29 janvier 2020
Cour d'appel de Versailles
RG n° 16/02898

15e chambre

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



15e chambre



ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE





DU 29 JANVIER 2020





N° RG 16/02898



N° Portalis DBV3-V-B7A-QYE5





AFFAIRE :





[F] [P]





C/





GE Hydro France anciennement dénommée Alstom Hydro France









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Avril 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : 14/01718





Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :





Me Olivier KHATCHIKIAN



Me Julie BEOT-RABIOT





le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT ,



La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant, fixé au 18 décembre 2019 puis prorogé au 15 janvier 2020 puis au 29 janvier 2020, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :







Madame [F] [P]

née le[Date naissance 1] 1975 à [Localité 6] (76), de nationalité française

[Adresse 3]

[Localité 4]



représentée par Me Olivier KHATCHIKIAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0619 substitué par Me Sylvain LEGRAND, avocat au barreau de PARIS







APPELANTE

****************





GE Hydro France anciennement dénommée Alstom Hydro France

N° SIRET : 327 948 907

[Adresse 2]

[Localité 5]



représentée par Me Julie BEOT-RABIOT de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0107 substituée par Me François-Xavier ANSART, avocat au barreau de PARIS







INTIMÉE

****************





Composition de la cour :



En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 octobre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Jean-Yves PINOY, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Madame Maryse LESAULT, Présidente,

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,



Greffier, lors des débats : Madame Carine DJELLAL,










FAITS ET PROCÉDURE,



Mme [F] [P] (ci-après Mme [P]) a été engagée par la société Alstom Hydro France par contrat à durée indéterminée écrit du 1er août 2000, avec reprise de son ancienneté au 1er mai 2000.



La relation de travail était soumise à la convention collective nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie.



En dernier lieu, Mme [P] occupait les fonctions de contrôleur de gestion projet, position II -indice 120.



Par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 décembre 2013, la société Alstom Hydro France a notifié à Mme [P] son licenciement pour motif économique. Mme [P] a accepté le congé de reclassement.



Mme [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre des demandes suivantes :

- 129 055 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

A titre infiniment subsidiaire : 129 055 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des critères d'ordre du licenciement,

- 16 131,88 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices causés par l'exécution déloyale de l'obligation de reclassement externe et le non-respect des engagements pris dans le PSE,

- 145,50 euros au titre des cotisations irrégulièrement retenues pendant le préavis pour la couverture mutuelle et prévoyance,

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- exécution provisoire,

- dépens.



Par jugement du 19 avril 2016, le conseil de prud'hommes de Nanterre a :

- jugé le licenciement économique de Mme [P] fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- condamné la société GE Hydro France à payer à Mme [P] 145,50 euros au titre des cotisations irrégulièrement retenues avec intérêt à taux légal à compter de la notification du jugement, et 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Par déclaration du 27 mai 2016, Mme [P] a interjeté appel du jugement.



Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, Mme [P], appelante, demande à la cour de :

- dire et juger que le plan de reclassement prévu au PSE mis en place par la société Alstom Hydro France était insuffisant,

- juger que le PSE dans le cadre duquel Mme [P] a été licencié est nul,

- juger que le licenciement de Mme [P] prononcé dans le cadre de ce PSE est par conséquent également nul,

Et,

- relever le manque de pertinence des motifs économiques allégués par la société Alstom Hydro France pour justifier la rupture pour motif économique du contrat de travail de Mme [P] ;

- relever que la société Alstom Hydro France n'a adressé aucune proposition de reclassement à Mme [P] ;

- juger que la société Alstom Hydro France n'a pas exécuté de manière loyale son obligation de recherche de solutions individuelles de reclassement pour Mme [P] ;

- juger que le licenciement pour motif économique de Mme [P] est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Et,

- relever que la société Alstom Hydro France n'a à tort pas appliqué les critères d'ordre du licenciement.

Et,

- juger que la société Alstom Hydro France n'a pas exécuté de manière loyale son obligation de reclassement externe, compte tenu des dispositions non respectées du PSE,

- relever que la société Alstom Hydro France n'a pas respecté son obligation de prise en charge intégrale des cotisations de mutuelle et prévoyance pendant le congé de reclassement.

