27 septembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-18.855

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2017:CO10388

Texte de la décision

COMM.

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 septembre 2017




Rejet non spécialement motivé


Mme MOUILLARD, président



Décision n° 10388 F

Pourvoi n° A 16-18.855







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par :

1°/ Mme Isabelle X..., domiciliée [...]                         ,

2°/ la société Jeanis, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...]                              ,

contre l'arrêt rendu le 8 mars 2016 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige les opposant à la société Emi accessoires mode, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...]                         ,

défenderesse à la cassation ;


Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 4 juillet 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Laporte, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, M. Debacq, avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de Mme X... et de la société Jeanis, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Emi accessoires mode ;

Sur le rapport de Mme Laporte, conseiller, l'avis de M. Debacq, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... et la société Jeanis aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Emi accessoires mode la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour Mme X... et la société Jeanis

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnité compensatrice formée par Madame X... en application de l'article L.134-12 du code de commerce,

AUX MOTIFS QUE :

« (
) en vertu des dispositions de l'article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ;

Que, par acte sous-seing privé du 13 août 1999, la SARL EMI ACCESSOIRES MODE a confié à la SARL JEANIS représentée par son gérant Monsieur Jean X... un mandat d'agent commercial à destination d'une clientèle limitée aux grandes et moyennes surfaces sur la région Franche-Comté, la Côte d'Or et la Saône et Loire ;

Que, conformément d'ailleurs aux dispositions de l'article L.134-13-3 du code de commerce, ce contrat d'agent commercial stipule en son article 11 que « étant conclu intuitu personae, tout changement dans la structure juridique de l'agent et tout projet de cession du contrat doit être soumis à l'agrément du mandant au plus tard un mois avant la survenance, soit du changement de structure juridique, soit de la cession projetée. Le non respect de cette obligation sera assimilé à une faute grave ouvrant droit à résiliation légitime du mandant » ;

Qu'en l'espèce, Madame Isabelle X... sollicite, sur le fondement de l'article L.134-12 du même code, la condamnation de la SARL EMI ACCESSOIRES MODE à lui régler une indemnité de fin de mandat d'agent général d'un montant de 24.262,31 € après en avoir fait vainement la demande par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 9 juin 2011 ;

Que si ce texte octroie en effet à l'agent commercial le droit de percevoir une indemnité compensatrice sous certaines conditions en cas de cessation de ses relations avec le mandant, encore faut-il que Madame Isabelle X... soit en mesure de justifier de sa qualité d'agent commercial contractuellement lié avec la SARL EMI ACCESSOIRES MODE ;

Que pas plus que devant les premiers juges, l'intéressée ne démontre cependant avoir signé avec l'intimée un tel contrat à titre personnel ; Qu'elle tente vainement de soutenir que le mandat lui aurait été confié par son père, Monsieur Jean X..., lors de son départ en retraite alors même que l'existence d'un contrat d'agent commercial entre celui-ci et la SARL EMI ACCESSOIRES MODE n'est pas démontrée et, qu'en tout état de cause, aucun agrément préalable à une cession de mandat au profit de Madame Isabelle X... n'a été sollicité ni obtenu de la part du mandant ;

Qu'en outre, elle ne peut sérieusement affirmer que la correspondance adressée le 23 août 2011 par la SARL EMI ACCESSOIRES MODE au responsable textile de la société INTER-MARCHE informant celui-ci que «l'agence SOMP
reprend l'activité de Madame Isabelle X... » suffirait à apporter la preuve de l'existence d'un tel contrat liant les parties, étant précisé qu'il n'est pas contestable que l'intéressée est salariée au sein de la société ;

(
) Que la cour relève d'ailleurs qu'il n'est produit que l'extrait, à jour au 13 octobre 2015, de l'immatriculation de la SARL JEANIS au registre spécial des agents commerciaux prescrit par l'article R.134-6 du code de commerce et non pas celui de Madame Isabelle X..., en dépit de l'invitation expresse faite par les premiers juges dans leur décision avant-dire droit du 2 décembre 2013 ; Que, si elle allègue l'existence d'un sous-mandat, elle n'établit nullement la véracité de ses dires, lequel ne serait en tout état de cause pas opérant en l'absence d'agrément du mandant ; Qu'enfin, les factures de commissions transmises à l'intimée sont bien établies à l'entête de la SARL JEANIS et non pas de Madame Isabelle X... ès-qualités d'agent commercial ;

