21 novembre 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-18.071

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2018:CO10565

Texte de la décision

COMM.

JT



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 novembre 2018




Rejet non spécialement motivé


M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10565 F

Pourvoi n° U 17-18.071






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société GFI Infogen Systems, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 10 mars 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l'opposant à la société Kathrein France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 2 octobre 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Y..., conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller, Mme Z..., avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat de la société GFI Infogen Systems, de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Kathrein France ;

Sur le rapport de Mme Y..., conseiller, l'avis de Mme Z..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;


REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société GFI Infogen Systems aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Kathrein France la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour la société GFI Infogen Systems

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué de prononcer la résolution judiciaire des contrats du 14 mars 2011 aux torts de la société GFI, de la condamner à payer à la société Kathrein la somme de 154 965,75 euros TTC et d'écarter ses demandes en résolution judiciaire du contrat d'intégration aux torts de la société Kathrein, en paiement de la somme de 74 735,88 euros TTC et de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

AUX MOTIFS QUE la société Kathrein a souscrit le 14 mars 2011 auprès de la société GFI un contrat d'intégration de la solution progiciel Sage ERP X3 consistant en l'installation de différents modules et un contrat de "service d'assistance" incluant support, intervention technique, mise à jour du progiciel et contrôle de sauvegarde ; que les délais de livraisons devaient être fixés par un comité de pilotage qui devait établir le planning prévisionnel et une réunion de validation devait valider le rapport d'analyse et le planning définitif ; qu'un planning prévisionnel a été établi lors de la réunion de lancement du 15 mars 2011 de la manière suivante : - phase de cadrage :
17 juin 2011 ; - phase de réalisation : le 12 septembre 2011 ; - phase d'homologation : le 28 octobre 2011 ; - phase de formation : démarrage : le 12 janvier 2012 ; la réunion de validation du 9 juillet 2011 a fixé les délais contractuels définitifs selon le planning suivant : - validation des entretiens de cadrage : 25 juillet 2011 ; - livraison de la solution : le 12 septembre 2011 ; - homologation de la solution recette provisoire : le 28 octobre 2011 ;- go no go pour mise en exploitation : le 30 novembre 2011 ; - recette définitive : le 16 janvier 2012 ; que le démarrage devait avoir lieu le 9 janvier 2012 et la livraison de la solution le 12 septembre 2011 ; que sur le contrat d'intégration : l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que « La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances » ; que la première livraison du logiciel a eu lieu le 29 septembre 2011 mais n'a pu être réceptionnée au vu des nombreuses anomalies ainsi que cela ressort des courriels de M. A..., responsable informatique chez Kathrein des 2 et 18 novembre 2011 ; qu'une deuxième livraison a été tentée le 2 décembre 2011, avec un retard de plus de deux mois par rapport au délai contractuel (12 septembre 2011), la journée des tests contradictoires du 22 décembre 2011 ne permettant pas de prononcer une recette provisoire en raison des nombreuses anomalies, ce que la société GFI reconnaissait « nous sommes d'accord que la recette provisoire ne peut être prononcée car il subsiste quelques incidents majeurs... » ; qu'une nouvelle livraison du 11 janvier 2012 - soit après la date prévue contractuellement pour le démarrage le 9 janvier 2012 - n'a pas permis une recette provisoire en raison encore une fois d'anomalies persistantes selon la société Kathrein qui invitait la société GFI à une nouvelle journée de tests contradictoires qui était refusée par cette dernière au motif que la société Kathrein ne collaborait pas ; que la société Kathrein sollicite la résolution du contrat d'intégration pour manquements graves de la société GFI à ses engagements contractuels ; qu'il ne peut être contesté par la société GFI que les délais contractuels de la livraison de la solution (12 septembre 2011), du démarrage (9 janvier 2012) et de la recette définitive (16 janvier 2012) n'ont pas été respectés ; qu'il convient de déterminer à quelle partie incombe la charge de ces retards, peu important que l'obligation qui pesait sur GFI soit une obligation de moyens ; qu'il résulte des pièces communiquées que la société Kathrein a protesté auprès de la société GFI lors de la deuxième livraison en date du 2 décembre 2011, dans les termes suivants « ... Tout d'abord nous tenons formellement à vous faire remarquer que cette version est livrée avec un retard extrêmement important puisque la date contractuelle arrêtée était le 12 septembre 2011. Sur un projet qui devait durer 6 mois, rien que sur cette phase il existe un retard de plus de 2 mois. (...) Nous faisons toute réserve sur le préjudice subi ce d'autant que nous avions arrêté et c'était un point fondamental, la date de démarrage au 9 janvier 2012. Comme vous le savez dans ce genre de projet, il est très souhaitable que la date de démarrage corresponde au début d'un exercice comptable. » ; que le 21 décembre 2011, la société Kathrein rappelait le retard extrêmement important du projet eu égard à la date contractuelle arrêtée au 12 septembre 2011 et réitérait ses protestations dans un courrier du 6 janvier 2012 en soulignant combien la date de démarrage en début d'exercice était fondamentale ; qu'il ne peut pas être contesté par la société GFI qu'aucune des versions livrées n'a fait l'objet d'une recette provisoire en raison des anomalies qu'elles présentaient - ce qu'elle a elle-même reconnu - les conclusions du rapport technique du cabinet Gm Consultant, non contradictoire, ne pouvant être retenues ; que la société Kathrein a bien utilisé l'outil dénommé MANTIS pour faire remonter auprès de GFI les tests et les anomalies ; que la société GFI n'établit pas que les retards intervenus seraient dus à un manque de collaboration de Kathrein qui aurait rendu impossible l'intégration, ce qui, en admettant que ce déficit de collaboration ait existé, ne justifie pas les anomalies présentées par les versions successives livrées ; qu'il convient de rappeler que c'est la société GFI qui était le professionnel de l'informatique à qui il appartenait de délivrer les conseils et l'assistance nécessaires et de s'adapter à son client non professionnel en le suppléant en cas de défaillance ou d'incompétence ; que GFI n'établit pas davantage qu'il y ait eu interruption des relations par la société Kathrein le 8 décembre 2011, cette dernière ayant déposé chez un huissier de justice la version livrée le 2 décembre 2011 qui présentait toujours des anomalies ; que la société Kathrein avait préalablement informé son cocontractant de ses besoins précis et des usages particuliers qu'elle entendait en faire (établissement de six documents d'analyse) et n'a pas exigé de modification supplémentaire en cours de projet (la modification de la tarification ne portant pas sur le contenu du contrat), ce qui aurait nécessairement impacté les délais de livraison ; que pour faciliter le déploiement de la solution progiciel le SAGE ERP X3, la société Kathrein a dû s'adjoindre un assistant à maître d'ouvrage, la société TE2I ; que au vu de ces éléments, il convient de constater que la société GFI a gravement manqué à ses obligations contractuelles résultant du contrat d'intégration ; que les retards dans la livraison constituent des manquements d'une gravité suffisante - les délais constituant une obligation déterminante - pour que la résolution du contrat d'intégration soit prononcée ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris et de prononcer la résolution du contrat d'intégration aux torts de la société GFI ; que sur le contrat des services d'assistance, ce contrat et le contrat de livraison sont indivisibles et interdépendants, le contrat de services d'assistance conclu le même jour, soit le 14 mars 2011, ayant pour objet la réalisation de prestations sur les modules du progiciel ERP X3 aux fins de résoudre les difficultés ponctuelles rencontrées par Kathrein dans le cadre de l'utilisation du progiciel Sage ERP X3 ; que ce contrat n'a donc de sens que si le contrat de livraison du progiciel a été exécuté ; qu'il en résulte une interdépendance entre les deux contrats qui procèdent d'une même opération économique ; qu'en conséquence, la résolution du premier (le contrat d'intégration) entraîne celle du second (le contrat de services d'assistance) en application de l'indivisibilité de ces deux conventions ; que sur les conséquences de la résolution, en application de l'article 1184 du code civil, la résolution du contrat entraîne la restitution des sommes qui ont été versées par Kathrein en application du contrat ; qu'en l'espèce, le coût total du contrat d'intégration est de 119 840 euros HT dont il convient de déduire le montant du coût des licences d'utilisation du logiciel sage ERP X3 qui ont été conservées par Kathrein soit 54 240 euros HT et de rajouter la somme de 74 735,88 euros TTC qui a été versée par Kathrein à la suite du jugement entrepris ; qu'en conséquence, il y a lieu de condamner la société GFI à payer à la société Kathrein la somme de 154 965,75 euros TTC ; que sur les demandes reconventionnelles de la société GFI, la résolution du contrat à ses torts implique le débouté de toutes ses demandes reconventionnelles fondées sur le paiement de factures (déjà réglées dans le cadre de la première instance) et sur des dommages et intérêts pour procédure abusive alors que la société Kathrein a été reçu en son appel principal ;