En conséquence,

- infirmer le jugement dont appel,

Et statuant à nouveau,

- condamner la société Alstom Hydro France, à verser à Mme [P] les sommes de :

- 129 055 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

A titre infiniment subsidiaire :

- 129 055 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des critères d'ordre du licenciement,

- 16 131.88 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices causés par l'exécution déloyale de l'obligation de reclassement externe et le non-respect des engagements pris dans le PSE,

- 145.50 euros au titre des cotisations irrégulièrement retenues pendant le préavis pour la couverture mutuelle et prévoyance,

- condamner la société Alstom Hydro France , à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- ordonner que ces sommes produisent intérêt au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du Conseil de Prud'hommes de Nanterre, avec la capitalisation,

- condamner la société Alstom Hydro France , aux entiers dépens.



Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, la Société GE Hydro France, intimée, demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Alstom Hydro France à payer à Mme [P] :

- la somme de 145,50 euros au titre des cotisations pour la couverture mutuelle et prévoyance retenues pendant le préavis ;

- la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Statuant à nouveau,

- dire et juger que la société Alstom Hydro France a respecté ses obligations de maintien de la couverture mutuelle et prévoyance

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- constaté que le licenciement économique de Mme [P] reposait sur une cause réelle et sérieuse,

- constaté que la société Alstom Hydro France n'avait pas manqué à ses obligations de reclassement à l'égard de Mme [P],

- débouté Mme [P] de l'ensemble de ses demandes,

En conséquence,

- débouter Mme [P] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Mme [P] à verser à la société Alstom Hydro France la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

- condamner Mme [P] aux entiers dépens d'instance.



Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.






MOTIFS,



1- Sur la demande de nullité du licenciement pour défauts du plan de sauvegarde et manquements à l'obligation de reclassement



Il ressort d'un document « accord de méthode » négocié entre la société GE Hydro France et les représentants des salariés, et constitué de deux volets, l'un du 23 mai 2013, l'autre du 19 juillet 2013, qu'a été organisé en concertation le reclassement d'un maximum de collaborateurs, avec une mise en place de moyens de reclassement par anticipation après consultation des représentants du personnel durant un délai de 8 mois au cours duquel la société GE Hydro France s'est engagée à ne pas notifier de licenciements économiques .



Mme [P] a été destinataire de trois propositions de reclassement qu'elle a refusées :



- un poste de « Business Opération Controller » offert par courrier du 25 juin 2013 avec un lieu de travail inchangé, un salaire brut annuel de 56 000 euros sur 13 mois et un variable de 6% représentant une augmentation de salaire de près de 6 000 euros par an. Poste refusé par courrier le 1er juillet 2013,

- un poste de « Project Controller » à [Localité 7] proposé par courrier du 8 juillet 2013, poste également refusé,

- un poste de « Corporate Controller » proposé par courrier du 2 octobre 2013 basé à [Localité 8], avec un salaire de 58 000 euros sur 13 mois, position II indice 120. Poste refusé par courrier du 11 octobre 2013.



Mme [P], dans le questionnaire de mobilité, a expressément refusé toute mobilité.



Le plan de reclassement mis en place au sein de la société GE Hydro France prévoyait que la cellule RH de reclassement devait interroger de manière régulière l'ensemble des filiales du groupe Alstom afin d'identifier les postes vacants et de présenter les postes réservés en interne (PRI) aux salariés concernés, lesdits postes devant en outre être publiés dans l'intranet de la branche «Hydro» de la société GE Hydro France à [Localité 8].



Mme [P] soutient que des postes disponibles n'ont pas été ouverts au reclassement et que les postes publiés sur l'intranet n'étaient que de l'affichage dès lors que certains salariés n'ont jamais reçu de réponse. Elle indique n'avoir eu qu'un entretien avec son référent RH de la cellule de reclassement et que la seule offre de reclassement qui lui aurait été faite serait celle d'un transfert à [Localité 7] qu'elle a refusé.



