16 mai 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-14.023

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2018:C100531

Texte de la décision

CIV. 1

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 mai 2018




Cassation partielle


Mme BATUT, président



Arrêt n° 531 F-D

Pourvoi n° C 15-14.023







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Pierre X..., domicilié [...] ,

2°/ la société Editions Adèle, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 25 novembre 2014 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Editions Robert Laffont , société anonyme, dont le siège est [...] ,

2°/ à la société Interforum, société anonyme, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les neuf moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 5 avril 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Z..., conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Z..., conseiller, les observations de la SCP Briard, avocat de M. X... et de la société Editions Adèle, de la SCP Hémery, Thomas-Raquin et Le Guerer, avocat des sociétés Editions Robert Laffont et Interforum, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et la société Editions Adèle ont conclu avec la société Editions Robert Laffont (l'éditeur) un contrat d'édition portant sur un ouvrage intitulé « Editions Le Café du pont » ; qu'estimant que l'éditeur avait manqué à ses obligations d'exploitation et de reddition des comptes, ils l'ont assigné devant le juge des référés pour obtenir la désignation d'un expert chargé d'établir les comptes entre les parties, avant de l'assigner avec la société Interforum, distributrice de l'ouvrage, en annulation du contrat d'édition et en paiement de diverses sommes, à titre d'un complément de droits d'auteur pour M. X... et à titre de dommages-intérêts pour la société Editions Adèle ;

Sur les deuxième, troisième, quatrième, sixième, septième et neuvième moyens, ci-après annexés :

Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article 2241 du code civil, ensemble l'article 1304 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation de l'article 6 B du contrat d'édition, l'arrêt retient que ni l'assignation en référé et les conclusions soutenues par les parties, ni l'assignation au fond ne comportent de demande ou de moyen relatif à la nullité de cet article ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'action en nullité de la clause litigieuse visait à l'exécution du contrat sans cette clause et tendait au même but que l'action en paiement de rémunérations complémentaires, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le cinquième moyen :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que, pour rejeter la demande de M. X... et de la société Editions Adèle en paiement d'une certaine somme au titre des ouvrages distribués gratuitement, l'arrêt retient que cette distribution ne saurait être assimilée à une vente ouvrant droit à une rémunération pour l'auteur et que le nombre d'exemplaires en cause, mentionné au contrat, s'est révélé insuffisant tant pour l'auteur que pour l'éditeur ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que le contrat mettait à la charge de l'éditeur, à ses frais exclusifs, la publicité et la promotion de l'ouvrage, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le huitième moyen :

Vu les articles 564 et 565 du code de procédure civile ;

Attendu qu'aux termes de l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, mêmes si leur fondement juridique est différent ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable, comme nouvelle en cause d'appel, la demande de M. X... et de la société Editions Adèle tendant à la condamnation de la société Interforum, sur le fondement de sa responsabilité délictuelle, au paiement d'une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que ceux-ci n'avaient formé une telle demande ni dans leur acte introductif d'instance ni dans leurs conclusions récapitulatives de première instance, au terme desquelles ils avaient seulement sollicité la condamnation solidaire de la société Interforum avec l'éditeur, pour avoir été complice de celui-ci dans la violation de ses obligations contractuelles ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la demande de condamnation de la société Interforum au paiement de dommages-intérêts tendait aux mêmes fins que la prétention formée en première instance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande d'annulation de la clause 6 B du contrat d'édition, la demande en paiement d'une certaine somme au titre de la diffusion gratuite de l'ouvrage et la demande de condamnation de la société Interforum fondée sur sa responsabilité délictuelle, l'arrêt rendu le 25 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne les sociétés Editions Robert Laffont et Interforum aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Briard, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Editions Adèle.

PREMIER MOYEN DE CASSATION (arrêt attaqué p. 8-10)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande d'annulation de l'article 6 B du contrat d'édition du 2 mai 2005 passé entre M. X... et la Sa Editions Adele d'une part, et la SA Editions Robert Laffont d'autre part,

Aux motifs que « M. Pierre X... et la Sa Editions Adele rappellent que la clause de l'article 6 B du contrat d'édition du 02 mai 2005 n'est pas conforme à l'article L 131-4 du code de la propriété intellectuelle et soutiennent que c'est à la date du 12 janvier 2006 qu'ils ont découvert les irrégularités que constituent les exploitations effectuées sans droit et le non respect des modalités de calcul de la redevance et que le délai de prescription ne court qu'à compter de cette date ;

qu'ils soutiennent que le juge des référés était bien saisi en février 2007 d'une discussion relative à l'assiette de la rémunération de l'auteur, que la prescription a à nouveau été interrompue en décembre 2008, pour toute la durée de l'instance, par l'introduction de leur instance au fond et non pas à compter de leurs conclusions du 15 décembre 2011 qui se rattachaient nécessairement et par un lien suffisant à leurs prétentions originaires portant depuis février 2007 sur la question de l'assiette de la rémunération de l'auteur ;

Qu'ils en concluent que le moyen tiré de la nullité de la clause 6 B du contrat d'édition n'est pas prescrite et qu'en outre l'exception de nullité soulevée en défense est perpétuelle ;

Que la SA Editions Robert Laffont répliquent que ce n'est que le 15 décembre 2011 que M. Pierre X... et la Sa Editions Adele ont soulevé une demande nouvelle en nullité de l'article 6 B du contrat d'édition ; qu'ils précisent qu'il s'agit d'une nullité relative se prescrivant par cinq ans à compter de la date de conclusion du contrat ;

Qu'elle précise qu'aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu avant le 15 décembre 2011 et que cette demande est donc prescrite ;

Que l'article L 131-4 du code de la propriété intellectuelle dispose que la cession par l'auteur de ses droits sur son oeuvre doit comporter au profit de ce dernier la participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l'exploitation ;

Que l'article 6 B du contrat d'édition du 02 mai 2005 stipule que "L'Éditeur devant à l'Auteur, en cas d'exploitation par un tiers des autres droits (i.e. édition en format de poche et en édition club), 50 % des sommes, de toute nature, nettes de tous frais et taxes effectivement encaissés par lui" ;

Que les dispositions de l'article L 131-4 susvisé n'ayant été édictées que dans le seul intérêt patrimonial de l'auteur et relevant ainsi d'un ordre public de protection, leur violation n'est susceptible d'emporter qu'une nullité relative du contrat, soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du code civil qui dispose que "dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans" ;

Que le délai de l'action en nullité court à compter de la date à laquelle les parties ont consenti aux termes du contrat, c'est-à-dire à la date de la signature du contrat, en l'espèce le 02 mai 2005, sauf à la partie qui entend se prévaloir d'une date postérieure de prouver que ce n'est qu'à cette date qu'elle aurait découvert le vice affectant le contrat, étant relevé que la Sa Editions Adele , co-signataire du contrat, doit être regardée en sa qualité de société commerciale, comme une professionnelle avertie au monde des affaires ;

