15 mai 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-17.790

Première chambre civile - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2018:C110295

Texte de la décision

CIV. 1

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 15 mai 2018




Rejet non spécialement motivé


Mme BATUT, président



Décision n° 10295 F

Pourvoi n° P 17-17.790







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par Mme Marylène X..., domiciliée [...] ,

contre l'arrêt rendu le 22 février 2017 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre B), dans le litige l'opposant à M. Olivier Y..., domicilié [...] ,

défendeur à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 27 mars 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme X..., de la SCP Bénabent, avocat de M. Y... ;

Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevable la requête en omission de statuer présentée le 19 décembre 2016 par Monsieur Olivier Y... ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « Les dispositions de l'article 463 du code de procédure civile énoncent :
"La juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s'il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
La demande doit être présentée un an au plus tard après que la décision est passée en force de chose jugée ou, en cas de pourvoi en cassation de ce chef, à compter de l'arrêt d'irrecevabilité.
Le juge est saisi par simple requête de l'une des parties, ou par requête commune. Il statue après avoir entendu les parties ou celles-ci appelées.
La décision est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. Elle est notifiée comme le jugement et donne ouverture aux mêmes voies de recours que celui-ci".
En l'espèce, il est constant que lors de l'audience du 28 septembre 2016 il a été annoncé aux parties que l'incident était joint au fond et que la Cour répondrait par un seul et même arrêt, statuant sur l'incident et sur le fond.
Or, il convient de constater que si la Cour a statué sur le fond du litige par son arrêt du 09 novembre 2016, elle a omis de statuer sur l'incident.
La requête en omission de statuer présentée par Monsieur Olivier Y... est donc recevable et il convient, en conséquence, de se prononcer sur sa demande incidente.
Il est de principe que le devoir de secours remédie à l'impécuniosité d'un époux et apparaît avec l'état de besoin de l'un des conjoints. Par ailleurs, pour fixer le montant de la pension alimentaire allouée à l'un des époux, c'est à bon droit que le juge tient compte du niveau d'existence auquel cet époux peut prétendre compte tenu des facultés du conjoint. Enfin, ce devoir de secours ne prend fin que du jour où le jugement de divorce devient irrévocable, sauf survenance d'un fait nouveau suffisamment important.
En l'espèce, le requérant fait état d'un fait nouveau important, puisqu'il démontre avoir été licencié de son poste de directeur de clinique par lettre de licenciement du 19 février 2016, qu'il est en arrêt maladie longue durée et qu'il ne perçoit que des indemnités journalières pour un montant total de 1 200 € environ par mois. Il justifie avoir contesté son licenciement devant le conseil de Prud'hommes, mais précise que la procédure est toujours en cours et indique n'avoir toujours pas retrouvé d'emploi.
Pour sa part, Madame X... ne rapporte pas la preuve que Monsieur Y... a retrouvé une activité salariale, notamment un nouveau poste de directeur de clinique. Sa situation professionnelle n'a pas été modifiée ces dernières années et son salaire mensuel reste stable, de l'ordre de l 500 € par mois.
Les deux parties supportent les dépenses habituelles de la vie quotidienne et Madame X... notamment, ne fait pas état de charges particulières qui viendraient lourdement grever son budget.
Par rapport aux ressources de Monsieur Y... qui depuis février 2016 sont plus faibles que celles de Madame X..., 1 200 € pour le premier, 1 500 € pour la seconde, cette dernière n'est pas dans une situation de besoin par rapport à son époux et celui-ci n'est plus en mesure de lui assurer le train de vie qui était le sien pendant les premières années du mariage et en particulier quand il était directeur de clinique.
Il y a donc lieu, sur le fond, de faire droit à la requête et de compléter l'arrêt du 09 novembre 2016 en supprimant la pension alimentaire due au titre du devoir de secours par le requérant à Madame X... à compter du 1er février 2016 » ;

ALORS en premier lieu QUE, lorsque le jugement prononçant le divorce est frappé d'appel, la modification des mesures accessoires exécutoires par provision en application de l'article 1074-1 du Code de procédure civile, en cas de survenance d'un fait nouveau, ne peut être demandée, selon le cas, qu'au premier président de la cour d'appel ou au conseiller de la mise en état ; que ces derniers disposent donc d'une compétence exclusive s'agissant de la modification des mesures provisoires en raison de la survenance d'un fait nouveau ; qu'en décidant toutefois qu'« il a été annoncé aux parties que l'incident était joint au fond et que la Cour répondrait par un seul et même arrêt, statuant sur l'incident et sur le fond » (cf. arrêt, p. 3, dernier §), pour en déduire que celle-ci a omis de statuer sur ce point (ibid., p. 4, § 1er), la cour d'appel a violé l'article 1083 du Code de procédure civile ;

ALORS en deuxième lieu QUE, subsidiairement, les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures ; qu'à défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées ; qu'en l'espèce, dans ses dernières conclusions récapitulatives adressées à la cour le 20 septembre 2016, Monsieur Y... n'a pas évoqué la modification des mesures provisoires en raison de la survenance d'un fait nouveau (cf. arrêt de la Cour d'appel de Montpellier du 9 novembre 2016, p. 5 et 6) ; qu'en retenant toutefois l'existence d'une omission de statuer sur ce chef dans l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 9 novembre 2016, la cour d'appel a violé l'article 954 du Code de procédure civile, ensemble l'article 4 du même code ;