En réplique, la société GE Hydro France produit devant la cour des impressions écran du portefeuille «PRI» comportant une liste de postes régulièrement mise à jour et soutient que l'accord de méthode précité prévoyait de conserver pendant 2 mois les postes « PRI » afin d'assurer un déroulement normal du processus de reclassement, disposition confirmée par la direction de la société GE Hydro France dans un mail du 15 octobre 2013 adressé à un salarié concerné par le reclassement.



Sur ce,



En application de l'article L. 1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou à défaut et sous réserve de l'accord exprès du salarié sur un emploi d'une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.



Il est relevé aux termes des dispositifs issus de l'accord de méthode conclu le 23 mai 2013 et du second volet conclu le 19 juillet 2013, qu'un important dispositif a été instauré au niveau de la société GE Hydro France, afin de permettre le reclassement d'un maximum de collaborateurs visés par le projet de licenciement collectif pour motif économique.



Il est constaté que ce dispositif comporte deux volets :

- un premier dispositif envisagé par anticipation, conformément aux dispositions de l'article L. 1233-21 du code du travail permettant dans sa rédaction alors en vigueur, la mise en place de moyens de reclassement par anticipation.

- un second dispositif devenu pérenne à la suite d'une consultation des instances représentatives du personnel, pendant une durée globale garantie de 8 mois.



Il est ainsi établi que le périmètre des recherches de reclassement n'a pas été circonscrit au secteur d'activité dont relève la société GE Hydro France mais a été étendu à l'intégralité des entités appartenant au groupe ALSTOM, et cela, quel que soit son domaine d'intervention.



En outre, il ressort des pièces du débat qu'une cellule RH de reclassement composée de 6 personnes a, dans ce cadre, été instituée en charge de piloter la démarche de reclassement par anticipation issue de l'accord du 23 mai 2013 puis les recherches postérieures aux avis des instances représentatives du personnel recueillis en date des 16, 18 et 19 juillet 2013.



Cette cellule de reclassement a identifié les solutions de reclassement parmi les postes vacants et a recensé chaque semaine l'intégralité des postes vacants au sein du Groupe ALSTOM en alimentant à ce titre un portefeuille de postes « PRI » instaurés spécifiquement pour cette réorganisation, avec pour objectif de compléter l'ensemble des solutions de reclassement identifiées lors de la présentation du plan de reclassement et présentées aux instances (Article 4.1.1 a) du Plan de sauvegarde de l'emploi du 7 juin 2013).



Il est constaté que les postes « PRI » correspondaient aux postes réservés en interne pour permettre aux collaborateurs visés par une mesure de licenciement économique de bénéficier d'une solution de reclassement et étaient dans ce cadre identifiés au regard des compétences des salariés concernés en envisageant si nécessaire une formation d'adaptation, conformément aux dispositions des accords conclus avec les organisations syndicales. (Article 1.1.2 c) de l'accord de méthode du 23 mai 2013 et article 1.2 c) de l'accord de méthode en date du 19 juillet 2013).



Le portefeuille de postes « PRI », consultable dans l'intranet, était mis à jour pour la parfaite information des salariés, comme en témoignent les captures d'écran produites aux débats.



Il est relevé que cette actualisation intranet a été complétée d'un envoi par courrier électronique aux salariés concernés.



Les postes « PRI », une fois identifiés, ont ensuite été conservés dans le portefeuille pendant un délai de 2 mois destiné à assurer le bon déroulement du processus de reclassement des salariés concernés et ce n'est qu'à l'expiration de ce délai que les postes n'ont plus été considérés comme «réservés » et sont sortis du portefeuille « PRI » sauf acceptation d'un poste PRI par un salarié.



S'agissant du reclassement hors du territoire national, il est établi par les pièces produites qu'un questionnaire recensant l'ensemble des implantations géographiques du Groupe ALSTOM, hors du territoire national a été adressé aux salariés concernés afin de recueillir leurs souhaits.



L'identification des solutions de reclassement à l'international a été élaborée en fonction de la volonté des collaborateurs de recevoir ou non des offres hors du territoire national.



Il résulte de ces constatations que la société GE Hydro France a mis en oeuvre d'importants moyens pour trouver une solution de reclassement à l'ensemble des salariés du site de [Localité 8].



