22 mars 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-40.001

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2017:SO00757

Texte de la décision

SOC.

COUR DE CASSATION



LM


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 22 mars 2017




NON-LIEU A RENVOI


M. FROUIN, président



Arrêt n° 757 F-D

Affaire n° F 17-40.001





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu le jugement rendu le 3 janvier 2017 par le conseil de prud'hommes de Valenciennes, transmettant à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 10 janvier 2017, dans l'instance mettant en cause :

D'une part,

la société Clinique Saint Roch, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

D'autre part,

Mme [K] [M], domiciliée [Adresse 2] ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 21 mars 2017, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Basset, conseiller rapporteur, M. Déglise, conseiller, M. Weissmann, avocat général référendaire, Mme Becker, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Basset, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Clinique Saint Roch, l'avis de M. Weissmann, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Attendu que Mme [M], délégué du personnel, a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de réparation du préjudice subi du fait de son licenciement notifié sans qu'une autorisation administrative ait été demandée ; que la société Clinique Saint Roch a, par mémoire distinct et motivé, soulevé deux questions prioritaires de constitutionnalité :

Attendu que la première question transmise est ainsi rédigée :

Les dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail combinées à l'article L. 1235-3 du code du travail, telles qu'interprétées de manière constante par la Cour de cassation, sont-elles contraires à l'article 34 de la Constitution et aux articles 5 et 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en ce qu'elles impliquent que le licenciement, sans autorisation de licenciement, d'un salarié représentant du personnel est nul et conduit à l'octroi de dommages-intérêts pour licenciement nul d'un minimum de six mois de salaires (selon l'article L. 1235-3 du code du travail), et ce alors qu'aucune disposition législative ne prévoit la possibilité pour le salarié de solliciter une telle condamnation contrairement aux dispositions légales applicables aux femmes enceintes prévoyant explicitement cette faculté (article L. 1225-71 du code du travail) ?

Mais attendu que seules sont applicables au litige les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail ; qu'elles ont déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif des décisions n° 2007-561 rendue le 17 janvier 2008 et n° 2016-582 rendue le 13 octobre 2016 par le Conseil constitutionnel ; qu'aucun changement de circonstances de droit ou de fait n'est depuis intervenu qui, affectant la portée de la disposition législative critiquée, en justifierait le réexamen ;

Qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;

Attendu que la seconde question transmise est ainsi rédigée :

Les dispositions de l'article L. 2411-5 du code du travail, telles qu'interprétées de manière constante par la Cour de cassation, sont-elles contraires au principe d'égalité de traitement, droit garanti par la Constitution, et à la liberté d'entreprendre, en ce qu'elles impliquent que, lorsqu'un salarié représentant du personnel est licencié sans autorisation de licenciement, la rupture produit les effets d'un licenciement nul (pour violation du statut protecteur) avec comme conséquence le paiement des rémunérations pendant la période de protection alors que d'autres salariés bénéficiant d'une protection spécifique (les salariés victimes d'accident du travail et de maladie professionnelle) ne bénéficient pas du versement des rémunérations pendant la période de protection et que cette disposition crée une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre ?

Attendu que les dispositions législatives critiquées sont applicables au litige ; qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, la question n'est pas nouvelle ;

Et attendu que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; que la question n'est pas sérieuse en ce que, d'abord, le salarié investi d'un mandat représentatif du personnel n'est pas dans la même situation que le salarié dont le contrat de travail est suspendu par suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle et en ce que, ensuite, les dispositions critiquées, telles qu'interprétées, ont pour objet d'assurer l'effectivité du principe de participation instauré par l'alinéa 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 en garantissant l'indemnisation du préjudice subi du fait d'un licenciement sans autorisation administrative, sans porter une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU À RENVOYER au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille dix-sept.

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