Que si les appelants soutiennent n'avoir découvert l'irrégularité de l'article 6 B du contrat que le 12 janvier 2006 à la lecture du relevé en date du 11 janvier 2006, force est de constater qu'ils ne procèdent sur ce point que par affirmations péremptoires non susceptibles d'entraîner la conviction de la cour ; qu'en conséquence le délai de prescription a bien couru à compter du 02 mai 2005 pour expirer le 02 mai 2010 ;

Que ni l'assignation en référé du 16 février 2007, ni les conclusions soutenues par les parties dans le cadre de cette instance, ne comportaient de demande ou de moyen relatifs à la nullité de l'article 6 B du contrat d'édition et que ni l'ordonnance de référé, ni l'arrêt confirmatif n'ont eu à statuer sur cette question ; que ces actes n'ont donc pas interrompu le cours de la prescription ;

Que l'assignation au fond du 03 décembre 2008 ne comportait également aucune demande ni aucun moyen relatifs à la nullité de l'article 6 B et n'a pu davantage interrompre le cours de la prescription et que ce n'est que par leurs conclusions récapitulatives du 15 décembre 2011 que M. Pierre X... et la Sa Editions Adele ont soulevé pour la première fois la nullité de la clause 6 B du contrat d'édition ;

Que M. Pierre X... et la Sa Editions Adele ne sauraient faire valoir le caractère perpétuel de l'exception de nullité soulevée en défense alors qu'en l'espèce c'est par voie d'action qu'ils invoquent la nullité de l'article 6 B du contrat pour fonder leurs demandes en paiement au titre des redevances d'auteur ;

Que la nullité de la clause 6 B du contrat ayant été soulevée par les appelants aux termes de leurs conclusions de première instance du 15 décembre 2011, c'est à juste titre que les premiers juges ont constaté que le délai de prescription de cinq ans était écoulé et que la demande formée de ce chef était irrecevable ;

Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande des appelants de ce chef ; que le dispositif du jugement sera cependant rectifié en ce qu'il a mentionné par erreur la date du 13 novembre 2001 comme étant celle du contrat d'édition au lieu du 02 mai 2005 » (arrêt, pp. 8 à 10) ;

Alors, d'une part, que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que, contestant les comptes de redevance présentés par les Editions Robert Laffont , M. X... et les Editions Adèle ont saisi en 2007 le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris pour obtenir une mesure d'expertise, afin d'établir un compte entre les parties ainsi que le paiement d'une provision, à valoir sur le complément de redevance qui leur était dû, et que, les 2 et 3 décembre 2008, ils ont assigné au fond les Editions Robert Laffont , demandant la révision des comptes présentés par celles-ci, leur condamnation au paiement d'un complément de redevances et de dommages et intérêts pour l'inexécution fautive de leurs obligations ; que la demande en nullité de l'article 6 B du contrat d'édition du 2 mai 2005, en ce qu'il prévoyait la rémunération proportionnelle de l'auteur sur les recettes nettes encaissées par l'éditeur, et non sur le prix de vente au public, contrairement aux dispositions impératives de l'article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle, tendait également, comme les précédentes demandes en référé et au fond, à la révision du compte présenté par l'éditeur, à sa condamnation au paiement d'un complément de redevances et de dommages et intérêts ; que dès lors, en décidant que la prescription de l'action en nullité, qui tendait au même but et se trouvait virtuellement comprise dans les précédentes demandes, n'avait pas été interrompue, la cour d'appel a violé l'article 2241 du code civil, ensemble l'article 1304 du même code ;

Alors, d'autre part et subsidiairement, qu'opposée en réponse à la prétention des Editions Robert Laffont qui soutenaient que les redevances avaient été calculées conformément aux stipulations contractuelles, la demande en nullité formée par conclusions du 15 décembre 2011 constituait une exception à la demande des Editions Robert Laffont tendant à faire constater par le juge la régularité de ses comptes ; que M. X... et les Editions Adèle étaient donc recevables à opposer cette nullité par voie d'exception, même après l'expiration du délai de prescription de l'action ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1304 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (arrêt attaqué p. 11-12)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de M. X... et des Editions Adèle tendant à la condamnation des Editions Robert Laffont au paiement de la somme de 87.945 euros au titre de l'exploitation non autorisée de l'ouvrage « Le café du pont » par la société France Loisirs,

Aux motifs que « les appelants exposent avoir découvert en juillet 2005 que la SA Editions Robert Laffont avait pris des accords éditoriaux au mois d'avril en vue d'une édition en club avec la société France Loisirs sans solliciter son autorisation écrite préalable et n'avoir donné aucune autorisation a posteriori que pour 3.000 exemplaires alors que 26.744 ouvrages ont été vendus au 31 décembre 2006 ; qu'ils réclament ainsi la somme de 87.945 € TTC au titre de cette exploitation ;

Qu'ils ajoutent avoir également découvert l'exploitation effectuée en 2005 par la société France Abonnements (aujourd'hui ADL Partner) ayant généré une vente de 3.900 exemplaires, réclamant à ce titre la somme de 8.228,36 € TTC et avoir découvert le 12 janvier 2006 une exploitation pour 7.000 exemplaires par la société Le Grand Livre du Mois, réclamant à ce titre la somme de 26.429,70 € TTC ;

Que la SA Editions Robert Laffont réplique que les appelants ont donné leur accord a posteriori sur l'ensemble des ventes par la société France Loisirs en adressant deux factures en 2006 et 2007 portant bien sur l'intégralité de l'opération ;

Qu'elle ajoute que pour la société ADL Partner il s'agit d'ouvrages de l'édition courante en librairie et que l'autorisation de l'auteur n'avait dès lors pas à être sollicitée, la société ADL Partner (anciennement France Abonnements) s'étant comportée comme un simple point de vente et non comme un sous-éditeur ; qu'au surplus les appelants ont perçu au titre de cette vente la somme totale de 13.935,60 € HT correspondant à ce qu'ils auraient perçu si les exemplaires avaient été directement vendus au public ;

Qu'elle ajoute encore qu'en ce qui concerne les ventes au profit du Grand Livre du Mois la demande fondée sur la nullité de la clause 6 B du contrat est prescrite ;

Que l'article 3 A du contrat d'édition stipule que "L'Auteur (
) cède à l'Éditeur les droits suivants : (
) - le droit de reproduire tout ou partie de l'OEuvre sous d'autres présentations que l'édition principale (i.e. édition courante), à savoir : (
) - les éditions au format de poche, en édition club ou illustrée, mais ce, sous réserve de recueillir au préalable l'assentiment écrit de l'Auteur" ;

Qu'en ce qui concerne les ventes par la société France Loisirs, s'il est constant que l'éditeur n'a pas recueilli l'accord de l'auteur préalablement à la conclusion du contrat passé avec cette société, il apparaît que par lettre du 26 août 2005, la Sa Editions Adèle a, pour ne pas nuire à la société France Loisirs, accepté la demande de cette société de pouvoir réimprimer 3.000 exemplaires sous réserve qu'aucune vente n'intervienne après le 31 décembre 2005 et qu'elle obtienne une copie de l'ensemble des états de compte ;

