30 novembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-25.308

Troisième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2017:C301223

Texte de la décision

CIV.3

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 novembre 2017




Rejet


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 1223 F-D

Pourvoi n° Q 16-25.308







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. Hubert X..., domicilié [...]                           ,

contre l'arrêt rendu le 25 juillet 2016 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Asmo-Bax, société anonyme, dont le siège est [...]                                                               ,

2°/ à la société de l'Ecusson, société civile immobilière, dont le siège est [...]                               ,

défenderesses à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 24 octobre 2017, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Jacques, conseiller rapporteur, M. Jardel, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Jacques, conseiller, les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. X..., de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat des sociétés Asmo-Bax et de l'Ecusson, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 25 juillet 2016), que les sociétés de l'Ecusson et Asmobax ont confié à M. X..., architecte, selon contrat du 21 juillet 2006, une mission d'assistance à caractère administratif, financier et technique et comportant la sélection des opérateurs en vue, notamment, de rendre constructible un terrain et, selon contrat du 28 juillet 2006, une mission de maîtrise d'oeuvre complète en vue de la construction d'un atelier et de bureaux ; que, M. X... ayant assigné les sociétés en paiement d'honoraires, de l'indemnité de résiliation stipulée au contrat de maîtrise d'oeuvre et de dommages-intérêts, ces sociétés ont, reconventionnellement, demandé l'annulation des deux conventions et le paiement de dommages-intérêts ; que, le tribunal, après avoir dit valides ces conventions et condamné les sociétés à payer les honoraires afférents au contrat de maîtrise d'oeuvre, a sursis à statuer sur le surplus des demandes et, avant dire droit, ordonné une consultation ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de décider que les conventions ont été résiliées à bon droit à ses torts, de le dire débiteur de la somme de 35 012,40 euros à titre de dommages-intérêts et d'ordonner la compensation entre cette somme et la condamnation de même montant mise à la charge des sociétés de l'Ecusson et Asmobax ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que les sociétés de l'Ecusson et Asmobax, qui avaient formé un appel général, demandaient la réformation du jugement mixte en toutes ses dispositions, le rejet de toutes les demandes de M. X... et sa condamnation à des dommages-intérêts, en soutenant que les contrats avaient été résiliés à bon droit à ses torts, la cour d'appel, qui était saisie de conclusions de M. X... soutenant qu'il n'avait pas commis de faute, n'était pas tenue, avant de faire usage de son pouvoir d'évocation pour statuer sur la question de l'imputabilité de la rupture des relations contractuelles et de ses conséquences, d'inviter les parties à conclure sur ces points, dès lors que celles-ci avaient toutes deux déjà conclu au fond sur l'imputabilité de la rupture et que, en l'état des conclusions d'appel des sociétés de l'Ecusson et Asmobax, M. X... était en mesure de prendre parti sur ses conséquences ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que M. X... avait tenté d'imposer une clause prévoyant que l'opérateur retenu devrait lui confier une mission complète d'architecte pour une SHON d'au moins 25 000 m² et qu'il avait mentionné dans ce dossier avoir droit, en tant que titulaire d'un mandat d'exclusivité pour mener les négociations de vente du terrain, à une commission de négociation égale à 1,5 % du montant de la transaction, la cour d'appel, qui a retenu, sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, qu'en intégrant de telles clauses dans le dossier de consultation des promoteurs, M. X... avait trahi la confiance des sociétés de l'Ecusson et Asmobax en poursuivant un intérêt personnel contraire aux leurs, a légalement justifié sa décision en fixant souverainement, sans procéder à une évaluation forfaitaire, le préjudice subi par celles-ci du fait de la faute commise par l'architecte ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer aux sociétés de l'Ecusson et Asmobax, ensemble, la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que la convention d'assistance au maître d'ouvrage et le contrat d'architecte pour travaux neufs avaient été résiliés à bon droit aux torts de M. X..., que celui-ci était débiteur envers la SCI de l'Ecusson et la SA Asmo-Bax de la somme de 35.012,40 €, outre intérêts, à titre de dommages-intérêts, et d'avoir ordonné la compensation entre cette somme et la condamnation de même montant mise à la charge des sociétés au bénéfice de M. X...,

