27 septembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-20.977

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2017:CO01254

Texte de la décision

COMM.

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 septembre 2017




Rejet


M. RÉMERY, conseiller doyen faisant fonction de président



Arrêt n° 1254 F-D

Pourvoi n° H 16-20.977






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par Mme Pascale Y..., domiciliée [...]                        ,

contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2015 par la cour d'appel de Nancy (chambre de l'exécution - JEX), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société CIC Est, société anonyme, anciennement dénommée Société nancéienne Varin Bernier, dont le siège est [...]                                               ,

2°/ à la société Banque européenne du crédit mutuel, société par actions simplifiée, anciennement dénommée Banque de l'économie, du commerce et de la monétique, dont le siège est [...]                            ,

3°/ au Trésor public, recette principale des impôts de Pont-à-Mousson, dont le siège est [...]                               ,

4°/ au Trésor public, trésorerie principale de Nancy, dont le siège est [...]                              ,

5°/ à la société Crédit national, société anonyme, dont le siège est [...]                                                         ,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 11 juillet 2017, où étaient présents : M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, M. Guérin, conseiller, M. Graveline, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Barbot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boulloche, avocat de Mme Y..., de Me Le Prado, avocat de la société CIC Est, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 14 septembre 2015), que Mme Y... a souscrit auprès d'établissements bancaires, parmi lesquels la société Banque de l'économie, du commerce et de la monétique, aux droits de laquelle vient la société Banque européenne du crédit mutuel (la BECM), et la Société nancéienne Varin-Bernier (la SNVB), un prêt garanti par une hypothèque ; que par un avenant du 14 décembre 2004, la société Pharmacie des prémontrés (la Pharmacie), en accord avec les prêteurs, s'est ajoutée à Mme Y... en qualité d'emprunteur ; que les 23 octobre et 19 novembre 1999, Mme Y..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de la Pharmacie, a conclu avec la BECM et la SNVB des protocoles d'accord transactionnels, homologués le 27 janvier 2000, portant sur le remboursement de la créance de chacun des établissements prêteurs ; que par un avenant du 28 février 2007, homologué le 4 septembre suivant, les modalités de remboursement de la créance de la BECM ont été réaménagées ; qu'un arrêt du 25 janvier 2012, devenu irrévocable, a prononcé la résolution des accords conclus en 1999 et 2007 entre la BECM et Mme Y... ; que le 24 mai 2012, la société Banque CIC Est (le CIC Est), venant aux droits de la SNVB, a fait délivrer à Mme Y... un commandement de payer valant saisie immobilière portant sur le bien hypothéqué en garantie du prêt initial, avant de l'assigner en vente forcée de son immeuble ; que la BECM et le Trésor public, créanciers inscrits, ont déclaré leurs créances dans le cadre de cette procédure ; que Mme Y... a contesté la validité du commandement, en arguant de ce que la créance invoquée par le CIC Est n'était pas exigible ;

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception de nullité du commandement de payer et de déclarer recevable et bien fondée la procédure de saisie immobilière engagée par le CIC Est alors, selon le moyen :

1°/ que la résiliation du protocole de règlement amiable des difficultés de l'entreprise homologué par le président du tribunal de commerce ne peut être prononcée que par le tribunal de commerce en cas d'inexécution des engagements résultant de l'accord ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que le protocole d'accord conclu entre Mme Y... et la SNVB le 23 octobre 1999 précisait, en son article 7 « résiliation du protocole : le présent protocole étant élaboré pour la restructuration financière globale de l'officine en commun accord entre les trois établissements financiers qui ont participé au financement à l'origine, à savoir la BECM, la SNVB et Natexis, la résiliation ou l'exigibilité anticipée de l'un quelconque des accords passés avec l'un des créanciers entraînera de plein droit la résiliation des autres protocoles » ; qu'elle en a déduit que puisque le protocole conclu avec la BECM avait été résolu, cela entraînait de plein droit la résiliation du protocole conclu avec la SNVB en application de l'article 7 précité ; qu'en statuant ainsi, quand le protocole conclu avec la SNVB n'aurait pu être résilié que par le tribunal de commerce en cas d'inexécution des engagements résultant dudit accord, la cour d'appel a violé les articles 1184 du code civil et L. 611-4 du code de commerce, dans sa version en vigueur du 21 septembre 2000 au 1er janvier 2006 ;

