20 janvier 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-40.041

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2016:C100124

Texte de la décision

CIV. 1

COUR DE CASSATION



JL


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 20 janvier 2016




NON-LIEU A RENVOI


Mme BATUT, président



Arrêt n° 124 F-D

Affaire n° G 15-40.041





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la décision rendue le 19 octobre 2015 par le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Grenoble, transmettant à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité, reçue à la Cour de cassation le 26 octobre 2015, dans l'instance mettant en cause :

D'une part,

M. [H] [I], domicilié [Adresse 1],

D'autre part,

le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Grenoble, domicilié [Adresse 2],

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 19 janvier 2016, où étaient présents : Mme Batut, président, Mme Wallon, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, MM. Delmas-Goyon, Girardet, Mmes Verdun, Ladant, Duval-Arnould, M. Truchot, Mme Teiller, M. Avel, conseillers, Mme Canas, M. Vitse, Mmes Barel, Le Gall, Kloda, conseillers référendaires, M. Drouet, avocat général, Mme Laumône, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Wallon, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [I], de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, avocat du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Grenoble, l'avis de M. Drouet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Attendu que le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Grenoble a cité M. [I], faisant l'objet d'une poursuite disciplinaire, à comparaître devant le conseil de l'ordre en vue d'une éventuelle suspension provisoire de ses fonctions d'avocat ;

Attendu que la question transmise se trouve ainsi rédigée :

L'article 24 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 porte-t-il atteinte à l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi garanti par les articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, au principe de légalité des délits et des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, aux principes de respect des droits de la défense et de libre choix de l'avocat garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et à la présomption d'innocence garantie par l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ?

Attendu que la disposition critiquée, régissant la suspension provisoire des fonctions dont un avocat pénalement ou disciplinairement poursuivi peut faire l'objet quand l'urgence ou la protection du public l'exigent, est applicable au litige ; que cette disposition n'a pas été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs ou le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu, d'abord, que la question posée, ne portant pas sur l'interprétation de normes constitutionnelles dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Attendu, ensuite, que la question ne présente pas un caractère sérieux ; qu'en effet, d'une part, la suspension provisoire n'est pas une sanction mais une mesure de sûreté conservatoire, d'une durée limitée à celle des actions pénale ou disciplinaire engagées contre l'avocat, dont le prononcé ne suppose pas qu'il soit pris parti sur l'imputabilité d'une quelconque faute pénale ou disciplinaire de l'avocat et que le juge peut prononcer lorsque l'urgence ou la protection du public l'exigent, sans porter atteinte ni à la présomption d'innocence, ni aux droits de la défense et au libre choix de l'avocat, lequel est nécessairement limité aux avocats autorisés à exercer, s'agissant d'une profession réglementée, ni au droit à un recours effectif, qui n'implique pas, à lui seul, que toute voie de recours soit suspensive d'exécution ; que, d'autre part, la méconnaissance de l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi, qui impose d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques, ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité, de sorte que le grief tiré de la méconnaissance de cet objectif n'est pas recevable ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille seize.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.