Que si cet accord initial n'a porté que sur 3.000 exemplaires, la Sa Editions Adèle a néanmoins validé l'intégralité des impressions réalisées pour la société France Loisirs en adressant le 13 janvier 2006 à la SA Editions Robert Laffont une facture n° 2006/001 comportant au paragraphe II b) en regard du poste "France Loisirs" les mentions de 25.000 + 3.000 exemplaires (étant observé qu'en réalité 26.744 exemplaires ont été vendus) ; que les appelants ont été réglés le 27 mars 2007 de l'intégralité de leurs droits sur cette opération ;

Que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont dit que les appelants ne pouvaient invoquer une violation de la cause 3 A du contrat et qu'ils étaient en tout état de cause irrecevables à invoquer la nullité de la clause 6 B » (arrêt, pp. 10 et 11) ;

Alors que la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes révélant sans équivoque l'intention de renoncer ; que l'envoi d'une pièce comptable, telle une facture émise pour la somme que son destinataire reconnaît devoir, non plus que le règlement de celle-ci, n'implique pas renonciation aux droits de l'auteur d'obtenir paiement intégral de ce qui lui est dû au titre des exemplaires diffusés sans son autorisation ; que dès lors, ni la lettre du 26 août 2005, maintenant les protestations des Editions Adèle, sur l'exploitation non autorisée de la société France Loisirs, mais autorisant sous certaines réserves la seule réimpression de 3.000 exemplaires, ni la facture adressée le 13 janvier 2006 à la société Editions Robert Laffont, qui en avait besoin pour régler ce qu'elle estimait devoir, n'emportaient renonciation des Editions Adèles à demander paiement des sommes qu'elle estimait lui revenir au titre de l'exploitation de l'ouvrage faite au mépris des droits patrimoniaux de Pierre X... par la société France Loisirs ; qu'en déboutant M. X... et la société Editions Adèle de leurs demandes de ce chef, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (arrêt attaqué p. 11)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande des Editions Adèle tendant à la condamnation des Editions Robert Laffont au paiement de la somme de 8.228,36 euros au titre de l'exploitation non autorisée de l'ouvrage par la société France Abonnements devenue ADL Partner ,

Aux motifs que (les appelants) ajoutent avoir également découvert l'exploitation effectuée en 2005 par la société France Abonnements (aujourd'hui ADL Partner ) ayant généré une vente de 3.900 exemplaires, réclamant à ce titre la somme de 8.228,36 € TTC (
)

Que (la SA Editions Robert Laffont ) ajoute que pour la société ADL Partner il s'agit d'ouvrages de l'édition courante en librairie et que l'autorisation de l'auteur n'avait dès lors pas à être sollicitée, la société ADL Partner (anciennement France Abonnements) s'étant comportée comme un simple point de vente et non comme un sous-éditeur ; qu'au surplus les appelants ont perçu au titre de cette vente la somme totale de 13.935,60 € HT correspondant à ce qu'ils auraient perçu si les exemplaires avaient été directement vendus au public ;

Que l'article 3 A du contrat d'édition stipule que "L'Auteur (
) cède à l'Éditeur les droits suivants : (
) - le droit de reproduire tout ou partie de l'OEuvre sous d'autres présentations que l'édition principale (i.e. édition courante), à savoir : (
) - les éditions au format de poche, en édition club ou illustrée, mais ce, sous réserve de recueillir au préalable l'assentiment écrit de l'Auteur" ;

Que « en ce qui concerne les ventes par la société France Abonnements (aujourd'hui ADL Partner ) il est constant que la SA Editions Robert Laffont a livré à cette société 3.900 exemplaires de l'ouvrage "Le Café du pont" selon factures des 18 mai, 28 juillet, 19 août, 31 août et 29 septembre 2005 au prix unitaire HT de 5,50 € ;

Que force est de constater qu'en l'absence de tout élément contraire, il apparaît que cette vente a porté sur des ouvrages de l'édition courante, étant relevé que la société France Abonnements (aujourd'hui ADL Partner ) opère sur le marché comme distributeur pour le compte des éditeurs ;

Que les appelants ne produisent aucune pièce susceptible de révéler l'existence d'une édition club, laquelle se distingue de l'édition principale par une présentation différente et par l'apposition de la marque ou du logo de l'éditeur club ;

Que la cession consentie à la société France Abonnement n'était pas soumise à l'accord écrit préalable de l'auteur prévu à l'article 3 A du contrat ;

Que dans la mesure où le prix convenu avec la société France Abonnements n'a pas été agréé par les appelants, la SA Editions Robert Laffont a, par lettre du 02 juin 2006, spontanément accepté de considérer ces 3.900 exemplaires comme ayant correspondu à des ventes au prix HT de 18,96 € au taux de 17 % pour 1.500 exemplaires et de 20 % pour les suivants de telle sorte que les appelants ont perçu la somme totale de 13.935,60 € HT correspondant à ce qu'ils auraient perçu par une vente directe de ces 3.900 exemplaires ;

Que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont dit que les appelants ont perçu la somme à laquelle ils pouvaient prétendre et ont rejeté leur demande en paiement d'une somme complémentaire » (arrêt, p.11) ;

Alors qu'aux termes de l'article 1 B du contrat du 2 mai 2005, il était stipulé que " l'auteur cède à l'éditeur aux fins d'une édition courante en librairie les droits de reproduction et de représentation afférents à l'oeuvre à l'exception des droits audiovisuels que l'auteur conserve. - Il est ici précisé en tant que de besoin que l'éditeur ne pourra se prévaloir de droits qui ne lui seraient pas expressément cédés aux termes du présent contrat" ; qu'il résulte de cette stipulation claire et précise que les droits de l'auteur n'étaient cédés qu'aux fins d'une édition courante en librairie, et que tout autre mode de diffusion était interdit ; que l'article 3 A 1 du contrat, qui prévoyait la possibilité pour l'éditeur de reproduire l'ouvrage sous d'autres présentations en édition club, sous réserve de recueillir au préalable l'assentiment écrit de l'auteur, ne dérogeait pas l'interdiction, qui résultait de l'article 1 B, de diffuser l'ouvrage hors librairie ; que dès lors, en jugeant que les ventes par la société France Abonnements à un prix différent du prix contractuel n'étaient pas soumises à l'accord préalable de l'auteur et ne constituaient pas une contrefaçon dès lors que les exemplaires ainsi vendus ne se distinguaient pas de l'édition principale par une présentation différente et par l'apposition de la marque ou du logo de l'éditeur club, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du contrat d'édition du 2 mai 2005, et ainsi violé l'article 1134 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (arrêt attaqué p. 11)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de M. X... et des Editions Adèle en paiement de la somme de 26.429,70 euros au titre de l'exploitation non autorisée de l'ouvrage par la société Le Grand Livre du Mois,

Aux motifs qu'« en ce qui concerne les ventes par la société Le Grand Livre du Mois, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté la demande en paiement des appelants fondée sur la nullité de l'article 6 B du contrat d'édition du fait de l'irrecevabilité de cette demande en nullité ;

Que devant la cour M. Pierre X... et la Sa Editions Adele soutiennent également que cette exploitation est contrefaisante faute d'avoir recueilli leur accord préalable ;