Elle a dans ce cadre procédé à des recherches individualisées de solutions de reclassement avec loyauté, en mettant en place une cellule dédiée composée de six collaborateurs mobilisés à cet effet.



Mme [P] formule deux critiques, l'une portant sur la démarche « PRI », l'autre relative aux diligences de recherches de reclassement effectuées par la cellule RH de reclassement interne.



Elle reproche en substance à la société GE Hydro France de ne pas avoir identifié l'ensemble des postes vacants au sein du Groupe, gelé pour le personnel d'Hydro [Localité 8] les postes vacants et listé dans l'intranet les postes ouverts à l'international.



La Cour relève cependant que Mme [P] ne démontre pas en quoi la société GE Hydro France n'aurait pas identifié la totalité des postes vacants pouvant entrer dans le champ du « PRI », et ce alors même que l'intégralité des postes vacants au sein du Groupe n'avait nullement vocation à figurer dans le portefeuille « PRI » qui ne devait contenir que les postes susceptibles de permettre le reclassement des salariés concernés et des postes adaptés à leurs compétences spécifiques.



Il est également relevé que Mme [P] ne fait pas la démonstration selon laquelle les postes « PRI » n'auraient pas été « réservés au seul personnel du site de [Localité 8] » alors même qu'est produit aux débats un message électronique concernant une salariée Mme [F] [P], adressé par l'employeur le 15 octobre 2013 aux termes duquel il lui était bien précisé que les postes proposés dans le cadre du « PRI » étaient conservés prioritairement pour les salariés de [Localité 8] avant d'être « relâchés » au profit d'autres candidats.



Il est rappelé que la mise en place d'accord de méthode et d'un plan de sauvegarde de l'emploi prévoyant des mesures collectives de reclassement ne dispense pas l'employeur de rechercher de façon individuelle et personnalisée des postes de reclassement aux salariés dont le licenciement est envisagé.



La proposition d'une modification du contrat de travail que le salarié peut toujours refuser ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement et celui-ci est tenu de proposer au salarié dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou à défaut d'une catégorie inférieure, sans pouvoir limiter ses offres en fonction de la volonté présumée de l'intéressé de les refuser.



Les possibilités de reclassement doivent être recherchées au sein de l'entreprise et si celle-ci appartient à un groupe, c'est dans le cadre du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu de travail permettent la permutation de tout ou partie du personnel qu'il faut se placer.



C'est à l'employeur de démontrer qu'il s'est acquitté de son obligation de reclassement, laquelle est de moyens. Le manquement par l'employeur à son obligation de reclassement préalable au licenciement prive celui-ci de cause réelle et sérieuse.



S'agissant des recherches individualisées menées par la cellule RH de reclassement, Mme [P] prétend qu'aucune recherche individualisée n'aurait été menée.



La cour relève toutefois s'agissant de sa situation personnelle, que Mme [P] a pu bénéficier de recherches individualisées ayant abouti à trois propositions de reclassement qu'elle a refusées, un poste de « Business Opération Controller » avec un lieu de travail inchangé, un poste de « Project Controller » à [Localité 7] et un poste de « Corporate Controller » basé à [Localité 8].



Les trois propositions de reclassement individualisées faites par l'employeur à la salariée font dès lors échec à caractériser un manquement de la société GE Hydro France dans l'exécution de son obligation de recherche individualisée de reclassement.



Il se déduit de tout ce qui précède que le plan de sauvegarde de l'emploi mis en 'uvre par la société GE Hydro France ne demeure insuffisant ni dans son contenu, ni dans ses modalités et que les organisations syndicales, pleinement associées au processus de reclassement ont négocié un accord d'anticipation ainsi qu'un accord de méthode portant sur les mesures de reclassement, qui ont au contraire permis d'aboutir au reclassement d'au moins 53 collaborateurs.



En outre, Mme [P] a pu bénéficier de recherches individualisées ayant abouti à trois offres de reclassement refusées.



