5 juillet 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-10.385

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2018:C201136

Titres et sommaires

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - sécurité sociale - code de la sécurité sociale - articles l. 512-1 et l. 761-2 - principe d'égalité devant la loi - compétence du législateur - défaut partiel d'applicabilité au litige - caractère sérieux - défaut - non-lieu à renvoi au conseil constitutionnel

Texte de la décision

CIV. 2

COUR DE CASSATION


FB

______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________




Audience publique du 5 juillet 2018



NON-LIEU A RENVOI


Mme FLISE, président



Arrêt n° 1136 F-P+B

Pourvoi n° K 18-10.385







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les questions prioritaires de constitutionnalité formulées par mémoires spéciaux reçus le 9 mai 2018 et présentés par Mme A... Y... , domiciliée [...] ,

à l'occasion du pourvoi formé par elle contre l'arrêt rendu le 9 novembre 2017 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section SB), dans le litige l'opposant à la caisse d'allocations familiales du Bas-Rhin, dont le siège est [...] ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 4 juillet 2018, où étaient présents : Mme Flise, président, Mme X..., conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mme Parchemal, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme X..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de Mme Y..., de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse d'allocations familiales du Bas-Rhin, l'avis de M. Z..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Attendu que Mme Y... a perçu, entre le 1er janvier 2012 et le 31 octobre suivant, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé et l'allocation de rentrée scolaire, alors qu'elle résidait, avec sa fille, en Turquie où son époux était affecté en tant qu'enseignant détaché auprès de l'Agence pour l'enseignement du français à l'étranger ; que la caisse d'allocations familiales du Bas-Rhin lui ayant notifié un indu d'une certaine somme, Mme Y... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ; que Mme Y... s'est pourvue en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Colmar du 9 novembre 2017 l'ayant déboutée de son recours ; que par mémoires distincts et motivés reçus par la Cour de cassation le 9 mai 2018, elle a déposé deux questions prioritaires de constitutionnalité ;

Que la première question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

"L'article L. 761-2 du code de la sécurité sociale méconnaît-il l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en subordonnant l'application de la législation française de sécurité sociale aux travailleurs détachés temporairement à l'étranger par leur employeur pour y exercer une activité salariée ou assimilée à la condition que l'employeur s'engage à s'acquitter de l'intégralité des cotisations dues ?" ;

Que la seconde question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

"L'article L. 512-1 du code de la sécurité sociale méconnaît-il l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et l'article 34 de la Constitution en ce qu'il ne prévoit pas de dérogation à la condition de résidence en France à laquelle est subordonnée l'allocation de prestations familiales pour les fonctionnaires de l'Etat temporairement détachés à l'étranger sur le fondement du décret n° 2002-22 du 4 janvier 2002 relatif à la situation administrative et financière des personnels des établissements d'enseignement français à l'étranger ?" ;

Sur la première question prioritaire de constitutionnalité :

Attendu que la situation des fonctionnaires de l'Etat détachés auprès de l'Agence pour l'enseignement à l'étranger pour l'exercice de leur activité à l'étranger dans les conditions fixées par le décret n° 2002-22 du 4 janvier 2002, n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 761-2 du code de la sécurité sociale ; que la disposition critiquée n'est pas, dès lors, applicable au litige ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ;

Et sur la seconde question prioritaire de constitutionnalité :

Attendu que la disposition critiquée, dans sa rédaction applicable à la date du versement des prestations litigieuses, est applicable au litige ;

Qu'elle n'a pas été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que, ne portant pas sur l'interprétation de dispositions constitutionnelles dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, la question n'est pas nouvelle ;

Et attendu que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; qu'ouvert sans condition d'activité, ni de cotisation ou de contribution, à toute personne française ou étrangère résidant en France, ayant à sa charge un ou plusieurs enfants résidant en France, le droit aux prestations familiales procède des exigences de la solidarité nationale telle qu'elle résulte des dispositions des dixième et onzième alinéas du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ; qu'ainsi, il ne saurait être sérieusement soutenu que la disposition critiquée méconnaît les exigences du principe d'égalité devant la loi pour n'avoir pas exempté de la condition de résidence qu'elle édicte certains fonctionnaires de l'Etat appelés à exercer leurs fonctions à l'étranger en application de dispositions statutaires purement réglementaires, lesquelles prévoient d'ailleurs le versement aux intéressés de majorations familiales destinées à couvrir pour partie leurs charges de famille ;

D'où il suit que la question ne présente pas un caractère sérieux et qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille dix-huit.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.