Qu'il ressort des pièces versées aux débats que les appelants ont donné leur autorisation pour cette opération en adressant le 13 janvier 2006 à la SA Editions Robert Laffont la facture n° 2006/001 sus mentionnée comportant au paragraphe II a) le poste "Grand Livre du Mois" avec la mention de 5.000 exemplaires ; que les appelants ont également été réglés de l'intégralité de leurs droits sur cette opération ;

Que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté les appelants de l'ensemble de leurs demandes à ce titre » (arrêt, p.11) ;

Alors, d'une part, que la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; que cette volonté ne peut être déduite de l'envoi d'une pièce à finalité purement comptable, telle une facture, destinée au paiement de ce dont le destinataire se reconnaît débiteur ; qu'en décidant que l'autorisation de M. X... et des Editions Adèle à la diffusion en édition club par la société Le Grand Livre du Mois résultait de ce qu'ils avaient adressé le 13 janvier 2006 aux Editions Robert Laffont une facture correspondant aux ventes ainsi réalisées, facture qui n'impliquait aucune renonciation aux droits que l'auteur tirait du caractère contrefaisant de la diffusion incriminée, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

Alors, d'autre part, que dans ses conclusions signifiées le 30 septembre 2014 (p.61-60), M. X... et les Editions Adèle faisaient valoir que s'ils avaient bien connu l'existence des ventes réalisées par la société Le Grand Livre du Mois et envoyé la facture correspondante avec la reddition de comptes faite le 12 janvier 2006 par la société Editions Robert Laffont , c'est seulement le 23 décembre 2007, par un Dire de celle-ci à l'expert, qu'ils avaient appris qu'il s'agissait d'une vente par correspondance, courtage ou abonnement, c'est-à-dire d'une vente club, donc soumise à autorisation préalable et ainsi contrefaisante à défaut d'une telle autorisation ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce point de fait qui, s'il était exact, excluait qu'une autorisation ait été donnée antérieurement en connaissance de cause, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION (arrêt attaqué p.12)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... et les Editions Adèle de leur demande en paiement de la somme de 4.052,57 euros au titre des ouvrages distribués gratuitement,

Aux motifs que « les premiers juges ont reconnu la SA Editions Robert Laffont débitrice de la somme de 2.703,70 € correspondant à 713 exemplaires supplémentaires destinés à la presse alors que le contrat n'avait retenu que 300 exemplaires, outre 100 exemplaires remis gratuitement à l'auteur ;

Que les appelants réclament à ce titre la somme de 4.052,57 € TTC correspondant aux 1.013 exemplaires supplémentaires non prévus par le contrat ;

Que la SA Editions Robert Laffont , appelante incidente de ce chef, fait valoir que sur ces 1.413 exemplaires, 400 ont été livrés directement à la Sa Editions Adele , l'auteur et l'éditeur ayant tous deux excédé leurs services de presse respectifs, rappelant que le contrat imposait à l'éditeur un effort promotionnel particulièrement important et que les 713 exemplaires ont contribué à la promotion de l'ouvrage et ne peuvent être assimilés à des exemplaires vendus ;

Que l'article 6 A du contrat d'édition stipulait que les droits d'auteur ne porteraient pas sur les 100 exemplaires remis gratuitement à l'auteur et sur les 300 exemplaires destinés au service de presse, à la promotion, à la publicité et au dépôt légal ;

Qu'il apparaît que le nombre d'ouvrages ainsi destinés à être distribués gratuitement au titre du service de presse et de la promotion de l'ouvrage s'est révélé particulièrement insuffisant tant pour l'auteur que pour l'éditeur ;

Que ce sont finalement 1.413 exemplaires de l'ouvrage qui ont ainsi servi à la promotion et à la publicité, que sur les 1.013 exemplaires supplémentaires, 400 ont été livrés gratuitement le 16 mai 2005 à la Sa Editions Adele qui n'est donc pas fondée à réclamer une rémunération sur ces ouvrages qui n'ont fait l'objet d'aucune vente ;

Que le fait qu'il est apparu nécessaire à l'auteur et à la Sa Editions Adele de réclamer 400 exemplaires gratuits supplémentaires pour assurer leur propre promotion de l'ouvrage démontre que les parties avaient, lors de la conclusion du contrat, nettement sous-estimé l'importance du service de presse ;

Que les 713 exemplaires restant ont bien servi à l'éditeur pour la promotion et à la publicité de l'ouvrage, étant signalé que l'article 5 du contrat d'édition mettait à sa charge une obligation de promotion pour le lancement de l'ouvrage notamment auprès des médias ;

Que ces exemplaires distribués gratuitement au titre du service de presse, de la promotion et de la publicité ne sauraient être assimilés à des ventes ouvrant droit à rémunération pour l'auteur ;

Que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné la SA Editions Robert Laffont à payer aux appelants la somme de 2.703,70 € au titre de la rémunération due à l'auteur sur 713 exemplaires presse et que statuant à nouveau de ce chef, M. Pierre X... et la Sa Editions Adele seront déboutés de leurs demandes en paiement à ce titre » (arrêt, p.12) ;

Alors qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'article 5 du contrat d'édition mettait à la charge de l'éditeur, à ses frais exclusifs, la publicité et la promotion de l'ouvrage, et que, selon l'article 6 A du contrat d'édition, conformément aux usages, les droits d'auteur ne porteraient pas sur les 100 exemplaires remis gratuitement à l'auteur, ni sur les 300 exemplaires destinés au service de presse, à la promotion et à la publicité faite par l'éditeur ; que si l'auteur ne pouvait demander paiement des droits d'auteur sur les 300 exemplaires qu'il avait demandés pour lui-même en plus des 100 exemplaires prévus au contrat, il était en revanche fondé, ainsi que l'avaient admis les premiers juges, à demander paiement des droits d'auteur sur les 713 exemplaires, dépassant les 300 prévus au contrat, qui avaient été utilisés par l'éditeur pour la promotion et la publicité de l'ouvrage ; qu'en infirmant le jugement de ce chef, et en jugeant que l'auteur n'avait pas droit à rémunération sur les 713 exemplaires distribués gratuitement au titre du service de presse, de la promotion et de la publicité de l'ouvrage, la cour d'appel, par refus d'application du contrat, a violé l'article 1134 du code civil.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION (arrêt attaqué p. 12-14)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les Editions Adèle de leur demande en paiement de la somme de 33.068,63 euros en réparation du préjudice résultant de la mise au pilon, sans autorisation de l'auteur, de 8.266 ouvrages prétendument défraîchis ou abîmés,

Aux motifs que « les premiers juges ont alloué aux appelants la somme de 1.000 € en réparation du préjudice résultant de la privation de la faculté de rachat pour les pilons déstockage au motif que l'auteur n'avait pas été informé de 657 pilons de déstockage alors que cette information lui ouvrait une faculté d'achat des ouvrages à leur prix de revient ;

Que les appelants soutiennent que selon le code des usages l'éditeur est tenu d'informer l'auteur de tout pilonnage important et que l'article 8 du contrat imposait à l'éditeur une telle information pour toute opération de pilonnage sans distinction des raisons de celui-ci ;