Qu'il résulte des développements qui précèdent que le jugement déféré devra être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnité compensatrice formée par Madame A...             en application de l'article L.134-12 précité » ;

1- ALORS QUE l'article L.134-1 du code de commerce ne subordonne pas l'application du statut d'agent commercial à l'inscription sur le registre spécial, qui est une mesure de police professionnelle ; Qu'en retenant notamment, pour débouter Madame X... de sa demande en paiement de l'indemnité compensatrice, que cette dernière n'a pas produit l'extrait de son immatriculation au registre spécial des agents commerciaux, la cour d'appel a violé l'article L.134-1 du code de commerce en lui ajoutant une exigence qu'il ne comporte pas ;



2- ALORS QUE, dans leurs conclusions d'appel (prod.2 p.3 in fine et p.4) Madame X... et la SARL JEANIS ne se prévalaient pas seulement du courrier du 23 août 2011 de la société intimée pour conclure que Madame X... était la titulaire du mandat d'agent commercial ; Qu'elles invoquaient également le fait que les correspondances après le départ en retraite de Monsieur X... émanant de la SARL EMI faisaient état de Madame X... comme agent commercial ; Qu'en énonçant que Madame X... ne peut sérieusement affirmer que la correspondance adressée le 23 août 2011 par la SARL EMI au responsable textile de la société INTERMARCHE suffirait à apporter la preuve de l'existence d'un tel contrat liant les parties, la cour d'appel a méconnu les termes du litige tels que résultant des conclusions des appelantes ; Que, ce faisant, elle a violé l'article 4 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir débouté Madame X... et la SARL JEANIS de leurs demandes subsidiaires en paiement à la SARL JEANIS de l'indemnité compensatrice de fin de contrat et de 50.000 € de dommages-intérêts en réparation de la faute grave commise par la SARL EMI,

AUX MOTIFS QUE :

« (
) les appelantes soutiennent à titre subsidiaire qu'alors que le contrat d'agent commercial consenti à la SARL JEANIS étant exclusif, la SARL EMI ACCESSOIRES MODE a com-mis une faute grave en recourant à un nouvel agent sans rompre les relations commerciales par lettre recommandée avec avis de réception et en déduisent que la résiliation de celui-ci doit être prononcée aux torts du mandant à la date de l'arrêt à intervenir ;

Que cependant, la SARL EMI ACCESSOIRES MODE rétorque à bon droit que le contrat a été rompu à l'initiative conjointe des deux appelantes par la lettre recommandée avec avis de réception expédiée par leur conseil le 9 juin 2011 ; Que cela ressort en effet clairement de cette correspondance qui précise qu'en raison de la maladie affectant Madame Isabelle X..., «malgré tous les efforts déployés et une intervention chirurgicale lourde, il ne lui est plus possible d'envisager dans ces circonstances douloureuses la poursuite de son activité » ; Que la notification expresse d'une demande de versement de l'indemnité compensatrice vient par ailleurs confirmer que la SARL JEANIS a entendu mettre un terme au contrat d'agent commercial liant les parties du fait de la maladie de sa salariée ;

Que par courrier en réponse du 26 juillet 2011, l'intimée a d'ailleurs expressément rappelé, par la voie de son conseil, à la SARL JEANIS que son contrat la liait exclusivement à elle et non à Madame Isabelle X... et lui a demandé confirmation de son intention de rompre le contrat conformément à la notification précitée ;

(
) Que, selon l'article L.134-13 du code de commerce, l'indemnité compensatrice n'est pas due lorsque la cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent, à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;

Qu'aucun grief imputable au mandant n'est invoqué en la cause à la date du 9 juin 2011, la rupture du contrat étant exclusivement motivée par la SARL JEANIS par la maladie grave de sa salariée ; Que par ailleurs, les circonstances dues à l'âge, l'infirmité et la maladie prévues au texte susvisé sont celles concernant l'agent commercial lui-même et non l'un de ses salariés comme c'est le cas en l'espèce ;