Aux motifs que « s'agissant du projet [...]             visé à la convention d'assistance à maîtrise d'ouvrage, la SCI de l'Ecusson et la SA Asmo-Bax critiquent les prestations réalisées par Monsieur Hubert X... à plusieurs titres.
D'une part, si l'intervention de l'architecte a permis de déclasser en zone UB2 constructible une partie de l'espace boisé classé et d'augmenter ainsi la surface de terrain constructible d'environ 1.800 m², cette première modification, présentée dans le cadre de l'enquête publique portant sur l'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune de Toulouse du 30 mai au 7 juillet 2005, était acquise lors de la signature de la convention qui en fait état dans son exposé préalable et l'architecte ne justifie pas que la deuxième modification escomptée, permettant de porter la SHON du projet de 20.000 m² à 30.000 m², soit intervenue en décembre 2006 comme prévu au calendrier prévisionnel, ainsi qu'il le prétend dans son courrier du 9 janvier 2007, ni ultérieurement, les extraits du plan local d'urbanisme versés aux débats ne révélant aucune réécriture de l'article 10 (UB2) qui aurait augmenté la hauteur maximale de construction autorisée de 15,50 m sur 5 niveaux (R+4) à 18,50 m en R+6.
Ayant déjà perçu une somme de 4.300 € selon note d'honoraires n°1 en date du 12 avril 2006 pour les négociations avec les services de l'urbanisme en vue d'obtenir au final une SHON de 30.000 m², il ne peut prétendre à aucun paiement complémentaire à ce titre, quand bien même il n'est pas comptable des délais d'instruction par les services de l'urbanisme.
D'autre part, le dossier de consultation des promoteurs adressé le 12 décembre 2006 par Monsieur Hubert X... à Madame Danièle Z... en deux exemplaires, dont l'un destiné à un responsable du Groupe Hoche, comporte des anomalies.
En effet, alors qu'il reconnaît dans ses conclusions que la clause insérée à l'article 4 de la convention, prévoyant que l'opérateur retenu lui confiera une mission complète d'architecte pour une SHON d'au moins 25.000 m², n'est pas opposable aux tiers, il n'en a pas moins tenté de l'imposer en intégrant à la partie "missions" de ce dossier, sur la base duquel devait s'opérer la sélection des promoteurs, un projet de contrat de maîtrise d'oeuvre d'exécution au profit de la S.E.L.A.R.L. d'architecture Martinie et de lui-même et en y spécifiant que ce contrat "sera complété et entériné lors de la signature du sous-seing privé entre le promoteur adjudicataire et la SCI de l'Ecusson" et "aura, au préalable, fait l'objet de précisions, concernant le montant provisoire des travaux", ce qui ne laisse guère le choix au promoteur retenu pour optimiser le projet, comme l'a souligné l'un de ceux consultés dans son fax du 21 décembre 2006.
Au surplus, il a précisé dans cette même partie qu'il "bénéficie d'un mandat d'exclusivité de la part de SCI de l'Ecusson, afin de mener à bien les négociations de la vente du terrain", que "ses honoraires sont de 1,5% (un et demi pour cent) du montant de la transaction" et que cette somme sera réglée intégralement lors de la signature de l'acte d'achat du foncier, alors qu'il ne justifie nullement de son allégation d'un accord verbal de Madame Danièle Z... sur une telle commission de négociation, augmentant d'autant le coût de l'opération et présentée par le promoteur susvisé comme peu conforme aux us et coutumes de sa profession.
Ce faisant, il a trahi la confiance de ses mandantes en poursuivant un intérêt personnel contraire aux leurs et la résiliation unilatérale pour fautes des deux contrats interdépendants, qui lui a été notifiée le 11 janvier 2007 par la S.C.I. de l'Ecusson et la S.A. Asmo-Bax, ne peut qu'être validée a posteriori sans qu'il soit besoin de recourir à une mesure d'instruction confiée à un technicien, consultant ou expert.
Il ne peut donc prétendre à l'indemnité de résiliation, fixée par l'article G 9.1 du cahier des clauses générales du contrat d'architecte à 20 % de la partie d'honoraires qui lui aurait été versée si sa mission n'avait pas été prématurément interrompue, mais prévue uniquement en cas de résiliation sur initiative du maître d'ouvrage qui ne justifierait pas du comportement fautif de l'architecte.
En outre, il s'expose au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à la SA Asmo-Bax et la SCI de l'Ecusson par l'interruption des deux projets [...]            et [...]    , préjudice qui, en l'absence d'éléments concrets sur les conditions financières et de délais auxquelles elles ont pu finalement mener à bien ces projets, sera estimé au montant d'honoraires dont elles sont redevables à son égard en principal et intérêts de retard, de sorte que, par compensation, leurs dettes respectives s'éteindront l'une l'autre et qu'aucune condamnation à paiement ne sera prononcée » (arrêt p. 5 à 7) ;

Alors que, d'une part, la cour d'appel qui entend évoquer doit mettre les parties en mesure de conclure sur le fond ; qu'en l'espèce, le tribunal de grande instance a sursis à statuer sur la demande de M. X... afférente au projet de la [...]    tendant à la condamnation des sociétés au paiement de la somme de 29 840,20 € TTC au titre des honoraires restant dus, et a ordonné une mesure d'instruction sur ce point ; que la cour d'appel, infirmant ce chef du jugement et évoquant, a jugé que les contrats, notamment celui relatif au projet de la [...]       , avaient été résiliés à bon droit aux torts de M. X... ; qu'en statuant ainsi, sans avoir mis les parties en demeure de conclure sur le fond, la cour d'appel a violé les articles 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 16 et 568 du code de procédure civile ;

Alors que, d'autre part, M. X... a soutenu, dans ses conclusions d'appel (p. 12 & 13), que la commission évoquée par la cour pour valider la résiliation du contrat à ses torts avait été déterminée dans le cadre de l'établissement du dossier de consultation en accord avec Mme Z..., laquelle ne pouvait donc valablement soutenir qu'elle aurait découvert ce point lors de la remise dudit dossier ; qu'il a ajouté que si cette commission avait été cachée, il suffisait à Mme Z... de lui demander de la supprimer du dossier de consultation ; qu'en prononçant la résiliation du contrat, sans répondre au moyen invoquant la possibilité de supprimer la clause du dossier de consultation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors qu'enfin, le juge doit justifier du quantum de la condamnation prononcée, laquelle ne peut être fixée forfaitairement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir relevé l'absence d'éléments concrets produits par les sociétés demanderesses, a condamné M. X... au paiement de dommages-intérêts équivalents au montant des honoraires dont elles étaient redevables envers lui ; qu'en statuant par ces seuls motifs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.

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