Qu'ils font valoir que l'auteur n'a jamais été informé de quelque pilon que ce soit et que 8.266 exemplaires ont été pilonnés ; qu'en ce qui concerne le préjudice subi il ne s'agit pas d'une perte de chance, les ouvrages défraichis ou abîmés qui ne sont pas des retours acceptés par la SA Interforum ayant été vendus de manière ferme aux points de vente et ont généré des recettes pour la SA Interforum ;

Que les appelants réclament donc de ce chef la somme de 33.068,63 € TTC correspondant à la rémunération due sur ces 8.266 exemplaires ;

Que la SA Editions Robert Laffont réplique que l'éditeur n'a pas à solliciter l'autorisation de l'auteur avant de pilonner les exemplaires défraîchis ou abîmés, l'article 8 du contrat ne prévoyant que les cas de pilon pour déstockage et de pilon définitif de l'article L 132-17 du code de la propriété intellectuelle ;

Qu'elle ajoute que c'est à tort que les premiers juges ont retenu 657 pilons de déstockage en se fondant sur un tableau erroné puisque sous cet intitulé y sont recensés des exemplaires pour les mois de mai et de juin 2005 alors que l'exploitation de l'ouvrage ne faisait que débuter et qu'il ne pouvait y avoir à l'époque aucun excédent de stock ;

Que l'article 8 du contrat d'édition, intitulé "vente en solde et mise au pilon" est ainsi rédigé :

"A) Si, à quelque moment que ce soit, l'Éditeur détient en magasin un stock de l'OEuvre plus important qu'il ne le juge nécessaire pour satisfaire les commandes, il aura le droit sans que le contrat soit pour autant résilié, de pilonner ou de solder une partie de ce stock. L'Auteur qui sera informé de tout pilonnage partiel d'exemplaires de l'OEuvre au moins deux mois à l'avance disposera d'un délai d'un mois pour faire connaître à l'Éditeur sa décision de racheter, au coût de la fabrication, tout ou partie du stock que l'Éditeur entend pilonner ou solder ; (
)

B) Dans le cas où l'Éditeur envisagerait de pilonner ou de solder la totalité du stock, il devrait en avoir averti l'Auteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. L'Auteur aura la faculté, dans le mois suivant cette notification, de racheter tout ou partie du stock au prix de revient tel que celui-ci ressort de la comptabilité de l'Éditeur. A défaut pour l'Auteur d'avoir exercé ce droit dans les délais, l'Éditeur pourrait pilonner ou solder l'ensemble du stock" ;

Que cet article offre ainsi à l'auteur la faculté de racheter les exemplaires que l'éditeur destine au pilon dans les deux seules hypothèses expressément envisagées du pilon pour déstockage (article 8 A) et du pilon définitif (article 8 B) ;

Que dès lors les appelants sont mal fondés à soutenir que l'auteur doit être informé, de manière à pouvoir exercer sa faculté de rachat, de tout pilonnage sans distinction des raisons de celui-ci et à prétendre que l'information mise à la charge de l'éditeur viserait également les "pilons retours", constitués des invendus défraîchis et abîmés retournés par les libraires ; qu'au demeurant une faculté de rachat qui porterait sur de tels ouvrages, sans valeur marchande, serait dépourvue d'intérêts ;

Que pour retenir néanmoins l'existence de 657 pilons de déstockage, les premiers juges se réfèrent au tableau joint au dire adressé le 28 décembre 2007 par l'avocat de la SA Editions Robert Laffont à l'expert où sous la rubrique "Pilon destock" apparaissent les chiffres de 16 exemplaires pour le mois de mai 2005, 14 pour le mois de juin, 17 pour le mois de juillet, 10 pour le mois d'août, 22 pour le mois de septembre, 35 pour le mois d'octobre, 80 pour le mois de novembre et 463 pour le mois de décembre ;

Qu'un déstockage n'intervient par définition que lorsque les stocks excèdent les besoins, que tel ne pouvait être le cas pour les mois de mai à décembre 2005 alors d'une part que l'exploitation de l'ouvrage ne faisait que débuter, le contrat d'édition étant du 02 mai 2005, et d'autre part que tout au long de l'année 2005 cet ouvrage a fait l'objet de réimpressions successives à la demande de la SA Editions Robert Laffont , démontrant ainsi que la rubrique "Pilon destock" figurant sur le tableau sus énoncé ne peut qu'être une erreur en l'absence de tout autre document établissant la matérialité de pilonnages de déstockage de l'ouvrage dès le début de son exploitation ;

Qu'il ne saurait être soutenu que les retours d'ouvrage défraîchis et abîmés ne donneraient pas droit à un avoir de la part de la SA Interforum et devraient être considérés comme des ventes effectives donnant droit à la rémunération de l'auteur ; qu'en effet ces retours, tels qu'ils apparaissent sur les relevés de l'éditeur, ont bien donné lieu à un remboursement auprès du libraire (comptabilisé au crédit dans ses comptes) et soit ont fait l'objet d'un pilonnage et n'ont donc pas été revendus, soit se sont retrouvés en stock et ne sont pas, à cette date, des ouvrages vendus ; que raisonner autrement sur ce dernier point reviendrait à reconnaître à l'auteur une double rémunération pour les ouvrages retournés et revendus après stockage ; qu'ainsi l'auteur n'a subi aucun manque à gagner du fait des pilonnages d'ouvrages sans valeur marchande en raison de leur état ;

Que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné la SA Editions Robert Laffont à payer aux appelants la somme de 1.000 € au titre du préjudice résultant de la privation de la faculté de rachat pour les pilons déstockage et que, statuant à nouveau de ce chef, M. Pierre X... et la Sa Editions Adele seront déboutés de leurs demandes en paiement à ce titre » (arrêt, pp.12 à 14) ;

Alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 8 du contrat d'édition, il était stipulé que si l'éditeur détenait en magasin un stock plus important qu'il ne jugeait nécessaire pour satisfaire les commandes ou s'il envisageait de pilonner ou de solder la totalité du stock, il devait en avertir l'auteur, qui disposait d'une faculté de rachat dans le délai d'un mois, aussi bien si le pilonnage concernait une partie du stock (art. 8 A) que s'il concernait la totalité (art. 8 B) ; que cette stipulation ne comportait aucune restriction dans le cas où le pilonnage concernerait des exemplaires défraîchis ou abîmés ; qu'en décidant que la faculté de rachat offerte à l'auteur par l'article 8 du contrat ne pouvait concerner les « pilons retours », constitués des exemplaires invendus, défraîchis et abîmés retournés par les libraires, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette stipulation et ainsi violé l'article 1134 du code civil ;

Alors, d'autre part, que le débiteur d'une obligation qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; que l'éditeur doit fournir à l'auteur toutes justifications propres à établir l'exactitude de ses comptes; qu'il incombait donc aux Editions Robert Laffont , qui se prétendaient dispensées d'informer l'auteur préalablement aux pilonnages réalisés des inventaires invendus défraîchis ou abîmés retournés par les libraires, de prouver que ces retours avaient bien été acceptés, conformément aux usages de la profession, c'est-à-dire en raison de leur mauvais état lors de la livraison, qui ne s'expliquait pas par des raisons de convenance des libraires ni par une mauvaise conservation des ouvrages qui leur était imputable ; qu'en admettant que les « pilons retours », qui avaient donné lieu à des avoirs au profit de la société Interforum étaient dispensés de l'information de l'auteur prévue à l'article 8 du contrat d'édition sur la seule affirmation de l'éditeur qu'il s'agissait d'invendus défraîchis et abîmés retournés par les libraires, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a ainsi violé les article 1315 du code civil, L.132-13 et L.132-14 du code de la propriété intellectuelle.