Mme [P] sera par conséquent déboutée de l'intégralité de ses demandes portant sur une prétendue insuffisance du plan de reclassement et manquements de l'employeur à son obligation de reclassement.



2- Sur le licenciement économique



Mme [P] fait valoir en substance que son poste a été, en réalité, supprimé et non transféré sur le site de [Localité 7] et que le motif économique n'est pas sérieux ; qu'il ne lui a été proposé au titre du reclassement que son poste qui était « transféré » sur [Localité 7], alors que son employeur fait partie du groupe ALSTOM qui dispose de plusieurs entités en France et qu'elle a identifié plusieurs postes pourvus dans les ressources humaines du groupe durant la période de mise en oeuvre de la réorganisation et non inclus dans le plan de reclassement interne prévu au PSE, qui ne lui ont pas été proposés et qui correspondaient pourtant à son profil.



En réplique, la société rappelle en premier lieu qu'elle a organisé un important dispositif avec l'accord de méthode du 23 mai 2013 qui permettait la mise en place de moyens de reclassement par anticipation avant le terme de la procédure d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel et celui du 19 juillet 2013 qui a pérennisé le dispositif postérieurement à cette consultation et que le licenciement économique demeure justifié par les pièces comptables qu'elle produit.









Sur ce,



Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emplois consécutive à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.



Mme [P] conteste la réalité économique de son licenciement au motif qu'elle considère que la réorganisation envisagée n'avait d'autres buts que la suppression pure et simple des postes proposés à [Localité 7] après que les salariés concernés aient refusé leur transfert dans cette ville.



La cour retient que la société GE Hydro France démontre que la branche Hydro du groupe, au niveau mondial, est confrontée à une baisse générale du marché et un renforcement de la concurrence et que cette situation a été relevée par l'expert-comptable du Comité Central d'Entreprise .



Il est établi par les chiffres présentés par la société GE Hydro France que les prises de commandes de la branche Hydro ont chuté depuis 2009 diminuant de plus de 60% entre 2009 et 2013 et que les résultats d'exploitation ont présenté des pertes conséquentes au cours de cette période.



Il ressort encore de l'examen des rapports effectués par deux cabinets d'expertises SECAFI et SYNDEX, que tous les chiffres présentés par la société GE Hydro France, ont été validés.



Par ailleurs, la société GE Hydro France produit le livre d'entrées et de sorties du personnel du site de [Localité 7] qui permet à la cour de constater que sur la période 2013-2014 il y a eu plus d'entrées que de sorties et que s'il y a bien eu 27 postes supprimés c'est le résultat du refus de salariés d'accepter leur transfert à [Localité 7].



Mme [P], prétend qu'aucun des membres du Comité de direction de la Société ALSTOM HYDRO n'aurait rejoint le site de [Localité 7], ce qui constituerait selon elle la preuve de suppressions de postes déguisées.



Or, il résulte pourtant des pièces produites que M. [V] membre du comité de direction a été remplacé sur son poste de General Manager au sein de l'entreprise à [Localité 8] par Mme [Z] [A] basée à [Localité 7]. Une note d'organisation produite aux débats confirme cette réalité. 



M. [S] [K], Vice- Président Ressources Humaines Europe et autre membre du comité de direction, ayant refusé le transfert de son poste à [Localité 7] a été licencié dans le cadre du PSE par courrier en date du 16 décembre 2013 mais a été remplacé dans ses fonctions, à [Localité 7] par M. [L] [J] tel que cela résulte d'une lettre de nomination produite aux débats.



Mme [G] [N], Directrice qualité, et membre à ce titre du comité de direction a été promue au niveau monde et a été remplacée sur son poste de [Localité 8] supprimé, par M. [S] [I] sur le site de [Localité 7], tel que cela ressort de sa nomination du 7 octobre 2013.



M. [U] [W], directeur Général opérations basé à [Localité 7], membre du comité de direction a été promu fin décembre 2013 et a été remplacé par M. [R] [Y] à [Localité 7] tel que cela est encore établi par sa lettre de nomination versée aux débats.



Les pièces ainsi produites suffisent à démontrer que plusieurs membres du comité de direction ont vu leurs postes transférés sur le site de [Localité 7] ce qui ne permet pas d'établir l'existence de suppressions de postes déguisées comme le soutient Mme [P].