2°/ que l'autorité de la chose jugé suppose une identité de parties, de cause et d'objet ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la cour d'appel de Nancy avait, par arrêt du 25 janvier 2012, prononcé la résolution judiciaire du protocole signé entre Mme Y... et la BCEM le 23 octobre 1999, ce qui avait entraîné de plein droit la résiliation de celui signé le même jour entre Mme Y... et la SNVB ; qu'en statuant de la sorte, quand l'arrêt rendu entre Mme Y... et la BCEM n'avait pu produire d'effet sur le protocole conclu avec la SNVB, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, que, contrairement à ce que postule le moyen, la résolution d'un accord conclu en application de l'article L. 611-4 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises, peut intervenir de plein droit par l'effet d'une clause résolutoire insérée dans un tel accord ;

Et attendu, d'autre part, qu'ayant constaté que l'article 7 de l'accord de 1999 conclu avec la SNVB prévoyait que la résiliation ou l'exigibilité de l'un quelconque des accords passés, notamment, avec la BECM entraînerait de plein droit la résiliation des autres accords, la cour d'appel, en relevant que la résolution des accords conclus avec la BECM avait été prononcée par l'arrêt du 25 janvier 2012, pour en déduire que cette résolution avait eu pour effet d'entraîner de plein droit celle de l'accord de 1999 conclu avec la SNVB, s'est bornée à vérifier qu'étaient réunies les conditions d'acquisition de la clause résolutoire stipulée à l'article 7, qui devait produire ses effets dès lors que Mme Y... n'opposait aucun moyen pour faire échec à sa mise en oeuvre ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa troisième branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société CIC Est la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour Mme Y....

Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception de nullité du commandement de payer du 24 mai 2012 et déclaré que la procédure de saisie immobilière engagée par la banque CIC Est était recevable et bien fondée ;

Aux motifs que « Mme Pascale Y... soutient que la Sa CIC Est ne peut se prévaloir d'une créance exigible dans le cadre du commandement de payer, puisque seule la BECM a fait annuler les protocoles transactionnels la concernant par décision judiciaire ;

Que cependant, le protocole transactionnel signé le 23 octobre 1999 par Mme Pascale Y..., la Selca Pharmacie des Prémontrés et la SNVB précise en son article 7 « résiliation du protocole : le présent protocole étant élaboré pour la restructuration financière globale de l'officine en commun accord entre les trois établissements financiers qui ont participé au financement à l'origine, à savoir la BECM, la SNVB et Natexis, la résiliation ou l'exigibilité anticipée de l'un quelconque des accords passés avec l'un des créanciers entraînera de plein droit la résiliation des autres protocoles » ;
Qu'il est constant que Mme Pascale Y... et la Selca ont signé les mêmes protocoles le 23 octobre 1999 avec les deux autres banques créancières, la BECM et Natexis, les différences portant uniquement sur les montants empruntés ; que par arrêt du 25 janvier 2012, la cour d'appel de Nancy a prononcé la résolution judiciaire du protocole signé avec la BECM le 23 octobre 1999 ainsi que celui signé le 28 février 2007 ; qu'il s'ensuit que la résolution judiciaire du protocole de 1999 signé avec la BECM a entraîné de plein droit la résiliation du protocole signé le même jour avec la SNVB devenue la Sa CIC Est en application de l'article 7 dudit protocole ; que ce protocole étant résilié, la Sa CIC Est était en droit de se prévaloir du contrat de prêt initial signé devant notaire le 28 novembre 1994, qui constitue un titre exécutoire valide ; que le commandement de payer, qui détaille précisément les sommes dues en principal et intérêts, est fondé sur une créance liquide et exigible ; que la demande de nullité est rejetée ;
Qu'en conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme Pascale Y... de sa demande de nullité du commandement de payer, les autres moyens exposés devant le juge de l'exécution par l' appelante n' étant pas repris devant la cour » (arrêt, p. 6) ;

