25 septembre 2012
Cour de cassation
Pourvoi n° 11-21.981

Chambre commerciale financière et économique - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2012:CO00927

Titres et sommaires

IMPOTS ET TAXES - Redressement et vérifications (règles communes) - Visites domiciliaires (article L. 16 B du livre des procédures fiscales) - Voies de recours - Appel contre l'ordonnance d'autorisation - Référé - Compétence du premier président - Détermination

Le premier président d'une cour d'appel peut être saisi, sur le fondement de l'article 956 du code de procédure civile, pour statuer en référé sur une demande de mesure provisoire urgente, avant les débats sur l'appel contre une autorisation de visite domiciliaire ou le recours contre son déroulement formés en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales

IMPOTS ET TAXES - Redressement et vérifications (règles communes) - Visites domiciliaires (article L. 16 B) - Voies de recours - Appel contre le déroulement des opérations de visite et saisies - Référé - Compétence du premier président - Détermination

Texte de la décision

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 septembre 2012


Rejet


M. ESPEL, président


Arrêt n° 927 FS-P+B

Pourvoi n° V 11-21.981





R E P U B L I Q U E F R A N C A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ l'entreprise [Z] [N], entreprise individuelle profession libérale, dont le siège est 15 avenue de l'Opéra, 75001 Paris,

2°/ la société LCBA, société anonyme, dont le siège est 50 rue Basse, 7307 Steinsel (Grand Duché du Luxembourg),

3°/ la Société de gestion et de vente de biens immobiliers (SGVI), société à responsabilité limitée, dont le siège est 15 avenue de l'Opéra, 75001 Paris,

4°/ la société La Braille LCBG, société à responsabilité limitée, dont le siège est 15 avenue de l'Opéra, 75001 Paris,

5°/ la société Urco, société à responsabilité limitée, dont le siège est 15 avenue de l'Opéra, 75001 Paris,

6°/ la société Eolia, société en nom collectif, dont le siège est 15 avenue de l'Opéra, 75001 Paris,

7°/ la société Saint-Vincent-de-Paul, société civile immobilière, dont le siège est 15 avenue de l'Opéra, 75001 Paris,

8°/ Mme [T] [Z],

9°/ M. [N] [Z],

domiciliés tous deux 220 rue du Faubourg Saint-Martin, 75010 Paris,

contre l'ordonnance rendue le 7 juin 2011 par le premier président de la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 7), dans le litige les opposant au directeur général des finances publiques, représenté par le chef des services fiscaux chargé de la Direction nationale d'enquêtes fiscales, dont le siège est Direction nationale d'enquêtes fiscales, 6 bis rue Courtois, 93695 Pantin cedex,

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 10 juillet 2012, où étaient présents : M. Espel, président, Mme Bregeon, conseiller rapporteur, M. Petit, conseiller doyen, M. Jenny, Mme Laporte, M. Le Dauphin, Mme Mandel, MM. Grass, Fédou, Mme Mouillard, conseillers, Mme Michel-Amsellem, MM. Pietton, Delbano, Mme Tréard, conseillers référendaires, M. Carre-Pierrat, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Bregeon, conseiller, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de l'entreprise [N] [Z], les sociétés LCBA, SGVBI, La Braille LCBG, Urco, Eolia, Saint-Vincent-de-Paul et M. et Mme [Z], de Me Foussard, avocat du directeur général des finances publiques, l'avis de M. Carre-Pierrat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel statuant en référé (Paris, 7 juin 2011), que, par deux ordonnances du 8 avril 2011, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris a, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, autorisé des agents des impôts à procéder à une visite avec saisies dans des locaux sis 15 avenue de l'Opéra à Paris, susceptibles d'être occupés notamment par M. [Z], le cabinet [Z], les sociétés LCBA SA, SARL La Braille enseigne LCBG, SCI Saint-Vincent-de-Paul, Société de gestion et de vente de biens immobiliers (SARL SGVBI), SNC Eolia et SARL Urco, afin de rechercher la preuve des fraudes fiscales des sociétés de droit luxembourgeois SA CA Animation et LCBA SA, au titre de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée ; que ces opérations ont eu lieu le 12 avril 2011 et que, le 28 avril suivant, le juge des libertés et de la détention a prorogé au 31 mai 2011 le délai d'ouverture des scellés ; qu'après avoir formé un appel contre les autorisations de visite et un recours contre leur déroulement, M. [Z], les sociétés LCBA SA, SARL SGVBI, SARL La Braille LCBG, SARL Urco, SNC Eolia, SCI Saint-Vincent-de-Paul et Mme [Z] ont saisi en référé le premier président de la cour d'appel, conformément aux dispositions de l'article 956 du code de procédure civile, afin qu'il ordonne que l'intégralité des documents saisis soit placée sous scellés et que l'ouverture des scellés soit réalisée en présence du juge des libertés et de la détention ;