SEPTIEME MOYEN DE CASSATION (arrêt attaqué p. 17-19)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait rejeté les demandes de M. X... et de la société Editions Adèle à l'égard des sociétés Editions Robert Laffont et de la société INTERFORUM fondées sur l'opacité des comptes, le défaut de communication des justificatifs relatifs à l'exploitation de l'ouvrage Le Café du Pont, notamment les retours et mises au pilon ainsi que les avoirs correspondants, et tendant à leur condamnation solidaire au paiement d'un complément de rémunération et d'une provision de 209.030 €;

Aux motifs que M. Pierre X... et la Sa Editions Adele soutiennent qu'à défaut de percevoir la rémunération proportionnelle sur l'intégralité des recettes, l'auteur est victime d'une atteinte à son droit de propriété et d'une contrefaçon tant de la part de l'éditeur que de celle de son distributeur ;

Qu'ils font valoir que l'article 7 B du contrat pose la question du nombre d'ouvrages retournés et effectivement acceptés comme tels par la SA Interforum par l'émission d'avoirs et de la régularisation de la provision sur retours par rapport aux retours, aucun report de la régularisation n'étant possible, ce qui exclut un cumul des retours ;

Qu'ils soutiennent que les retours ne satisfaisant pas aux conditions générales de vente de la SA Interforum selon lesquelles les produits retournés doivent être en parfait état et que le retour doit intervenir entre le troisième et le douzième mois suivant la date de parution, doivent être considérés comme étant définitivement vendus et, pour l'auteur, être comptabilités comme autant de ventes ouvrant droit au reversement de redevances ;

Qu'ils ajoutent que les intimées ne rapportent pas la preuve que la totalité des 15.767 exemplaires qu'elles déclarent retournés auraient été acceptés comme tels par le distributeur avec l'émission d'un avoir et qu'il importe donc de connaître les avoirs ;

Qu'ils font valoir que la SA Editions Robert Laffont refuse de leur communiquer tous les justificatifs comptables et financiers propres à permettre de vérifier l'exactitude des comptes concernant ces retours, ces pièces relevant d'une même chaîne des droits dans le cadre d'un groupe de contrats, la responsabilité délictuelle de la SA Interforum pouvant être engagée à leur égard ; que cette société n'est en effet pas étrangère au litige et a concouru à l'opacité des comptes en refusant de communiquer les pièces réclamées ; qu'elle n'a pas donné à l'expert les justificatifs témoignant de l'exactitude des comptes de l'éditeur, fournissant notamment des documents caviardés dissimulant des informations essentielles ; que les manquements de l'éditeur à ses obligations s'agissant de l'opacité des comptes et du défaut de versement à l'auteur d'une rémunération proportionnelle aux ouvrages vendus constituent autant de fautes du distributeur qui y a contribué ;

Qu'ils ajoutent encore que l'expertise judiciaire démontre l'absence de communication des justificatifs comptables de l'exploitation confiée à la SA Interforum et le bien fondé d'une demande de nouvelle expertise ;

Considérant que la SA Editions Robert Laffont rappelle que l'expert judiciaire a noté que l'analyse des flux, consistant à suivre le parcours de chacun des 143.568 exemplaires livrés à la SA Interforum se révèle impossible à réaliser tant par le volume d'ouvrages concernés que par l'absence d'identification individuelle de chaque exemplaire ;

Qu'elle indique que l'expert a choisi de calculer la rémunération de l'auteur à partir des flux physiques en déduisant du nombre d'ouvrages imprimés et livrés à la SA Interforum, les chiffres de pilons puis la quantité d'ouvrages en stock au 31 décembre 2005, validant au demeurant les chiffres de la SA Interforum ;

Qu'elle précise être allé au-delà de ses obligations légales et contractuelles en fournissant très régulièrement des informations sur les ventes de l'ouvrage, en communiquant les redditions de comptes, enjoignant une attestation de l'imprimeur récapitulant l'ensemble des tirages et une attestation de la SA Interforum indiquant le nombre total des pilons et en acceptant un audit de ses comptes par l'expert-comptable de la Sa Editions Adele ; que la mesure d'expertise judiciaire a été ordonnée par le juge des référés en raison de l'accord des parties sur ce point ;

Considérant que la SA Interforum réplique ne s'être aucunement rendue complice de l'inexécution par l'éditeur de ses obligations contractuelles, qu'elle a fourni des informations exhaustives dès avant la mesure d'expertise ordonnée en référé et durant la mission d'expertise en répondant à toutes les demandes de l'expert ;

Qu'elle précise qu'au-delà de déclarations générales d'intention, la pratique veut que dans les faits, la très grande majorité des retours est acceptée, ceux-ci étant alors soit pilonnés s'ils sont défraîchis ou abîmes, soif réintégrés dans les stocks s'ils sont en bon état ; qu'en outre M. Pierre X... et la Sa Editions Adèle n'ont aucun droit à s'immiscer dans les relations existant entre la SA Interforum et les libraires alors surtout que l'expert a obtenu les justifications lui permettant de vérifier la sincérité des comptes de l'éditeur et qu'en exigeant la communication de milliers de pièces, les appelants souhaitent une mesure générale d'investigation tendant à leur permettre d'apprécier des relations auxquelles ils sont étrangers et incluant des renseignements sur les ouvrages de tiers ;

Considérant ceci exposé, que l'expert judiciaire M. Jean-Pierre A... a effectué ses opérations dans le respect du principe du contradictoire, qu'il relève en page 29 de son rapport les désaccords des parties sur la réalité et la prise en compte des retours enregistrés dans les états de suivi des flux d'ouvrages par la SA Interforum ;

Que l'expert indique que "/ 'analyse de ces flux, consistant à suivre le parcours de chacun des 143.568 ouvrages livrés à INTERFORUM se révèle impossible à réaliser tant par le volume d 'ouvrages concernés, que par l'absence d 'identification individuelle de chaque ouvrage" et que dans ces conditions il a neutralisé les flux intermédiaires en déterminant les ventes d'ouvrages par la différence entre la quantité d'ouvrages imprimés et livrés, la quantité d'ouvrages pilonnés et la quantité d'ouvrages en stock au 31 décembre 2005 ; que cette méthode n'est pas affectée par les retours et réexpéditions réalisés au cours de la période de diffusion de l'ouvrage contractuellement fixée au 31 décembre 2005 et s'appuie sur des données qui peuvent être recoupées ;