Qu'il s'ensuit qu'ayant été à l'initiative de la rupture des relations contractuelles dans les conditions rappelées ci-avant, la SARL JEANIS n'est pas légitime à solliciter pour elle-même, à titre subsidiaire, l'allocation d'une indemnité de fin de mandat ; Qu'elle sera donc déboutée de cette prétention subsidiaire, nouvelle à hauteur de cour ;

(
) Que la SARL JEANIS ayant implicitement invoqué un cas de force majeure pour notifier à son mandant la résiliation du contrat d'agent commercial (en l'occurrence la grave maladie de sa salariée), il doit être retenu qu'en exécution de l'article 9 in fine, le contrat s'est trouvé résilié après un préavis de quinze jours et qu'elle n'était pas tenue par le préavis de trois mois invoqué ; Qu'il s'ensuit que le recours à un autre agent commercial postérieurement à l'expiration de ce préavis ne saurait lui être reprochée puisqu'intervenu alors que toute relation contractuelle avait cessé à l'initiative de l'agent ;

Que, surabondamment, même à supposer que le préavis de trois mois soit opposable à la SARL JEANIS, force est de relever que l'intimée déplore le délaissement de sa clientèle dès le 9 juin 2011 par son agent, en sorte que le recours à un nouvel agent commercial avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter de cette date ne saurait constituer une faute grave compte tenu de la propre faute de l'agent caractérisée par le non respect de ses obligations contractuelles jusqu'au terme du préavis ;

Qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de faute grave caractérisée imputable à la SARL EMI ACCESSOIRES MODE, qui a été contrainte de confier le démarchage de sa clientèle délaissée à un autre agent commercial, la résiliation ne saurait être prononcée aux torts de celle-ci, ce qu'autant qu'elle est déjà effective à l'initiative de son cocontractant ; Que la demande d'indemnisation à hauteur de 50.000 € formée à ce titre pour la première fois devant la cour doit donc être écartée » ;

1- ALORS QUE le juge, tenu de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur un moyen qu'il a relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à formuler leurs observations ; Que la lecture des conclusions d'appel de la SARL EMI (prod.3 p.15 et 16) permet de constater que cette dernière n'a jamais soutenu, bien au contraire, qu'en exécution de son article 9 in fine, le contrat d'agent commercial s'était trouvé résilié après un préavis de quinze jours au motif que la SARL JEANIS avait implicitement invoqué un cas de force majeure (la grave maladie de sa salariée) pour notifier la résiliation du contrat, de sorte qu'elle n'était pas tenue par le préavis de trois mois invoqué ; Qu'en relevant ce moyen d'office et sans inviter les parties à en débattre contradictoirement pour débouter la SARL JEANIS de sa demande d'indemnisation à hauteur de 50.000 €, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2- ALORS QUE les conventions doivent être exécutées de bonne foi et que toute obligation de faire ne résout en dommages-intérêts en cas d'inexécution de la part du débiteur, les dommages-intérêts n'étant dus que lorsque le débiteur est en demeure de remplir son obligation ; Que la SARL EMI ne pouvait donc légitimement mandater un nouvel agent commercial avant l'expiration du délai de préavis de trois mois pour pallier l'inexécution de ses obligations par sa cocontractante qu'autant qu'elle justifiait avoir vainement mis la SARL JEANIS en demeure de s'acquitter de ses obligations jusqu'à la fin du préavis ; Qu'en déboutant la SARL JEANIS de sa demande en paiement de dommages-intérêts en énonçant surabondamment, sans constater qu'il était justifié d'une telle mise en demeure restée sans effet, que « même à supposer que le préavis de trois mois soit opposable à la SARL JEANIS, force est de relever que l'intimée déplore le délaissement de sa clientèle dès le 9 juin 2011 par son agent, en sorte que le recours à un nouvel agent commercial avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter de cette date ne saurait constituer une faute grave compte tenu de la propre faute de l'agent caractérisée par le non respect de ses obligations contractuelles jusqu'au terme du préavis », la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134, 1142, 1146 et 1147 du code civil.

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