Attendu que l'entreprise [N] [Z], les sociétés LCBA SA, SARL SGVBI, SARL La Braille LCBG, SARL Urco, SNC Eolia, SCI Saint-Vincent-de-Paul, M. et Mme [Z] font grief au premier président d'avoir rejeté leur demande de placement sous scellés de l'intégralité des documents saisis, alors, selon le moyen :

1°/ que saisi en référé d'une demande relative à l'exécution d'une décision du juge des libertés et de la détention, le premier président de la cour d'appel n'a pas le pouvoir de modifier les ordonnances du juge des libertés et de la détention dont il n'est pas saisi de la réformation ; qu'au cas présent, il ressort des faits constatés par le premier président de la cour d'appel que le juge des libertés et de la détention avait demandé le placement sous scellés de tous les documents saisis sans distinction ; que, par suite, le premier président de la cour d'appel, saisi en référé, et non de l'appel de la décision du juge des libertés et de la détention de placer les biens saisis sous scellés, n'avait pas le pouvoir de réformer cette décision et d'apprécier l'opportunité du placement sous scellés décidé par le juge des libertés et de la détention ; qu'en écartant la demande de placement sous scellés des documents qui ne l'avaient pas initialement été au motif que les demandeurs "ne précisent pas en quoi l'absence de placement sous scellés leur fait grief alors que les opérations de visite et de saisie remontent au 12 avril 2011 et qu'ils indiquent par ailleurs avoir formé un recours contre le déroulement de ces opérations", la déléguée du premier président de la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 956 du code de procédure civile ;

2°/ que dans leur assignation en référé devant le premier président, les consorts [Z] faisaient valoir qu'une partie des documents saisis par l'administration fiscale, concernaient d'autres clients du Cabinet [Z], non concernés par les procédures diligentées par l'administration, et étaient couverts par le secret professionnel ; qu'en rejetant la demande de mise des documents en question sous scellés au motif que les consorts [Z] n'auraient pas précisé en quoi l'absence de placement sous scellés leur faisait grief, la déléguée du premier président de la cour d'appel a dénaturé ladite assignation, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

3°/ que l'absence de placement sous scellés de documents couverts, ou susceptibles d'être couverts par le secret professionnel cause grief au professionnel tenu audit secret dans la mesure où elle permet à l'administration de porter atteinte audit secret ; qu'en rejetant la demande de mise des documents en question sous scellés au motif que les consorts [Z] n'auraient pas précisé en quoi l'absence de placement sous scellés leur faisait grief, cependant que le grief résultait de la raison même pour laquelle le placement sous scellés des autres documents avait été ordonné par le juge des libertés et de la détention, à savoir préserver le secret professionnel, la déléguée du premier président de la cour d'appel a violé l'article 956 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'il avait été procédé le 12 mai 2011 à l'ouverture du scellé constitué lors du déroulement de la visite, que les demandeurs n'apportaient aucune précision sur les documents qui n'avaient pas été placés sous scellés au cours de celle-ci et qu'il était par ailleurs saisi d'un recours contre le déroulement des opérations de visite, le premier président a pu en déduire, abstraction faite du motif surabondant critiqué par le moyen, que la demande de placement sous scellés de l'intégralité des documents saisis était sans objet ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'entreprise [N] [Z], les sociétés LCBA, SGVBI, La Braille LCBG, Urco, Eolia, Saint-Vincent-de-Paul et M. et Mme [Z] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer la somme globale de 2 500 euros au directeur général des finances publiques ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour l'entreprise [N] [Z], les sociétés LCBA, SGVBI, La Braille LCBG, Urco, Eolia, Saint-Vincent-de-Paul et M. et Mme [Z].