Que pour ce faire l'expert a obtenu de l'imprimeur une attestation des impressions par date et par diffuseurs, des diffuseurs les contrats et relevés semestriels des ventes dont pour la SA Interforum (dont il convient de rappeler qu'à ce stade de la procédure elle n'était pas une partie mais un tiers à l'expertise) une attestation des ouvrages pilonnés et de la SA Editions Robert Laffont les relevés des droits d'auteur, les avis des règlements, le tableau SIEL 2005 et l'état du stock ;

Que l'expert indique expressément en page 30 de son rapport avoir "ainsi obtenu les informations nécessaires et suffisantes pour réaliser [sa] mission et répondre aux questions posées par le tribunal et la Cour d Appel" ;

Que l'expert a ainsi déterminé que 177.978 exemplaires avaient été imprimés dont 143.562 pour la SA Editions Robert Laffont et son diffuseur la SA Interforum que 8.266 exemplaires avaient été pilonnés, que le stock au 31 décembre 2005 était de 1.464 exemplaires et que la SA Interforum avait diffusé 143.568 exemplaires (soit une différence de 6 exemplaires par rapport à l'attestation de l'imprimeur, chiffre retenu par l'expert car plus favorable aux appelants) ; que 1.413 exemplaires ont été distribués gratuitement pour le service presse et le service auteur ;

Que l'expert retient ainsi un nombre total de 129.209 exemplaires vendus (ou considérés comme tels pour retenir la différence sus indiquée de 6 exemplaires entre l'attestation de l'imprimeur et celle de la SA Interforum) ;

Qu'au vu de ce rapport d'expertise, complet et documenté, que la cour entérine, il apparaît que la demande de nouvelle expertise ainsi que la demande de communication de pièces ne sont aucunement justifiées au regard de l'ensemble des éléments d'appréciation soumis à la cour ;

Que dès lors la cour adopte expressément les motifs pertinents tirés d'une exacte appréciation des pièces de la procédure et du rapport d'expertise, par lesquels le jugement entrepris, qui sera confirmé de ce chef, a débouté M. Pierre X... et la Sa Editions Adele de leurs demandes de communication de pièces et d'expertise. (arrêt attaqué p. 17-19)

Alors d'une part que les contrats, comme les accords collectifs et les usages professionnels, s'ils n'ont qu'un effet relatif, créent des situations juridiques dont les tiers peuvent se prévaloir ; qu'il s'en déduit qu'un auteur dont la rémunération est assise sur les ventes de livres peut se prévaloir, à l'égard de son éditeur, du régime du droit de retour des libraires tel qu'il résulte du contrat conclu entre l'éditeur et le distributeur renvoyant aux usages professionnels du secteur du livre et aux conditions générales de vente du distributeur, en considération duquel il a accepté les modalités de rémunération stipulées au contrat d'édition ; qu'en retenant, pour rejeter les demandes de M. X... et de la société Editions Adèle, que la société Editions Robert Laffont n'avait pas commis de faute en acceptant, avec la société Interforum, les retours des libraires en dehors des cas prévus par les prévisions de leur contrat renvoyant aux usages professionnels et aux conditions générales de vente de la société Interforum, quand elle aurait dû rechercher si M. X... et la société Editions Adèle pouvaient se prévaloir de la situation juridique résultant des règles organisant les conditions d'exercice du droit de retour et, corrélativement, si les retours irrégulièrement acceptés en contravention avec ces conditions n'étaient pas inopposables à M. X... et à la société Editions Adèle dans le cadre de la détermination de l'assiette des redevances, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil et L. 131-4 du code de la propriété intellectuelle ;

Alors d'autre part que l'éditeur est tenu d'assurer à l'oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale conforme aux usages de la profession ; que cette obligation de l'éditeur était rappelée à l'article 2 du contrat d'édition du 13 novembre 2001 ; qu'en écartant la faute de la société Editions Robert Laffont au titre des retours des libraires sans se prononcer sur le point de savoir si l'éditeur, tenu de respecter en la matière les usages de la profession, n'avait pas manqué à ses obligations en acceptant, avec la société Interforum, des retours dans des cas non conformes aux usages professionnels, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 132-12 du code de la propriété intellectuelle, ensemble des articles 1134 et 1147 du code civil ;

HUITIEME MOYEN DE CASSATION (arrêt attaqué p. 20)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme constituant une prétention nouvelle en cause d'appel, la demande de M. X... et de la société Editions Adèle en condamnation de la société Interforum en paiement de la somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

Aux motifs que « M. Pierre X... et la Sa Editions Adele soutiennent pouvoir opposer au distributeur l'exécution défectueuse d'un contrat auquel ils sont tiers mais qui leur cause personnellement préjudice ; que cette inexécution défectueuse constitue à leur égard une faute de nature à engager la responsabilité délictuelle du distributeur ;

Qu'ils demandent à ce titre au dispositif de leurs conclusions la condamnation de la SA Interforum à leur payer la somme de 200.000 € à titre de dommages et intérêts en précisant qu'il ne s'agit pas d'une demande nouvelle, celle-ci ayant déjà été portée par les premiers juges ; qu'elle n'est pas davantage prescrite, la prescription ayant été interrompue par l'assignation du 03 décembre 2008 ;

Que la SA Interforum soulève l'irrecevabilité de cette demande en paiement comme étant nouvelle en cause d'appel ;

Qu'il sera relevé que dans la mesure où les appelants sont mal fondés à reprocher à la SA Editions Robert Laffont une mauvaise exécution du contrat d'édition, ils sont par voie de conséquence tout aussi mal fondés à faire grief à la SA Interforum d'avoir concouru à la prétendue mauvaise exécution du contrat par l'éditeur pour réclamer une condamnation solidaire des intimés ;

qu'en ce qui concerne la demande de condamnation distincte de la seule SA Interforum au paiement de la somme de 200.000 € sur le fondement de sa responsabilité délictuelle, la cour relève que tant dans leur acte introductif d'instance du 03 décembre 2008 qua dans leurs conclusions récapitulatives de première instance, M. Pierre X... et la Sa Editions Adele soutenaient seulement que la SA Interforum était "de connivence avec la société Editions Robert Laffont et complice de cette dernière dans la violation de ses obligations contractuelles" justifiant selon eux la seule condamnation solidaire de la SA Interforum avec la SA Editions Robert Laffont au paiement de sommes au titre de la rémunération de l'auteur ;

Qu'il n'était alors demandé aucune condamnation distincte de la SA Interforum au paiement de dommages et intérêts pour faute ; qu'en effet la seule demande en ce sens fondée sur une prétendue incitation massive aux recours n'était présentée que contre la seule SA Editions Robert Laffont ;

Que dès lors la demande présentée pour la première fois en cause d'appel sur le fondement de l'article 1382 du code civil et tendant à la condamnation de la SA Interforum au paiement de la somme de 200.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de ses fautes délictuelles constitue bien une prétention nouvelle prohibée par l'article 564 du code civil ;

Qu'en conséquence M. Pierre X... et la SA Editions Robert Laffont [sic lire Editions Adèle] seront déclarés irrecevables en leur demande de ce chef » (arrêt, p.20) ;

Alors, d'une part, que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges même si leur fondement juridique est différent; que la demande de condamnation d'une partie à des dommages et intérêts tend au même but que la demande de condamnation assortie de solidarité passive avec une autre société, laquelle n'affecte que les recours éventuels entre les coobligés ; que dès lors, en décidant que la demande en condamnation distincte de la seule société Interforum au titre de sa responsabilité délictuelle était irrecevable et nouvelle, la cour d'appel a violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile ;

Alors, d'autre part, que les parties peuvent expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises aux premiers juges et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ; que la demande de condamnation de la société Interforum au paiement de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité délictuelle à raison de sa participation fautive à la mauvaise exécution du contrat d'édition par la société Editions Robert Laffont et à raison de son exécution défectueuse de ses conditions générales de vente et du contrat de distribution la liant à la société Editions Robert Laffont constituait l'accessoire et le complément de la demande formée en première instance de condamnation solidaire de ces deux sociétés à des dommages et intérêts sur les mêmes fondements ; qu'en déclarant néanmoins irrecevables les demandes de M. X... et des Editions Adèle contre la société Interforum, la cour d'appel a violé l'article 566 du code de procédure civile.

