15 mai 2019
Cour d'appel de Paris
RG n° 17/13304

Pôle 6 - Chambre 8

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 15 Mai 2019

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/13304 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4LUQ



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Novembre 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F12/10668





APPELANT

Monsieur [X] [P]

Chez M. [W] [Adresse 4]

[Localité 7]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 8] (BENIN)

comparant en personne, assisté de Me Thomas FORMOND, avocat au barreau de PARIS, toque : C2615







INTIMEES

Me [O] [Y] (SCP BTSG) - Mandataire liquidateur de SARL QUALITE GLOBALE CONSEIL VENANT AUX DROITS DE FACE TO FACE FORCE

[Adresse 3]

[Localité 5]

non comparant

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10







COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Décembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Pascale MARTIN, Présidente, chargée du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Pascale MARTIN, présidente

Nadège BOSSARD, conseiller

Benoît DEVIGNOT, conseiller







Greffier : Mme Frantz RONOT, lors des débats









ARRET :



- réputé contradictoire

-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Prorogé à ce jour.

- signé par Pascale MARTIN, Présidente et par Philippe ANDRIANASOLO, greffier de la mise à disposition, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire






FAITS- PROCÉDURE-PRÉTENTIONS DES PARTIES



M [X] [P] était engagé à compter du 1er juin 2002 par la société Fields Service par contrat à durée déterminée en qualité d'enquêteur, niveau 1 coefficient 200 ,la convention collective nationale applicable étant celle des bureaux d'études techniques.



La société FACE TO FACE FORCE, ayant pour activité les études de marché et de sondage, a repris, à compter du 3 janvier 2011, le contrat de travail de M [X] [P].



M [X] [P] comme trois autres salariés saisissait le conseil des prud'hommes de Paris le 27 septembre 2012 aux fins notamment de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et de diverses demandes à caractère indemnitaire et salarial.



Par jugement du 18 novembre 2013, le conseil des prud'hommes déboutait M [X] [P] de l'ensemble de ses demandes et le condamnait aux dépens.



M [X] [P] a interjeté appel le 28 février 2014 (notification en date du 11/02/2014).



Placée en redressement judiciaire le 16 mai 2013, la société FACE TO FACE FORCE a été radiée, par suite de la transmission universelle du patrimoine à la société QUALITE GLOBALE CONSEIL .

Cette société, après plan de redressement judiciaire adopté le 22 septembre 2014, a fait l'objet d'une liquidation judiciaire, par résolution du plan de redressement, par jugement du 20 juillet 2016 qui a désigné la SCP BTSG en la personne de Me [O] en qualité de liquidateur .



Les parties ont été convoquées à l'audience du 9 décembre 2016 et l'affaire renvoyée à la demande des parties ou de leurs conseils à celle du 7 septembre 2017.



L'affaire a été radiée à cette date .




Sur demande et conclusions du conseil des appelants, l'affaire a été rétablie et les parties convoquées à l'audience du 11 décembre 2018.



Selon conclusions reprises oralement, M [X] [P] demande à la cour de :

Infirmer le jugement déféré,

Requalifier la relation de travail à contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée,

Inscrire au passif de la SARL QUALITE GLOBALE CONSEIL les sommes suivantes :

- 1.399,31 € au titre de l'indemnité de requalification,

- 21.274,22 € à titre de rappel de salaire à temps plein d'octobre 2007 à décembre 2011,

- 2.127,42 € au titre des congés payés afférents,

- 2.798,62 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 279,86 € au titre des congés payés afférents,

- 2.518,74 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 13.993,10 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse .

Dire ces créances opposables aux AGS CGEA,

Inscrire au passif de la SARL QUALITE GLOBALE CONSEIL la somme de 1.000 € au bénéfice de Me Thomas FORMOND sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle,

Ordonner la remise de l'attestation conforme destinée au POLE EMPLOI,

Ordonner l'intérêt légal à compter de la saisine,

Condamner aux entiers dépens.



Par un courrier du 31 octobre 2018, Me [O] a accusé réception de la convocation mais indiqué que , faute de fonds et d'information, il ne se ferait pas représenter ès qualités, à la procédure.



L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA d' Ile de France Ouest, aux termes de ses écritures et lors des débats, demande à la cour de :

Fixer le salaire moyen de M [X] [P] à la somme de 550,47 €,

Débouter M [X] [P] de sa demande de requalification,

Confirmer le jugement sur l'absence de travail à temps plein et débouter l'appelante de sa demande de rappel de salaire, de sa demande au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre des indemnités de rupture.

A titre subsidiaire, au visa de l'article L.1235-3 du code du travail, elle demande le débouté de M [X] [P] de sa demande à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, de fixer le montant du préavis à 1.693,48 € et l'indemnité conventionnelle de licenciement à 1.323,03 €.

Elle demande à la cour de dire que la garantie ne couvre les créances de nature salariale que dans la limite d'un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail à compter du 18 juin 2012.



Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile , aux conclusions des parties visées par le greffier à l'audience.






MOTIFS DE L'ARRÊT



A titre liminaire, la cour constate que M [X] [P] ne produit que les contrats d'enquête conclus avec la seule société FACE TO FACE FORCE, de sorte que ses demandes visant à la requalification du contrat de travail ou à ses demandes de rappel de salaire antérieurement au 3 janvier 2011, ne peuvent prospérer.