1°) ALORS QUE la résolution judiciaire ne peut être prononcée que si les juges du fond vérifient que l'inexécution est suffisamment grave pour justifier cette mesure ; qu'en prononçant la résolution judiciaire du contrat d'intégration aux torts de la société GFI en raison du non-respect de délais constitutifs d'une obligation déterminante sans justifier sa décision de retenir en l'espèce un tel caractère déterminant qui était contesté (conclusions d'appel de la société GFI, p. 12 et s.), et cependant qu'elle relevait que les manquements de la société GFI n'avaient eu aucun caractère préjudiciable pour le maître de l'ouvrage (arrêt attaqué, p. 8), la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble l'article 1184 du même code, dans leurs versions applicables en la cause ;

2°) ALORS, en tout état de cause, QU'il appartient au demandeur à la résolution de prouver l'inexécution contractuelle et la gravité de celle-ci justifiant le prononcé de la résolution judiciaire du contrat ; qu'en cas d'obligation de moyens, le créancier de l'obligation inexécutée doit démontrer que le débiteur n'a pas mis tous les moyens en oeuvre pour exécuter son obligation ; qu'en l'espèce, il était constant que la société GFI était tenue à une simple obligation de moyens (arrêt attaqué, p. 6), ce dont il résultait que la société Kathrein, créancier de l'obligation inexécutée tenant dans le respect des délais fixés, devait démontrer que l'exposante n'avait pas mis en oeuvre de moyens suffisants pour respecter cette obligation ; qu'en prononçant la résolution judiciaire du contrat d'intégration aux torts de la société GFI en raison du non-respect des délais sans constater que la société Kathrein démontrait que l'exposante n'avait pas mis tous les moyens en oeuvre pour respecter ces délais, ce qui était contesté, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1134 et 1315 alinéa 2 du code civil, ensemble l'article 1184 du même code, dans leurs versions applicables en la cause ;

3°) ALORS QUE l'inexécution de ses obligations par l'une des parties à un contrat synallagmatique permet à l'autre partie de suspendre l'exécution de ses obligations corrélatives ; que la résolution ne peut être prononcée aux torts d'une partie que si la rupture des relations contractuelles n'est pas due à l'attitude fautive antérieure de l'autre partie ; que dans ses conclusions d'appel, la société GFI faisait valoir que le fait que la société Kathrein n'ait plus réglé aucune facture dès le mois d'octobre 2011 constituait un manquement devant conduire à exclure la résolution à ses torts (conclusions d'appel, p. 15 et 27) ; qu'en retenant la résolution judiciaire du contrat aux torts de la société GFI sans rechercher, comme elle y était invitée, si le défaut de paiement de la société Kathrein ne constituait pas un manquement devant conduire à exclure une telle résolution, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1184 du code civil dans sa version applicable en la cause ;

4°) ALORS QUE tout rapport technique peut valoir à titre de preuve dès lors qu'il est soumis à la libre discussion des parties, pourvu que le juge de se fonde pas exclusivement sur celui-ci ; qu'en refusant de tenir compte du rapport technique du cabinet GM consultant, qui imputait à la société Kathrein des défauts d'utilisation du logiciel et excluait une défaillance inhérente à l'exposante, en se fondant exclusivement sur son caractère non contradictoire et bien qu'il ait été régulièrement produit aux débats et soumis à la discussion contradictoire des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de la décision censurée qui présentent un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire entre elles ; qu'en l'espèce, dès lors que la cour d'appel a retenu la résolution du contrat de services d'assistance conclu entre la société GFI et la société Kathrein en se fondant sur la résolution du contrat de livraison dont il était indivisible, la cassation à intervenir sur les quatre premières critiques du moyen, doit entraîner l'annulation, par voie de conséquence, du chef de dispositif relatif à la résolution du contrat de services d'assistance et ceux écartant les demandes reconventionnelles de cette société, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

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