La cour après avoir examiné l'ensemble des pièces présentées au débat en déduit que le licenciement pour motif économique de Mme [P] est fondé sur une cause réelle et sérieuse et la déboute de l'ensemble de ses demandes indemnitaires subséquentes.



3- Sur le non-respect des critères d'ordre du licenciement



Aux termes de l'article L. 1233-5 du Code du Travail, l'application des critères d'ordre des licenciements doit s'étendre à l'ensemble des salariés de l'entreprise occupant un emploi appartenant à la même catégorie professionnelle que le poste supprimé.



Mme [P] prétend avoir subi un préjudice du fait de la perte injustifiée de son emploi et que la société GE Hydro France aurait dû respecter des critères d'ordre du licenciement à son égard.



Or, il est relevé que l'ensemble des salariés concernés par le transfert de leur poste de travail à [Localité 7] ont été destinataires d'une proposition de modification de leur contrat de travail pour motif économique.



L'ensemble des refus enregistrés a alors conduit l'employeur à mettre en 'uvre une procédure de licenciements collectifs pour motif économique.



Cette procédure est ainsi consécutive non pas à des suppressions de poste mais à des refus de modification du contrat de travail, et n'a donc pas nécessité la mise en 'uvre des critères d'ordre de licenciement dès lors que la modification du contrat de a été proposée à tous les salariés et que les licenciements ont concerné tous ceux qui l'ont refusée.



Mme [P] ne fait pas davantage la démonstration de ce que son poste aurait été en réalité supprimé. Elle sera déboutée de ce chef de demande.



4- Sur les cotisations mutuelle et prévoyance irrégulièrement retenues pendant le préavis



Mme [P] soutient que la société GE Hydro France n'aurait pas respecté ses obligations de maintien de la couverture mutuelle et prévoyance et sollicite de la Cour la condamnation de la société GE Hydro France au paiement de 145, 50 euros.



Elle affirme que les cotisations salariales au titre des frais de santé et de la prévoyance auraient dû intégralement être prises en charge par la société GE Hydro France pendant toute la durée du congé de reclassement, en ce compris le préavis.



Or, il ressort de l'article 4.2.2.3 du plan de sauvegarde de l'emploi du 7 juin 2013, que les cotisations ne doivent être intégralement prises en charge par la société GE Hydro France que pour la période excédant le préavis.



A l'occasion d'une réunion extraordinaire du Comité Central d'Entreprise du 20 février 2014, la direction de la société GE Hydro France a rappelé cette règle en ces termes :



« (...) la mutuelle est prise en charge par l'employeur à 100% pendant le congé de reclassement ; ce n'est en revanche pas le cas pendant la période de préavis, pendant laquelle la prise en charge est répartie à 60/40, comme pour tous les autres salariés. La prise en charge à 100% vise à compenser la baisse de rémunération pendant le congé de reclassement ».



L'ensemble de ces éléments conduit la cour à écarter les demandes formulées par Mme [P] et le jugement déféré sera infirmé sur ce point.



5- Sur les demandes accessoires



Mme [P] qui succombe supportera les entiers dépens et sera déboutée de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile.



Il ne serait pas équitable de laisser à la charge de la société GE Hydro France les frais irrépétibles engagés dans la présente instance. Mme [P] sera condamnée à lui payer la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS,



La COUR,



Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,



CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré, sauf en qui concerne le paiement des cotisations mutuelle et prévoyance durant la durée du préavis.



L'INFIRMANT sur ce point :



DÉBOUTE Mme [F] [P] de sa demande de paiement de la somme de 145,50 euros au titre du maintien de la couverture mutuelle et prévoyance durant son préavis,



Y ajoutant :



CONDAMNE Mme [F] [P] à payer à la société GE Hydro la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,



CONDAMNE Mme [F] [P] aux dépens de première instance et d'appel.



- Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- Signé par Madame Maryse LESAULT, Présidente et par Madame Carine DJELLAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





LE GREFFIER,LA PRÉSIDENTE,

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