Et aux motifs, éventuellement adoptés du jugement, que « tant le crédit amortissable que le crédit in fine sont arrivés à échéance le 31 janvier 2012 ;
Attendu que Mademoiselle Y... ne justifie aucunement ni même n'allègue que les deux prêts auraient été entièrement soldés avant la délivrance du commandement de saisie immobilière, ou même postérieurement à celle-ci ;
Attendu que les deux prêts étant arrivés à échéance, la BANQUE CIC EST apparaît fondée à poursuivre en justice le recouvrement de sa créance ou toute voie d'exécution sans avoir à solliciter préalablement la résolution du protocole de 1999, lequel apparaît définitivement inexécuté depuis le 31 janvier 2012 » (jugement, p. 8) ;

Alors, d'une part, que la résiliation du protocole de règlement amiable des difficultés de l'entreprise homologué par le président du tribunal de commerce ne peut être prononcée que par le tribunal de commerce en cas d'inexécution des engagements résultant de l'accord ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que le protocole d'accord conclu entre Mme Y... et la SNVB le 23 octobre 1999 précisait, en son article 7 « résiliation du protocole : le présent protocole étant élaboré pour la restructuration financière globale de l'officine en commun accord entre les trois établissements financiers qui ont participé au financement à l'origine, à savoir la BECM, la SNVB et Natexis, la résiliation ou l'exigibilité anticipée de l'un quelconque des accords passés avec l'un des créanciers entraînera de plein droit la résiliation des autres protocoles » ; qu'elle en a déduit que puisque le protocole conclu avec la BECM avait été résolu, cela entraînait de plein droit la résiliation du protocole conclu avec la SNVB en application de l'article 7 précité ; qu'en statuant ainsi, quand le protocole conclu avec la SNVB n'aurait pu être résilié que par le tribunal de commerce en cas d'inexécution des engagements résultant dudit accord, la cour d'appel a violé les articles 1184 du code civil et L. 611-4 du code de commerce, dans sa version en vigueur du 21 septembre 2000 au 1er janvier 2006 ;

Alors, d'autre part, que l'autorité de la chose jugé suppose une identité de parties, de cause et d'objet ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la cour d'appel de Nancy avait, par arrêt du 25 janvier 2012, prononcé la résolution judiciaire du protocole signé entre Mme Y... et la BCEM le 23 octobre 1999, ce qui avait entraîné de plein droit la résiliation de celui signé le même jour entre Mme Y... et la SNVB ; qu'en statuant de la sorte, quand l'arrêt rendu entre Mme Y... et la BCEM n'avait pu produire d'effet sur le protocole conclu avec la SNVB, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;

Alors, enfin, que la mise en oeuvre d'une procédure de saisie immobilière nécessite un titre exécutoire constatant une créance certaine, liquide et exigible, laquelle fait défaut en cas d'accord homologué par le président du tribunal de commerce qui suspend toute action en justice et toute poursuite individuelle sur les meubles et les immeubles du débiteur tant qu'il n'est pas résolu par le tribunal de commerce ; qu'en l'espèce, les premiers juges avaient validé le commandement de payer délivré par la banque CIC Est en relevant que le protocole de 1999 apparaissait inexécuté depuis le 31 janvier 2012 et qu'il importait peu qu'il n'ait pas été résolu ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 311-2 du code des procédures civiles d'exécution, anciennement 2191 du code civil, et L. 611-4 du code de commerce dans sa version en vigueur du 21 septembre 2000 au 1er janvier 2006.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.