [N] [A] VEUVE [C], aux termes de ses dernières écritures notifiées le 18 décembre 2015, sollicite de la cour de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a attribué le bien immobilier sis à Paris à Monsieur [V] [C], ainsi que les meubles le garnissant et en ce qu'il a débouté l'appelant de sa demande de rapport à la succession des cent-vingt parts sociales de la SCI LE VERSEAU, et de l'infirmer en ce qu'elle a homologué le partage conformément au projet d'acte de partage et d'état liquidatif dressé par Maître [O] [O], notaire, le 17 février 2012.

Elle demande à la cour de :

-condamner Monsieur [V] [C] à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts,

-lui donner acte de ce qu'elle a converti en titres nominatifs les titres au porteur sur lesquels elle bénéficie d'un usufruit,

-débouter Monsieur [V] [C] de l'ensemble de ses prétentions,

-le condamner à lui payer la somme de 15.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.



Elle expose que :

-concernant la valeur de l'appartement sis à [Localité 2], l'évaluation effectuée par l'appelant ne se fonde sur aucun élément sérieux,

-la location de ce bien a permis l'exécution d'importants travaux devenus nécessaires compte tenu de la vétusté du bien, l'intimée supportant seule les charges afférents et s'étant trouvée financièrement dans l'obligation de prendre cette mesure,

-cet immeuble entre dans l'actif successoral,

-sur le rapport des parts sociales, l'arrêt rendu le 5 février 2009 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence a tranché la demande de Monsieur [V] [C] et se trouve revêtu de l'autorité de la chose jugée,

-l'attitude irrationnelle de l'appelant et sa volonté de lui nuire, faisant obstacle au partage de la succession du de cujus depuis de nombreuses années, justifiant l'octroi de dommages et intérêts à son bénéfice.



La procédure a été clôturée par ordonnance du magistrat chargé de la mise en état en date du 25 janvier 2017.




MOTIVATION DE LA DECISION



Attendu, sur l'immeuble situé avenue du président Wilson à [Localité 2], qu'il convient de constater que Madame [N] [A] veuve [C] accepte que ce dernier, et les meubles qui le garnissent, soient attribués à Monsieur [V] [C] ;

Attendu que la décision entreprise doit être confirmée sur ce chef ;

Attendu, sur la valeur vénale de ce bien immobilier, que l'appelant ne démontre pas, par les pièces qu'il produit, que celle-ci doit être arrêtée à la somme de 1.002.375 euros, le notaire désigné devant déterminer cette dernière, au regard des documents communiqués par chacune des parties ou, à défaut, sur la base de l'avis contradictoire d'un sapiteur qu'il mandatera ;

Attendu que Monsieur [V] [C] sera débouté de sa prétention formulée sur ce point ;

Attendu, sur la demande de l'appelant tendant au rapport, par Madame [N] [A] veuve [C], des cent-vingt parts sociales de la SCI LE VERSEAU, que le jugement déféré doit être confirmé, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, par arrêt définitif en date du 5 février 2009, revêtu de l'autorité de la chose jugée, l'ayant débouté de cette prétention ;

Attendu, sur la demande présentée par Madame [N] [A] veuve [C], tendant à l'octroi de dommages et intérêts, que l'examen de la procédure soumise à la cour démontre que l'appelant fait obstacle, depuis dix années, à ce que la succession de [S] [C] soit liquidée, en refusant de signer le projet d'acte liquidatif dressé par le notaire désigné et en multipliant les voies de recours à l'encontre des décisions rendues, revêtues de l'autorité de la chose jugée, attitude opposante qui occasionne à l'intimée un préjudice financier, caractérisé par l'absence de perception des fonds lui revenant au titre de ladite succession et l'engagement de frais inhérents à l'entretien et à la conservation des immeubles en dépendant ;

Attendu par suite qu'il convient d'infirmer la décision déférée sur ce point et, statuant à nouveau, de condamner Monsieur [V] [C] à payer à Madame [N] [A] veuve [C] la somme de 10.000 euros en réparation de l'entier préjudice financier par elle supporté ;





Attendu qu'il convient de renvoyer les parties devant le notaire désigné aux fins d'établissement de l'acte définitif de partage, avec application des principes ci-dessus posés ;



Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'article 696 du code de procédure civile ;



P A R C E S M O T I F S

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,



Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté Madame [N] [A] veuve [C] de sa demande de dommages et intérêts ;



Statuant à nouveau sur ce point,



Condamne Monsieur [V] [C] à payer à Madame [N] [A] veuve [C] la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier par elle subi ;



Y ajoutant,



Déboute Monsieur [V] [C] de sa demande tendant à voir fixer la valeur vénale du bien immobilier sis à [Adresse 7] à la somme de 1.002.375 euros et dit qu'il appartient au notaire désigné de déterminer cette dernière, au regard des documents communiqués par chacune des parties ou, à défaut, sur la base de l'avis contradictoire d'un sapiteur qu'il mandatera ;



Renvoie les parties devant le notaire désigné aux fins d'établissement de l'acte définitif de partage ;



Condamne Monsieur [V] [C] à payer à Madame [N] [A] veuve [C] la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;



Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance ni en cause d'appel au bénéfice de Monsieur [V] [C] ;



Dit que les dépens d'appel seront pris en frais privilégiés de partage et recouvrés dans les formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.



LE GREFFIER LE PRESIDENT

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