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts [Z] de leur demande visant à ordonner que l'intégralité des documents saisis soit placée sous scellés, et en particulier les documents qui ne l'avaient pas initialement été ;

Aux motifs que « Sur les autres documents : les requérants n'apportent pas de plus amples précisions sur lesdits documents et ne précisent pas en quoi l'absence de placement sous scellés leur fait grief alors que les opérations de visite et de saisies remontent au 12 avril 2011 et qu'ils indiquent par ailleurs avoir formé un recours contre le déroulement de ces opérations ; que, dès lors, ils doivent être déboutés de toutes leurs demandes » (ordonnance, p. 5, § 3 et 4) ;

1°) Alors que, saisi en référé d'une demande relative à l'exécution d'une décision du juge des libertés et de la détention, le Premier Président de la cour d'appel n'a pas le pouvoir de modifier les ordonnances du juge des libertés et de la détention dont il n'est pas saisi de la réformation ; qu'au cas présent, il ressort des faits constatés par le Premier Président de la cour d'appel que le juge des libertés et de la détention avait demandé le placement sous scellés de tous les documents saisis sans distinction (ordonnance, p. 3, § 7) ; que, par suite, le Premier Président de la cour d'appel, saisi en référé, et non de l'appel de la décision du juge des libertés et de la détention de placer les biens saisis sous scellés, n'avait pas le pouvoir de réformer cette décision et d'apprécier l'opportunité du placement sous scellés décidé par le juge des libertés et de la détention ; qu'en écartant la demande de placement sous scellés des documents qui ne l'avaient pas initialement été au motif que les exposants « ne précisent pas en quoi l'absence de placement sous scellés leur fait grief alors que les opérations de visite et de saisie remontent au 12 avril 2011 et qu'ils indiquent par ailleurs avoir formé un recours contre le déroulement de ces opérations », la déléguée du Premier Président de la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 956 du Code de procédure civile ;

2°) Alors, subsidiairement, que dans leur assignation en référé devant le Premier Président, les consorts [Z] faisaient valoir qu'une partie des documents saisis par l'administration fiscale, concernaient d'autres clients du cabinet [Z], non concernés par les procédures diligentées par l'administration, et étaient couverts par le secret professionnel (p. 3) ; qu'en rejetant la demande de mise des documents en question sous scellés au motif que les consorts [Z] n'auraient pas précisé en quoi l'absence de placement sous scellés leur faisait grief, la déléguée du Premier Président de la cour d'appel a dénaturé ladite assignation, en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

3°) Alors, subsidiairement, que l'absence de placement sous scellés de documents couverts, ou susceptibles d'être couverts par le secret professionnel cause grief au professionnel tenu audit secret dans la mesure où elle permet à l'administration de porter atteinte audit secret ; qu'en rejetant la demande de mise des documents en question sous scellés au motif que les consorts [Z] n'auraient pas précisé en quoi l'absence de placement sous scellés leur faisait grief, cependant que le grief résultait de la raison même pour laquelle le placement sous scellés des autres documents avait été ordonné par le juge des libertés et de la détention, à savoir préserver le secret professionnel, la déléguée du Premier Président de la cour d'appel a violé l'article 956 du Code de procédure civile.

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