NEUVIEME MOYEN DE CASSATION (arrêt attaqué p. 21-22)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum M. X... et de la Sa Editions Adele à payer à la SA Interforum la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour procédure abusive,

Aux motifs que « la SA Interforum reprend devant la cour sa demande de condamnation de M. Pierre X... et de la Sa Editions Adele à lui payer la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, dont elle a été déboutée par les premiers juges ;

Qu'elle soutient avoir été attraite de manière totalement abusive à la présente instance alors qu'elle n'a jamais contracté avec les appelants et a fourni dans le cadre de la procédure de référé puis de l'expertise, toutes les pièces requises permettant de justifier la majeure partie de la reddition de comptes établie par la SA Editions Robert Laffont ;

Que les appelants répliquent que l'exercice d'une action en justice constitue un droit, que la SA Interforum n'est pas étrangère au litige et que c'est à juste titre que le jugement entrepris a rejeté la demande de cette société qui ne rapporte la preuve d'aucun abus ;

que dans leur assignation en référé du 16 février 2007 tendant à obtenir une mesure d'expertise et la condamnation de la seule SA Editions Robert Laffont au paiement d'indemnités provisionnelles, M. Pierre X... et la Sa Editions Adele déclaraient n'assigner également que la SA Interforum et l'imprimeur que dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice afin que l'ordonnance à intervenir soit rendue commune (page 13, 4ème alinéa de l'assignation) pour que ces sociétés fournissent à l'expert les éléments nécessaires à sa mission ;

qu'au cours de la procédure de référé aucune demande mettant en cause la responsabilité personnelle de la SA Interforum n'était présentée par les demandeurs ; que le juge des référés lui avait en outre alloué la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en relevant que sa mise en cause apparaissait injustifiée dans la mesure où elle avait fourni aux demandeurs l'ensemble des documents utiles pour la vérification des comptes préalablement à l'instance ;

que devant la cour saisie de leur appel contre cette ordonnance, M. Pierre X... et la Sa Editions Adele n'avaient pas davantage présenté de demandes à l'encontre de la SA Interforum, que l'arrêt confirmatif du 20 février 2008 relevait en particulier que "Monsieur X... et ADELE excluent eux-mêmes tout procès futur éventuel à l'encontre de INTERFORUM et FD, développant longuement le moyen unique selon lequel la présence à l'instance de ces parties est nécessaire pour que l'expert puisse disposer de toutes les pièces justificatives que possèdent ces sociétés" ; qu'il était d'ailleurs encore alloué à la SA Interforum la somme de 1.000 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;

qu'au cours des opérations d'expertise M. Pierre X... et la Sa Editions Adele ont présenté des demandes de communication de pièces à l'encontre de la SA Interforum dont ils ont été systématiquement déboutés par le juge chargé du contrôle des expertises ; que moins de dix mois après l'arrêt du 20 février 2008 et alors que les opérations d'expertise étaient toujours en cours et que les données de fond du litige n'avaient pas évolué, M. Pierre X... et la Sa Editions Adele assignaient la SA Interforum en condamnation solidaire avec la SA Editions Robert Laffont comme prétendue complice des manquements contractuels de cette dernière ;

Qu'ils maintenaient en outre devant le tribunal leur demande de communication de documents dont ils avaient déjà été déboutés ;

que déboutés de leurs demandes de ces chefs devant les premiers juges, M. Pierre X... et la Sa Editions Adele ont présenté contre la SA Interforum devant la cour non plus seulement une demande de condamnation solidaire avec la SA Editions Robert Laffont mais également une demande nouvelle de condamnation distincte qui ne pouvait qu'être déclarée irrecevable comme constituant une prétention nouvelle en cause d'appel ;

qu'ils maintenaient en outre à nouveau devant la cour leur demande de communication de documents dont il convient au surplus de relever qu'une partie importante de ceux-ci ne pouvait même pas être en la possession de la SA Interforum (ainsi les justificatifs de l'impression de l'ouvrage, le contrat passé entre l'éditeur et l'imprimeur, l'inventaire des stocks, les justificatifs relatifs à l'exploitation au Canada de l'ouvrage et les justificatifs concernant les exploitations confiées aux sociétés ADL Partner , France Loisirs et le Grand Livre du Mois) ;

Qu'il apparaît ainsi que M. Pierre X... et la Sa Editions Adele ont, à l'encontre de la SA Interforum, fait dégénérer en abus leur droit d'ester en justice et d'user des voies de recours prévues par la loi et ont ainsi commis une faute engageant leur responsabilité civile sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil ;

que cette faute a causé à la SA Interforum un préjudice matériel et moral certain en obligeant cette société, qui n'a aucun lien contractuel avec les appelants, à intervenir depuis sept ans dans la procédure engagée contre l'éditeur et à se défendre contre des demandes évolutives au fil de l'instance ; que la cour évalue ce préjudice au vu des éléments de la cause à la somme de 10.000 € ;

Que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de la SA Interforum pour procédure abusive et que statuant à nouveau, M. Pierre X... et la Sa Editions Adele seront condamnés in solidum à payer à la SA Interforum la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive » (arrêt, pp. 21 et 22) ;

Alors que l'exercice d'une action en justice ne peut donner lieu à dommages et intérêts qu'en cas de faute ayant fait dégénérer en abus la mise en oeuvre du droit d'agir ; qu'une action en justice ne peut, sauf circonstance particulière qu'il appartient alors au juge de spécifier, constituer un abus du droit d'agir lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation prononcée en appel ; que la mise en cause de la société Interforum dans la procédure de référé pour que celle-ci fournisse à l'expert les éléments nécessaires à sa mission, sans que soit recherchée sa responsabilité personnelle, ne caractérisait pas une faute, pas davantage que les demandes de communication de pièces dont ils ont été déboutés ; que le rejet en première instance de leur demande de condamnation solidaire de la société Interforum avec la société Robert Laffont ne caractérisait pas une faute, non plus que le maintien de leurs demandes de communication de documents ; qu'en se prononçant par les motifs précités qui ne caractérisent pas l'abus par M. X... et la société Editions Adèle de leur droit d'ester en justice et d'user des voies de recours prévues par la loi, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.

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