Sur la requalification



M [X] [P] indique qu'il a été employé en qualité d'enquêteur vacataire tel que visé dans la convention collective nationale applicable et que sa collaboration n'avait rien d'occasionnel ayant travaillé de 6 à 12 mois par an depuis 1998, invoque un mode de fonctionnement des instituts de sondage selon des contrats à durée déterminée alors que l'activité d'enquête était permanente .



L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA d' Ile de France Ouest indique que M [X] [P] n'a jamais travaillé une année entière pour la société, qu'il s'agissait d'une activité à caractère temporaire et fluctuant.



La société FACE TO FACE FORCE, avait pour activité les études de marché et de sondages , soit dans un secteur visé par l'article D 1242 1 (8°) du code du travail pour lequel en application du 3° de l'article L.1242-2 du code du travail, des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois .

L'accord du 16 Décembre 1991 intégré à la convention collective des Bureaux d'études techniques (SYNTEC) définissant le statut des enquêteurs vacataires dispose en son article 43 que par nature ces vacations comportent des prestations diverses effectuées à des périodes variables, qu'elles sont imprévisibles, temporaires et discontinues donc précaires et aléatoires ; l'article 44 dispose que son contrat de travail est appelé «contrat d'enquête'' et qu'il a pour objet l'exécution de tâches consistant 'en interview, comptage ou autres tâches de même type sur un sujet donné fixé lors de chaque mission et que les contrats d'enquête sont par nature indépendants les uns des autres'.



En l'espèce, M [X] [P] verse aux débats des contrats sur la période du 10/01/2011 au 07/02/2012 desquels il ressort qu'il a travaillé à des endroits différents, selon des horaires différents et à des jours variés, le nombre de jours de travail - consécutifs ou non - étant très contrasté :

11 jours en janvier, 7 en février, 13 au mois de mars, aucun sur les mois d'avril-mai-juin-juillet-août-septembre, 3 au mois d'octobre, 7 au mois de novembre, 11 au mois de décembre 2011, 15 au mois de janvier 2012 et enfin le 07/02/2012.



Ces contrats signés par un paraphe de la société, sont produits par M [X] [P] , et ont été exécutés de sorte que l'absence de signature par le salarié n'est pas un motif de requalification ; ils comportent tous sur la 1ère page , la rémunération en heures de jour, de nuit, attentes, frais etc... et au verso un ordre de mission dit feuille de route comportant le début de la mission et la fin de celle-ci et le nombre d'heures travaillées.



Eu égard à ces éléments démontrant une grande variabilité des horaires, des jours et mois travaillés, sans jamais atteindre un mois entier le caractère temporaire et fluctuant de l'emploi - dépendant de la demande des clients de l'entreprise et donc du marché - est établi et ne permet pas de requalifier les contrats en un contrat à durée indéterminée .



En conséquence, il convient d'approuver le conseil des prud'hommes d'avoir rejeté ce chef de demande ainsi que la demande d'indemnité subséquente.



Sur le rappel de salaires



Au visa de l'article L.3123-14 du code du travail, M [X] [P] invoque l'absence d'écrit, prétend n'avoir eu connaissance de ses horaires et jours travaillés qu'à chaque fin de semaine et indique avoir été dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme , il devait travailler chaque mois, considérant qu'il était dans l'obligation de se tenir en permanence à la disposition de son employeur. Il souligne produire ses avis d'imposition démontrant qu'il n'avait pas d'autre employeur et ses seuls autres revenus salariaux provenant de Pôle Emploi.



L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA d' Ile de France Ouest précise que M [X] [P] ne peut demander de rappel de salaires concernant la période antérieure au 3 janvier 2011; elle considère que les périodes d'inactivité résultaient d'un choix délibéré du salarié et qu'il ne justifie pas s'être tenu à disposition.



Même si M [X] [P] n'a pas eu d'autre activité salariale que celle exercée pour la société de sondage en 2011 et 2012, cela ne caractérise pas la nécessité dans laquelle il se trouvait d'être en permanence à la disposition de l'employeur chaque mois puisqu'il s'agissait de contrats journaliers, inférieurs à une semaine et qu'il conservait la possibilité de refuser une mission, comme le démontre l'absence de travail plusieurs jours par mois voire des mois entiers, cette situation étant connue de M [X] [P], lequel pouvait disposer de son temps comme il le souhaitait, étant précisé qu'il a été rémunéré à hauteur des heures de travail accomplies, telles que précisées dans les contrats avec les horaires de début et de fin de mission, sans émettre de réclamation pendant la relation contractuelle.



En conséquence, il convient d'approuver le conseil des prud'hommes en ce qu'il a rejeté la demande de requalification à temps plein du contrat de travail ainsi que la demande de rappel de salaire.



Sur la rupture du contrat de travail



En l'absence de requalification en contrat à durée indéterminée , la rupture de la relation est intervenue au terme du dernier contrat à durée déterminée du 7 février 2012 .

En tout état de cause, faute d'un licenciement ou d'une demande de résiliation judiciaire voire de prise d'acte, M [X] [P] est mal fondé à voir imputer à la société , un autre mode de rupture .



Sur les frais et dépens



L'appelant qui succombe supportera les dépens d'appel.





PAR CES MOTIFS





La Cour,



* Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,



Y ajoutant, Laisse les dépens d'appel à la charge de M. [X] [P].



.







LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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