ALORS en troisième lieu QUE, en tout état de cause, le juge de la mise en état demeure saisi jusqu'à l'ouverture des débats ou jusqu'à la date fixée pour le dépôt des dossiers des avocats ; qu'en l'espèce, il était dessaisi le 28 septembre 2016, date de la clôture de l'instruction et de l'ouverture des débats ; qu'en considérant toutefois que la cour d'appel devait se prononcer sur la modification des mesures provisoires en raison de la survenance d'un fait nouveau dans son arrêt du 9 novembre 2016, l'arrêt attaqué à violé l'article 779, alinéa 4, du Code de procédure civile ;

ALORS en quatrième lieu QUE, en tout état de cause, la saisine d'une juridiction pour omission de statuer se fait par simple requête de l'une des parties, ou par requête commune, l'auto-saisine de la juridiction n'étant pas autorisée ; qu'en l'espèce, par avis en date du 6 décembre 2016, soit antérieurement à toute requête formulée par Monsieur Y..., les parties ont été invitées, sur auto-saisine de la cour, à plaider à propos d'une « rectification suite à une erreur matérielle » le 3 janvier 2017 ; qu'en décidant toutefois, évoquant l'existence d'une omission de statuer, que « les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 03 janvier 2017 » (arrêt, p. 3, § 3), la cour d'appel a violé l'article 463 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fait droit à la requête de Monsieur Y... et de compléter l'arrêt du 09 novembre 2016 en supprimant la pension alimentaire due au titre du devoir de secours par celui-ci à Madame X... à compter du 1er février 2016 ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « Il est de principe que le devoir de secours remédie à l'impécuniosité d'un époux et apparaît avec l'état de besoin de l'un des conjoints. Par ailleurs, pour fixer le montant de la pension alimentaire allouée à l'un des époux, c'est à bon droit que le juge tient compte du niveau d'existence auquel cet époux peut prétendre compte tenu des facultés du conjoint. Enfin, ce devoir de secours ne prend fin que du jour où le jugement de divorce devient irrévocable, sauf survenance d'un fait nouveau suffisamment important.
En l'espèce, le requérant fait état d'un fait nouveau important, puisqu'il démontre avoir été licencié de son poste de directeur de clinique par lettre de licenciement du 19 février 2016, qu'il est en arrêt maladie longue durée et qu'il ne perçoit que des indemnités journalières pour un montant total de 1 200 € environ par mois. Il justifie avoir contesté son licenciement devant le conseil de Prud'hommes, mais précise que la procédure est toujours en cours et indique n'avoir toujours pas retrouvé d'emploi.

Pour sa part, Madame X... ne rapporte pas la preuve que Monsieur Y... a retrouvé une activité salariale, notamment un nouveau poste de directeur de clinique. Sa situation professionnelle n'a pas été modifiée ces dernières années et son salaire mensuel reste stable, de l'ordre de l 500 € par mois.
Les deux parties supportent les dépenses habituelles de la vie quotidienne et Madame X... notamment, ne fait pas état de charges particulières qui viendraient lourdement grever son budget.
Par rapport aux ressources de Monsieur Y... qui depuis février 2016 sont plus faibles que celles de Madame X..., 1 200 € pour le premier, 1 500 € pour la seconde, cette dernière n'est pas dans une situation de besoin par rapport à son époux et celui-ci n'est plus en mesure de lui assurer le train de vie qui était le sien pendant les premières années du mariage et en particulier quand il était directeur de clinique.
Il y a donc lieu, sur le fond, de faire droit à la requête et de compléter l'arrêt du 09 novembre 2016 en supprimant la pension alimentaire due au titre du devoir de secours par le requérant à Madame X... à compter du 1er février 2016 » ;

ALORS en premier lieu QUE, si le juge est souverain quant à l'interprétation des documents de la cause, il ne lui est cependant pas permis de les dénaturer, lorsque ceux-ci sont clairs et précis et ne nécessitent aucune interprétation ; qu'en l'espèce, Monsieur Y... reconnaissait, dans un courrier adressé à son employeur le 9 mars 2016, que, « durant [sa] période d'arrêt de travail, [il] souhaite bénéficier des indemnités journalières de sécurité sociale ainsi que des indemnités complémentaires versées par l'organisme assureur » et qu'il « [bénéficierait] effectivement du maintien des garanties de prévoyance et de complémentaire santé dès la fin de [sa] période d'incapacité temporaire de travail et ce pendant une durée de 12 mois » (lettre du 9 mars 2016 de Monsieur Y..., cf. prod.), ce dont il résulte qu'il avouait, sans la moindre ambiguïté, qu'il allait pouvoir maintenir son salaire tant durant son arrêt maladie qu'après son licenciement ; qu'en décidant toutefois que, « [Monsieur Y...] fait état d'un fait nouveau important, puisqu'il démontre avoir été licencié de son poste de directeur de clinique par lettre de licenciement du 19 février 2016, qu'il est en arrêt maladie longue durée et qu'il ne perçoit que des indemnités journalières pour un montant total de 1 200 € environ par mois » (arrêt, p. 4, § 4), la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du courrier adressé par Monsieur Y... à son employeur en date du 9 mars 2016 ;

ALORS en second lieu QUE la modification des mesures provisoires n'a point d'effet rétroactif, sauf en cas de fraude de l'un des époux ; qu'en décidant toutefois de supprimer « la pension alimentaire due au titre du devoir de secours par le requérant à Madame X... à compter du 1er février 2016 » (arrêt, p. 4, dernier §), sans expliquer quelle aurait été la fraude de Madame X... lors de la fixation de ladite pension alimentaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1118 du Code de procédure civile, ensemble l'article 254 du Code civil.

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