31 janvier 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-40.045

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2019:C200303

Texte de la décision

CIV. 2

COUR DE CASSATION



LM


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 31 janvier 2019




NON-LIEU À RENVOI


Mme FLISE, président



Arrêt n° 303 F-D

Affaire n° Z 18-40.045

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de MM. I... G... et X... Y....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près le tribunal de grande instance d'Amiens.
en date du 23 janvier 2019.


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu l'arrêt rendu le 15 novembre 2018 par la cour d'appel d'Amiens, transmettant à la Cour de cassation deux questions prioritaires de constitutionnalité, reçues le 20 novembre 2018, dans l'instance mettant en cause :

D'une part,

1°/ M. Z... A...,
2°/ Mme J... , épouse A...,
3°/ M. B... A...,
4°/ M. C... A...,
5°/ M. I... G... ,

tous cinq domiciliés chez Mme Sylvie D...[...] ,

6°/ M. X... Y..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs, Daniel, Franklin et Justin Y...,

7°/ Mme K... , épouse Y...,

tous deux domiciliés [...] ,

D'autre part,

le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, dont le siège est [...] ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 30 janvier 2019, où étaient présents : Mme Flise, président, Mme E..., conseiller référendaire rapporteur, M. Savatier, conseiller doyen, M. Grignon F..., avocat général, Mme Mainardi, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme E..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de MM. G... et Y..., l'avis de M. Grignon F..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Attendu que la commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) de l'Aisne ayant déclaré irrecevable comme forclose la demande d'indemnisation de leurs préjudices à la suite du meurtre de H... A..., M. Z... A..., Mme J... , M. B... A..., M. C... A..., M. I... G... , M. X... Y..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs, Daniel Y..., Franklin Y... et Justin Y..., et Mme K... , ont saisi la cour d'appel d'Amiens, devant laquelle ils ont présenté, par un écrit distinct et motivé, plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité, dont deux ont été transmises à la Cour de cassation qui les a reçues le 20 novembre 2018 ;

Sur la première question :

Attendu que la question transmise est ainsi rédigée :

« L'article 706-5 du code de procédure pénale méconnaît-il le principe constitutionnel d'égalité des citoyens devant la loi, en ce qu'il fait courir le délai de trois ans pour saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions de la date de l'infraction sans prévoir le cas dans lesquels les faits n'acquièrent la qualification d'infraction que plus de trois ans après leur commission ? » ;

Attendu que la disposition contestée est applicable au litige qui se rapporte aux conditions de recevabilité de la saisine de la CIVI et notamment aux délais impartis aux victimes et à leur point de départ ;

Qu'elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu, d'une part, que la question ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, qu'il ne peut être sérieusement soutenu qu'une atteinte serait portée au principe d'égalité des citoyens devant la loi dès lors que l'article 706-5 du code de procédure pénale prévoit d'une part que lorsque des poursuites pénales sont exercées, le délai de saisine de la CIVI est prorogé et n'expire qu'un an après la décision de la juridiction qui a statué définitivement sur l'action publique ou sur l'action civile engagée devant la juridiction répressive ou un an après l'avis donné par la juridiction en application de l'article 706-15 lorsque l'auteur de l'infraction est condamné à verser des dommages-intérêts, et d'autre part que lorsque le requérant n'a pas été en mesure de faire valoir ses droits dans les délais requis, la commission le relève de la forclusion ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;

Et sur la seconde question :

Attendu que la question transmise est ainsi rédigée :

« Les articles 706-5 et 706-15 du code de procédure pénale méconnaissent-ils le droit à un procès équitable en prévoyant ensemble que le délai d'un an ouvert à la victime en cas d'exercice de poursuites pénales court à compter de l'avertissement prévu par le second de ces textes mais n'expire qu'un an après la décision qui a statué définitivement sur l'action publique ou sur l'action civile, alors qu'en cas d'appel, si la victime est fondée à croire que le délai pour saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions ne courra qu'à compter de la décision statuant sur le recours, et de l'avertissement qui sera réitéré à cette occasion, un désistement de l'appel principal entraînant la caducité des appels incidents la prive de toute possibilité de saisine de la commission d'indemnisation des victimes d'infractions ? »

Attendu que la disposition contestée est applicable au litige qui se rapporte aux conditions de recevabilité de la saisine de la CIVI et notamment aux délais impartis aux victimes et à leur point de départ ;

Qu'elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu, d'une part, que la question ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, qu'il ne peut être sérieusement soutenu qu'une atteinte serait portée au droit à un procès équitable dès lors que ce n'est que dans l'hypothèse où l'auteur de l'infraction a été condamné à verser des dommages-intérêts, sans que le caractère définitif de la décision n'ait en ce cas une incidence sur le délai, que l'article 706-5 du code de procédure pénale prévoit que le délai d'un an pour saisir la CIVI court à compter de l'avis donné par la juridiction en application de l'article 706-15 du même code, tandis que dans le cas où la juridiction n'a pas accordé de dommages-intérêts à la victime et ne lui a donc pas adressé l'avis prévu à l'article 706-15 du code de procédure pénale, le délai de saisine de la CIVI expire un an après la décision de la juridiction qui a statué définitivement sur l'action publique ou sur l'action civile engagée devant la juridiction répressive ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel les deux questions prioritaires de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille dix-neuf.

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